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03/09/2020 | FRANCE | N°19BX01142

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 03 septembre 2020, 19BX01142


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Impact 33990, Mme AT... BB..., M. et Mme C... et BO... BF..., Mme Brigitte AL..., Mme AF... K..., M. AG... G..., M. et Mme BG... et Cathy S..., M. et Mme X... et BU... M..., M. et Mme D... et Liliane AS..., M. A... AK..., M. et Mme B... et BT... N..., M. et Mme AN... et BV... L..., M. O... Y..., Mme AE... Q..., M. et Mme W... et BW... BE..., M. et Mme E... et BS... AC..., M. I... F..., M. AU... AI..., Mme V... AM..., M. et Mme A... et BR... AB..., M. BI... P..., M. AJ... BC..., Mme AW... AG..., M. et

Mme AH... et BP... AX..., M. BL... R..., M. B... T..., M. et M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Impact 33990, Mme AT... BB..., M. et Mme C... et BO... BF..., Mme Brigitte AL..., Mme AF... K..., M. AG... G..., M. et Mme BG... et Cathy S..., M. et Mme X... et BU... M..., M. et Mme D... et Liliane AS..., M. A... AK..., M. et Mme B... et BT... N..., M. et Mme AN... et BV... L..., M. O... Y..., Mme AE... Q..., M. et Mme W... et BW... BE..., M. et Mme E... et BS... AC..., M. I... F..., M. AU... AI..., Mme V... AM..., M. et Mme A... et BR... AB..., M. BI... P..., M. AJ... BC..., Mme AW... AG..., M. et Mme AH... et BP... AX..., M. BL... R..., M. B... T..., M. et Mme AZ...-W... et BQ... BA..., Mme AR... AV..., Mme BJ... AP..., M. U... H..., M. AZ...-BM... BA... et Mme BK... AY..., ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 mai 2013 par lequel le préfet de la Gironde a autorisé la société Ener-Biomasse à exploiter une unité de fabrication de granulés de bois de chauffage sur le territoire de la commune d'Hourtin.

Par un jugement n° 1400886 du 14 janvier 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 16BX00880 du 3 mai 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur appels des demandeurs de première instance, a annulé ce jugement et l'arrêté du 29 mai 2013.

Par une décision n° 421935, 422000 du 25 mars 2019, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi de pourvois présentés par la société Ener-Biomasse et par le ministre de la transition écologique et solidaire, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 3 mai 2018 et a renvoyé l'affaire à la cour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 mars 2016, le 7 mai 2019 et le 27 mai 2020, l'association Impact 33990, Mme BB..., M. et Mme BF..., Mme AL..., Mme K..., M. G..., M. et Mme S..., M. et Mme M..., M. et Mme AS..., M. AK..., M. et Mme N..., M. et Mme L..., M. Y..., Mme Q..., M. et Mme BE..., M. et Mme AC..., M. F..., M. AI..., Mme AM..., M. et Mme AB..., M. P..., M. BC..., Mme AG..., M. et Mme AX..., M. R..., M. T..., M. et Mme BA..., Mme AV..., Mme AP..., M. H..., M. BA... et Mme AY..., ayant désigné M. Jean-Louis Combe, président de l'association Impact 33990 en tant que représentant unique, représentés par Me Z..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 14 janvier 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 mai 2013 par lequel le préfet de la Gironde a autorisé la société Ener-Biomasse à exploiter une unité de fabrication de granulés de bois de chauffage sur le territoire de la commune d'Hourtin ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal a dénaturé leur moyen tiré de l'insuffisance de l'information donnée aux habitants de la commune d'Hourtin sur l'ampleur réelle du projet soumis à l'enquête publique en l'analysant comme un moyen tiré de l'absence de réalisation des mesures de publicité prévues par l'article R. 123-11 du code de l'environnement ; le commissaire-enquêteur a relevé cette insuffisance ;

- les premiers juges ont commis une erreur d'interprétation des pièces produites en jugeant que les insuffisances alléguées du dossier de demande n'étaient pas établies ;

