Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme E... F... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2016 par lequel le maire de Saint-Palais-sur-Mer ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme K... pour la modification des façades et des toitures d'un bâtiment situé 7 rue des Ramiers.
Par un jugement no 1700493 du 7 juin 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande et a infligé aux requérants une amende de 1 000 euros en application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 août 2018, le 30 septembre 2019 et le 28 novembre 2019, M. et Mme F..., représentés par Me C..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 7 juin 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2016 du maire de Saint-Palais-sur-Mer susmentionné ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Palais-sur-Mer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
Sur la régularité du jugement :
- en l'absence de communication du mémoire présenté par Mme K... le 13 juillet 2017, le contradictoire a été méconnu ;
Sur le bien-fondé du jugement :
- le maire était tenu de s'opposer à la déclaration de Mme K... dès lors que celle-ci n'avait pas déposé un dossier régularisant le changement de destination et l'ensemble des travaux antérieurement effectués sans autorisation alors que l'immeuble en cause avait une destination commerciale ;
- les travaux ont permis de créer sans autorisation une surface de plancher de 120 m2 et devaient donc faire l'objet d'une demande de permis de construire ;
- l'avis de l'architecte des bâtiments de France n'est pas motivé et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; dès lors que les travaux sont compris dans le périmètre d'une ZPPAUP cet avis est un avis conforme ;
- le dossier de déclaration de travaux méconnait les dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme dès lors qu'il présente des éléments relatifs à l'existant non conformes à la réalité et ne présente pas de photographie des constructions avoisinantes.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 27 mai 2019 et le 4 novembre 2019, Mme K..., représentée par Me I..., conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué, et à la condamnation des requérants à lui verser une somme de 5 000 euros en application de l'article " L. 741-12 " du code de justice administrative à titre de " dommages-intérêts " et de 5000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir ;
- aucun des moyens de la requête n'est fondé ;
- étant victime de l'acharnement procédural de M. et Mme F..., elle peut légitimement demander à la cour de les condamner à lui verser des dommages-intérêts de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 741-12 du code de justice administrative.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2019, le maire de la commune de Saint-Palais-sur-Mer, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué et à la condamnation des requérants à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir ;
- aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code du patrimoine ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme G... H...,
- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,
- et les observations de Me J..., représentant M. et Mme F..., requérants.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme F... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2016 par lequel le maire de Saint-Palais-sur-Mer ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par Mme K... en octobre 2016 pour la modification des façades et des toitures d'un bâtiment situé 7 rue des Ramiers. Par un jugement du 7 juin 2018 le tribunal a rejeté leur demande et leur a infligé en application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, une amende de 1 000 euros pour recours abusif. M. et Mme F... relèvent appel de ce jugement. Mme K... conclut au rejet de leur demande et aux fins que la cour les condamne à lui verser des dommages-intérêts de 5 000 euros pour recours abusif.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier et notamment de la consultation du fichier du greffe du tribunal administratif de Poitiers que l'unique mémoire présenté par Mme K... et enregistré au greffe du tribunal le 13 juillet 2017 n'a pas été communiqué. Toutefois, d'une part, le mémoire en défense produit par la commune de Saint-Palais-sur-Mer a été communiqué aux parties et d'autre part, le jugement attaqué ne se fonde pas, pour rejeter la requête des époux F..., sur les éléments de ce mémoire produit par Mme K..., lequel en outre, n'appelait pas de discussion de la part de la commune de Saint-Palais-sur-Mer. Ainsi, il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, l'absence de communication du premier mémoire de l'un des défendeurs n'a pu préjudicier aux droits des parties. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour ce motif doit être écarté.
Sur la légalité de l'arrêté de non opposition à déclaration :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 632-1 du code du patrimoine alors applicable : " Dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable, sont soumis à une autorisation préalable les travaux susceptibles de modifier l'état des parties extérieures des immeubles bâtis, y compris du second oeuvre, ou des immeubles non bâtis. (...) ". Aux termes de l'article L. 632-2 du même code : " I.- Le permis de construire, le permis de démolir, le permis d'aménager, l'absence d'opposition à déclaration préalable ou (...) tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 632-1 du présent code si l'architecte des Bâtiments de France a donné son accord, le cas échéant assorti de prescriptions motivées. A ce titre, il s'assure du respect de l'intérêt public attaché au patrimoine, à l'architecture, au paysage naturel ou urbain, à la qualité des constructions et à leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant. Il s'assure, le cas échéant, du respect des règles du plan de sauvegarde et de mise en valeur ou du plan de valorisation de l'architecture et du patrimoine. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque le projet est situé dans (...) une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, le permis de construire, le permis d'aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 642-6 du code du patrimoine dès lors que cette décision a fait l'objet de l'accord, selon les cas prévus par cet article, de l'architecte des Bâtiments de France, du préfet de région ou du ministre chargé des monuments historiques et des espaces protégés ". Il résulte de ces dispositions combinées qu'un projet de construction situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable, anciennement nommé zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, ne peut être autorisé qu'après avoir recueilli l'accord de l'architecte des bâtiments de France.
