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20/10/2020 | FRANCE | N°18BX01203

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 20 octobre 2020, 18BX01203


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... H... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2015 par lequel le maire de la commune de Rodez a autorisé la société Orange à installer une antenne de relais de téléphonie sur un immeuble situé sur le territoire de la commune 25 rue Neuve.

Par un jugement n°s 1504368, 1505236, 1505323 du 30 janvier 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, respectivem

ent enregistrés le 29 mars 2018, le 25 avril 2019 et le 16 septembre 2020, M. H..., représenté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... H... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2015 par lequel le maire de la commune de Rodez a autorisé la société Orange à installer une antenne de relais de téléphonie sur un immeuble situé sur le territoire de la commune 25 rue Neuve.

Par un jugement n°s 1504368, 1505236, 1505323 du 30 janvier 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, respectivement enregistrés le 29 mars 2018, le 25 avril 2019 et le 16 septembre 2020, M. H..., représenté par Me A..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 30 janvier 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Rodez du 27 juillet 2015 ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Rodez et de la société Orange la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses requêtes n° 1504368 et n° 1505236 comme irrecevables sur le fondement de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme dès lors que l'arrêté du 27 juillet 2015 autorisant les travaux ne comportait pas la mention de l'obligation de notifier tout recours administratif ou contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire de l'autorisation ; en outre, l'affichage de l'autorisation n'a pas été constant pendant deux mois ni visible depuis la voie publique;

En ce qui concerne l'arrêté du 25 juillet 2015 :

- il est insuffisamment motivé ;

- cet arrêté est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière : l'avis de l'architecte des bâtiments de France est insuffisamment motivé ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions du 12° de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques : il ne reçoit plus les chaînes de télévisions depuis l'installation de l'antenne, ce qui démontre qu'au moins une catégorie d'appareils radioélectriques est impactée par les champs magnétiques ; en outre, le rapport du professeur Le Ruz a relevé des anomalies au sein de son immeuble de nature à provoquer des dysfonctionnements sur les appareils électriques, électroniques et de bureautiques ainsi que sur des appareils d'assistance médicale ;

- cet arrêté méconnaît la directive européenne 2004/108/CE ainsi que le décret n° 2006-1278 du 18 octobre 2006 : le rapport du professeur Le Ruz révèle que le niveau de 3 V/m était dépassé lors de son expertise en 2015 ; en outre, l'expertise réalisée après l'installation de l'antenne Orange a détecté une valeur de 7,8 V/m ; la société Orange doit veiller à ce que le niveau d'exposition du public aux champs électromagnétiques demeure inférieur aux normes et seuils en vigueur ainsi que le prévoit l'article 3 du décret n° 2002-775 ;

- il méconnaît le principe de précaution, les articles R. 111-2 et R. 111-15 du code de l'urbanisme et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation : la société Orange n'a pas pris en compte l'existence d'une antenne relais SFR sur le site d'installation et n'a ainsi procédé à aucune étude d'impact préalable quant à l'augmentation des champs magnétiques liés à la mise en service de la nouvelle antenne relais alors que le risque pour la santé est avéré ; la commune aurait dû refuser l'installation de l'antenne relais supplémentaire dès lors que les analyses du professeur Le Ruz démontrent que l'exposition aux ondes électromagnétiques sont dépassées dans son habitation ; la commune pouvait, à tout le moins, solliciter la simulation prévue par l'article L. 34-9-2 II C du code des postes et des communications électroniques ; en outre, il apporte un commencement de preuves scientifiques suffisant pour déclencher la mise en oeuvre du principe de précaution en raison du classement par l'OMS des hyperfréquences comme possiblement cancérigène.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 mars 2019, la société Orange, représentée par Me K..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. H... la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les requêtes n° 1504368 et 1505236 étaient irrecevables ainsi que l'a retenu le tribunal administratif ;

- l'arrêté attaqué n'a pas à être motivé ;

- l'avis de l'architecte des bâtiments de France n'a pas à être motivé ;

- l'appelant ne peut se fonder sur les constats du professeur Le Ruz qui n'est pas un expert impartial puisqu'il a été mandaté par le requérant ; M. H... a la possibilité de demander à l'Agence nationale des fréquences de faire effectuer des mesures de champs électromagnétiques à son domicile ; en outre, il n'est pas établi que les mesures effectuées par le professeur Le Ruz proviennent de l'antenne appartenant à la société Orange ;

