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18/12/2020 | FRANCE | N°18BX03334,20BX00038

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 18 décembre 2020, 18BX03334,20BX00038


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme I... N..., Mme G... F..., Mme J... E... et M. B... K... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 18 mars 2015 du centre hospitalier de Luchon, ensemble le rejet implicite du recours gracieux formé le 22 octobre 2015.

Par un jugement n° 1600988 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 18 mars 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Luchon n'a accordé à Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... qu'une décharge p

artielle d'activité de service correspondant à 7 heures par jour, ensemble le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme I... N..., Mme G... F..., Mme J... E... et M. B... K... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 18 mars 2015 du centre hospitalier de Luchon, ensemble le rejet implicite du recours gracieux formé le 22 octobre 2015.

Par un jugement n° 1600988 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 18 mars 2015 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Luchon n'a accordé à Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... qu'une décharge partielle d'activité de service correspondant à 7 heures par jour, ensemble le rejet implicite de leur recours gracieux, a mis à la charge du centre hospitalier de Luchon une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions présentées par cet établissement sur le fondement des mêmes dispositions.

Procédure devant la cour :

I. Sous le n°18BX03334, par une requête et des mémoires enregistrés les 31 août 2018, 26 février et 18 septembre 2020, le centre hospitalier " Les Hôpitaux de Luchon ", représenté par Me O..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 29 juin 2018 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement n'a pas répondu à tous ses moyens de défense, et ne s'est notamment pas prononcé sur l'ensemble des fins de non-recevoir qu'il avait opposées, en particulier celle tirée du caractère non décisoire de l'acte contesté ; ce jugement est ainsi insuffisamment motivé ;

- les premiers juges sont, à certains égards, allés au-delà de ce qui ressortait des échanges entre les parties, sans s'en expliquer, de sorte que le jugement n'est pas motivé ; ils ont notamment relevé que la décision du 18 mars 2015 ne comportait pas la mention des voies et délais de recours, alors qu'aucune des parties n'en débattait ; le tribunal a de la sorte statué ultra petita, méconnu le principe du contradictoire et mené une instruction partiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la demande de première instance était irrecevable ; le courrier du 18 mars 2015 est une réponse à une demande de renseignements présentée par Mme N... le 2 mars 2015 ; il n'a pas modifié l'ordonnancement juridique de son auteur, qui n'était alors que Mme N... ; cet acte ne fait pas grief à cette dernière ; il ne fait pas davantage grief à Mmes F... et E... et à M. K..., qui n'étaient pas co-auteurs de la demande de Mme N... ;

- la demande de première instance était tardive ; en effet, l'absence de mention des voies et délais de recours ne fait pas obstacle au déclenchement du délai de recours pour un agent public ;

- les demandeurs de première instance n'étaient pas recevables à présenter une requête collective dès lors que le calcul d'une décharge d'activité syndicale dépend de la situation statutaire de chaque agent ;

- M. M..., directeur adjoint et directeur des ressources humaines du centre hospitalier, était compétent pour signer l'acte du 18 mars 2015 en vertu de la décision de délégation de signature du 11 mars 2015, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Haute-Garonne et sur le site internet des deux établissements ;

- en application des dispositions combinées des articles 9 et 14 du décret n°2002-9 du 4 janvier 2002 et du protocole d'accord local sur la réduction de travail de l'établissement public hospitalier, le cinquième des obligations hebdomadaires de service prévues en moyenne sur la durée du cycle de travail des agents a été déterminé à 7 heures ; le principe d'égalité de traitement des agents fait obstacle à la modulation du nombre d'heures correspondant à une journée de décharge pour activité syndicale en fonction des cycles de travail individuels des agents, et, par conséquent, des postes occupés par les agents.

