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24/09/2020 | FRANCE | N°20BX01009

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 24 septembre 2020, 20BX01009


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1901055 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par

une requête, enregistrée le 18 mars 2020, Mme E... D..., représentée par Me A..., demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 1901055 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 mars 2020, Mme E... D..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 12 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai, ainsi que la décision portant rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté litigieux est entaché d'un vice d'incompétence ;

- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français méconnaissent l'article L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions litigieuses méconnaissent l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a entaché ses décisions d'une erreur manifeste dans son appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juin 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme E... D... ne sont pas fondés.

Mme E... D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... D..., ressortissante vénézuélienne née le 27 septembre 1990, est entrée en France le 2 novembre 2016. Elle a demandé, le 7 mars 2017, la délivrance d'un titre de séjour temporaire. Mme E... D... relève appel du jugement du 12 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 29 novembre 2018, portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai.

2. En premier lieu, l'appelante se borne à reprendre en appel le moyen tiré du vice d'incompétence entachant l'arrêté litigieux du 29 novembre 2018, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ce moyen.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne (...) a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; 3° S'il est inscrit dans un établissement fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur pour y suivre à titre principal des études ou, dans ce cadre, une formation professionnelle, et garantit disposer d'une assurance maladie ainsi que de ressources suffisantes pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 5° afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; / 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; / 5° S'il est le conjoint ou un enfant à charge accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées au 3. ". L'article L. 121 3 du même code énonce que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de famille visé aux 4° ou 5° de l'article L. 121 1 selon la situation de la personne qu'il accompagne ou rejoint, ressortissant d'un État tiers, a le droit de séjourner sur l'ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois. / S'il est âgé de plus de dix-huit ans ou d'au moins seize ans lorsqu'il veut exercer une activité professionnelle, il doit être muni d'une carte de séjour. (...) ".

4. Si Mme E... D... soutient qu'elle est venue retrouver son père, ressortissant portugais qui réside en France et qui a déclaré la reconnaître pour sa fille devant un officier de l'état civil à la mairie de Cézac (Gironde) le 27 janvier 2017, il ressort des pièces du dossier que l'appelante était âgée de plus de vingt-et-un ans à la date de dépôt de sa demande de titre de séjour et ne saurait être regardée comme étant effectivement à la charge de son père au sens des dispositions précitées au seul motif qu'elle serait hébergée au domicile de ce dernier depuis son arrivée en France. Au demeurant, l'appelante ne peut être regardée comme une citoyenne de l'Union européenne et ne peut en outre utilement se prévaloir de l'acte de reconnaissance enregistré par les autorités vénézuéliennes le 17 décembre 2018, soit postérieurement à la date de l'arrêté litigieux. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme E... D..., qui est entrée récemment en France à l'âge de 26 ans, est célibataire, sans charge d'enfant. Si elle fait valoir que son père réside en France et que ses demi-frères ont la nationalité française, elle n'est pas dépourvue de toute attache familiale au Venezuela où résident sa mère, son frère et sa soeur et où elle a vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de la décision de refus de séjour litigieuse, alors même qu'elle fait preuve d'une volonté d'intégration notamment par l'apprentissage de la langue française. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, soulevés au soutien des conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour, doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, soulevé à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.

7. En quatrième lieu, Mme E... D... se borne à reprendre en appel les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste commise par le préfet dans son appréciation des conséquences des décisions litigieuses sur sa situation personnelle, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... E... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 27 août 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. C... B..., président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2020.

Le rapporteur,

Didier B...

Le président,

Marianne HardyLe greffier,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 20BX01009


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01009
Date de la décision : 24/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : DUTEN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-09-24;20bx01009 ?
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