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13/04/2021 | FRANCE | N°19BX01130

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 13 avril 2021, 19BX01130


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EURL A... Automobile Réunion (GAR) a demandé au tribunal administratif de La Réunion de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujetties au titre de l'exercice clos en 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er février 2011 au 30 juin 2014 et des rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de taxe additionnelle mis à sa charge au titre de

l'exercice clos en 2013.

Par un jugement n° 1600974 du 17 décembre 2018, le trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EURL A... Automobile Réunion (GAR) a demandé au tribunal administratif de La Réunion de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujetties au titre de l'exercice clos en 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er février 2011 au 30 juin 2014 et des rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de taxe additionnelle mis à sa charge au titre de l'exercice clos en 2013.

Par un jugement n° 1600974 du 17 décembre 2018, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 20 mars et 23 octobre 2019, l'EURL GAR, représentée par son liquidateur, M. B... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 17 décembre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujetties au titre de l'exercice clos en 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er février 2011 au 30 juin 2014 et des rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de taxe additionnelle mis à sa charge au titre de l'exercice clos en 2013 ;

3°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas statué sur les rectifications relatives aux cotisations supplémentaires procédant de la réintégration d'une somme de 44 236 euros d'" autres charges non-justifiées " alors qu'elle a établi la déductibilité de cette somme par la production de factures ;

- la reconstitution de son chiffre d'affaires procède d'une méthode excessivement sommaire qui aboutit à des résultats imposables exagérés ; la méthode de reconstitution est inexacte dès lors qu'elle prend insuffisamment en compte les achats de fournitures et de pièces détachées ;

- des factures dont la finalité professionnelle est évidente justifient que la réintégration de la somme de 44 236 euros au titre des " autres charges non-justifiées " dans le résultat imposable n'était pas justifiée ;

- les cotisations supplémentaires et les rappels établis au titre des impôts et taxe autre que l'impôt sur les sociétés procèdent d'une reconstitution de son chiffre d'affaire viciée.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 27 septembre 2019 et 30 novembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... C...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'EURL A... Automobile Réunion (GAR), qui exerce une activité de négoce de véhicules, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, entre le 19 septembre 2014 et le 26 février 2015, au titre des exercices clos les 30 juin 2012, 2013 et 2014, au cours de laquelle l'agent vérificateur a écarté le caractère probant de sa comptabilité et a procédé à une reconstitution de son chiffre d'affaires et de son bénéfice imposable. A l'issue de ces opérations, l'administration a informé la société GAR des rappels et rehaussements envisagés en matière, notamment, d'impôt sur les sociétés, de TVA, de CVAE et de taxe additionnelle au titre des trois exercices concernés. Suite à la réclamation de la contribuable du 26 janvier 2016, l'administration a procédé au dégrèvement des rappels d'impôt sur les sociétés portant sur les exercices clos en 2012 et 2013, établis selon la procédure de rectification contradictoire, et a maintenu le rappel d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2014, les rappels de TVA assignés à l'entreprise au titre de la période du 1er février 2011 au 30 juin 2014, ainsi que les rappels de CVAE et de taxe additionnelle relatifs à l'exercice clos en 2013 établis selon la procédure de taxation d'office de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. L'EURL GAR relève appel du jugement en date du 17 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujetties au titre de l'exercice clos en 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er février 2011 au 30 juin 2014 et des rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et de taxe additionnelle mis à sa charge au titre de l'exercice clos en 2013.

Sur la régularité du jugement :

2. A l'appui de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014, la société GAR soutenait notamment que le service avait réintégré à tort la somme de 44 236 euros de charges regardées comme non-justifiées, au résultat imposable au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014. Le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant. Dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué qui est entaché d'irrégularité et de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions aux fins de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions en décharge.

Sur le bien-fondé des compléments d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2014 :

3. En vertu des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, il appartient au contribuable qui entend contester devant le juge de l'impôt le bien-fondé de l'imposition de sommes régulièrement taxées d'office d'apporter la preuve du caractère exagéré des impositions mises à sa charge.

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que dans le cadre de la vérification de comptabilité dont l'EURL GAR a fait l'objet, l'agent vérificateur a notamment constaté, d'une part, l'enregistrement de ventes et achats sans factures, de ventes à 1 euro, d'écritures de régularisation sans pièce justificative et d'importantes écritures globales de fin d'exercices sur les comptes de produits et, d'autre part, l'absence d'enregistrement et de suivi des clients et le défaut de tenue régulière d'une Caisse, de caisses créditrices et d'un inventaire de stock. L'ensemble de ces constatations l'a conduit à écarter la comptabilité comme présentant des irrégularités graves et répétées. L'EURL GAR, qui impute à un incendie, survenu en février 2014, la disparition des documents comptables, ne conteste pas le rejet de sa comptabilité.