- l'information du public sur l'ampleur et les impacts du projet a été insuffisante, en violation des articles L. 110-1, L. 123-1 et L. 123-10 du code de l'environnement ; le préfet ne peut justifier cette insuffisance par le fait que le projet avait été antérieurement présenté au public en 2007 dès lors que le projet de 2007 était différent de celui autorisé ;

- 1'étude d'impact était insuffisante ; en effet, le préfet, en méconnaissance des articles R. 512-28 et L. 511-1 du code de l'environnement, n'a pas pris en compte les incidences du projet ;

- ces incidences concernent la pollution visuelle pour les habitants du lotissement voisin et l'impact grave pour la cohérence de l'ensemble paysager compte tenu du parti d'aménagement retenu par la commune dans la zone 1 NAY du plan d'occupation des sols ; les plantations mentionnées dans l'étude d'impact ne pourront pallier ces incidences ; l'étude d'impact n'envisage la perception de l'usine que depuis les voies de communication et ne traite pas de la présence d'une cheminée de 18 mètres de hauteur de laquelle s'échappera un panache de fumée, de nature à nuire à l'activité touristique ;

- les incidences du projet consistent également en une pollution sonore liée à la circulation des poids lourds acheminant les matières premières et les produits finis et au fonctionnement des engins et machines de l'usine qui a vocation à fonctionner sans interruption du lundi 6 h au samedi 6 h puis 24 h sur 24 et 7 jours sur 7 avec une activité de broyage qui sera nocturne ; ces nuisances ont été mises en exergue par l'agence régionale de santé qui a souligné l'insuffisance de l'étude d'impact sur ce point en l'absence d'étude acoustique ; un merlon de terre ne suffit pas à prévenir ces nuisances ;

- les incidences concernent aussi la qualité de l'air et aucune étude précise ne mesure cet impact ni n'atteste de l'absence de risques pour les riverains ;

- le projet aura également des effets sur la protection de la nature, de l'environnement et des paysages alors que le territoire communal comporte une réserve naturelle ; ces effets ne sont pas pris en compte dans l'étude d'impact ;

- les mesures de remise en état prévues sont insuffisantes en méconnaissance des articles R. 512-8 et L. 512-20 du code de l'environnement ; seules sont prévues des mesures lors de l'arrêt définitif de l'installation mais pas en cours d'exploitation, en cas d'incident ou d'accident et en cas de libération de terrains au sein du site ;

- le choix du lieu d'implantation du site est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 512-1 du code de l'environnement, compte tenu du caractère urbanisé de la zone concernée, du risque d'incendie lié à 1'usine elle-même et aux feux de forêts, le site étant entouré de zones boisées et la commune étant classée en zone rouge s'agissant de ce risque et des caractéristiques des zones 1 NAY et NC du plan d'occupation des sols ; le projet est en contradiction avec les prescriptions applicables à la zone 1 NAY autorisant l'implantation d'activités à la condition de ne pas compromettre l'urbanisation du reste de la zone et sous réserve de mesures pour assurer la protection du milieu ;

- les prescriptions prévues par l'arrêté contesté sont insuffisantes ; l'arrêté n'impose pas de réaliser une étude en vue de mesurer les rejets de fumées et poussières et leur impact pour la santé des riverains ; l'installation d'un merlon de terre ne suffit pas à prévenir les nuisances sonores ;

- les capacités techniques et financières de la société Ener-Biomasse sont insuffisantes au regard des articles L. 512-1 et R. 512-3 du code de l'environnement ; la société ne démontre pas ses capacités à assumer l'ensemble des obligations que lui impose la préservation des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ; elle ne dispose d'aucune référence dans le domaine de la biomasse ; elle ne donne des informations que sur son capital et non sur ses fonds propres, le montant et les modalités du prêt bancaire qu'elle a souscrit et les recettes attendues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 août 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 6 mai 2019 et le 15 janvier 2020, la société Ener-Biomasse, représentée par Me J..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 10 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- certains requérants n'ont pas repris l'instance après cassation et doivent être regardés comme s'étant désistés de l'instance ; Mme AY... n'a pas d'intérêt à agir car elle habite à Bordeaux ;

