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25/06/2021 | FRANCE | N°19BX02410

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 25 juin 2021, 19BX02410


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 8 juin 2017 par lequel le maire de Bordeaux s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux en vue de la construction d'un garage au 240 rue Blanqui à Bordeaux ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux du 23 août 2017 et de condamner la commune de Bordeaux à lui verser une indemnité d'un montant de 10 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi.

Par un jugement n° 1704687 du 18

avril 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 8 juin 2017 par lequel le maire de Bordeaux s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux en vue de la construction d'un garage au 240 rue Blanqui à Bordeaux ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux du 23 août 2017 et de condamner la commune de Bordeaux à lui verser une indemnité d'un montant de 10 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi.

Par un jugement n° 1704687 du 18 avril 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 juin et 6 décembre 2019, M. E..., représenté par Me H..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 18 avril 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 juin 2017 par lequel le maire de Bordeaux s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux en vue de la construction d'un garage au 240 rue Blanqui à Bordeaux ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux du 23 août 2017 ;

3°) de condamner la commune de Bordeaux à lui verser une indemnité d'un montant de 10 000 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du présent recours ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bordeaux le paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le rejet de son recours gracieux est entaché d'un vice d'incompétence de sorte que la substitution de motif tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article 2.2.1 de la zone UP 1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux Métropole ne pouvait être retenue ;

- l'assimilation des zones orange de forts aléas incluses dans la carte d'aléa contenue dans le porter à connaissance du 20 juillet 2016 aux zones rouges du plan de prévention des risques d'inondation est entachée d'une erreur de droit ;

- le motif tiré de ce que le projet est pour partie en emprise 0 est entaché d'une erreur de fait au regard du plan " ville de pierre " VP 422 de la zone UP1 dont il ressort que le projet se situe en emprise 50 ;

- le projet ne constitue aucune emprise au sol nouvelle compte tenu de l'abri de jardin précédemment existant ayant fait l'objet d'une déclaration préalable du 5 août 2010 n'ayant pas donné lieu à opposition ;

- l'édification du garage d'une emprise de 22,16 m² ne présente aucun risque réel d'atteinte à la sécurité publique alors que le projet se situe en zone constructible et que la maison principale n'a jamais été inondée, de sorte que le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- le maire a méconnu le principe d'égalité devant la loi alors que des permis de construire ont été délivrés dans le même secteur ;

- l'illégalité de l'opposition à sa déclaration de travaux est fautive et de nature à engager la responsabilité de la commune de Bordeaux ; le préjudice causé par l'impossibilité de terminer la construction et le caractère discriminatoire de cette opposition lui ont causé un préjudice qui doit être évalué à la somme de 10 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2019, la commune de Bordeaux, représentée par Me I..., conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... le paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré du vice d'incompétence entachant le rejet du recours gracieux est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... B...,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me C... pour la commune de Bordeaux.

Considérant ce qui suit :

1. Un procès-verbal d'infraction a été dressé le 28 mars 2017 à l'encontre de M. E..., propriétaire d'une maison d'habitation au 240 rue Blanqui à Bordeaux pour avoir réalisé des travaux non conformes à la déclaration préalable qu'il avait présentée pour " la pose d'un abri de jardin démontable en bois ". Afin de régulariser sa situation, il a déposé, le 18 mai 2017, une déclaration préalable en vue de la construction d'un garage. Par arrêté du 8 juin 2017, le maire de Bordeaux s'est opposé à cette déclaration préalable, puis, par lettre du 23 août 2017, il a rejeté le recours gracieux exercé par l'intéressé contre cette décision. M. E... relève appel du jugement du 18 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande regardée comme tendant à l'annulation de ces deux décisions et comme tendant à la condamnation de la commune de Bordeaux à lui verser une indemnité d'un montant de 10 000 euros à titre de réparation du préjudice qu'il estime avoir subi.

2. Il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l'encontre d'une décision administrative un recours gracieux devant l'auteur de cet acte et de ne former un recours contentieux que lorsque le recours gracieux a été rejeté. L'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative. Il appartenait, en conséquence, au tribunal, saisi dans le délai de recours contentieux qui avait recommencé de courir à compter de la notification du rejet du recours gracieux, de conclusions dirigées formellement contre le seul rejet du recours gracieux, d'interpréter les conclusions qui lui étaient soumises comme étant aussi dirigées contre la décision administrative initiale et il a pu à bon droit écarter comme inopérant le moyen tiré d'un vice d'incompétence entachant le rejet du recours gracieux qui constitue un vice propre de cette décision.

3. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet de M. E... se situe en zone rouge hachurée bleue du plan de prévention du risque d'inondation approuvé le 7 mai 2005, applicable à la date de la décision attaquée, correspondant à une zone urbanisable soumise à des prescriptions constructives. Alors même que les cartes d'aléas établies en février 2016, dans le cadre de la révision du plan de prévention des risques, font dorénavant figurer la parcelle en cause en zone d'aléas forts d'inondation, le maire de Bordeaux ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, opposer à ce projet les règles prescrites par les articles 2.1.1 et 2.1.3 du règlement du plan de prévention du risque d'inondation applicables aux zones rouges de ce plan après leur avoir assimilé les zones d'aléas forts d'inondation de la carte d'aléas dès lors que cette nouvelle carte n'avait pas donné lieu à l'adoption d'un nouveau règlement ni à une mesure d'application anticipée.

4. Cependant, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

5. Il résulte des termes mêmes de la décision litigieuse du 8 juin 2017 que le maire de Bordeaux a entendu également opposer à la déclaration préalable de M. E..., sur le fondement des dispositions citées au point 3 ci-dessus, le risque d'inondation dès lors que le terrain d'assiette du projet se situe en zone d'aléa fort identifié par les cartes d'aléas établies en février 2016 et qui ont été portées à sa connaissance dans le cadre de la procédure de révision du plan de prévention du risque d'inondation approuvé le 7 mai 2005. Il ressort de ces cartes d'aléas que le projet de M. E... se situe en zone orange encerclée de rouge caractérisée par un aléa fort en raison du risque d'inondation avec une hauteur d'eau de plus d'un mètre. M. E... ne conteste pas les éléments cartographiques et techniques ayant conduit à cette évaluation du risque d'inondation. S'il soutient que le terrain d'assiette du projet n'aurait pas été antérieurement inondé, cette seule circonstance n'est pas de nature à infirmer cette évaluation. Contrairement à ce qu'il soutient également, son projet de construction de garage constitue une construction nouvelle, alors même qu'un ancien abri de jardin démontable en bois, à l'emprise d'ailleurs moindre, implanté sur sa parcelle, aurait été antérieurement détruit par le vent. Ainsi, en estimant que le projet d'édification d'un garage réalisé en parpaing, d'une emprise de plus de 22 m² dans un secteur densément urbanisé, présentait, eu égard à son implantation en zone fortement inondable, un risque pour la sécurité publique et en s'opposant pour ce motif, à la déclaration préalable présentée par M. E..., le maire de Bordeaux a fait une exacte application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et pouvait légalement, pour ce seul motif, s'opposer par l'arrêté litigieux du 8 juin 2017 à la déclaration préalable de travaux de M. E....

6. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le projet d'une longueur de 5,70 m, implanté en fond de parcelle d'une profondeur de 24 m, empiète sur une longueur d'environ 0,70 m sur l'" emprise 0 " au regard du plan dit " ville de pierre " VP 422 de la zone UP1 du plan local d'urbanisme de Bordeaux métropole au sein de laquelle, en vertu de l'article 2.2.1 du règlement de ce plan, aucune emprise bâtie nouvelle n'est autorisée. Le moyen tiré d'une erreur de fait entachant cet autre motif opposé par le rejet du recours gracieux du 23 août 2017 doit ainsi, en tout état de cause, être écarté.

7. Enfin, le principe d'égalité des administrés devant la loi ne saurait être invoqué pour justifier la demande d'un avantage illégal. Ainsi, M. E... ne peut utilement se prévaloir de ce que des permis de construire ont été délivrés dans le même secteur dès lors que, comme il a été dit, l'opposition à sa déclaration préalable de travaux n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation. Au demeurant, les projets qu'il invoque se situent non pas en zone d'aléa fort mais en zone d'aléa modéré, de sorte qu'ils sont dans une situation différente susceptible de donner lieu à un traitement différent.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions d'excès de pouvoir et, en l'absence d'illégalité fautive de l'opposition à sa déclaration préalable de travaux, ses conclusions indemnitaires.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bordeaux, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande M. E... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

10. Il y a lieu, en revanche, en application des mêmes dispositions de mettre à la charge de M. E..., partie perdante à l'instance, la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Bordeaux au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : M. E... versera à la commune de Bordeaux la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... E... et à la commune de Bordeaux.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Brigitte Phémolant, présidente,

M. D... B..., président-assesseur,

Mme G... A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 juin 2021.

Le rapporteur,

Didier B...

La présidente,

Brigitte PhémolantLa greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX02410


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02410
Date de la décision : 25/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Régimes de déclaration préalable. Déclaration de travaux exemptés de permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SELARL JURIS TIME

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-06-25;19bx02410 ?
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