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09/07/2020 | FRANCE | N°18BX01247

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 09 juillet 2020, 18BX01247


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision née le 25 novembre 2015 par laquelle le président de la société Orange a refusé de réexaminer rétroactivement ses possibilités de promotion au grade de chef technicien des installations (CTINT) par l'établissement des listes d'aptitudes et des tableaux d'avancement au titre des années 2004 à 2015.

Par un jugement n° 1600005 du 29 janvier 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Pro

cédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 29 mars 2018, le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision née le 25 novembre 2015 par laquelle le président de la société Orange a refusé de réexaminer rétroactivement ses possibilités de promotion au grade de chef technicien des installations (CTINT) par l'établissement des listes d'aptitudes et des tableaux d'avancement au titre des années 2004 à 2015.

Par un jugement n° 1600005 du 29 janvier 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 29 mars 2018, le 13 septembre 2018 et le 27 mars 2019, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 29 janvier 2018 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet du 25 novembre 2015 par laquelle le président de la société Orange a refusé de réexaminer rétroactivement ses possibilités de promotion au grade de chef technicien des installations (CTINT) par l'établissement des listes d'aptitudes et des tableaux d'avancement au titre des années 2004 à 2015 ;

3°) à titre principal de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Bordeaux, et à titre subsidiaire d'annuler la décision implicite de rejet du 25 novembre 2015 ;

4°) d'enjoindre à la société Orange de réexaminer ses possibilités de promotion interne au grade de chef technicien des installations (CTINT) pour les années 2004 à 2015 en établissant rétroactivement des listes d'aptitude et tableaux d'avancement pour les années 2004 à 2015 ;

5°) de mettre à la charge de la société Orange la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il a omis de statuer sur le moyen tiré de l'obligation pour la société Orange d'établir rétroactivement des listes d'aptitude et tableaux d'avancement ;

- le dispositif de promotion interne mis en place par Orange depuis 2004 est illégal car il n'a prévu que le concours en méconnaissance de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984, de l'article 2 du décret du 26 novembre 2004, de l'article 58 de la loi du 11 janvier 1984, et du décret du 24 mai 1972.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 juillet 2018, le 15 octobre 2018, le 4 décembre 2018, le 18 juin 2019 et le 7 avril 2020, la société Orange, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable du fait de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 2 octobre 2017 de la cour administrative d'appel de Bordeaux ;

- les autres moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret n° 72-420 du 24 mai 1972 ;

- le décret n° 90-1231 du 31 décembre 1990 ;

- le décret n° 92-932 du 7 septembre 1992 ;

- le décret n° 2004-1300 du 26 novembre 2004 ;

- le décret n° 2011-1673 du 29 novembre 2011 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... F...,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant M. D....

Une note en délibéré présentée pour M. D... par Me C... a été enregistrée le 23 juin 2020.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., a intégré le service public des postes et télécommunications en 1975 au grade d'ouvrier d'Etat, avant d'être promu, en 1980, au grade de technicien des installations (TINT). A la suite des modifications de statuts des agents de France Télécom par la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, il a opté pour conserver son grade de technicien des installations de FT dans un corps de " reclassement ". Il a recherché la responsabilité de la société Orange, venant aux droits de France Télécom, en raison du blocage de carrière qu'il estimait avoir subi postérieurement au décret du 26 novembre 2004, en raison de l'illégalité du dispositif de promotion interne mis en place à partir de cette date et a demandé la reconstitution de sa carrière au grade de chef technicien des installations (CTINT) à compter du 1er décembre 2004 ainsi que son inscription sur la liste d'aptitude 2013 pour l'accès au corps d'inspecteur. Le tribunal administratif de Bordeaux puis la cour administrative d'appel de Bordeaux par un arrêt du 2 octobre 2017, ont rejeté sa demande. M. D... a ensuite formé une demande auprès de son employeur tendant à ce que soient réexaminées rétroactivement les possibilités de promotion au grade de chef technicien des installations par 1'établissement des listes d'aptitudes et des tableaux d'avancement aux titre des années 2004 à 2015. Sans réponse de la société Orange, il a saisi le tribunal administratif de Bordeaux lequel a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite de rejet née le 25 novembre 2015. Il relève appel de ce jugement du 29 janvier 2018.