- aucun des moyens n'est fondé ;

- l'article L. 181-27 du code de l'environnement exige seulement de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes ; ainsi le préfet peut être amené à demander la constitution de garanties financières en application de l'article L. 516-2 du code de l'environnement ; dès lors les garanties et capacités n'ont pas à être constituées au jour de la demande mais lors de la mise en service de l'installation ; entrera au capital de la société Ener-Biomasse, la société Eco Mondia Green Technology Gmbh, composée de la société Think Energy Solutions Gmbh et GLB Gmbh, qui est spécialiste au niveau mondial des technologies dans le domaine des énergies renouvelables, et qui dispose de l'assise financière du groupe North Capital ; elle entend mettre en oeuvre un budget ainsi composé : 700 000 euros d'apport, crédits baux, prêt bancaire et fonds propres ; 30 personnes représenteront les moyens humains.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale et notamment son article 15 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme AQ... Zuccarello,

- les conclusions de Mme BT... Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de Me Boillot, représentant l'association Impact 33990 et autres, en présence de M. AA... AD..., associé et financier du projet de la SARL Ener-Biomasse..

Une note en délibéré, présentée par Me Boillot pour l'association Impact 33990 et autres, a été enregistrée le 9 juin 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 29 mai 2013, le préfet de la Gironde a autorisé la société Ener-Biomasse à exploiter sur le territoire de la commune d'Hourtin une unité de fabrication de granulés de bois de chauffage. L'association Impact 33990 ainsi que plusieurs personnes physiques, soutenant avoir leur domicile ou leur propriété à proximité du site d'implantation de cette unité, ont saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Ils font appel du jugement du 14 janvier 2016 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.

Sur le désistement d'instance :

2. La société Ener-Biomasse fait valoir que certains des requérants n'ont pas produit de mémoire devant la cour administrative d'appel après cassation et doivent être regardés comme s'étant implicitement désistés. Toutefois, en l'absence de désistement explicite, et quand bien même ces requérants ne se sont pas manifestés après la décision de cassation du Conseil d'Etat, il y a lieu de rejeter la demande de la société Ener-Biomasse tendant à ce que soit constaté leur désistement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Les requérants font valoir que le tribunal aurait inexactement interprété leur moyen tiré de l'insuffisance de l'information donnée aux habitants de la commune d'Hourtin sur l'ampleur réelle du projet soumis à l'enquête publique en l'analysant comme un moyen tiré de l'absence de réalisation des mesures de publicité prévues par l'article R. 123-11 du code de l'environnement. Toutefois, il ressort du jugement, qu'en son point 5, le tribunal a examiné si l'information avait été suffisante et a ainsi répondu au moyen. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité sur ce point.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant le projet en cause au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation. Les obligations relatives à la composition du dossier de demande d'autorisation d'une installation classée relèvent des règles de procédure.

En ce qui concerne la procédure :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 123-10 du code de l'environnement alors applicable : " I. _ Quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et durant celle-ci, l'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête informe le public : / _ de l'objet de l'enquête ; / _ de la ou des décisions pouvant être adoptées au terme de l'enquête et des autorités compétentes pour statuer ; / _ du nom et des qualités du commissaire enquêteur ou des membres de la commission d'enquête, de la date d'ouverture, du lieu de l'enquête, de sa durée et de ses modalités ; / _ de l'existence d'une évaluation environnementale, d'une étude d'impact ou, à défaut, d'un dossier comprenant les informations environnementales se rapportant à l'objet de l'enquête, et du lieu où ces documents peuvent être consultés ; / _ lorsqu'il a été émis, de l'existence de l'avis de l'autorité administrative de l'État compétente en matière d'environnement mentionné aux articles L. 122-1 et L. 122-7 du présent code ou à l'article L. 121-12 du code de l'urbanisme, et le lieu où il peut être consulté. / II. _ L'information du public est assurée par tous moyens appropriés, selon l'importance et la nature du projet, plan ou programme, notamment par voie d'affichage sur les lieux concernés par l'enquête, par voie de publication locale ou par voie électronique (...) / La personne responsable du projet assume les frais afférents à ces différentes mesures de publicité de l'enquête publique ". Aux termes du I de l'article R. 123-11 du même code, alors applicable : " Un avis portant les indications mentionnées à l'article R. 123-9 à la connaissance du public est publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. Pour les projets, plans ou programmes d'importance nationale, cet avis est, en outre, publié dans deux journaux à diffusion nationale quinze jours au moins avant le début de l'enquête ".

