Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler, d'une part, la décision par laquelle le directeur de l'unité de formation et de recherche, doyen de la faculté de médecine de Toulouse-Purpan de l'université Toulouse III Paul Sabatier a refusé de valider le stage semestriel qu'elle a effectué de mai à octobre 2015 dans le service de neurochirurgie du centre hospitalier universitaire (CHU) de La Timone à Marseille et, d'autre part, la décision du 4 mai 2016 du président de l'université Toulouse III Paul Sabatier refusant de lui délivrer le diplôme d'études spécialisées (D.E.S) de neurochirurgie.
Par un jugement n° 1600790, 1602941 du 28 mars 2018, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 4 mai 2016 du président de l'université Toulouse III Paul Sabatier refusant de délivrer à Mme A... le diplôme d'études spécialisées de neurochirurgie et a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision refusant de valider le stage semestriel effectué dans le service de neurochirurgie du CHU de La Timone à Marseille.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mai et 3 août 2018, l'université Toulouse III Paul Sabatier, représentée par la SCP Potier de la Varde - Buk Lament - Robillot, demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 28 mars 2018 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 4 mai 2016 du président de l'université Toulouse III Paul Sabatier refusant de lui délivrer le diplôme d'études spécialisées (D.E.S) de neurochirurgie ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement n'est pas suffisamment motivé en violation de l'article L. 9 du code de justice administrative ;
- c'est à tort que les premiers juges ont retenu des faits remontant aux années 2010 et 2011, se sont abstenus d'établir en quoi les relations du professeur R. avec Mme A... en 2016 auraient été de nature à influencer l'appréciation portée par ce dernier et ont estimé que le professeur R. avait manqué à son devoir d'impartialité ; la décision refusant de délivrer le diplôme d'études spécialisées de neurochirurgie à Mme A... ne méconnait pas les dispositions des articles L. 632-4 et R. 632-23 à R. 632-25 du code de l'éducation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue de la procédure nationale de choix organisée au titre de l'année universitaire 2008-2009, Mme B... A... a été nommée par une décision du directeur régional des affaires sanitaires et sociales en qualité d'interne en médecine à compter du 3 novembre 2008 et affectée au centre hospitalier universitaire de Toulouse en spécialités chirurgicales. Dans le cadre de son troisième cycle d'études médicales, elle a été autorisée à s'inscrire au diplôme d'études spécialisées (D.E.S.) de neurochirurgie. Elle a effectué, de mai à octobre 2015, son douzième stage semestriel dans le service de neurochirurgie du centre hospitalier universitaire de La Timone à Marseille. Le chef du service de neurochirurgie a émis un avis défavorable à la validation de ce stage et le directeur de l'unité de formation et de recherche, doyen de la faculté de médecine Toulouse-Purpan de l'université Toulouse III Paul Sabatier, a refusé de valider ce stage. La commission interrégionale du sud-ouest a proposé, le 28 avril 2016, de ne pas délivrer à Mme A... C... D.E.S. de neurochirurgie. Par une décision du 4 mai 2016, le président de l'université Toulouse III Paul Sabatier a décidé de ne pas lui délivrer le diplôme. Par une demande enregistrée sous le n° 1600790, Mme A... a saisi le tribunal administratif de Toulouse de conclusions tendant à l'annulation de la décision refusant de valider le stage semestriel effectué au centre hospitalier universitaire de la Timone. Par une demande enregistrée sous le n° 1602941, elle a sollicité l'annulation de la décision du 4 mai 2016 refusant de lui délivrer le D.E.S de neurochirurgie. Le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande n° 1600790 et annulé la décision du 4 mai 2016. L'université Toulouse III Paul Sabatier relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé cette dernière décision et a mis à sa charge une somme de 1 500 euros à verser à Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif a, dans le point 13 de ce jugement, exposé les raisons pour lesquelles il estimait que l'état des relations entre l'enseignant coordinateur régional du D.E.S de neurochirurgie et Mme A... devait être regardé comme étant de nature à influer sur son appréciation quant à la délivrance du diplôme. Ces indications ont permis à Mme A... de comprendre et de contester utilement l'appréciation ainsi portée par les premiers juges. Par suite, contrairement à ce que soutient l'université, le jugement est suffisamment motivé. La circonstance que le tribunal se serait fondé sur des faits remontant aux années 2010 et 2011 sans prendre en compte des circonstances contemporaines à l'année 2016 relève du bien-fondé du jugement et non de sa régularité.
