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17/12/2020 | FRANCE | N°18BX03208

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 17 décembre 2020, 18BX03208


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des suppléments d'impôt en matière d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement du 6 juillet 2018 le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 23 août 2018 et le 8 novembre 2019, M. E..., représenté par la S

ELARL Quesnel et Associés demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 juillet 2018 du tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des suppléments d'impôt en matière d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement du 6 juillet 2018 le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 23 août 2018 et le 8 novembre 2019, M. E..., représenté par la SELARL Quesnel et Associés demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 juillet 2018 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de prononcer la décharge des suppléments d'impôt en matière d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011 ;

3°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- les sommes portées au crédit de ses comptes courants et imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers correspondent à des remboursements de frais effectués par les sociétés dans lesquelles il est associé ;

- les sommes portées au crédit de ses comptes bancaires personnels et imposées dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée correspondent des remboursements de frais qui ne sont pas imposables.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 février 2019, et un mémoire enregistré le 14 avril 2020 le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. H... G...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 à l'issue duquel l'administration lui a notifié des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux au titre des années 2010 et 2011 pour un montant total de 167 841 euros. M. E... relève appel du jugement en date du 6 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à être déchargé de ces cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux.

Sur les revenus distribués :

2. Aux termes de l'article 109-1 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ". Les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus et ne sont alors imposables que dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

3. Il résulte de l'instruction qu'à l'occasion des opérations de vérification, l'agent vérificateur a constaté que des fonds ont été inscrits au crédit des comptes courants d'associé de M. E... au sein de la SARL Rima Meulbes, de la SARL Holdon, de l'EURL ORM Investissement, de la SARL Bordeaux Diffusion, de la SARL 21 Palais Gallien et de la société Times Café Chartrons. Estimant les réponses apportées aux demandes d'explication et de justifications des 6 février et 6 mars 2013 insuffisantes, les sommes concernées ont été considérées par l'administration comme des revenus distribués dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en application des dispositions précitées du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts au titre des années 2010 et 2011. Suite aux observations formulées le 19 septembre 2013, ces rectifications ont été partiellement maintenues par courrier n° 3926 du 25 septembre 2013, à hauteur de 65 507 euros au titre de l'année 2010 et de 38 992 euros au titre de l'année 2011.

4. M. E..., qui ne conteste pas avoir appréhendé ces sommes, soutient qu'une partie de ces inscriptions correspond, à hauteur de 94 965,42 euros, à des remboursements de frais qu'il aurait exposés au bénéfice des sociétés concernées. Toutefois, d'une part, une partie des pièces produites, à savoir les tickets de caisse de restaurants, de supermarchés, des reçus autoroutiers, des factures de taxi, de prestataires de téléphonie et d'hôtel justifient seulement de ce que des sommes ont été exposées par M. E... sans établir qu'elles l'ont été dans l'intérêt d'une des sociétés concernées ou de ce qu'une facture a été émise au nom d'une de ces sociétés sans établir que M. E... en aurait assuré le paiement. D'autre part, la production de chèques établis par M. F... E... au bénéfice d'une de ces sociétés n'est pas de nature à démontrer que l'inscription de crédits de même montant sur le compte courant de M. A... E... ne constitue pas un revenu distribué. Dès lors, c'est à bon droit que le service a imposé l'ensemble des sommes en litige dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts.

Sur les revenus d'origine indéterminée :

5. Aux termes de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales : " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. / Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite ". Aux termes de l'article L. 69 du même livre : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ".

6. Si l'administration ne peut régulièrement taxer d'office, en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle sait qu'elles relèvent d'une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d'office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l'envoi de la demande de justifications fondée sur l'article L. 16 du même livre et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue. Il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus. Dans cette dernière situation, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l'imposition d'office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d'office et les bases résultant de l'application des règles d'assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause.

7. Lors de l'examen de la situation fiscale personnelle de M. E..., l'administration a constaté sur les comptes bancaires de l'intéressé la remise de nombreux chèques et virements en provenance de tiers pour un total de 183 116,21 euros en 2010 et 144 370,34 euros en 2011. Ayant estimé que les réponses fournies par M. E... à la demande d'éclaircissements et de justification qui lui a été adressée le 6 février 2013 ne permettaient pas de justifier de l'origine des sommes ainsi créditées sur son compte, l'administration a taxé d'office lesdites sommes à l'impôt sur le revenu en tant que revenus d'origine indéterminée. Suite aux justifications apportées par M. E... dans sa réponse à la proposition de rectification, les sommes de 139 415 euros pour 2010 et de 97 791 euros pour 2011 ont été imposées d'office en tant que revenus d'origine indéterminée.

8. M. E... qui se contente de produire la copie de chèques établis par des tiers pour justifier des crédits bancaires des sommes de 30 062,50 euros, 17 713,63 euros, 10 000 euros, 9 282 euros et 5 000 euros relevés par l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe que ces paiements correspondraient à des remboursements de frais préalablement engagés par ses soins pour le compte d'une des sociétés dont il est l'associé ou ne constituent pas des revenus imposables.

9. De même la production du document non signé intitulé " acte de cession de créance " daté du 1er septembre 2012 ne permet pas de justifier de l'origine des virements de 2 000 euros et de 30 000 euros opérés les 12 octobre et 13 décembre 2011. La production d'un document intitulé " reconnaissance de dette " daté du 6 novembre 2011 par lequel M. C... reconnait que le requérant lui a consenti un prêt d'un montant de 3 500 euros ne permet pas d'établir que le virement de 3 500 euros opéré sur le compte de M. E... le 6 décembre 2011 serait intervenu pour solder cette dette.

10. En revanche, la production d'un chèque d'un montant de 13 982 euros émis par le Trésor public le 28 juillet 2010 permet à M. E... de justifier de l'origine des crédits provenant de l'encaissement d'un chèque du même montant le 31 août 2010 et du caractère non imposable de cette somme. De même, il ressort d'un relevé de compte produit par le requérant que, le 24 mai 2010, l'établissement de la BNP Paribas hébergeant un de ses comptes a constaté l'impossibilité d'obtenir le paiement du chèque d'une valeur de 2 000 euros remis le 12 mai 2010. C'est donc à tort que l'administration a regardé ces sommes comme constituant pour M. E... des revenus d'origine indéterminée. Il y a donc lieu de réduire d'une somme de 15 982 euros la base de l'impôt sur le revenu assigné au requérant au titre de l'année 2010.

11. Il résulte de ce qui précède que M. E... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la réduction des impositions se rapportant à l'encaissement d'une somme de 15 982 euros.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés par M. E... et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu assigné à M. E... au titre de l'année 2010 est réduite de la somme totale de 15 982 euros.

Article 2 : M. E... est déchargé des droits et des pénalités correspondant à cette réduction de la base d'imposition.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 juillet 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. E... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. E... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme D... B..., présidente,

M. Nicolas Normand, premier conseiller,

M. H... G..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2020.

La présidente,

Evelyne B...

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 18BX03208


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03208
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances - Taxes foncières - Taxe foncière sur les propriétés bâties.

Contributions et taxes - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances - Taxes foncières - Taxe foncière sur les propriétés bâties.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS QUESNEL ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-17;18bx03208 ?
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