6. Ainsi que l'ont pertinemment décidé les juges de première instance, il résulte de l'instruction, en particulier des annonces légales, que l'ensemble des mesures de publicité prévues par les dispositions précitées de l'article R. 123-11 du code de l'environnement ont été réalisées. Et il ressort clairement de ces mesures de publicité que l'enquête publique porte sur un projet d'" installation classée pour la protection de l'environnement " et plus précisément d'une " unité de production de granulés de bois-énergie ". Par suite, l'information donnée au public dans le cadre de ces mesures de publicité a été suffisante.

7. En deuxième lieu, les requérants font valoir que les premiers juges ont à tort, estimé que les insuffisances alléguées du dossier de demande n'étaient pas établies. Toutefois, si le commissaire-enquêteur a relevé que certaines cartographies de zones urbaines et résidentielles étaient un peu lacunaires, il résulte de l'instruction que les lacunes ainsi relevées n'étaient pas de nature à vicier la présentation du projet, dès lors que les documents produits au dossier d'enquête comme le plan au 1/2500ème du site et de ses abords et la carte de localisation des habitations et activités environnantes, permettaient d'apprécier très précisément la proximité d'habitations.

8. En troisième lieu, aux termes du II de l'article R. 122-5 du code de l'environnement alors applicable : " L'étude d'impact présente : (...) / 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages, les biens matériels, les continuités écologiques telles que définies par l'article L. 371-1, les équilibres biologiques, les facteurs climatiques, le patrimoine culturel et archéologique, le sol, l'eau, l'air, le bruit, les espaces naturels, agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que les interrelations entre ces éléments ; / 3° Une analyse des effets négatifs et positifs, directs et indirects, temporaires (y compris pendant la phase des travaux) et permanents, à court, moyen et long terme, du projet sur l'environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° et sur la consommation énergétique, la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses), l'hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que l'addition et l'interaction de ces effets entre eux (...) ".

9. En application de l'article R. 512-8 du code de l'environnement, en vigueur à la date de l'arrêté en litige, le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. Par ailleurs, les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