- les mesures relevées sont bien en dessous des seuils limites d'exposition du public mentionnés par l'annexe I du décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 pris en application du 12° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications et relatif aux valeurs limites d'exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques ;

- le risque supposé pour la santé n'est pas suffisamment circonstancié de sorte que le maire ne pouvait agir au titre de ses pouvoirs de police générale dès lors que le refus d'autorisation n'aurait ainsi pas été justifié ; en outre, le seul fait que plusieurs antennes soient implantées sur le toit d'un même bâtiment ne présente pas de risque sanitaire et cette cohabitation est même encouragée par l'article D. 96-6-1 du code des postes et des communications électroniques lorsqu'elle est possible.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 septembre 2020, la commune de Rodez, représentée par Me I..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. H... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La commune fait valoir que la requête de M. H... n° 1505323 n'est pas recevable et que subsidiairement les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958 et son préambule ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code des postes et des communications électroniques ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 pris en application du 12° de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications et relatif aux valeurs limites d'exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques ;

- le décret n° 2006-1278 du 18 octobre 2006 relatif à la compatibilité électromagnétique des équipements électriques et électroniques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. J... D...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me E... représentant M. H... et les observations de Me G... représentant la commune de Rodez.

Considérant ce qui suit :

1. Le 3 juin 2015, la société Orange a déposé une déclaration de travaux portant sur l'implantation d'une antenne relais de téléphonie sur le toit d'un immeuble situé 25 rue Neuve à Rodez. Par un arrêté du 27 juillet 2015, le maire de la commune de Rodez a accordé l'autorisation sollicitée. Par trois requêtes enregistrées sous les n° 1504368, n° 1505236 et n° 1505323, M. H..., voisin du projet, a demandé, au tribunal administratif de Toulouse d'annuler cet arrêté. M. H... relève appel du jugement du 30 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date d'enregistrement des requêtes de première instance : " En cas de (...) de recours contentieux à l'encontre (...), d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...). / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt (...) du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. ". Aux termes de l'article R. 424-15 de ce code, dans sa version applicable au litige : " Mention (...) de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle (...) la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...). / Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. (...). ".

3. D'une part, il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'irrecevabilité tirée de l'absence d'accomplissement des formalités de notification prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne peut être opposée, en première instance, en appel ou en cassation, qu'à la condition, prévue au deuxième alinéa de l'article R. 424-15 du même code, que l'obligation de procéder à cette notification ait été mentionnée dans l'affichage du permis de construire. Il appartient au juge, s'il est saisi de moyens en ce sens, y compris pour la première fois en appel, de vérifier si l'obligation de notification posée par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme peut, au regard des conditions fixées par l'article R. 424-15 du même code, être opposée à la demande.

4. D'autre part, s'il incombe au bénéficiaire d'une décision de non opposition à déclaration préalable de justifier qu'il a bien rempli les formalités d'affichage prescrites par les dispositions précitées, le juge doit apprécier la continuité de l'affichage en examinant l'ensemble des pièces qui figurent au dossier qui lui est soumis.

5. Pour justifier que la société Orange avait accompli les formalités d'affichage prévues par les dispositions précitées, la commune de Rodez a versé aux dossiers un unique constat d'huissier établi le 13 août 2015 duquel il ressort que l'arrêté de non-opposition faisait l'objet d'un affichage sur un panneau mentionnant les modalités de l'obligation de notification des recours. M. H... conteste la continuité de cet affichage entre la fin du mois d'août 2015 et la fin du mois d'avril 2016 et produit des attestations qui corroborent ses allégations ainsi qu'un constat d'huissier établi le 27 avril 2016, date d'installation de l'antenne relais, duquel il ressort que la décision en cause ne faisait l'objet d'aucun affichage à cette date. La commune de Rodez et la société Orange ne produisent aucune pièce de nature à établir la régularité et la continuité de l'affichage et à contredire les éléments ainsi apportés par l'appelant. Dans ces circonstances, l'obligation de notification posée par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne pouvait être opposée aux demandes de M. H....

6. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté les requêtes n° 1504368 et n° 1505236 comme irrecevables. Son jugement en date du 30 janvier 2018 doit, dès lors, être annulé comme étant irrégulier dans cette mesure.

7. Il y a lieu pour la cour administrative d'appel de se prononcer immédiatement sur les conclusions de ces deux demandes par voie d'évocation et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions de la requête de M. H....

Sur les demandes n° 1504368 et n° 1505236 :

8. En premier lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public alors applicable : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (...). ". Aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Il en est de même lorsqu'elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d'urbanisme applicables. ".

9. Il ne résulte pas de ces dispositions que l'arrêté de non-opposition à déclaration de travaux, qui ne constitue pas une décision individuelle défavorable, doive être motivé sauf lorsqu'il comporte des prescriptions. En l'espèce, l'arrêté contesté ne comporte aucune prescription mais se borne à accorder l'autorisation sollicitée. Dès lors, M. H... ne peut utilement soutenir que l'arrêté en litige serait insuffisamment motivé.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Lorsque le projet est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques (...), le permis de construire, le permis d'aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 621-31 du code du patrimoine dès lors que la décision a fait l'objet de l'accord de l'architecte des Bâtiments de France. (...). ".

11. Il résulte de ces dispositions que la délivrance d'une décision de non-opposition à déclaration préalable est subordonnée, lorsque les travaux envisagés sont situés dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit, à l'accord de l'architecte des bâtiments de France. Par ailleurs, la régularité et le bien-fondé de l'avis de l'architecte des bâtiments de France peut être contesté à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision de non-opposition et présenté par une personne ayant un intérêt pour agir.

12. Il ressort des pièces du dossier que l'architecte des bâtiments de France a donné, le 29 juin 2015, son accord aux travaux faisant l'objet de la déclaration déposée par la société Orange le 3 juin 2015. Aucune disposition législative ou règlementaire n'impose que cet accord soit motivé. Par suite, M. H... ne peut utilement soutenir que l'arrêté attaqué serait intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière en raison de l'insuffisance de motivation de l'avis de l'architecte des bâtiments de France.

13. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications électroniques, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " 12° Exigences essentielles. / On entend par exigences essentielles les exigences nécessaires pour garantir dans l'intérêt général la santé et la sécurité des personnes, la compatibilité électromagnétique entre les équipements et installations de communications électroniques et, le cas échéant, une bonne utilisation du spectre des fréquences radioélectriques en évitant des interférences dommageables pour les tiers. Les exigences essentielles comportent également, dans les cas justifiés, la protection des réseaux et notamment des échanges d'informations de commande et de gestion qui y sont associés, l'interopérabilité des services et celle des équipements terminaux, la protection des données, la compatibilité des équipements terminaux et des équipements radioélectriques avec des dispositifs empêchant la fraude, assurant l'accès aux services d'urgence et facilitant leur utilisation par les personnes handicapées. / On entend par interopérabilité des équipements terminaux l'aptitude de ces équipements à fonctionner, d'une part, avec le réseau et, d'autre part, avec les autres équipements terminaux. ".

14. Le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 relatif aux valeurs limites d'exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques est intervenu pour l'application de ces dispositions et participe à la définition d'une police spéciale des communications électroniques confiée à l'Etat. Toutefois, le contrôle du respect de cette réglementation, relève de cette police spéciale des communications électroniques en application du code des postes des communications électroniques, et non de la réglementation de l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de la réglementation en vigueur relative à l'exposition aux ondes électromagnétiques doit être écarté comme inopérant.

15. En quatrième lieu et pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, les moyens tirés de ce que l'arrêté en litige méconnaîtrait les dispositions de l'article 3 du décret n° 2002-775 du 3 mai 2002, de l'annexe I de ce décret ainsi que les dispositions du décret n° 2006-1278 du 18 octobre 2006, à les supposer soulever, doivent être écartés comme inopérants.

