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11/03/2021 | FRANCE | N°20BX02921

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 11 mars 2021, 20BX02921


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 11 mai 2020 par lequel la préfète de la Vienne l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2001319 du 22 juillet 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2020, Mme A..., représent

e par la SCP Breillat Dieumegard Masson, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 11 mai 2020 par lequel la préfète de la Vienne l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2001319 du 22 juillet 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 septembre 2020, Mme A..., représentée par la SCP Breillat Dieumegard Masson, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers du 22 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 mai 2020 de la préfète de la Vienne;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou de procéder au réexamen de sa demande dans le même délai en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français,

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elle a retrouvé en France une stabilité et une sérénité qu'elle ne pouvait avoir, que son mari a subi en Tchétchénie une agression physique le 2 avril 2016 et qu'il a entamé un suivi psychologique, qu'ils sont parfaitement intégrés et que leurs deux filles sont scolarisées depuis deux ans ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

S'agissant de la décision fixant le délai de départ volontaire, à la date du 11 mai 2020, elle ne pouvait exécuter l'arrêté en cause du fait de la lenteur du déconfinement ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi,

- elle est privée de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle est tchétchène alors que l'arrêté fixe la Russie comme pays de destination.

Par décision du 29 octobre 2020, Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2020, le préfet de la Vienne conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., de nationalité russe, est entrée en France en 2018, accompagnée de son époux et de leurs deux filles et a déposé, le 18 avril 2018, une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 13 juin 2019, confirmée le 3 janvier 2020 par la Cour nationale du droit d'asile. Elle relève appel du jugement du 22 juillet 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Vienne du 11 mai 2020 lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, Mme A... reprend en appel, sans les assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision contestée et du défaut d'examen approfondi de sa situation personnelle. Il convient d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, aux termes de 1'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Mme A... fait valoir qu'elle a retrouvé en France une stabilité et une sérénité qu'elle ne pouvait avoir en Tchétchénie, où son mari a subi une agression physique le 2 avril 2016, que ce dernier a entamé un suivi psychologique, qu'ils sont parfaitement intégrés et que leurs deux filles sont scolarisées depuis deux ans. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée est entrée irrégulièrement en France en 2018, à l'âge de 37 ans, et n'a été autorisée à y séjourner que le temps nécessaire à l'instruction de sa demande d'asile, laquelle a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 13 juin 2019, confirmée le 3 janvier 2020 par la Cour nationale du droit d'asile. Elle ne fait valoir aucune intégration sociale et professionnelle en France et n'établit ni même n'allègue que son mari, qui fait lui aussi l'objet d'une mesure d'éloignement, ne pourrait recevoir le suivi psychologique dont il a besoin dans son pays d'origine et que ses filles ne pourraient y être scolarisées. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré par Mme A... de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

6. Mme A... n'établit ni même n'allègue que ses filles ne pourraient suivre leurs parents en Russie, pays dont elles ont la nationalité, et y suivre leur scolarité. Dès lors, le moyen tiré de l'atteinte à l'intérêt supérieur des enfants doit être écarté.

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

7. Mme A... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de ce que, eu égard au contexte sanitaire prévalant au jour de l'arrêté contesté du 11 mai 2020, elle ne pouvait quitter la France dans le délai de trente jours. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

9. En deuxième lieu, la décision attaquée, qui vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et mentionne que " l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ", est suffisamment motivée.

10. En deuxième lieu, Mme A... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée à la préfète de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 11 février 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme F..., présidente-assesseure,

Mme C... D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 11 mars 2021.

Le président de chambre,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 20BX02921


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX02921
Date de la décision : 11/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. BOURGEOIS
Avocat(s) : SCP BREILLAT DIEUMEGARD MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-03-11;20bx02921 ?
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