La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/02/2021 | FRANCE | N°19BX01052

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 16 février 2021, 19BX01052


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile FLHB a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2011.

Par un jugement n° 1700153 du 5 février 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 mars 2019 et un mémoire en réplique enregistré le 16 octobre

2019, la société civile FLHB, représentée par Me I..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile FLHB a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2011.

Par un jugement n° 1700153 du 5 février 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 mars 2019 et un mémoire en réplique enregistré le 16 octobre 2019, la société civile FLHB, représentée par Me I..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 5 février 2019 ;

2°) de prononcer la reconstitution de son résultat fiscal tel qu'il existait dans ses écritures au 30 juin 2011 et, par voie de conséquence, la restitution du déficit reportable de 96 110 euros dont elle bénéficiait à cette date ;

3°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos au 30 juin 2011 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a pas eu l'intention de recevoir de libéralité lors de la vente des titres ERBTP et E... Bâtiment ;

- c'est à tort que l'administration a qualifié l'achat de titres qu'elle a réalisé à des prix minorés comme une distribution d'avantages occultes dès lors que celle-ci n'apporte pas la preuve de l'intention libérale des parties ;

- elle n'a tiré aucun avantage de la revente d'une quotepart significative des titres ;

Par mémoires en défense enregistrés le 18 septembre 2019 et le 27 octobre 2020, ce dernier non communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 7 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 novembre 2020 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. H... D...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile FLHB a pour activité la prise de participation dans le capital de sociétés et la gestion de titres. Elle a fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur l'exercice clos le 30 juin 2011. A l'issue de ce contrôle, l'administration a procédé à un rehaussement de l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice clos le 30 juin 2011, estimant que la société avait bénéficié d'une distribution d'avantages occultes portant sur l'obtention de titres à un prix minoré taxable sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts. Les impositions supplémentaires correspondantes ont été mises en recouvrement le 20 janvier 2015 pour un montant total en droits et pénalités de 95 528 euros. Par ailleurs, les rectifications ont eu pour conséquence l'annulation du déficit reportable d'un montant de 96 110 euros. La société civile FLHB relève appel du jugement du 5 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 30 juin 2011.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en application de l'article 209 du même code : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) ". Aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition (...) ". Il résulte de ces dernières dispositions que, dans le cas où le prix de l'acquisition d'une immobilisation a été volontairement minoré par les parties pour dissimuler une libéralité faite par le vendeur à l'acquéreur, l'administration est fondée à corriger la valeur d'origine de l'immobilisation, comptabilisée par l'entreprise acquéreuse pour son prix d'acquisition, pour y substituer sa valeur vénale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l'acquisition faite à titre gratuit, laquelle, au demeurant, correspond, si le vendeur est une entreprise passible de l'impôt sur les sociétés, à un revenu distribué imposable entre les mains de l'acquéreur en vertu du c) de l'article 111 du code général des impôts.

3. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués (...) c) les rémunérations et avantages occultes (...) ". En cas d'acquisition par une société de titres à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts précitées. La preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale des titres cédés, d'autre part, d'une intention pour la société d'octroyer, et pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession. L'intention libérale est présumée lorsque le cédant et le cessionnaire sont en relation d'intérêts.

4. Par ailleurs, la valeur vénale d'actions non cotées en bourse sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue.

5. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la société civile FLHB est détenue à 99 % par M. G... E..., qui en est également le gérant. Celui-ci détient également 11 % des parts de la SAS E... SA, détenue à hauteur de 65 % par la SC E... participations, elle-même détenue à hauteur de 31 % par M. F... E..., 32 % par Mme A... E... et 32 % par M. G... E.... Ainsi, ce dernier détient directement 11 % et indirectement 21 % des parts de la SAS E... SA, dont il est président. Suite à la vérification de comptabilité de la SAS Leonard SA, la société civile FLHB a fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur l'exercice clos le 30 juin 2011. Au cours de ce contrôle, l'administration a constaté que par un acte du 21 décembre 2010, la SAS Leonard SA a, d'une part, cédé à la société civile FLHB 5 499 titres de la SAS ERBTP au prix unitaire de 20 euros alors qu'elle avait vendu 5 769 titres de cette même société, le 7 juin 2010, à un autre particulier à un prix unitaire de 166 euros, et que, d'autre part, la SAS E... SA a également cédé à la société FLHB 1 198 titres de la SAS E... Bâtiment au prix unitaire de 77 euros, le 21 décembre 2010, alors que, le 27 mai 2010, elle avait cédé 3 001 titres de cette même société à un particulier à un prix unitaire de 316 euros. L'administration a ainsi estimé que la société civile FLHB avait bénéficié d'une distribution d'avantages occultes portant sur l'obtention de titres à un prix minoré taxable sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts.

6. Il est constant que l'évaluation de la valeur vénale unitaire des titres en litige effectuée par l'administration et fixée à 47, 80 euros pour le titre de la SAS ERBTP et à 95 euros pour le titre de la SAS E... Bâtiment, n'est pas contestée par la société civile FLHB. Dès lors, l'administration a pu constater que l'écart de prix était significatif entre le prix convenu lors de la cession du 21 décembre 2010 et la valeur vénale des titres cédés, soit un écart de plus de 23 % pour le titre de la SAS E... Bâtiment et plus de 139 % pour le titre de la SAS ERBTP.

7. Par ailleurs, compte tenu de l'existence de liens d'intérêts capitalistiques et familiaux entre les parties, tels que rappelés au point 5, l'intention libérale est présumée. Or, si la société FLHB, pour démontrer l'absence d'intention libérale, fait valoir qu'elle a revendu 600 actions de la SA E... Bâtiment à un particulier le 25 avril 2011 au prix unitaire de 77 euros, puis 389 actions de cette société le 23 mai 2012 à un autre particulier à 90 euros l'unité, et 1 200 actions de la société ERBTP à un autre particulier le 6 octobre 2011 à 30 euros l'unité, ces circonstances au demeurant postérieures à la cession en litige et pour lesquelles la société ne fournit aucune indication sur les motifs de la revente et alors que l'administration fait valoir, sans être contredite, que ces cessions de titres ont été effectuées au profit de salariés de la SAS E... Bâtiment et de la SAS ERBTP, ne sont pas de nature à établir l'absence de l'intention libérale de la société FLHB d'acquérir des actions à un prix minoré. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a estimé que, lors de l'acquisition, le 21 décembre 2010 des titres des SAS E... Bâtiment et ERBTP, auprès de la SAS E... SA, la société civile FLHB a bénéficié d'une distribution d'avantages occultes portant sur l'obtention de titres à un prix minoré taxable sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société civile FLHB n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande de décharge des impositions et pénalités en litige.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société civile FLHB est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile FLHB et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

Mme C... B..., présidente,

M. H... D..., président-assesseur,

M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2021.

La présidente,

Evelyne B...

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX01052


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01052
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19 Contributions et taxes.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : LES JURISTES ASSOCIES DU SUD-OUEST

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-16;19bx01052 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award