Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2017 par lequel le maire de la commune de Castetbon l'a révoquée de ses fonctions à compter du 1er septembre 2017 et l'a radiée des cadres.
Par un jugement n° 1701831 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 31 décembre 2018 et 15 mai 2019,
Mme D..., représentée par Me J... F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2017 par lequel le maire de la commune de Castetbon l'a révoquée de ses fonctions à compter du 1er septembre 2017 et l'a radiée des cadres ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Castetbon la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête d'appel est suffisamment motivée et recevable ;
- l'arrêté en litige a été pris en méconnaissance de l'article 15 du décret du 18 septembre 1989, car elle n'a pas reçu les informations permettant de déterminer si les conditions de saisine du conseil de discipline de recours sont réunies ;
- il n'est pas suffisamment motivé, car il ne précise pas les griefs qui lui sont reprochés ;
- les griefs tenant aux prétendues heures de service non faites, à un abandon de poste, au refus de respecter le règlement intérieur et à un acte de désobéissance hiérarchique sont infondés ; le grief tiré de l'inexécution de son temps de service repose sur des informations inexactes et est infondé, dès lors que la modification de ses horaires de travail a été décidée en décembre 2016, alors qu'aucune nécessité de service ne l'imposait et qu'il a été procédé à des retenues de traitement pour absence de service fait ;
- la décision en litige est entachée d'erreur d'appréciation et de détournement de pouvoir ;
- elle a été harcelé par mail le samedi à ses horaires de travail ;
- le grief tiré du manquement répété de remplir sa mission est infondé ;
- jusqu'à l'arrivée du nouveau maire aucun formalisme n'était demandé aux agents pour prendre leurs congés. Elle a utilisé les formulaires de demande de congés, n'a jamais excédé ses cinq semaines et rappelait au maire par mail ses dates de congés ;
- le grief tiré de la désobéissance hiérarchique n'est pas justifié et est entaché d'erreur d'appréciation ;
- les erreurs techniques qui lui sont reprochées dans l'établissement des pièces d'identité des administrés ne sont pas établies ;
- le grief tiré du versement indu et frauduleux d'indemnités et de faux en écritures publiques et usage de faux n'est pas établi ;le grief selon lequel la décision lui attribuant deux indemnités serait un faux n'est pas démontré et est infondé ;
- les pressions, menaces, dénigrements envers les élus et l'autorité territoriale, manquements au devoir de réserve et de discrétion procèdent de simples affirmations ;
- le grief tiré du comportement professionnel désinvolte n'est pas établi ;
- eu égard à ses bons états de service, la sanction est disproportionnée.
Par des mémoires enregistrés les 17 avril 2019 et 25 novembre 2020, la commune de Castetbon, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête de Mme D... ;
2°) à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour prononcerait l'annulation de son arrêté pour un moyen de légalité externe, de différer l'effet de sa décision dans le temps afin qu'elle puisse prendre une nouvelle décision ;
3°) de mettre à la charge de Mme D... la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête n'est pas recevable, car elle n'est que la reprise des moyens de première instance, présentés de façon identique, de sorte qu'elle pourrait être rejetée par voie d'ordonnance ;
- aucun moyen n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;
- le décret n° 91-298 du 20 mars 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E... C...,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public ;
- et les observations de Mme A... D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., adjoint administratif principal de 1ère classe, était employée à titre permanent par les communes de Narp, Audaux et Castetbon, en tant que secrétaire intercommunale. A l'issue d'une procédure disciplinaire engagée le 31 mai 2017 et après avoir consulté la commission administrative paritaire du département des Pyrénées-Atlantiques, siégeant en formation disciplinaire laquelle a émis un avis le 27 juin 2017 ainsi que les maires de Narp et d'Audaux, le maire de la commune de Castetbon a, par arrêté du 1er juillet 2017, prononcé la révocation et la radiation des cadres de Mme D... à compter du 17 juillet 2017. Mme D... a contesté cet arrêté devant le tribunal administratif de Pau en tant qu'il a prononcé sa révocation. Elle relève appel du jugement du 30 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Sur les conclusions en annulation de l'arrêté du 1er juillet 2017 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. (...) L'avis de cet organisme de même que la décision prononçant une sanction disciplinaire doivent être motivés. ". Aux termes du 2° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 2° Infligent une sanction ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
3. Il résulte de ces dispositions que l'autorité qui prononce une sanction disciplinaire a l'obligation de préciser, dans sa décision, les griefs qu'elle entend retenir à l'encontre de l'agent intéressé, de sorte que celui-ci puisse à la seule lecture de la décision qui lui est notifiée, connaître les motifs de la sanction qui le frappe.