10. Les requérants soutiennent que l'étude d'impact comportait des insuffisances au regard des nuisances visuelles, des nuisances sonores, de la pollution de l'air et de la protection de la nature. Cependant, d'une part, il résulte de cette étude que des mesures de nature à assurer l'intégration du projet dans le paysage sont prévues et sont suffisantes, ainsi que l'a relevé d'ailleurs le commissaire-enquêteur, dès lors que l'installation en cause n'aura qu'un faible impact sur le paysage compte tenu de la topographie plane du secteur et des écrans végétaux existants et à créer. D'autre part, si l'agence régionale de santé, qui a émis un avis favorable, a relevé le caractère incomplet de l'étude acoustique compte tenu de l'absence d'étude acoustique de l'état initial et du caractère incomplet de l'étude concernant l'impact sonore du broyeur et de la circulation routière générée par le projet, il résulte cependant de l'étude d'impact que les nuisances sonores qui seront générées tant par la rotation des camions que par le trafic des engins sur le site et par le fonctionnement des machines sur le site ont été identifiées et détaillées. Cette même étude précise que le niveau de bruit en limite de propriété n'excèdera pas 70 db de jour et 60 db de nuit. Sont également indiquées les mesures prises afin de maîtriser les effets de l'exploitation s'agissant du bruit en période d'exploitation ainsi que durant la période de construction de l'établissement, en particulier l'engagement d'intégrer le broyeur à rondins et plaquettes de bois, équipement le plus bruyant, dans un bâtiment à isolation phonique. Le commissaire-enquêteur a également relevé que le dossier d'enquête ne faisait aucune impasse sur les nuisances potentielles en termes de bruit tant en phase construction qu'en phase exploitation. En outre, il résulte de la même étude, que les produits entrants et sortants ne dégageront pas de mauvaises odeurs, que sont recensées les émissions dans l'air à considérer pour l'activité du site comme étant des émissions de poussières de bois, de vapeur d'eau à raison du séchage des matière, de fumées du foyer à biomasse et de CO2 émis par les engins et véhicules lors des phases de terrassement et d'exploitation et il est précisé que les émissions de fumées et poussières, estimées de faible ampleur, seront contrôlées par l'exploitant. Enfin, s'agissant des impacts du projet sur le caractère naturel des lieux avoisinants, l'étude liste les zones naturelles remarquables pour la qualité ou la sensibilité du milieu naturel qui concernent la commune d'Hourtin, ainsi que leur distance approximative au site, et envisage les mesures destinées à compenser ou réduire les inconvénients du projet notamment sur la faune et la flore.

11. En quatrième lieu, si les requérants font valoir que les mesures de remise en état prévues par l'étude d'impact sont insuffisantes car elles ne sont prévues qu'en cas d'arrêt définitif de l'exploitation, en méconnaissance de l'article R. 512-8 et L. 512-20 du code de l'environnement, toutefois ces dispositions, n'imposent pas de prévoir de telles mesures en cours d'exploitation.

12. Il résulte de tout ce qui précède, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la composition du dossier d'étude d'impact serait insuffisante sur ces différents points.

En ce qui concerne le fond :

S'agissant de la méconnaissance de l'article L. 181-26 du code de l'environnement :

13. Aux termes de l'article L. 181-26 du code de l'environnement applicable : " La délivrance de l'autorisation peut être subordonnée notamment à l'éloignement des installations vis-à-vis des habitations, immeubles habituellement occupés par des tiers, établissements recevant du public, cours d'eau, voies de communication, captages d'eau, zones fréquentées par le public, zones de loisir, zones présentant un intérêt naturel particulier ou ayant un caractère particulièrement sensible ou des zones destinées à l'habitation par des documents d'urbanisme opposables aux tiers. ".

14. Les requérants font valoir que le choix du lieu d'implantation du site est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 512-1 du code de l'environnement, compte tenu du caractère urbanisé de la zone concernée et du risque d'incendie lié à 1'usine elle-même et aux feux de forêts, la commune étant classée en zone rouge s'agissant de ce risque. Toutefois, il résulte de l'instruction que le site d'implantation de l'installation est bordé de parcelles agricoles, les constructions les plus proches de l'installation en litige étant implantées entre 300 et 400 mètres du site et le premier établissement destiné à recevoir du public étant situé à 500 mètres. Enfin, s'agissant de la proximité de forêts et du risque d'incendie, l'article L. 512-1 du code de l'environnement ne subordonne pas l'autorisation d'exploiter à l'éloignement des forêts et en tout état de cause, le risque incendie a été pris en compte et précisément développé dans l'étude de danger fournie par l'exploitant. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté d'autorisation contesté aurait méconnu les dispositions de l'article L. 181-26 du code de l'environnement.

S'agissant du respect des règles d'urbanisme :

15. Selon l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme applicable à la date de l'autorisation contestée, le règlement et les documents graphiques du plan d'occupation des sols ou du plan local d'urbanisme qui lui a succédé sont opposables à l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan. Il en résulte que les prescriptions de celui-ci qui déterminent les conditions d'utilisation et d'occupation des sols et les natures d'activités interdites ou limitées s'imposent aux autorisations d'exploiter délivrées au titre de la législation des installations classées. Et il appartient au juge du plein contentieux des installations classées de se prononcer sur la légalité de l'autorisation au regard des règles d'urbanisme légalement applicables à la date de sa délivrance.