Par des mémoires en défense enregistrés les 8 mars 2019 et 25 mars 2020, Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K..., représentés par Me H..., concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge du centre hospitalier " Les Hôpitaux de Luchon " d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal a répondu à la fin de non-recevoir tirée du caractère non décisoire de l'acte du 18 mars 2015 ;

- la décision du 18 mars 2015 ne se borne pas à constater un état de fait ou de droit mais exprime une volonté ; elle ne revêt ainsi pas un caractère purement informatif ; la décision du 18 mars 2015 est le seul acte qui traduit explicitement la décision du centre hospitalier de retenir une valorisation de 7 heures de la journée de travail pour décompter le temps de décharge syndicale ; cette décision a été prise sur une demande présentée par Mme N..., non pas en son nom personnel, mais comme représentante syndicale ;

- en application de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, cette décision expresse ne comportant pas la mention des voies et délais de recours, le délai de recours n'a pas commencé à courir ; les dispositions du code des relations entre le public et l'administration relatives à l'accusé de réception des demandes ne font pas échec aux dispositions du code de justice administrative ;

- en admettant que la décision implicite sur recours du 22 octobre 2015 serait confirmative, les conclusions dirigées contre la décision du 18 mars 2015 demeurent recevables ;

- l'examen de la légalité des décisions contestées appelait une réponse unique et non un examen individualisé ;

- il n'est toujours pas justifié de ce que M. M..., qui n'est pas le directeur du centre hospitalier, disposait d'une délégation de signature l'habilitant à signer la décision du 18 mars 2015 ; les actes produits en appel ne permettent pas de justifier de sa compétence pour prendre la décision du 18 mars 2015 ; il n'est pas indiqué de quelle manière ces décisions auraient été rendues consultables ;

- le centre hospitalier ne peut se prévaloir du principe d'égalité de traitement pour se baser sur une durée théorique du temps de travail ; en effet, les agents qui ont des cycles de travail différents sont dans une situation objective différente justifiant un traitement distinct ;

- il résulte des dispositions de l'article 14 du décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 que le décompte se calcule sur le cinquième des obligations de services prévues en moyenne sur la durée du cycle de travail, et non pas sur le temps annuel théorique de travail.

II. Sous le n° 20BX00038, par une lettre enregistrée le 11 février 2019, Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K..., représentés par Me H..., ont saisi la cour d'une demande tendant à obtenir l'exécution de ce jugement du 29 juin 2018 du tribunal administratif de Toulouse.

Ils soutiennent que le centre hospitalier n'a pas tiré les conséquences du jugement et persiste à valoriser à 7 heures une journée d'absence pour décharge syndicale.

Par une ordonnance du 17 janvier 2020, la présidente de la cour a, en application

de l'article R. 921-6 du code de justice administrative, ouvert une procédure juridictionnelle en vue de l'exécution du jugement du 29 juin 2018 du tribunal administratif de Toulouse.

Par un mémoire enregistré le 5 février 2020, Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... persistent dans leur demande d'exécution.

Ils font valoir qu'aucune mesure d'exécution n'a été prise par le centre hospitalier.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le décret n°86-660 du 19 mars 1986 modifié relatif à l'exercice du droit syndical dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Q... C...,

- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public,

- et les observations de Me O..., représentant le centre hospitalier " Les Hôpitaux de Luchon " et de Me H..., représentant Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K....

Des notes en délibéré ont été présentées le 10 décembre 2020 dans les deux instances pour Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K..., par Me H....

Considérant ce qui suit :

1. Par un courrier du 23 février 2015, Mme N... a, en sa qualité de secrétaire générale du syndicat CFDT de la Haute-Garonne, communiqué au directeur du centre hospitalier de Luchon la liste des représentants syndicaux en activité dans l'établissement bénéficiaires de crédits de temps syndical et précisé les volumes de crédit de temps syndical de ces derniers en se basant sur une durée de 7h30 par journée d'absence. Par un courrier du 18 mars 2015, le directeur adjoint du centre hospitalier a indiqué que la journée d'absence devait être valorisée à 7 heures. Par un courrier en date du 22 octobre 2015, Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K..., représentants syndicaux désignés par le courrier du 23 février 2015, ont présenté un recours gracieux en contestant ce mode de calcul, recours qui a été implicitement rejeté. Le centre hospitalier " Les hôpitaux de Luchon " relève appel du jugement du 29 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 18 mars 2015 en ce qu'elle n'accorde à Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... qu'une décharge partielle d'activité de service correspondant à 7 heures par jour, ensemble le rejet implicite de leur recours gracieux. Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... ont saisi la cour d'une demande d'exécution de ce jugement sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative. Il y a lieu de joindre les deux instances pour statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le tribunal a répondu, aux points 3 et 4 du jugement, à la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier et tirée de ce que le courrier du 18 mars 2015, uniquement informatif, n'aurait pas revêtu un caractère décisoire.

