Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Ocean's Dream Resort, société par action simplifiée, a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler la délibération n° 2017-186 CE du 23 février 2017 par laquelle le conseil exécutif de Saint-Barthélemy a délivré à la société civile immobilière (SCI) Almosnino un permis de construire pour la démolition et la reconstruction d'une résidence particulière à Gustavia.
Par un jugement no 1700024 du 22 février 2018, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande pour défaut d'intérêt à agir.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 23 avril 2018, le 4 mai 2018, le 7 janvier 2019, le 28 novembre 2019 et le 30 juillet 2020, la société Ocean's Dream Resort, représentée par Me G..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Saint-Barthélemy du 22 février 2018 ;
2°) d'annuler la délibération n° 2017-186 CE du 23 février 2017 du conseil exécutif de Saint-Barthélemy ;
3°) de mettre à la charge de la SCI Almosnino et de la collectivité de Saint-Barthélemy la somme de 5 000 euros chacune en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, elle justifie d'un intérêt à agir au sens de l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme compte tenu que l'affichage en mairie n'est pas établi par le seul certificat du 6 décembre 2017 du président du conseil exécutif dès lors qu'aucune précision n'est donnée sur les mentions qu'il contient (article 75 al 2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy) ; en outre, elle justifie de circonstances particulières au sens de l'article L. 600-1-3 et justifie d'une offre d'achat en date du 11 mars 2017 ; par ailleurs, les mentions portées sur l'affichage sur la parcelle sont trompeuses ;
- elle justifie d'un intérêt à agir au sens de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme en sa qualité de voisine immédiate du projet de construction compte tenu des nuisances durant et après les travaux de construction occasionnées par le projet ;
- elle justifie de sa qualité pour agir compte tenu qu'elle est représentée par son président en exercice et produit un procès-verbal du 20 juin 2017 l'autorisant à engager cette action en justice ;
- aucune intention frauduleuse ne motive son action contrairement à ce que soutient la société Almosnino ; la théorie de la connaissance acquise alléguée en défense compte tenu qu'elle connaissait l'existence de ce permis de construire avant même son affichage ne peut lui être opposée ;
- le dossier de permis de construire est entaché d'insuffisances en méconnaissance des articles 71 et 73 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ; il n'est pas possible d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement plus large au vu des documents photographiques ; les documents graphiques sont insuffisants concernant l'insertion du projet du côté de la rue de la Colline ; l'extrait Kbis de la société n'est pas produit ; les documents exigés par l'article 98 du même code en cas de remblai ou déblai ne sont pas produits ; le dossier ne comprend pas la justification du dépôt de la demande de permis de démolir ;
- la surface hors oeuvre nette (SHON) mentionnée au dossier est erronée en méconnaissance de l'article 12 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy en ce qui concerne le plan du niveau principal et du niveau inférieur ; les terrasses couvertes et le local technique n'ont pas été pris en compte dans le calcul ;
- la surface hors oeuvre brute (SHOB) mentionnée est également erronée en l'absence de prise en compte des terrasses et places de stationnement ;
- la collectivité aurait dû sursoir à statuer sur la demande de permis de construire compte tenu de l'avancement du projet de carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy prescrit par délibération du 6 juin 2014 et approuvé le lendemain, soit le 24 février 2017, de la délivrance du permis de construire en litige lequel est en contradiction avec plusieurs dispositions du règlement de la carte d'urbanisme, à savoir les articles U7, U8, U9, N1 et N1.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 novembre 2018, le 4 octobre 2019, la société Almosnino, société civile immobilière, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Ocean's Dream Resort la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que l'appelante ne justifie pas d'un intérêt à agir au sens de l'article L. 600-1-2 et de l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme, et qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 mai 2019 et le 25 juin 2020, la collectivité de Saint-Barthélemy, représentée par Me F... conclut au rejet de la requête, et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Ocean's Dream Resort la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que l'appelante ne justifie pas d'un intérêt pour agir et qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... E...,
- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,
- et les observations de Me G..., représentant la société Ocean's Dream Resort et de Me A... qui substitue Me B..., représentant la société Almosnino.
