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08/12/2020 | FRANCE | N°18BX04101

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 08 décembre 2020, 18BX04101


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler la délibération n° 18-41 en date du 22 juin 2018 par laquelle le conseil municipal de Saint Georges de l'Oyapock a remis en question la cession relative à la parcelle AD 17 d'une surface de 2 868 m², au profit de M. B....

Par une ordonnance n° 1801050 du 4 octobre 2018, le président du tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 novembre 2

018 et des mémoires enregistrés les 28 février 2020 et 10 juillet 2020, M. B..., représenté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler la délibération n° 18-41 en date du 22 juin 2018 par laquelle le conseil municipal de Saint Georges de l'Oyapock a remis en question la cession relative à la parcelle AD 17 d'une surface de 2 868 m², au profit de M. B....

Par une ordonnance n° 1801050 du 4 octobre 2018, le président du tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 novembre 2018 et des mémoires enregistrés les 28 février 2020 et 10 juillet 2020, M. B..., représenté par Me I..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président du tribunal administratif de la Guyane du 4 octobre 2018 ;

2°) d'annuler la délibération n° 18-41 en date du 22 juin 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint Georges de l'Oyapock une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance par laquelle le président du tribunal administratif de la Guyane a rejeté comme irrecevable sa demande au motif, qu'en dépit de la demande de régularisation qui lui a été adressée le 23 août 2018, il n'a produit qu'une partie de la décision attaquée est irrégulière car il a produit l'entièreté de la délibération attaquée n° 18-41 du 22 juin 2018 à l'appui de sa demande ;

- il a intérêt à agir et sa demande a été introduite dans le délai contentieux de deux mois courant à compter de la date d'affichage de la délibération litigieuse ;

- la délibération est insuffisamment motivée dès lors notamment que ni le rapport du maire n° 2018/06-10 auquel il est fait référence dans la délibération litigieuse, ni l'avis du conseil municipal également cité, n'ont été annexés à la délibération litigieuse ;

- la délibération attaquée qui retire la décision créatrice de droit par laquelle le conseil municipal a décidé le 27 mai 2011 de lui vendre la parcelle, sans aucune condition, méconnaît les dispositions de l'article L. 241-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la délibération du 27 mai 2011 est créatrice de droit puisqu'il a notamment honoré les versements auprès du notaire ;

- c'est à tort que la commune prétend qu'il n'a pas régularisé la cession dans un délai raisonnable et s'empare de ce motif pour annuler la délibération ayant approuvé la cession litigieuse ;

- il appartenait à la commune de l'informer de sa volonté de prendre une délibération dans le but d'annuler ladite cession ;

- il est victime d'un détournement de pouvoir ;

- la propriété du bien litigieux par le mécanisme de la prescription acquisitive trentenaire lui est acquise.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 janvier 2020 et 31 mars 2020, la commune de Saint Georges de l'Oyapock, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande à ce que soit mis à la charge de M. B... une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 18 septembre 2020, la clôture d'instruction a été reportée en dernier lieu au 5 octobre 2020 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... F...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me H..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération en date du 27 mai 2011, le conseil municipal de la commune de Saint Georges de l'Oyapock a approuvé la demande de cession d'une parcelle communale d'un terrain à détacher de la section AD 17, d'une surface de 2 868 m², au profit de Monsieur G... B..., moyennant le prix d'un euro le m². Ce dernier relève appel de l'ordonnance du 4 octobre 2018 par laquelle le président du tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération n° 18-41 en date du 22 juin 2018 du conseil municipal de Saint Georges de l'Oyapock qui a " approuvé l'annulation " de la cession intervenue à son profit de la parcelle AD 17 d'une surface de 2 868 m².

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; (...). Aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. / (...) / La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. La demande de régularisation tient lieu de l'information prévue à l'article R. 611-7 ".

3. Aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué ou, dans le cas mentionné à l'article R 412-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. / Cet acte ou cette pièce doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagné d'une copie. ".

4. Le président du tribunal administratif de la Guyane a rejeté comme irrecevable la demande de M. B... enregistrée au greffe du tribunal le 22 août 2018, au motif qu'en dépit de la demande de régularisation qui lui a été adressée le 23 août 2018, celui-ci n'a produit qu'une partie de la décision attaquée. Toutefois, il ressort de l'examen de la demande de première instance que M. B... avait produit, en pièce jointe, l'entièreté de la délibération attaquée n° 18-41 en date du 22 juin 2018. Par suite, c'est à tort que le président du tribunal a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi. L'ordonnance du 4 octobre 2018 est donc irrégulière et doit, dès lors, être annulée. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de la Guyane.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Aux termes de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : (...) 7° De passer dans les mêmes formes les actes de vente, échange, partage, acceptation de dons ou legs, acquisition, transaction, lorsque ces actes ont été autorisés conformément aux dispositions du présent code ". Aux termes de l'article 1583 du code civil, la vente " est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée, ni le prix payé ". Enfin, aux termes de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. ".

6. Il ressort des termes mêmes de la délibération du 27 mai 2011 que le conseil municipal de Saint Georges de l'Oyapock s'est prononcé favorablement sur l'offre de M. B... tendant à lui acheter une parcelle pour un prix d'un euro le m², sans subordonner cet accord à aucune condition. Les parties ayant ainsi marqué leur accord sur l'objet de la vente et sur le prix auquel elle devait s'effectuer, la délibération du 27 mai 2011 a clairement eu pour effet, en application des dispositions de l'article 1583 du code civil, de parfaire la vente et de transférer à M. B... la propriété de cette parcelle. Le seul fait que M. B... n'a pas honoré la totalité des engagements financiers qui lui incombaient en conséquence de la délibération précitée n'a pu le priver de cette propriété.

7. Dans ces conditions et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, le conseil municipal de la commune de Saint Georges de l'Oyapock ne pouvait légalement, à la date à laquelle il a statué par sa délibération du 22 juin 2018, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration, retirer ou abroger la délibération créatrice de droit du 27 mai 2011 par laquelle il avait exprimé son accord sur la demande d'acquisition de la parcelle litigieuse formée par M. B....

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que la délibération n° 18-41 en date du 22 juin 2018 par laquelle le conseil municipal de Saint Georges de l'Oyapock a remis en question la cession relative à la parcelle AD 17 doit être annulée.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B... qui n'est pas la partie perdante quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint Georges de l'Oyapock une somme d'argent à verser à M. B... en application de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1801050 du président du tribunal administratif de la Guyane du 4 octobre 2018 est annulée.

Article 2 : La délibération du 22 juin 2018 du conseil municipal de Saint Georges de l'Oyapock, annulant la délibération du 27 mai 2011 autorisant la vente d'une parcelle à M. B..., est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... B... et à la commune de Saint Georges de l'Oyapock.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme D... C..., présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. E... F... premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 08 décembre 2020.

La présidente,

Evelyne C...

La République mande et ordonne au préfet de la Guyane, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX04101


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04101
Date de la décision : 08/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Domaine - Domaine privé - Régime - Aliénation.

Procédure - Voies de recours - Appel - Effet dévolutif et évocation - Évocation.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SCP DELAVALLADE - GELIBERT - DELAVOYE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-08;18bx04101 ?
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