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08/10/2020 | FRANCE | N°20BX01711

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 08 octobre 2020, 20BX01711


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1901876 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mai 2020, Mme C..., rep

résentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 décembre 2019 ;

2°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2019 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1901876 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mai 2020, Mme C..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 décembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 16 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail dans l'attente ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 920 euros au titre de la première instance et 1 920 euros au titre de l'appel à verser à son conseil en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant du refus de séjour :

- la décision portant refus de séjour est entachée d'un vice de procédure dès lors que le préfet n'a pas saisi la commission du titre de séjour pour avis ;

- elle est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle apporte la preuve de l'absence de liens personnels et familiaux au Maroc ;

- elle méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;

- elle méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant du délai de départ volontaire :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- ce défaut de motivation révèle que le préfet n'a pas fait usage de son pouvoir d'appréciation et d'instruction ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant du pays de renvoi :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 juillet 2020, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 avril 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution et notamment son préambule ;

- le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et de l'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... A... a entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... C..., ressortissante marocaine née en 1981, est entrée en France en 2014 selon ses déclarations, de manière irrégulière. Par une demande du 13 novembre 2018, elle a sollicité son admission au séjour. Par un arrêté du 16 juillet 2019, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C... relève appel du jugement du 5 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

2. Si Mme C... justifie que ses parents et certains de ses frères, soeurs et cousins résident en France, les attestations peu circonstanciées des membres de sa famille qu'elle produit ne sont pas suffisantes pour tenir pour établi qu'elle serait dépourvue de toute attache au Maroc où elle a vécu pendant 33 ans, et ce, même en tenant compte de la circonstance qu'elle est désormais divorcée de son mari avec lequel elle vivait dans ce pays. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'erreur de fait qu'aurait commise le préfet sur ce point doit être écarté.

3. Aux termes de l'article L. 31311 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 3132 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Aux termes l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bienêtre économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... est entrée en France en 2014 selon ses déclarations, de manière irrégulière. Elle a fait l'objet d'une première mesure d'éloignement le 23 juin 2015, devenue définitive, à laquelle elle n'a pas déférée et s'est maintenue en situation irrégulière jusqu'à sa nouvelle demande d'admission au séjour le 13 novembre 2018. Si elle fait valoir que toute sa famille séjourne régulièrement en France, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit précédemment, que l'intéressée, qui est célibataire et sans charge de famille, soit dépourvue de tout lien dans son pays d'origine, dans lequel elle a vécu pendant 33 ans. La circonstance qu'elle est désormais divorcée de son mari avec lequel elle vivait au Maroc n'étant pas suffisante pour démontrer l'absence de liens qu'elle allègue. Par ailleurs, elle n'invoque aucune circonstance particulière faisant obstacle à ce qu'elle puisse rendre visite aux membres de sa famille qui résident en France ou à ce que ceux-ci puissent se rendre régulièrement au Maroc pour la voir. Dans ces conditions, la décision contestée ne peut être regardée comme portant au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus qui lui a été opposé. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, de l'article 23 du pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur sa situation personnelle, doivent être écartés.

5. Mme C... reprend en appel, sans critiquer les motifs retenus par le tribunal pour les écarter et sans apporter d'éléments de droit et de fait nouveau, les moyens tirés du défaut d'avis de la commission du titre de séjour et du défaut d'examen de sa situation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi.

7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaitrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'appelante doivent être écartés.

En ce qui concerne le délai de départ volontaire :

8. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant un délai de départ volontaire.

9. Mme C... reprend en appel, sans critiquer les motifs retenus par le tribunal pour les écarter et sans apporter d'élément de droit et de fait nouveau, les moyens tirés du défaut de motivation de la décision fixant un délai de départ volontaire, de la méconnaissance des dispositions de l'article 7-2 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 et de l'erreur manifeste d'appréciation. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

10. Mme C... ne peut utilement exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour pour soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait elle-même illégale.

11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, les moyens tirés de ce que la décision fixant le pays de renvoi méconnaitrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'appelante doivent être écartés.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme D... A..., président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2020.

Le président-rapporteur

Marianne A... Le président-assesseur,

Didier Salvi

Le greffier,

Stéphan Triquet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 20BX01711 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01711
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Marianne HARDY
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : OUANGARI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-08;20bx01711 ?
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