4. Il ressort de l'avis rendu le 18 novembre 2016 par l'architecte des bâtiments de France, consulté dans le cadre de l'instruction de la déclaration préalable de travaux déposée en octobre 2016 par Mme K..., qu'il rappelle les textes applicables et indique qu'après examen, il donne son accord sur le projet sans l'assortir de prescriptions ainsi qu'il lui est loisible de le faire. En l'absence de dispositions l'obligeant à motiver son accord, la circonstance que l'architecte des bâtiments de France, qui au demeurant, par un précédent avis du 28 mai 2013, indiquait les raisons de son accord sur le même projet, ne précise pas, en l'espèce, en quoi le projet est conforme à la règlementation en vigueur, n'entache pas son avis d'illégalité.
5. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier, en l'absence de toute précision des requérants au soutien de leur moyen, que cet avis serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. Par suite le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige serait illégal en raison de l'illégalité de l'avis de l'architecte des bâtiments de France doit être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants (...) ". Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, uniquement applicable aux dossiers de demande de permis de construire est en l'espèce inopérant dès lors qu'ainsi qu'il sera dit ci-après, le projet litigieux n'est pas au nombre de ceux soumis à permis de construire.
8. En troisième lieu, les requérants persistent à soutenir en appel que les travaux envisagés par Mme K... ne pouvaient être autorisés sans demande de permis de construire comportant autorisation de changement de destination de l'immeuble dès lors que selon eux, l'immeuble était à l'origine à destination commerciale. Toutefois, ainsi que l'a indiqué le tribunal, d'une part, il est constant que lorsque, par un acte notarié du 31 octobre 1974, M. et Mme D..., auteurs de Mme K..., ont acquis l'immeuble objet des travaux, celui-ci avait alors une destination d'habitation dès lors que l'acte désigne le bien comme un immeuble comportant un garage en rez-de-chaussée et une chambre et un grenier à l'étage. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier et notamment des témoignages produits, que l'activité d'autocars qui était exercée depuis les années 1950 sur le site a cessé avant 1970. D'autre part, à supposer même que cet immeuble fut antérieurement à cette date, pour partie à destination commerciale, les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, en vigueur avant le 1er janvier 1977, n'exigeaient pas l'obtention d'un permis de construire pour le changement de destination des immeubles en tant que tel. Dans ces conditions, en l'absence d'élément permettant d'estimer que le changement de destination de l'immeuble allégué serait postérieur au 1er janvier 1977 et en l'absence de précisions sur la nature et l'importance des travaux qui auraient été alors réalisés, il ne peut être considéré que ce changement aurait dû être précédé d'une demande de permis de construire.
9. En outre, si les requérants affirment qu'une surface de plancher de 120 m2 aurait été créée, sans l'obtention d'un permis de construire en méconnaissance de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme, ils n'apportent aucun élément à l'appui de leurs affirmations, en l'absence de précisions suffisantes notamment sur la réalité et la date des travaux qui auraient permis la création dans cet immeuble construit en 1922 de cette surface de plancher, alors au demeurant qu'il résulte de l'acte notarié de vente datant du 31 octobre 1974 qu'existait à l'étage une chambre et un grenier dont la surface n'est pas précisée. De même s'ils affirment que des travaux de modifications de la façade ont été réalisés sans permis de construire en méconnaissance du c) de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme, ils n'apportent pas davantage de précisions quant à la réalité et la date des travaux considérés.
10. Par suite, le moyen tiré de ce que Mme K... devait présenter une demande de permis de construire pour régularisation portant sur l'ensemble des modifications qui auraient été apportées à l'immeuble ne peut qu'être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-revoir opposée en défense, que M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Palais-sur-Mer qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme F... une somme de 800 euros à verser à la commune de Saint-Palais-sur-Mer et une somme de 800 euros à verser à Mme K... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur l'amende pour recours abusif demandée par Mme K... à titre de " dommage-intérêts " :
13. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application de ces dispositions à l'encontre de M. et Mme F... dont la requête ne présente pas un caractère abusif.
14. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel ".
15. En l'espèce, compte tenu des moyens soulevés, la contestation par les requérants de la déclaration de non opposition à travaux délivrée à Mme K... n'a pas excédé la défense de leurs intérêts légitimes. Par suite, à supposer que Mme K... ait entendu se prévaloir de ces dispositions, ses conclusions tendant à ce que les requérants lui versent des " dommages-intérêts " doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme F... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme F... verseront une somme de 800 euros à la commune de Saint-Palais-sur-Mer et une somme de 800 euros à Mme K... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme E... F..., à Mme B... K... et à la commune de Saint-Palais-sur-Mer.
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme G... H..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.
Le rapporteur,
Caroline H...
Le président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Virginie Marty
La République mande et ordonne au préfet de Charente-Maritime, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX03093