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08/06/2021 | FRANCE | N°21BX00478,21BX00479

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 08 juin 2021, 21BX00478,21BX00479


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et assignation à résidence.

Par un jugement n° 2006144 du 11 janvier 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annul

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et assignation à résidence.

Par un jugement n° 2006144 du 11 janvier 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de la Haute-Garonne de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer, en attendant, une autorisation provisoire de séjour, et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991.

Par une ordonnance de rectification d'erreur matérielle n° 2006144 du 22 janvier 2021, la présidente du tribunal administratif de Toulouse a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des seules dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

I/ Par une requête, enregistrée le 9 février 2021 sous le n° 21BX00478, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de rejeter les demandes de première instance présentées par M. A....

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a annulé l'arrêté du 30 novembre 2020 portant obligation de quitter le territoire français en estimant qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'il emporte sur la situation personnelle de M. A... et par voie de conséquence, pour défaut de base légale, les décisions du même jour lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, fixant le pays de renvoi de la mesure d'éloignement, l'interdisant de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'assignant à résidence ; en effet, M. A... est entré en France pour poursuivre des études ce qui ne lui donnait pas vocation à se maintenir en France ; il s'est sciemment soustrait à une précédente mesure d'éloignement confirmée par la cour de céans ; il est célibataire et sans enfant et sa relation avec une française est récente ; Monsieur A..., qui ne bénéficie plus d'autorisation de travail depuis la péremption de son dernier titre de séjour le 30 novembre 2013, ne saurait se prévaloir d'avoir travaillé en France illégalement depuis cette date ; c'est à juste titre qu'aucun délai de départ volontaire ne lui a été accordé ; la décision fixant le pays de renvoi n'est entachée d'aucune illégalité ; la décision portant interdiction de retour pour une durée d'un an édictée à l'encontre de Monsieur A... est justifiée et proportionnée ; s'agissant de l'assignation à résidence, l'intéressé n'est pas fondé à se prévaloir du fait qu'il justifie de garanties de représentation suffisantes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2021, et des mémoires en production de pièces non communiqués enregistrés le 6 mai 2021, M. A... représenté par Me D... conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'agissant tant de la procédure devant le tribunal administratif de Toulouse que devant la cour administrative d'appel administrative de Bordeaux.

II/ Par une requête, enregistrée le 9 février 2021 sous le n° 21BX00479, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 11 janvier 2021.

Il soutient que :

- ses conclusions aux fins de sursis à exécution sont fondées sur l'article R. 811-15 du code de justice administrative ;

- il soulève des moyens sérieux dans sa requête au fond ;

- c'est à tort que le tribunal a annulé l'arrêté du 30 novembre 2020 portant obligation de quitter le territoire français en estimant qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'il emporte sur la situation personnelle de M. A... et par voie de conséquence, pour défaut de base légale, les décisions du même jour lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, fixant le pays de renvoi de la mesure d'éloignement, l'interdisant de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'assignant à résidence.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2021, M. A... représenté par Me D... conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'État la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'agissant tant de la procédure devant le tribunal administratif de Toulouse que devant la cour administrative d'appel administrative de Bordeaux.

Par deux ordonnances du 10 mars 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 23 avril 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... C..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 5 juin 1982 à Dabo (Sénégal), est entré en France le 21 octobre 2005 sous couvert d'un titre de séjour portant la mention étudiant valable du 2 décembre 2005 au 30 novembre 2013. Le 20 mars 2015, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale. Le 28 avril 2016, a été édicté à son encontre un arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, arrêté dont la légalité a été successivement confirmée par le tribunal administratif de Toulouse le 10 janvier 2017 et la cour administrative d'appel de Bordeaux le 30 juin 2017. Le 30 novembre 2020, après avoir été interpellé par les services de police, M. A... s'est vu notifier un arrêté par lequel le préfet de la Haute-Garonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, ensemble l'arrêté du même jour l'assignant à résidence. Par la requête n° 21BX00478, le préfet de la Haute-Garonne relève appel du jugement du 11 janvier 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté et lui a enjoint de réexaminer la demande de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement. Par la requête n° 21BX00479, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement.

2. Les requêtes n° 21BX00478 et n° 20BX00479 présentées par le préfet de la Haute-Garonne sont dirigées contre le même jugement. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... séjourne en France depuis 15 ans, durée particulièrement importante. Il est, par ailleurs, titulaire d'une licence d'anglais obtenue en 2009 et d'un master 1 en communication délivré en 2012. Il a travaillé régulièrement en France de 2005 à 2013 en qualité d'agent de sécurité puis de septembre 2017 à juillet 2020 exceptés les mois de mars 2018, avril et juin 2020 en tant qu'agent d'exploitation et déménageur. M. A... a également ouvert une entreprise de conseil en communication et web marketing le 21 septembre 2012 qui a été par la suite liquidée. Par ailleurs, le préfet ne conteste pas que M. A... vit en concubinage, certes récent, avec une ressortissante française, maître de conférences à l'institut national des sciences appliquées de Toulouse et produit des attestations permettant d'établir qu'il entretient depuis plusieurs années des liens d'amitié en France et qu'il y est intégré. Dans ces conditions, alors même que M. A... a séjourné en France de 2005 à 2013 sous couvert d'un titre de séjour étudiant ne lui donnant pas vocation à rester sur le territoire français, qu'il réside irrégulièrement en France depuis le 30 novembre 2013, date d'expiration de son dernier titre de séjour et qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une mesure d'éloignement en date du 28 avril 2016 confirmée par un arrêt de la cour de céans du 30 juin 2017, la décision portant obligation de quitter le territoire français est effectivement, dans les circonstances particulières de l'espèce, compte tenu des conditions et de la durée importante du séjour en France de M. A..., entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle. Cette situation prive de base légale les décisions du même jour lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, de fixation du pays de renvoi de la mesure d'éloignement, lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'assignant à résidence.

4. Il résulte de ce qui précède, que le préfet de la Haute-Garonne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé son arrêté du 30 novembre 2020 et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de trois mois.

Sur les conclusions à fins de sursis à exécution :

5. La cour statuant au fond par le présent arrêt sur les conclusions à fin d'annulation du jugement du 30 septembre 2020 du tribunal administratif de Toulouse, les conclusions de la requête n° 21BX00479 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement sont devenues sans objet.

Sur les frais liés au litige :

6. Par un jugement n° 2006144 du 11 janvier 2021 et une ordonnance de rectification d'erreur matérielle du 22 janvier 2021, le tribunal a alloué la somme de 1 500 euros demandée par le requérant au titre des frais exposés en première instance. Par suite, il n'y a pas lieu de faire droit en appel à cette demande.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à M. A... en application des dispositions précitées au titre des frais exposés en appel.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 21BX00479 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 2006144 du 11 janvier 2021 du tribunal administratif de Toulouse.

Article 2 : La requête n° 21BX00478 du préfet de la Haute-Garonne est rejetée.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 200 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. E... A....

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. B... C..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juin 2021.

Le rapporteur,

Nicolas C... La présidente,

Evelyne Balzamo La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX00478, 21BX00479


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX00478,21BX00479
Date de la décision : 08/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : LASPALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-06-08;21bx00478.21bx00479 ?
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