Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le titre de perception émis à son encontre le 3 juin 2014 et de prononcer la décharge de la somme de 24 404,51 euros et, d'autre part, d'annuler le commandement de payer la somme de 26 544,51 euros en date du 7 décembre 2017, ainsi que la décision de rejet de sa réclamation en date du 19 janvier 2018.
Par un jugement n° 1603998 et n° 1801372 du 14 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 février 2019, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 14 décembre 2018 ;
2°) d'annuler le titre de perception du 3 juin 2014 et de prononcer la décharge de la somme de 24 404,51euros ;
3°) d'annuler le commandement de payer en date du 7 décembre 2017 le mettant en demeure de payer la somme de 26 544,51 euros ;
4°) d'annuler la décision de rejet de sa réclamation du 19 janvier 2018 ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal administratif a jugé à tort que sa demande dirigée à l'encontre du titre de perception du 3 juin 2014 était tardive ; aucun délai de forclusion ne saurait lui être opposé dès lors que la mention des voies et délais de recours figurant dans la décision du 18 mars 2015 lui indiquait à tort la possibilité d'exercer un recours juridictionnel en lieu et place d'une réclamation devant le comptable public chargé du recouvrement ;
- le titre de perception est insuffisamment motivé ;
- la créance dont le paiement lui est réclamé n'est pas certaine, liquide et exigible ;
- la sanction de 25 % retenue à son encontre présente un taux supérieur au taux d'intérêt légal et présente le caractère d'une sanction ;
- l'administration n'a pas indiqué de manière suffisante les considérations de droit ou de fait qui ont fondé les pénalités retenues, ni fait référence aux circonstances particulières de l'affaire et aux éléments de fait qui justifient l'application des majorations ;
- s'agissant de la mise en demeure qui lui a été adressée le 7 décembre 2017, il ne peut être fait application des dispositions des articles L. 257-0 et L. 258 A du livre des procédures fiscales au motif qu'une réclamation contentieuse assortie d'une demande de sursis de paiement a été déposée ; l'exigibilité de la créance doit être suspendue en raison de la réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement qu'il a formée le 7 mars 2016 ;
- la doctrine administrative admet qu'un commandement de payer ne peut être utilisé lors d'une réclamation contentieuse assortie d'une demande de sursis de paiement ; le commandement de payer délivré le 7 décembre 2017 et la décision de rejet de sa réclamation du 19 janvier 2018 doivent, dès lors, être annulés.
Par un mémoire, enregistré le 10 septembre 2019, l'administrateur général des finances publiques de Tarn-et-Garonne conclut à l'annulation de la mise en demeure du 7 décembre 2017 et de la décision de rejet rendue le 19 janvier 2018 et au rejet des conclusions dirigées contre la réclamation formulée par M. A... en raison de sa tardiveté.
Il soutient que le recouvrement de la créance aurait dû être suspendu à la suite de l'opposition à l'exécution préalable formée par le requérant.
Par un mémoire, enregistré le 26 septembre 2019, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut à l'irrecevabilité de la requête et à titre subsidiaire à son rejet.
Il soutient que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés et que sa demande de première instance était bien tardive.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 mai 2019.
Par un courrier du 19 janvier 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré du dépassement du délai raisonnable d'un an à compter de la date à laquelle le titre de perception émis le 3 juin 2014 a été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance pour le contester devant le tribunal administratif.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... D...,
- les conclusions de M. Manuel Bourgeois, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... relève appel du jugement du 14 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 24 404,51 euros mise à sa charge par un titre de recettes émis par le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, le 3 juin 2014 et à l'annulation du commandement de payer la somme de 26 544,51 euros en date du 7 décembre 2017 et de la décision de rejet de sa réclamation en date du 19 janvier 2018.
Sur la demande tendant à l'annulation du titre de recette émis le 3 juin 2014 et la décharge de l'obligation de payer la somme de 24 404,51 euros :
2. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Il résulte de ces dispositions que cette notification doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l'hypothèse d'un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle.
3. Aux termes de l'article 117 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Les titres de perception émis en application de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales peuvent faire l'objet de la part des redevables : 1° Soit d'une opposition à l'exécution en cas de contestation de l'existence de la créance, de son montant ou de son exigibilité ; (...) / 2° Soit d'une opposition à poursuites en cas de contestation de la régularité de la forme d'un acte de poursuite. (...) / L'opposition à l'exécution et l'opposition à poursuites ont pour effet de suspendre le recouvrement de la créance ". Aux termes de l'article 118 du même texte : " Avant de saisir la juridiction compétente, le redevable doit adresser une réclamation appuyée de toutes justifications utiles au comptable chargé du recouvrement de l'ordre de recouvrer. / La réclamation doit être déposée, sous peine de nullité : 1° En cas d'opposition à l'exécution d'un titre de perception, dans les deux mois qui suivent la notification de ce titre ou du premier acte de poursuite qui procède du titre en cause (...) / L'autorité compétente délivre un reçu de la réclamation, précisant la date de réception de cette réclamation. Elle statue dans un délai de six mois dans le cas prévu au 1° et dans un délai de deux mois dans le cas prévu au 2°. À défaut d'une décision notifiée dans ces délais, la réclamation est considérée comme rejetée ". Et aux termes de l'article 119 dudit décret : " Le débiteur peut saisir la juridiction compétente dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la décision prise sur sa réclamation ou, à défaut de cette notification, dans un délai de deux mois à compter de la date d'expiration des délais prévus à l'article 118 ".