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 23 février 2017, le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société civile immobilière (SCI) Almosnino un permis de construire pour la démolition et la reconstruction d'une résidence d'une surface de 351 m2 sur un terrain constitué des parcelles cadastrées section AL n° 228 et n° 229 situées à Gustavia. La société Ocean's Dream Resort a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy l'annulation de ce permis de construire. Par un jugement du 22 février 2018, le tribunal a rejeté sa demande pour défaut d'intérêt à agir. La société Ocean's Dream Resort relève appel de ce jugement.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Aux termes de l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme : " Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire (...) s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. ". Aux termes de l'article 75 alinéa 2 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy : " Dans les trente jours qui suivent le dépôt de la demande et pendant la durée d'instruction de celle-ci, le président du conseil territorial procède à l'affichage d'un avis de dépôt de demande de permis de construire comprenant les mentions suivantes : nom du demandeur, numéro et date d'enregistrement de la demande, adresse du terrain, surface hors oeuvre nette et hauteur du projet, destination de la construction ". Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire (...) que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier et notamment d'un certificat du 6 décembre 2017 produit en défense par la collectivité de Saint-Barthélemy et signé de son président exécutif, que la demande de permis de construire déposée le 17 octobre 2016 par la société Almosnino auprès des services de la collectivité a fait l'objet d'un affichage dans le hall de la collectivité à compter du 17 octobre 2016 jusqu'au 29 mars 2017. Quand bien même la collectivité de Saint-Barthélemy n'a pas produit de registre d'affichage, il ne ressort d'aucun élément du dossier que les mentions portées dans le certificat du 6 décembre 2017, établi par une autorité publique et dont les mentions font foi jusqu'à preuve contraire, seraient erronées quant à la réalité et la régularité de l'affichage. Par suite, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme, l'intérêt à agir de la société Ocean's Dream Resort à l'encontre du permis de construire en litige doit s'apprécier, en principe, au 17 octobre 2016, date d'affichage de la demande de permis.
4. Il ressort des pièces du dossier que la société Ocean's Dream Resort, immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 1er juin 2017 seulement, n'a acquis la propriété voisine du terrain d'assiette du projet que le 23 juin 2017, soit postérieurement à l'affichage de la demande de permis au siège de la collectivité. Si l'appelante se prévaut de l'offre d'achat de cette parcelle voisine faite le 11 mars 2017 par M. C..., président de la société Therabel Pharma Nv qui est la société mère de la société Ocean's Dream Resort, cette offre d'achat est postérieure à la date d'affichage au siège de la collectivité de la demande de permis et ne constitue pas, en elle-même, une circonstance particulière permettant de déroger à la règle d'appréciation de l'intérêt à agir fixée par les dispositions précitées du code de l'urbanisme. La requérante fait aussi valoir qu'il existe " une unicité " entre M. C..., auteur de l'offre d'achat, et la société Therabel Pharma, signataire du compromis de vente du 9 mai 2017, mais cet élément ne caractérise pas non plus une circonstance particulière au sens de l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme. Ne constitue pas davantage une telle circonstance particulière le fait, à le supposer établi, que la société Ocean's Dream Resort ignorait l'existence du permis de construire. Enfin, si cette société soutient que les conditions d'affichage du permis sur le terrain d'assiette du projet étaient irrégulières, ces éléments, qui n'auraient eu de conséquence que sur le déclenchement du délai de recours, sont sans incidence et ne sauraient être regardés comme des circonstances particulières au sens et pour l'application de l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme.
5. Dans ces conditions, la société Ocean's Dream Resort, qui n'est devenue propriétaire de la parcelle voisine du terrain d'assiette du projet que le 23 juin 2017, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté sa demande d'annulation du permis de construire en litige pour défaut d'intérêt à agir à la date d'affichage de ce permis au siège de la collectivité. Dès lors, il y a lieu de rejeter l'appel formé par la société Ocean's Dream Resort.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy et de la société Almosnino, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdante, la somme que la société Ocean's Dream Resort demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Ocean's Dream Resort une somme de 800 euros à verser à la collectivité de Saint-Barthélemy et une somme de 800 euros à verser à la société Almosnino au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Ocean's Dream Resort est rejetée.
Article 2 : La société Ocean's Dream Resort versera une somme de 800 euros à la collectivité de Saint-Barthélemy et une somme de 800 euros à la société Almosnino sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ocean's Dream Resort, à la société Almosnino et à la collectivité de Saint-Barthélemy. Copie en sera délivrée au ministre de l'outre-mer.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Frédéric Faïck, président,
Mme D... E..., premier conseiller,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2020.
Le président,
Frédéric Faïck
La République mande et ordonne au ministre de l'outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX01646