16. Les requérants font valoir que le projet est en contradiction avec les prescriptions applicables aux zones 1 NAY et NC du plan d'occupation des sols alors en vigueur. Cependant, il résulte de l'instruction que la zone 1 NAY, sur laquelle il est prévu d'installer la partie principale du projet, est destinée à recevoir des opérations d'ensemble à vocation d'activités et comporte également le site de la station d'épuration et la station de pompage. Cette zone 1 NAY admet les opérations d'ensemble, y compris les établissements classés, à condition qu'elles ne compromettent pas l'urbanisation du reste de la zone et il ne résulte d'aucun élément du dossier que l'installation de cette unité de production de granulés de bois compromettrait l'urbanisation de cette zone à vocation d'activités. S'agissant de la zone NC, sur laquelle il est prévu l'installation de la plateforme de stockage des produits finis, celle-ci est une zone qui recouvre les terres agricoles ou sylvicoles et admet les installations classées soumises à autorisation à condition qu'elles soient liées notamment à la sylviculture et que des mesures soient prises pour assurer la protection du milieu. Or d'une part, il résulte de l'arrêté d'autorisation contesté, que des mesures sont imposées pour assurer la protection du milieu des pollutions sonores, visuelles, atmosphériques et pour assurer la préservation de la faune et de la flore. D'autre part, l'activité de production de granulés de bois doit être regardée comme liée à une activité sylvicole, dès lors que la production de granulés se fait à partir de la biomasse issue de la sylviculture, et notamment du pin maritime inexploité en Médoc.

S'agissant de l'insuffisance des prescriptions :

17. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'arrêté contesté prévoit, dans le titre 3 " prévention de la pollution atmosphérique " plusieurs prescriptions de nature à éviter les pollutions provenant des fumées et poussières. Il fixe des valeurs limites et impose des contrôles à réaliser et à transmettre à l'inspection. Dès lors que ces prescriptions suffisent à prévenir les pollutions atmosphériques, la circonstance que la réalisation d'une étude sur la réalité et l'impact de ces rejets ne soit pas exigée n'est pas de nature à entacher l'arrêté contesté d'illégalité. L'arrêté en cause prévoit également dans son titre 6 " prévention des nuisances sonores ", l'installation d'un merlon de terre périphérique d'une hauteur de 3 mètres et d'une embase de 10 mètres tel que préconisée par le commissaire-enquêteur et des valeurs limites d'émergence. En outre, l'exploitant installera le broyeur, équipement le plus bruyant, dans un bâtiment isolé phoniquement. Dès lors, l'arrêté attaqué comporte un ensemble de prescriptions de nature à répondre aux exigences des dispositions de l'article R. 181-43 du code de l'environnement.

S'agissant des capacités techniques et financières :

18. L'article L. 181-27 du code de l'environnement, issu de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale, dispose que : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en oeuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ". En vertu de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement, l'exploitant peut justifier de ses capacités jusqu'à la date de mise en service de son installation. Ces dispositions modifient les règles de fond relatives aux capacités techniques et financières de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement antérieurement définies à l'article L. 512-1 du code de l'environnement.

19. Il résulte de ces dispositions qu'une autorisation d'exploiter une installation classée ne peut légalement être délivrée, sous le contrôle du juge du plein contentieux des installations classées, si les conditions qu'elles posent ne sont pas remplies. Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site, au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des article L. 516-1 et L. 516-2 du même code. Lorsque le juge se prononce après la mise en service de l'installation, il lui appartient de vérifier la réalité et le caractère suffisant des capacités financières et techniques du pétitionnaire ou, le cas échéant, de l'exploitant auquel il a transféré l'autorisation.

