Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... I... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du 30 octobre 2018 par laquelle le préfet de la Guadeloupe lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1801117 du 16 avril 2019, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, respectivement enregistrés le 5 juillet 2019 et le 4 janvier 2020, M. I..., représenté par Me G..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 16 avril 2019 ;
2°) d'annuler la décision du préfet de la Guadeloupe du 30 octobre 2018 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le préfet de la Guadeloupe lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a assigné à résidence dans le département de la Guadeloupe ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe de lui délivrer un titre de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'incompétence de son auteur ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière : le préfet aurait dû saisir le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- cette décision méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation : son état de santé nécessite une prise en charge médical dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et il ne pourra pas bénéficier des soins requis en Haïti ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation : il est présent en France depuis 2013 où il a tissé des liens privés et familiaux ; il travaille et est bien intégré ; il n'a conservé aucun lien familial avec son pays d'origine ;
Par un mémoire en défense enregistré le 27 février 2020, le préfet de la Guadeloupe conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par un courrier en date du 2 mars 2020, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions, nouvelles en appel, dirigées contre l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 26 avril 2019.
Par un mémoire enregistré le 10 mars 2020, M. I..., représenté par Me G... déclare se désister purement et simplement des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 26 avril 2019 et maintenir le surplus de ses conclusions.
Par un mémoire complémentaire enregistré le 13 mars 2020, M. I..., représenté par Me G... conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens.
Par ordonnance du 17 mars 2020 l'instruction de l'affaire a été rouverte et la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 17 avril 2020 à 12h00.
M. I... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 octobre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. F... E..., a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. I..., ressortissant haïtien né le 5 octobre 1985, est, selon ses déclarations, entré irrégulièrement en France le 30 septembre 2013 et y a sollicité le bénéfice de l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 25 mars 2014, définitivement confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 22 avril 2016. A la suite de son interpellation par les services de la police aux frontières pour séjour irrégulier, le préfet de la Guadeloupe, par un arrêté du 11 juillet 2016 dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 24 novembre 2016, devenu définitif, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. I... n'a pas exécuté cette mesure d'éloignement et a sollicité, le 10 avril 2017, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 22 février 2017, il s'est vu délivrer une autorisation provisoire de séjour valable jusqu'au 21 août 2017 et dont il a sollicité le renouvellement le 23 août 2017. Par une décision du 30 octobre 2018, le préfet de la Guadeloupe a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. I... relève appel du jugement du 16 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 avril 2019 :
2. Dans sa requête et dans son mémoire du 4 janvier 2020, M. I... avait également demandé l'annulation de l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le préfet de la Guadeloupe lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a assigné à résidence dans le département de la Guadeloupe. Toutefois, dans son mémoire enregistré le 10 mars 2020, l'intéressé a déclaré se désister de ces conclusions. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 30 octobre 2018 :
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. H... A..., sous-préfet de l'arrondissement de Pointe-à-Pitre et signataire de la décision attaquée a reçu, par un arrêté du préfet de la Guadeloupe du 28 mai 2018 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 29 mai 2018, délégation à l'effet de signer, notamment, les décisions et correspondances en matière d'entrée et de séjour des étrangers.
4. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée qu'elle mentionne que M. I... a sollicité son admission au séjour en 2017 et qu'il a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour dans le cadre de la procédure " étranger malade " prévue par l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette décision fait également état de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 3 avril 2018 concernant l'état de santé de l'intéressé et précise que ce dernier ne peut justifier de liens personnels et familiaux sur le territoire français et qu'il n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La décision attaquée comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée.
5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le collège de médecins de l'OFII a rendu un avis concernant l'état de santé de M. I... le 3 avril 2018. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière doit être écarté.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) ; / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...). ".
7. Il ressort des pièces du dossier que, pour prendre la décision attaquée, le préfet de la Guadeloupe s'est notamment fondé sur l'avis du collège de médecins de l'OFII du 3 avril 2018 selon lequel l'état de santé de M. I... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Aucune des pièces du dossier ne permet de remettre en cause les conclusions de cet avis. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que celui tiré de l'erreur d'appréciation doivent être écartés.
8. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) ; / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). ".
9. Il ressort des pièces du dossier que si M. I... est présent en France depuis son entrée sur le territoire le 30 septembre 2013, il n'a été admis à y séjourner que le temps de l'examen de sa demande d'asile, définitivement rejetée par une décision de la cour nationale du droit d'asile du 22 avril 2016, puis pour des motifs liés à son état de santé du 22 février 2017 au 23 août 2017. En outre, il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 11 juillet 2016 dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 24 novembre 2016, devenu définitif. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ferait l'objet d'une intégration particulière dans la société française, ni qu'il y aurait tissé des liens personnels et familiaux d'une particulière intensité. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que M. I..., qui est célibataire et sans enfant, serait dépourvu de toute attaches personnelles ou familiales en Haïti, pays dont il a la nationalité, où il a vécu jusqu'à l'âge de 28 ans et où résident sa mère, son frère et l'une de ses soeurs. Dans ces circonstances, la décision attaquée n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée par rapports aux buts en vue desquels elle a été prise, ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. I... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 octobre 2018 par laquelle le préfet de la Guadeloupe lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par voie de conséquences, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction ainsi que celles relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions de M. I... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 26 avril 2019.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. I... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... I... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée pour information au préfet de la Guadeloupe.
Délibéré après l'audience du 6 octobre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme D... C..., présidente,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. F... E..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.
Le rapporteur,
Stéphane E... La présidente,
Mme D... C...
Le greffier,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX02531