3. En deuxième lieu, en relevant que la décision du 18 mars 2015 ne comportait pas la mention des voies et délais de recours, de sorte que la demande de première instance n'était pas tardive, le tribunal a écarté de manière suffisamment motivée la fin de non-recevoir opposée par le centre hospitalier tirée de ce que la décision implicite de rejet du recours administratif formé le 22 octobre 2015 aurait été purement confirmative de celle du 18 mars 2015.

4. En troisième lieu, en s'appuyant sur les pièces du dossier, en particulier sur l'absence de mention des voies et délais de recours sur la décision du 18 mars 2015, pour écarter la fin de non-recevoir tirée du caractère tardif de la demande, le tribunal n'a ni statué " ultra petita ", ni encore méconnu le caractère contradictoire de la procédure juridictionnelle et le principe d'impartialité.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

5. En premier lieu, en vertu de l'article 16 du décret du 19 mars 1986 relatif à l'exercice du droit syndical, notamment, dans les établissements hospitaliers, l'attribution des décharges d'activité pour activité syndicale aux personnes désignées par leur organisation syndicale, selon les volumes de crédit de temps syndical précisés par cette dernière dans sa demande, fait nécessairement l'objet d'une décision de l'autorité administrative. Une telle décision est susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir dès lors qu'elle ne satisfait pas l'organisation syndicale ou la personne désignée par elle à ce titre.

6. Il ressort des pièces du dossier que par une demande en date du 23 février 2015 adressée au directeur du centre hospitalier de Luchon, Mme N..., en sa qualité de secrétaire générale du syndicat CFDT de la Haute-Garonne, a sollicité des décharges d'activité syndicale au bénéfice de quatre représentants syndicaux, Mme F..., Mme E..., M. K... et elle-même, et défini les volumes de crédit de temps syndical en se basant sur une durée de 7h30 pour une journée d'absence. Par un courrier du 18 mars 2015, le directeur adjoint du centre hospitalier a indiqué que la journée d'absence devait être valorisée à 7 heures, soit un cinquième des obligations de service fixées à 35 heures par semaine. Il ressort des termes mêmes de ce courrier, qui précise qu'il répond à un courrier adressé le 2 mars 2015 par Mme N... en sa qualité de secrétaire générale du syndicat, par lequel elle contestait une telle modalité de décompte, que ce courrier est la confirmation expresse de la décision non formalisée prise par l'établissement sur la demande d'attribution de décharges d'activités du 23 février 2015. Ce courrier n'est ainsi pas purement informatif mais revêt, contrairement à ce que persiste à soutenir le centre hospitalier, un caractère décisoire.

7. En deuxième lieu, cette décision du 18 mars 2015, qui ne satisfait pas le syndicat demandeur quant aux volumes de temps de crédit syndical sollicités au bénéfice de ses représentants, a une incidence sur la situation des agents concernés. Ces derniers, s'ils n'étaient certes pas les auteurs de la demande d'attribution de décharges d'activité présentée par leur syndicat, justifient dès lors d'un intérêt suffisant pour agir contre la décision en cause.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ". Par ailleurs, l'exercice d'un recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative.