20. Il résulte de l'instruction que le projet en cause n'a pas encore été mis en service à la date du présent arrêt. D'une part, en ce qui concerne les capacités techniques, la société Ener-Biomasse a indiqué dans son dossier de demande, à la rubrique relative aux capacités techniques, ses équipements, ses effectifs par catégorie d'emplois, ses jours et horaires de fonctionnement et son engagement dans une " démarche de certification DIN PLUS " et de " management de la sécurité avec l'assistance de l'APAVE ". D'autre part, en ce qui concerne les capacités financières, la société Ener-Biomasse a précisé dans sa demande que le budget de la société serait constitué de 200 000 euros d'apport en capital et de 500 000 euros en compte courant, auxquels s'ajoutent le recours à des crédits baux pour les investissements techniques, un prêt bancaire pour la construction des bâtiments et un recours aux fonds propres pour l'achat du terrain. La société Ener-Biomasse précise que la société Eco Mondia Green Technologie Gmbh, société d'envergure internationale spécialisée dans le domaine des énergies renouvelables, envisage d'entrer au capital et dispose d'une expérience et d'une envergure suffisante, ce qui est attesté par la lettre de confort du fonds d'investissement North Capital Holding. Quand bien même la société, qui est une société de projet, n'aurait pas encore d'expérience dans le domaine de la fabrication des granulés en bois, compte tenu de ces éléments et eu égard à la nature du projet dont les opérations principales seront le broyage de rondins pour les transformer en sciures, le séchage des sciures puis leur compactage en granulés, l'exploitant doit être regardé comme justifiant avant la mise en service de l'installation, conformément à l'article L. 181-27 du code de l'environnement, de la pertinence des modalités selon lesquelles il prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site.

21. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée en défense, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur requête.

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société Ener-Biomasse au titre des frais non compris dans les dépens dès lors qu'elle n'est pas dans la présente instance la partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des requérants une somme à verser à la société Ener-Biomasse sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association Impact 33990, Mme BB..., M. et Mme BF..., Mme AL..., Mme K..., M. G..., M. et Mme S..., M. et Mme M..., M. et Mme AS..., M. AK..., M. et Mme N..., M. et Mme L..., M. Y..., Mme Q..., M. et Mme BE..., M. et Mme AC..., M. F..., M. AI..., Mme AM..., M. et Mme AB..., M. P..., M. BC..., Mme AG..., M. et Mme AX..., M. R..., M. T..., M. et Mme BA..., Mme AV..., Mme AP..., M. H..., M. BA... et Mme AY..., est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Ener-Biomasse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Impact 33990, Mme AT... BB..., M. et Mme C... et BO... BF..., Mme Brigitte AL..., Mme AF... K..., M. AG... G..., M. et Mme BG... et Cathy S..., M. et Mme X... et BU... M..., M. et Mme D... et Liliane AS..., M. A... AK..., M. et Mme B... et BT... N..., M. et Mme AN... et BV... L..., M. O... Y..., Mme AE... Q..., M. et Mme W... et BW... BE..., M. et Mme E... et BS... AC..., M. I... F..., M. AU... AI..., Mme V... AM..., M. et Mme A... et BR... AB..., M. BI... P..., M. AJ... BC..., Mme AW... AG..., M. et Mme AH... et BP... AX..., M. BL... R..., M. B... T..., M. et Mme AZ...-W... et BQ... BA..., Mme AR... AV..., Mme BJ... AP..., M. U... H..., M. AZ...-BM... BA... et Mme BK... AY..., à la société Ener-Biomasse, à la commune d'Hourtin et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme AO... BD..., présidente,

Mme AQ... BH..., présidente-assesseure,

Mme Déborah de Paz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 3 septembre 2020.

La rapporteure,

Fabienne BH...La présidente,

BN... Phémolant

Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX01142


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01142
Date de la décision : 03/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement - Régime juridique - Actes affectant le régime juridique des installations - Première mise en service.


Composition du Tribunal
Président : Mme PHEMOLANT
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS BEDEL DE BUZAREINGUES ET BOILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-09-03;19bx01142 ?
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