Sur la légalité de la décision du 4 mai 2016 :
4. Aux termes de l'article L. 632-4 du code de l'éducation : " Le diplôme d'Etat de docteur en médecine est conféré après soutenance avec succès d'une thèse de doctorat. / Après la validation du troisième cycle, un document est délivré au titulaire du diplôme, mentionnant la spécialité dans laquelle il est qualifié (...) ". Aux termes de l'article R. 632-23 du même code : " Le diplôme d'Etat de docteur en médecine ne peut être délivré qu'aux candidats ayant à la fois soutenu avec succès leur thèse et obtenu le diplôme d'études spécialisées mentionné à l'article R. 632-24, délivré par les universités habilitées à cet effet (...) ". Aux termes de l'article R. 632-24 du même code : " La validation du troisième cycle des études médicales est attestée par la délivrance d'un diplôme d'études spécialisées, mentionnant la qualification obtenue (...) ". Aux termes de l'article R. 632-25 du même code : " Dans chacune des interrégions, la coordination des enseignements et du contrôle des connaissances de chaque diplôme d'études spécialisées de médecine et de chaque diplôme d'études spécialisées complémentaires de médecine est assurée par : (...) 2° La commission interrégionale de coordination du diplôme. / a) Cette commission est présidée par un coordonnateur interrégional. (...) / b) La commission interrégionale de coordination du diplôme regroupe les coordonnateurs locaux, qui sont nommés dans chaque subdivision. Ils ont pour mission, avec l'assistance d'un département de formation créé en application de l'article L. 713-3 ou d'une commission particulière, de donner des avis au directeur de l'UFR sur le déroulement des études menant au diplôme concerné. Ils sont enseignants de la spécialité du diplôme d'études spécialisées ou du diplôme d'études spécialisées complémentaires concerné ". Aux termes de l'article 7 de l'arrêté du 22 septembre 2004 fixant la liste et la réglementation des diplômes d'études spécialisées complémentaires de médecine : " Conformément aux dispositions de l'article 23 du décret du 16 janvier 2004, la commission interrégionale de coordination regroupe les coordonnateurs locaux de la spécialité. / Ceux-ci sont nommés, pour une durée de trois ans renouvelable, par le ou les directeurs de la ou des unités de formation et de recherche de médecine de la subdivision, parmi les enseignants de la spécialité du diplôme concerné (...) ". L'article 22 de ce même arrêté dispose : " Dans chaque interrégion ou groupe d'interrégions, la commission interrégionale de coordination du diplôme concerné (...) propose la délivrance du diplôme d'études spécialisées complémentaires au terme du dernier stage ".
5. La seule circonstance qu'un membre d'un tel jury d'examen professionnel connaisse un candidat ne suffit pas à justifier qu'il s'abstienne de participer aux délibérations qui concernent ce candidat. En revanche, le respect du principe d'impartialité exige que s'abstienne de participer, de quelque manière que ce soit, aux interrogations et aux délibérations qui concernent un candidat un membre du jury qui aurait avec celui-ci des liens, tenant à la vie personnelle ou aux activités professionnelles, qui seraient de nature à influer sur son appréciation. En outre, un membre du jury qui a des raisons de penser que son impartialité pourrait être mise en doute ou qui estime, en conscience, ne pas pouvoir participer aux délibérations avec l'impartialité requise, peut également s'abstenir de prendre part aux interrogations et aux délibérations qui concernent un candidat. En dehors de ces hypothèses, il incombe aux membres des jurys d'examen de siéger dans les jurys auxquels ils ont été nommés en application de la réglementation applicable.
6. Il ressort des pièces du dossier que l'enseignant coordonnateur régional du D.E.S. de neurochirurgie pour la subdivision de Toulouse a émis un avis défavorable à l'inscription de Mme A... en D.E.S. de neurochirurgie, a fait état de sa difficulté à travailler avec elle, a demandé notamment au doyen de la faculté de médecine de Toulouse Purpan, dans un courrier du 10 janvier 2011, " d'intervenir rapidement (...) pour trouver (...) une solution pérenne pour Sabrina qui semble s'être engagée dans une voie extrêmement dommageable pour son futur ", a indiqué, dans un courrier du 22 juillet 2011, regretter que l'intéressée ait pu s'y inscrire et que l'agence régionale de santé ne s'y soit pas opposée, a mentionné, dans un courrier du 6 octobre 2011, qu' " après avoir fait l'objet d'attaques diffamatoires inouïes, écrites et verbales, encore tout récemment ", il ne pouvait plus continuer à assurer sa fonction de coordonnateur régional de neurochirurgie. En outre, contrairement à ce que soutient l'université, il ressort des pièces du dossier que Mme A... a déposé une main courante, le 29 septembre 2011, pour harcèlement à l'encontre de ce même enseignant coordonnateur régional. Si ces faits datent de 2011, ils révèlent l'existence de liens particuliers tenant aux activités professionnelles entre Mme A... et l'enseignant coordonnateur régional du D.E.S. de neurochirurgie pour la subdivision de Toulouse qui étaient de nature à influer sur l'appréciation que cet enseignant pouvait être amené à porter, en tant que membre de la commission, sur les mérites professionnels de Mme A.... Or, il ressort du document du 28 avril 2016, portant les noms et signatures des membres de la commission interrégionale, que le coordonnateur régional du D.E.S. de neurochirurgie pour la subdivision de Toulouse a participé à la commission et il n'est pas contesté qu'il a pris part à la délibération. Dans les circonstances de l'espèce et eu égard aux positions qu'il avait prises antérieurement, le coordonnateur régional du D.E.S de neurochirurgie ne pouvait participer à la délibération de la commission sans que soit méconnu le principe d'impartialité. A cet égard, l'université ne peut se prévaloir des motifs retenus par le Conseil d'Etat dans sa décision du 18 mars 2015, dès lors qu'il ne s'est pas prononcé sur ce point. Dans ces conditions, Mme A... était fondée à soutenir que la décision refusant de lui délivrer le D.E.S. de neurochirurgie avait méconnu le principe d'impartialité et était entachée d'illégalité.
7. Il résulte de tout ce qui précède que l'université Toulouse III Paul Sabatier n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 4 mai 2016 par laquelle le président de l'université a refusé de délivrer à Mme A... C... D.E.S. de neurochirurgie.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'appelante demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'université Toulouse III Paul Sabatier est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'université Toulouse III Paul Sabatier et à Mme B... A....
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 octobre 2020.
Le rapporteur,
Nathalie Gay-Sabourdy Le président,
Marianne Hardy
Le greffier,
Stéphan Triquet
La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX02162