4. L'arrêté litigieux du 1er juillet 2017 vise le code général des collectivités territoriales, la loi du 13 juillet 1983, la loi du 26 janvier 1984, le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux et le décret
n° 91-298 du 20 mars 1991 portant dispositions statutaires applicables aux fonctionnaires territoriaux nommés dans des emplois à temps non complet. Il mentionne qu'il est reproché à Mme D... l'inexécution de son temps de service (8 heures exécutées sur les 16 heures prévues) et qu'elle refuse d'appliquer le nouveau planning de travail notifié à compter du mois d'avril 2016 pour remédier à cette situation. Il lui est également reproché des manquements répétés à son obligation d'assurer les missions confiées et à mettre en oeuvre les demandes de son autorité hiérarchique, ainsi que de graves erreurs techniques, notamment lors de l'établissement des dossiers de pièces d'identité des administrés. Par suite, l'arrêté en litige comporte les considérations de droit sur lesquelles il se fonde et énonce précisément les griefs qui sont reprochés à Mme D.... Il est suffisamment motivé. Le moyen tiré du défaut de motivation, doit donc être écarté.
5. En second lieu, aux termes de l'article 15 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " Lors de la notification au fonctionnaire poursuivi de la sanction dont il a fait l'objet, l'autorité territoriale doit communiquer à l'intéressé les informations de nature à lui permettre de déterminer si les conditions de saisine du conseil de discipline de recours se trouvent réunies. La notification fait mention du délai d'un mois prévu à l'article 23 du présent décret et indique l'adresse du secrétariat du conseil de discipline de recours compétent ". Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté de révocation du 1er juillet 2017 indique dans son article 3 que Mme D... " peut faire l'objet d'un appel dans le délai d'un mois devant le conseil de discipline de recours, dont le secrétariat est assuré par le centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Gironde (Immeuble Emeraude - rue du Cardinal Richaud - 33049 Bordeaux Cedex) ". Par suite, ce moyen manque en fait.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...) Deuxième groupe : abaissement d'échelon ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours. Troisième groupe : la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans (...). Quatrième groupe : (...) la révocation (...) ".
7. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
8. D'une part, Mme D... ne peut utilement se prévaloir de ce que certains griefs du rapport de saisine de la commission de discipline sont erronés dès lors que ces motifs n'ont pas été repris par l'autorité territoriale dans l'arrêté litigieux. Il en est ainsi des motifs tirés de ce qu'elle aurait refusé de signer le compte-rendu de son entretien professionnel et à son absence aux réunions du service intercommunal, des difficultés engendrées par l'absence de production de la part de la requérante des bulletins de paie des agents et des relevés d'indemnité des élus, de ce que l'intéressée avait perçu à tort deux indemnités, à savoir l'indemnité d'exercice des missions des personnels de préfecture et l'indemnité d'administration et de technicité, de ce que la délibération du 15 mai 2009 lui attribuant les deux indemnités précitées serait un faux, de ce que Mme D... ferait usage de pressions et de menaces sur l'autorité territoriale et les élus des conseils municipaux des communes de Narp, Audaux et Castetbon et aurait manqué à son devoir de réserve, de discrétion professionnelle et de secret professionnel.
9. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que Mme D..., secrétaire intercommunale, devait effectuer un travail à temps complet qui était réparti entre les communes de Narp, Audaux et Castetbon. A ce titre, elle devait accomplir un temps de travail de 16 heures hebdomadaires à la mairie de Castetbon. Il est constant que durant plusieurs années, alors que cette pratique avait été tolérée par l'ancien maire, elle n'a effectué que 8 heures de présence à la mairie de Castetbon. Le nouveau maire a souhaité y mettre fin et a rappelé à Mme D... ses obligations de services, notamment à l'occasion de son entretien professionnel au titre de
l'année 2014. Il ressort également de l'entretien professionnel de l'intéressée au titre de l'année 2015, que Mme D... n'avait pas modifié ses pratiques et n'accomplissait toujours pas son temps de travail de seize heures hebdomadaires à la mairie de Castetbon. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier, contrairement à ce que soutient Mme D..., que son temps de présence face au public ne représenterait pas la totalité des heures travaillées et qu'elle aurait été autorisée à accomplir son temps de service en télétravail et si elle fait état des tâches de secrétariat des conseils municipaux, elles ne sont pas équivalentes, compte tenu de leur nombre, à un travail de 8 heures hebdomadaires. Pour remédier à la persistance de cette situation, les maires de Narp, Audaux et Castetbon ont organisé le 30 mars 2016 une réunion concernant la répartition de son temps de travail et Mme D... a, le 21 avril 2016, refusé le planning décidé à l'issue de cette réunion. Toujours confrontés à la persistance de ce refus, un règlement interne du secrétariat intercommunal, pris après avis favorable du comité technique intercommunal à l'issue de sa réunion du 17 juin 2016, a dû être approuvé le 28 juillet 2016 pour fixer des règles d'organisation du service. Ce règlement, qui intègre, notamment, les modalités d'obtention des autorisations individuelles de congés et son planning, fait apparaître que Mme D... doit travailler tous les samedis à Castetbon.