Sur la régularité du jugement :

2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments du requérant, ont suffisamment répondu aux points 2 à 5 du jugement attaqué au moyen tiré de ce que la société Orange était tenue d'établir rétroactivement des listes d'aptitudes et de procéder à la reconstitution de carrière sollicitée. Dès lors, le jugement contesté n'est pas entaché d'irrégularité sur ce point.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration (...), non seulement par voie de concours (...), mais aussi par la nomination de fonctionnaires (...) suivant l'une des modalités ci-après : 1°) Examen professionnel 2°) Liste d'aptitude établie après avis de la commission paritaire du corps d'accueil (...) " ; qu'en vertu de l'article 10 de la même loi : " En ce qui concerne les membres des corps recrutés par la voie de l'Ecole nationale d'administration, des corps enseignants et des personnels de la recherche, des corps reconnus comme ayant un caractère technique, les statuts particuliers pris en la forme indiquée à l'article 8 ci-dessus peuvent déroger, après avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat prévu à l'article 13 ci-après, à certaines des dispositions du statut général qui ne correspondraient pas aux besoins propres de ces corps ou aux missions que leurs membres sont destinés à assurer, notamment pour l'accomplissement d'une obligation statutaire de mobilité. Les statuts particuliers de corps interministériels ou communs à plusieurs départements ministériels ou établissements publics de l'Etat peuvent déroger, après avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, à certaines des dispositions du statut général qui ne correspondraient pas aux besoins propres à l'organisation de la gestion de ces corps au sein de chacun de ces départements ministériels ou établissements (...) ". Aux termes de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et des télécommunications : " Les dispositions de l'article 10 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée s'appliquent à l'ensemble des corps de fonctionnaires de La Poste et de France Télécom. ".

4. Il est constant qu'en ce qui concerne la période postérieure à l'entrée en vigueur du décret du 26 novembre 2004, et alors même que la société Orange fait valoir qu'elle a fait le choix de privilégier le concours interne, cette circonstance ne la dispensait pas, en application des dispositions précitées de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 de procéder à l'établissement de listes d'aptitude ou de tableaux d'avancement permettant la promotion interne des fonctionnaires. En s'en abstenant, la société Orange a commis une illégalité fautive.

5. Les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir. S'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires ou des militaires, l'administration ne peut, en dérogation à cette règle générale, leur conférer une portée rétroactive que dans la mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation. Toutefois, ni ce principe, ni la décision du Conseil d'Etat n° 217006 du 15 juillet 2004, ni l'arrêt de la cour n° 14BX00472 du 22 décembre 2014, lequel au surplus ne concernait pas M. D..., ni d'ailleurs aucune autre décision de justice ou disposition législative, n'impliquent que soient rétroactivement établies des listes d'aptitude et des tableaux d'avancement ou que la carrière de M. D... soit rétroactivement reconstituée. Le requérant n'est donc pas fondé à invoquer, ni l'autorité de la chose jugée qui s'attache à ces décisions, ni l'illégalité des dispositifs de promotion interne mis en place par France Telecom pour les fonctionnaires reclassés, ni la circonstance qu'il a perdu une chance d'obtenir une promotion dès lors que l'avancement qu'il revendique n'est pas de droit, pour demander l'annulation de la décision par laquelle le président de la société Orange a implicitement refusé d'établir des listes d'aptitude et des tableaux d'avancement au titre des années 2004 à 2015, de le nommer au grade de chef technicien des installations à compter de 2004, après établissement d'une liste d'aptitude et d'un tableau d'avancement, et de procéder à la reconstitution de sa carrière jusqu'en 2015.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'exception d'autorité de chose jugée, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Orange, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. D... demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. D..., une somme à verser à la société Orange sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Orange au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... D... et à la société Orange.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2020 à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme E... F..., présidente-assesseure,

Mme Déborah de Paz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 9 juillet 2020.

Le président,

Dominique NAVES

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX01247


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01247
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-02 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement. Avancement.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : HORUS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-09;18bx01247 ?
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