9. Ainsi que l'a relevé le tribunal, la décision du 18 mars 2015 ne comporte pas de mention relative aux voies et délais de recours, seule à même de déclencher le délai de recours contentieux en application des dispositions précitées de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, auxquelles ne font pas échec celles, invoquées par le centre hospitalier, de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration. Le délai de recours contentieux n'ayant pas commencé à courir contre la décision du 18 mars 2015, le centre hospitalier n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas été conservé par l'exercice du recours gracieux du 22 octobre 2015. Enfin, la demande de Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... a été enregistrée devant le tribunal administratif le 1er mars 2016, soit dans un délai raisonnable. La fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de cette demande doit dès lors être écartée.

10. Enfin, la recevabilité d'une requête présentée conjointement par plusieurs requérants est subordonnée à la condition, outre celle tenant au lien suffisant entre les demandes, que la solution du litige ne nécessite pas un examen distinct de la situation individuelle de chacun des requérants.

11. Devant le tribunal, Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... se sont bornés à demander l'annulation de la décision du 18 mars 2015, confirmée sur recours gracieux, en ce qu'elle valorise une journée d'absence au titre de la décharge syndicale par référence au temps théorique annuel de travail, ramené à 35 heures par semaine, sans présenter de conclusions tendant à ce que le tribunal tire les conséquences de son annulation en fixant, pour chacun d'entre eux, le volume de leur décharge syndicale. Contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, ces demandes, présentées conjointement, présentaient un lien suffisant entre elles, et ne nécessitaient pas pour les premiers juges de procéder à un examen distinct de la situation individuelle de chacun des requérants. La fin de non-recevoir doit dès lors être écartée.

Sur la légalité de la décision du 18 mars 2015 du directeur du centre hospitalier de Luchon, ensemble la décision implicite portant rejet du recours gracieux du 22 octobre 2015 :

12. Aux termes de l'article 1er du décret du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 : " La durée du travail est fixée à 35 heures par semaine dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. / Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures maximum, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées. (...) ". Aux termes de son article 5 : " La durée du travail effectif s'entend comme le temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles (...) ". L'article 8 de ce décret dispose : " L'aménagement et la répartition des horaires de travail sont fixés par le chef d'établissement, après avis du comité technique d'établissement ou du comité technique et compte tenu de la nécessité d'assurer la continuité des soins ou de la prise en charge des usagers, les dimanches, les jours fériés et la nuit ". Aux termes de son article 9 : " Le travail est organisé selon des périodes de référence dénommées cycles de travail définis par service ou par fonctions et arrêtés par le chef d'établissement après avis du comité technique d'établissement ou du comité technique paritaire./ Le cycle de travail est une période de référence dont la durée se répète à l'identique d'un cycle à l'autre et ne peut être inférieure à la semaine ni supérieure à douze semaines ; le nombre d'heures de travail effectué au cours des semaines composant le cycle peut être irrégulier. / Il ne peut être accompli par un agent plus de 44 heures par semaine ". Enfin, aux termes de l'article 14 du même décret : " Tout agent soumis à un décompte horaire qui ne peut effectuer l'intégralité de son temps de travail quotidien en raison d'une absence autorisée ou justifiée est considéré avoir accompli le cinquième de ses obligations hebdomadaires de service prévues en moyenne sur la durée du cycle de travail. ".

13. Il résulte des dispositions précitées que, dans les établissements publics de santé, le chef d'établissement fixe la répartition et l'aménagement des horaires de travail des agents et arrête les cycles de travail définis par services ou par fonctions. A ce titre, il est également compétent pour déterminer les conséquences des absences pour décharge syndicale des agents pour le calcul de leur temps de travail annuel effectif. A cet égard, le cycle de travail reposant sur l'alternance de journées de travail effectif tantôt inférieures à sept heures, tantôt supérieures à sept heures, correspondant, sur l'année, à un nombre total d'heures de travail effectif de 1 607 heures, il peut légalement retenir que l'agent absent une journée pour décharge syndicale doit être regardé comme ayant effectué sept heures de travail effectives, quand bien même, selon la période du cycle de travail en cause, la journée de travail pour laquelle l'agent est absent devait normalement comporter un nombre d'heures de travail effectives supérieur ou inférieur à sept heures. Dès lors, et ainsi que le soutient le centre hospitalier " Les Hôpitaux de Luchon ", la décision en litige, qui valorise à 7 heures toute journée d'absence pour décharge syndicale, n'est pas entachée d'erreur de droit. C'est ainsi à tort que le tribunal s'est fondé sur le motif tiré de ce que cette décision était entachée d'une erreur de droit pour l'annuler.