10. Si Mme D... soutient qu'entre le 20 avril 2016 jusqu'à la fin du mois de septembre 2016, elle a respecté ce planning, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la suite de l'entrée en vigueur du règlement intérieur précité, elle n'est plus venue travailler les samedis en mairie de Castetbon à compter du 1er octobre 2016, soit pendant plus de trente-et-une semaines sans poser de demandes d'autorisations individuelles de congés. Si Mme D... fait valoir que ce planning ne lui laissait qu'un jour de repos par semaine, cette circonstance ne la dispensait pas d'accomplir ses 16 heures de travail hebdomadaires à Castetbon. Enfin, la circonstance que le maire de Castetbon lui envoyait des courriers électroniques sur sa messagerie professionnelle pour s'assurer de sa présence en mairie le samedi et qu'il lui demandait de lui signaler par courriels ses heures d'arrivée et de départ les jours où elle travaillait à Castetbon, n'excède pas les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique en particulier compte tenu du comportement de Mme D.... Dès lors, cet agissement ne révèle aucun acte de harcèlement à son égard. Par suite, l'importante inexécution de son temps de service et la persistance de ce comportement en dépit des demandes réitérées du nouveau maire de Castetbon depuis 2014, ainsi qu'à compter d'avril 2016, la méconnaissance du planning de travail établi pour remédier à cette situation qui sont suffisamment établis, sont de nature à justifier une sanction disciplinaire.
11. Enfin, s'agissant du dernier grief relevé dans l'arrêté, relatif aux manquements répétés à son obligation d'assurer ses missions et au devoir d'obéissance hiérarchique envers le nouveau maire de Castetbon, ainsi qu'aux graves erreurs techniques, si Mme D... soutient que les erreurs qui lui sont reprochées dans l'établissement de deux dossiers de pièces d'identité sont ponctuelles, toutefois, il ressort des pièces du dossier que ces erreurs ont contraint le maire de Castetbon à solliciter auprès du préfet des Pyrénées-Atlantiques, les 3 et 13 février 2017, des demandes dérogatoires pour le renouvellement de cartes nationales d'identité avant leur date d'expiration. En outre, il ressort également des pièces du dossier que d'autres dossiers de demandes de pièces d'identité complétés par Mme D... ont été renvoyés à la commune de Castetbon par la préfecture des Pyrénées-Atlantiques en raison d'erreurs ou de dossiers incomplets. De plus, la préfecture des Pyrénées-Atlantiques a été dans l'obligation d'adresser plusieurs relances à la commune de Castetbon les 8 mars 2016, 16 mars 2016 et 29 mars 2016 afin que soient déposées les listes électorales de la commune. Cette situation s'est d'ailleurs reproduite en 2017. L'IRCANTEC a également adressé le 20 avril 2017 une relance à la commune de Castetbon car la commune n'avait pas procédé avant le 31 janvier 2016 à la déclaration annuelle au titre des cotisations pour l'année 2016. Enfin, la trésorerie de
Sauveterre-de- Béarn a envoyé plusieurs courriers au maire de Castetbon, les 23 septembre 2015 et 4 mars 2016, afin de l'informer d'erreurs ou d'omissions dans plusieurs mandats complétés et transmis par Mme D... à leurs services. Par suite, ce grief, suffisamment établi par les pièces du dossier, était également de nature à justifier une sanction.
12. Compte tenu de la gravité des fautes commises par Mme D..., de leur nombre, de leur caractère volontairement réitéré, en particulier en ce qui concerne le refus d'accomplir le temps de travail en mairie de Castetbon, l'ensemble traduisant un comportement général incompatible avec la bonne marche du service, ces griefs, alors même que l'agent avait une ancienneté importante et n'avait pas fait l'objet de sanction au préalable, justifiaient la sanction de révocation, qui n'est pas une sanction disproportionnée dès lors qu'aucune autre sanction moins lourde prévue par les dispositions de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 n'était adaptée aux fautes commises. Enfin, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi et le moyen tiré de l'erreur de droit n'est pas assorti de l'indication de la disposition textuelle qui aurait été méconnue.
13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de
non-recevoir opposée en défense par la commune de Castetbon ni de se prononcer sur ses conclusions subsidiaires, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Sur les frais d'instance :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Castetbon, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que demande Mme D... au titre de ses frais d'instance. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la Mme D... une somme à payer à la commune de Castetbon au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... et les conclusions de la commune de Castetbon présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et à la commune de Castetbon.
Délibéré après l'audience du 30 novembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme G... I..., présidente,
Mme H... K..., présidente-assesseure,
Mme E... C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 décembre 2020.
La présidente,
Brigitte PHEMOLANT
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX04453