16. En dernier lieu, il est énoncé à l'article 5 de la Charte de l'environnement, à laquelle le Préambule de la Constitution fait référence en vertu de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 que : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ". Ces dispositions s'imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leurs domaines de compétence respectifs. Au demeurant, l'article R. 111-15, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, prévoit que le permis de construire ou la décision prise sur la déclaration préalable de travaux doit respecter les préoccupations définies par l'article L. 110-1 du code de l'environnement qui se réfère au principe de précaution " selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable ". S'il appartient, dès lors, à l'autorité administrative compétente de prendre en compte le principe de précaution lorsqu'elle se prononce sur l'octroi d'une autorisation délivrée en application de la législation sur l'urbanisme, les dispositions de l'article 5 de la Charte de l'environnement ne permettent pas, indépendamment des procédures d'évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d'être mises en oeuvre par les autres autorités publiques dans leur domaine de compétence, de refuser légalement la délivrance d'une autorisation d'urbanisme en l'absence d'éléments circonstanciés faisant apparaître, en l'état des connaissances scientifiques, des risques, même incertains, de nature à justifier un tel refus.

17. En l'espèce, aucun élément circonstancié de nature à établir l'existence, en l'état des connaissances scientifiques, d'un risque pouvant résulter, pour le public, de son exposition aux champs électromagnétiques émis par les antennes relais de téléphonie mobile et justifiant que, indépendamment des procédures d'évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d'être mises en oeuvre par les autorités compétentes, le maire de la commune de Rodez s'oppose à la déclaration préalable faite par la société Orange, en application de la législation de l'urbanisme, en vue de l'installation de l'antenne-relais en cause, ne ressort des pièces du dossier, et notamment pas des mesures réalisées par un expert mandaté par M. H.... Par ailleurs, s'agissant spécifiquement du problème des cumuls d'ondes invoqués par l'appelant, il se limite à des mesures réalisées par l'expert mandaté par M. H.... Selon le rapport de cet expert, lesdites mesures ont été effectuées dans " l'esprit du décret n° 2002-775 du 3 mai 2012 " relatif aux valeurs limites d'exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunication ou par les installations radioélectriques, sans que soit explicitée la différence avec la lettre du texte. Toutefois, les mesures réalisées ne rendent compte que d'un niveau global d'émissions d'ondes mais ne tiennent pas compte de celles spécifiquement crées notamment par la télévision, la radio FM, les dispositifs Wifi ou les téléphones sans fil dont il est indiqué qu'ils sont importants. Enfin, si M. H... fait état d'une étude récente réalisée par une équipe de chercheurs indiens qui ferait apparaitre que l'exposition aux radiofréquences pourrait entrainer des dommages sur l'ADN des riverains exposés et fait valoir à cet égard qu'il connait des problèmes de santé liés à une mutation de gène constatée en 2017, cette circonstance n'est pas suffisamment étayée pour établir une causalité certaine avec l'installation en litige. Ainsi, il ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier que l'installation de l'antenne-relais en cause serait de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publiques. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du principe de précaution, de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et de l'article R. 111-15 de ce code ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

18. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que les requêtes n° 1504368 et n° 1505236 doivent être rejetées.

Sur le bien-fondé du jugement en tant qu'il statue sur la demande n° 1505323 :

19. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 8 à 17 du présent arrêt, les moyens identiques présentés en appel par M. H... à l'encontre du jugement en tant qu'il statue sur sa demande n° 1505323 doivent être écartés.

20. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. H... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2015 par lequel le maire de la commune de Rodez a autorisé la société Orange à installer une antenne de relais de téléphonie sur un immeuble situé sur le territoire de la commune 25 rue Neuve.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Orange et de la commune de Rodez, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. H... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur ce même fondement par la société Orange et la commune de Rodez.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 30 janvier 2018 en tant qu'il statue sur les demandes n° 1504368 et n° 1505236 de M. H... est annulé.

Article 2 : Les demandes n° 1504368 et n° 1505236 présentées par M. H... devant le tribunal administratif de Toulouse et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions de la société Orange et de la commune de Rodez tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et le surplus des conclusions des parties sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... H..., à la société Orange et au maire de la commune de Rodez.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme. C... B..., présidente,

M. J... D..., président-assesseur,

M. Nicolas Normand, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 20 octobre 2020.

Le rapporteur,

Dominique D...

La présidente,

Evelyne B...

Le greffier,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet de l'Aveyron, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 18BX01203 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01203
Date de la décision : 20/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : GENTILHOMME

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-20;18bx01203 ?
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