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15/06/2021 | FRANCE | N°20BX04037

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2eme chambre (formation a 3), 15 juin 2021, 20BX04037


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 4 mai 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2003212 du 18 novembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure de

vant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2020, M. B..., représenté par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 4 mai 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2003212 du 18 novembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2020, M. B..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de la Gironde du 4 mai 2020 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il retient à tort qu'il n'est pas dépourvu d'attache familiale dans son pays d'origine et que sa mère et sa fratrie ne justifient pas de la régularité de leur séjour en France, alors que sa mère est titulaire d'un titre de séjour et que ses deux demi-frères et soeur sont français ;

- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard du trouble mineur à l'ordre public qui lui est reproché, de ses attaches familiales en France, de l'état de santé de sa mère et de ses efforts d'intégration, notamment professionnelle ; il conteste par ailleurs être impliqué dans la grande majorité des faits qui lui sont reprochés par la préfète après consultation du fichier de traitement des antécédents judiciaires, qui ne saurait constituer une preuve de sa culpabilité ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision d'éloignement ;

- la durée de cette interdiction est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision d'éloignement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés et renvoie à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... D...,

- et les observations de Me E..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant marocain né en 2000, est entré en France le 6 mars 2015 sous couvert d'un visa portant la mention " visiteur " valable du 18 février 2015 au 18 février 2016, puis s'est vu délivrer un document de circulation pour étranger mineur valable jusqu'au 9 octobre 2019. Il a sollicité le 22 mai 2017 la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, laquelle lui a été délivrée par une décision du 27 août 2018 lui précisant également que le renouvellement de cette carte serait, compte tenu de ses antécédents judiciaires, conditionné par son comportement au regard de l'ordre public. M. B... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour les 18 juin et 20 septembre 2019 sur le fondement des mêmes dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et celui-ci lui a été refusé par un arrêté de la préfète de la Gironde du 4 mai 2020 portant également obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, détermination du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. Il relève appel du jugement du 18 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient entaché d'irrégularité le jugement attaqué en retenant à tort que M. B... n'est pas dépourvu d'attache familiale dans son pays d'origine et qu'il ne justifie pas de la régularité du séjour en France de sa mère et de sa fratrie relève de l'examen du bien-fondé du jugement et non de sa régularité.

Sur la légalité de la décision :

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Pour refuser de renouveler le titre de séjour de M. B..., la préfète de la Gironde a retenu que son comportement constituait une menace grave, réelle et actuelle pour l'ordre public dès lors, tout d'abord, qu'il a été condamné le 12 juin 2019 par le tribunal correctionnel de Toulouse à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis assortie d'une mise à l'épreuve pendant deux ans pour des faits commis le 10 juin 2019 de détention et offre ou cession non autorisée de stupéfiants, ensuite, que le fichier de traitement des antécédents judiciaires mentionne son implication dans plusieurs faits de vols commis avec ou sans violence au mois d'août et novembre 2017 ainsi qu'au mois de mai 2018, de recel de bien provenant d'un vol, de détention, transport ou cession non autorisée de stupéfiants commis en novembre 2018, mai 2019 et juin 2019, de communication non autorisée avec un détenu au mois de mai 2019 et de port sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitante au mois de novembre 2019, enfin, qu'il ressort de ses auditions par les forces de l'ordre qu'il a volé deux bouteilles d'alcool, trois coques de téléphones portables, une clé USB et une paire d'écouteurs dans un magasin le 24 janvier 2017, qu'il a reconnu avoir donné deux gifles à un individu dans un transport en commun le 27 novembre 2017 et qu'il a déclaré, le 16 avril 2019, être consommateur de produits stupéfiants depuis environ un an et en revendre de faibles quantités à des connaissances. Si M. B... conteste " avoir participé ou être impliqué dans la grande majorité des faits " pour lesquels la consultation du fichier de traitement des antécédents judiciaires indique qu'il a été mis en cause, il n'apporte aucun élément permettant de mettre en doute les informations précises qui y figurent ni n'indique lesquels de ces faits lui seraient reprochés à tort. Dans ces conditions, compte tenu du nombre, de la gravité et du caractère récent des faits reprochés à M. B..., qui se sont poursuivis en dépit de l'avertissement que contenait la décision de la préfète du 27 août 2018 renouvelant son titre de séjour, la préfète de la Gironde a pu, à bon droit, retenir que sa présence en France caractérisait une menace à l'ordre public. Compte tenu de ces éléments, et quand bien même l'intéressé s'est investi dans son activité professionnelle et qu'il vivait en France depuis cinq ans à la date de la décision attaquée avec sa mère, titulaire d'une carte de résident, à l'état de santé fragile, son beau-père français et ses demi-frère et demi-soeur français et qu'il n'aurait pas d'attaches au Maroc, la décision de refus de séjour attaquée ne porte pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis par cette mesure et les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées au point 3 doivent être écartés.

5. Les moyens dirigés contre la décision de refus de séjour ayant été écartés, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision d'éloignement prononcée à son encontre serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de cette décision.

6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, l'obligation de quitter le territoire français ne porte pas au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts qu'elle poursuit. Cette décision ne méconnaît pas, par suite, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour prononcée à son encontre serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de cette décision.

8. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Sauf menace grave pour l'ordre public, la durée totale de l'interdiction de retour ne peut excéder cinq ans, compte tenu des prolongations éventuellement décidées. (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que M. B... séjournait régulièrement en France depuis cinq ans à la date de la décision en cause, et qu'il y vit avec sa mère, atteinte d'une grave pathologie, son beau-père et ses demi-frère et soeur. Toutefois, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, il ressort également des pièces du dossier que son comportement représente une menace à l'ordre public. Dans ces conditions, la préfète de la Gironde n'a pas entaché la décision litigieuse d'une erreur d'appréciation en fixant à deux ans la durée pendant laquelle M. B... sera interdit de retour sur le territoire français.

10. Les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de cette décision.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par suite, sa requête ne peut qu'être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

Mme C... D..., conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 juin 2021.

La rapporteure,

Kolia D...

La présidente,

Catherine Girault

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 20BX04037


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 20BX04037
Date de la décision : 15/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: Mme BEUVE-DUPUY
Avocat(s) : LASSORT

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-06-15;20bx04037 ?
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