4. La méconnaissance de l'obligation d'informer le débiteur sur les voies et les délais de recours, prévue par l'article R. 421-5 du code de justice administrative, ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie, est de nature à faire obstacle à ce que le délai de forclusion, prévu par l'article 119 du décret du 7 novembre 2012, lui soit opposable.
5. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. Dans le cas où le recours juridictionnel doit obligatoirement être précédé d'un recours administratif, celui-ci doit être exercé, comme doit l'être le recours juridictionnel, dans un délai raisonnable. S'agissant des titres exécutoires, sauf circonstances particulières dont se prévaudrait son destinataire, le délai raisonnable ne saurait excéder un an à compter de la date à laquelle le titre, ou à défaut, le premier acte procédant de ce titre ou un acte de poursuite a été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance.
6. Il résulte de l'instruction que si le titre de perception émis le 3 juin 2014 mentionne la possibilité d'un recours dans les deux mois suivant sa notification au ministère de l'égalité des territoires et du logement, il ne comporte cependant aucune mention de l'obligation de présenter une réclamation préalable devant l'agent comptable dans le délai de deux mois qui suit la notification du titre ou la reproduction des articles 117 et 118 précités du décret du 7 novembre 2012. Ainsi, les dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative font obstacle à ce que le délai de deux mois laissé au débiteur pour adresser sa réclamation préalable au comptable public, prévu à l'article 119 du décret du 7 novembre 2012, lui soit opposé, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges.
7. Toutefois, il résulte de l'instruction que M. A... a eu connaissance du titre de perception émis le 3 juin 2014 au plus tard le 17 octobre 2014, date à laquelle il a présenté un recours gracieux auprès du ministre de l'égalité des territoires et du logement. De plus et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ce recours gracieux n'a pas eu pour effet de proroger le délai de recours préalable obligatoire prévu par l'article 118 précité. Dès lors, les conclusions dirigées contre ce titre de perception enregistrées au greffe du tribunal administratif de Toulouse le 7 septembre 2016, soit presque deux ans après en avoir eu connaissance, étaient tardives et, par suite, irrecevables. La réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement adressée au directeur départemental des finances publiques de Tarn-et-Garonne par lettre du 7 mars 2016, reçue le 11 mars 2016, également tardive, n'a pas eu pour effet de rouvrir de nouveaux délais. La demande de M. A... tendant à l'annulation du titre de recette émis à son encontre le 3 juin 2014 et à la décharge de l'obligation de payer la somme de 24 404,51 euros ne pouvait, dès lors, qu'être rejetée pour tardiveté.
Sur la demande d'annulation du commandement de payer et du rejet de sa demande de suspension de la procédure de recouvrement :
8. Ainsi qu'il a été dit au point 7, avant d'adresser au directeur départemental des finances publiques de Tarn-et-Garonne, une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement par lettre du 7 mars 2016, contestant le bien-fondé de la créance, M. A... avait auparavant formé, le 17 octobre 2014, un recours auprès du ministre de la cohésion des territoires pour demander une remise gracieuse de la somme qui lui est réclamée. À la suite du rejet implicite de cette demande, M. A... a formé un recours en opposition devant le tribunal administratif en contestant l'exigibilité du titre exécutoire émis à son encontre le 3 juin 2014, recours qui a la nature d'une opposition à exécution au sens du 1° de l'article 117 précité du décret du 7 novembre 2012. Toutefois, si l'opposition formée par le débiteur à l'encontre du titre de perception émis à son encontre suspend la possibilité pour l'administration de recourir aux modes de recouvrement forcé, elle est sans incidence sur l'exigibilité de la créance constatée par ce titre. Par suite, et alors que le recours formé par M. A... à l'encontre du titre de perception est irrecevable en raison de sa tardiveté, l'intéressé n'est pas fondé à demander l'annulation de la mise en demeure du 7 décembre 2017 et de la décision du 19 janvier 2018 de rejet de sa demande de suspension de la procédure de recouvrement.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Copie en sera adressée à la DDFIP de Tarn-et-Garonne.
Délibéré après l'audience du 11 février 2021 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme F..., présidente-assesseure,
Mme C... D..., première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 mars 2021.
Le président de chambre,
Éric Rey-Bèthbéder
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et au ministre de l'économie, des finances et de la relance, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX00487