14. Toutefois, aux termes de l'article D. 6143-33 de code de la santé publique : " Dans le cadre de ses compétences définies à l'article L. 6143-7, le directeur d'un établissement public de santé peut, sous sa responsabilité, déléguer sa signature ". Aux termes de l'article D. 6143-35 du même code : " Les délégations mentionnées à la présente sous-section, de même que leurs éventuelles modifications sont notifiées aux intéressés et publiées par tout moyen les rendant consultables. Elles sont communiquées au conseil de surveillance et transmises sans délai au comptable de l'établissement lorsqu'elles concernent des actes liés à la fonction d'ordonnateur des dépenses. ". Aux termes de l'article R. 6143-38 de ce code, dans sa rédaction alors en vigueur: " Sans préjudice des obligations de publication prévues par d'autres dispositions du présent code, les décisions des directeurs des établissements publics de santé et les délibérations non réglementaires de leurs conseils de surveillance sont notifiées aux personnes physiques et morales qu'elles concernent. Leurs décisions et délibérations réglementaires sont affichées sur des panneaux spécialement aménagés à cet effet et aisément consultables par les personnels et les usagers. Lorsque ces décisions ou délibérations font grief à d'autres personnes que les usagers et les personnels, elles sont, en outre, publiées au bulletin des actes administratifs de la préfecture du département dans lequel l'établissement a son siège ".

15. La décision en litige a été signée par M. M..., directeur adjoint chargé des ressources humaines au sein du centre hospitalier " Les hôpitaux de Luchon ". Si l'établissement produit, pour la première fois en appel, une décision du 11 mars 2015 de délégation de signature du directeur au profit de M. M..., il n'apporte aucun élément de nature à justifier que cette décision aurait fait l'objet des mesures de publicité prévues par les dispositions précitées. La compétence du signataire de la décision attaquée ne peut ainsi être regardée comme établie. Par suite, le motif, retenu à titre surabondant par le tribunal, tiré de l'incompétence du signataire de cette décision, suffit à en justifier l'annulation.

16. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier " Les Hôpitaux de Luchon " n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision de son directeur du 18 mars 2015, ensemble le rejet implicite du recours gracieux de Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K....

Sur la demande d'exécution du jugement :

17. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution (...) Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution

et prononcer une astreinte (...) ".

18. Eu égard à qui a été dit aux points 13 et 15 du présent arrêt, l'exécution du jugement n'implique, compte tenu du seul motif d'annulation confirmé en appel et tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige, aucune mesure. La demande présentée par Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 911-4 ne peut dès lors être accueillie.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K..., qui n'ont pas la qualité de partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier " Les Hôpitaux de Luchon " le versement de quelque somme que ce soit euros au titre des frais exposés par Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du centre hospitalier " Les Hôpitaux de Luchon " est rejetée.

Article 2 : La demande d'exécution présentée par Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... au titre de l'article L. 911-4 du code de justice administrative est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme N..., Mme F..., Mme E... et M. K... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier " Les Hôpitaux de Luchon " et à Mme I... N..., qui en informera Mme G... F..., Mme J... E... et M. B... K....

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme P... L..., présidente,

Mme A... D..., présidente-assesseure,

Mme Q... C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 décembre 2020.

Le rapporteur,

Marie-Pierre Beuve C...

La présidente,

Catherine L...

Le greffier,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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Nos 18BX03334 et 20BX00038


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03334,20BX00038
Date de la décision : 18/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Droit syndical.

Procédure - Introduction de l'instance.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : HERRMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-18;18bx03334.20bx00038 ?
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