5. Pour reconstituer le chiffre d'affaires réalisé par l'EURL GAR lors de la période litigieuse, le vérificateur a analysé les opérations d'achats et de ventes effectuées par l'entreprise au cours de cette période et ayant pu être regardées comme justifiées à la faveur des éléments concrets recueillis lors du contrôle, l'origine de l'achat, les prix d'achat et de vente, l'immatriculation et la marge brute constatée. Il a ainsi dégagé un échantillon d'analyse de 60 véhicules identifiés en achat et en vente au titre de l'exercice clos en 2012, de 110 véhicules pour l'exercice clos en 2013 et de 90 véhicules pour l'exercice clos en 2014. Si les lacunes de la comptabilité, sommairement corrigées par des écritures de régularisation inscrites globalement en comptabilité en fin d'exercice, n'ont pas permis de valider les données alléguées par le contribuable en ce qui concerne le nombre de véhicules vendus pour chaque exercice, il résulte de l'instruction que l'administration a été en mesure de fixer le rapport entre le montant des ventes de véhicule pouvant être prises en considération et le montant total des ventes déclarées par la société, à savoir 34,73 % au titre de l'exercice clos en 2012, 38,95 % pour l'exercice clos en 2013 et 38,28 % pour l'exercice clos en 2014, l'échantillon retenu s'appuyant sur une part substantielle des opérations de vente réalisées. Sur la base de cet échantillon, l'administration a calculé le taux de marge moyen réalisé qu'elle a ensuite appliqué à l'ensemble des achats de véhicules réalisés par l'EURL GAR.

6. D'une part, la société requérante, qui ne propose aucune méthode alternative de reconstitution de son chiffre d'affaires ni ne produit un inventaire exhaustif des opérations réalisées, n'est pas fondée à soutenir que le choix de recourir à un taux de marge moyen brute établi sur la base d'un échantillon représentatif serait inadapté en raison de la disparité des taux de marge réalisés sur chaque opération d'achat-revente de véhicule. D'autre part, l'EURL GAR soutient que le taux de marge moyen brute n'intègre pas les frais exposés préalablement à la revente de chaque véhicule, qu'elle évalue à 3% du prix d'achat, mais ne justifie ni du montant des sommes qui n'auraient pas été prises en compte ni de leur impact sur le chiffre d'affaires reconstitué. Enfin, elle se prévaut d'un nouveau calcul de coefficient de marge effectué à partir d'un échantillon qu'elle estime plus représentatif au regard du nombre d'opérations recensées mais, outre que les ventes concernées ont été réalisées au cours des seuls exercices clos en 2012 et 2013, elle ne corrobore par aucun élément justificatif les prix d'achat et de revente des véhicules concernés à l'appui du tableau présenté en annexe de son mémoire. La charge de la preuve lui incombant, elle n'est pas fondée à soutenir qu'il appartenait à l'agent vérificateur de constater sur place et sur pièces la réalité des prix retenus, alors au demeurant que l'échantillon représentatif critiqué a été élaboré par l'administration sur la base des éléments présentés lors du contrôle. Dans ces conditions la société GAR n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires mise en oeuvre par le vérificateur est excessivement sommaire ou radicalement viciée dans son principe.

7. En second lieu, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...) ".

8. Il résulte de l'instruction qu'à l'occasion des opérations de contrôle, le service a relevé la comptabilisation, via le journal des opérations diverses, de charges inscrites sous le libellé " NJ " (non justifiée) ou " FNP " (factures non parvenues), à hauteur de 44 236 euros au titre de l'exercice clos en 2014. Aucune facture ni aucun justificatif d'une autre nature n'ayant été présenté à 1' appui de ces écritures, l'agent vérificateur a procédé à la réintégration au résultat imposable de la somme de 44 236 euros au titre de l'exercice litigieux. Pour établir le caractère déductible des sommes concernées la société GAR a produit onze factures de prestations relatives à l'immatriculation de véhicules et un relevé de factures de prestations de contrôle technique pour un montant total hors taxe de 47 173,97 euros.

9. D'une part, le montant des charges justifiées est sans rapport avec celui réintégré et, en dehors des écritures EC 1278 et 1281, ces factures sont afférentes à des dépenses sans lien avec les charges écartées par l'administration. D'autre part, le relevé de factures des prestations réalisées en mai 2014 par la société Sécurité Auto moto Réunion pour un montant de 1 980 euros ne peut justifier l'écriture EC 1278, qui enregistre le 19 juin 2014 une charge de prestations de contrôle technique d'un montant de 1 980 euros au bénéfice de la société Autosur. Enfin, en l'absence de corrélation entre les montants et les dates concernés, les onze factures de prestations liées à l'immatriculation de véhicules ne présentent aucun lien avec l'écriture EC 1281 qui enregistre une charge " prestations de cartes grises " de 9 815,69 euros le 30 juin 2014.

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et les taxes additionnelles :

10. Il résulte du point 6 du présent arrêt que la société GAR ne critique pas utilement les minorations de chiffres d'affaires constatées après reconstitution opérée par le service de contrôle. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, de taxe d'apprentissage et de contribution au développement de l'apprentissage, de participation à la formation professionnelle continue et de taxes sur les véhicules de tourisme des sociétés mis à sa charge seraient irréguliers en tant qu'ils résulteraient de la constatation de ces minorations de chiffre d'affaires.

11. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que la demande de la société GAR tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés en litige ne peut qu'être rejetée et, d'autre part, que la société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté le surplus de ses demandes.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. L'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante au principal, les conclusions de la société GAR tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : : Le jugement n° 1600974 du 17 décembre 2018 du tribunal administratif de La Réunion est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de l'EURL GAR tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la société a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014.

Article 2 : Les conclusions de la l'EURL GAR tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles cette dernière a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014 ainsi que le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la l'EURL GAR et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. D... C..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2021.

La présidente,

Evelyne Balzamo

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 19BX01130


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01130
Date de la décision : 13/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SELARL DAVID HOARAU - MATHIEU GIRARD

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-04-13;19bx01130 ?
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