Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'ordonner une expertise médicale et de condamner Bordeaux Métropole à lui verser une indemnité de 80 000 euros en réparation des préjudices en lien avec la chute dont elle a été victime
le 26 août 2012 rue Emile Combes à Bordeaux.
Par un jugement n° 1603676 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Bordeaux
a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 avril 2018, Mme E..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'ordonner une expertise afin d'évaluer ses préjudices ;
3°) de condamner Bordeaux Métropole à lui verser une indemnité de 80 000 euros ;
4°) de mettre à la charge de Bordeaux Métropole une somme de 2 000 euros au titre
de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'excavation large et évasée de la chaussée, d'une profondeur très importante, n'était pas visible et n'a pas été signalée ; contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, elle a utilisé le passage protégé pour piétons, puis a continué sur la chaussée pour rejoindre son véhicule en le contournant ;
- elle a présenté une fracture du coude gauche avec perte de substance osseuse du capitellum postérieur, nécessitant un arrêt de travail de plusieurs mois, et conserve des séquelles à type d'enraidissement en extension malgré la rééducation ; elle a subi des douleurs et des complications importantes qui ont donné lieu à des soins durant trois ans.
Par des mémoires enregistrés les 8 juin et 20 septembre 2018, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde, représentée par la SELARL Bardet et Associés, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures, de condamner Bordeaux Métropole à lui verser une somme de 22 661,14 euros et de mettre à sa charge une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le droit de plaidoirie de 13 euros,
ainsi que les dépens.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable dès lors qu'elle a présenté une critique du jugement ;
- Bordeaux Métropole n'apporte pas la preuve de l'entretien normal de la chaussée, qui présentait un risque excédant celui auquel un usager peut normalement s'attendre, et la victime n'a commis aucune faute ;
- ses débours en lien avec l'accident s'élèvent à 22 661,14 euros, dont 14 840,26 euros de dépenses de santé et 7 820,88 euros de prestations en espèces.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 juin 2018, Bordeaux Métropole, représentée par la SELARL Racine, conclut au rejet de la requête et des conclusions de la CPAM de la Gironde, et demande à la cour de mettre à la charge de Mme E... et de la CPAM de la Gironde une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les conclusions d'appel de Mme E... et de la CPAM de la Gironde sont irrecevables dès lors qu'elles ne comportent aucune critique du jugement attaqué ;
A titre subsidiaire :
- Mme E... ne démontre pas l'existence d'une défectuosité excédant les obstacles que tout usager doit normalement s'attendre à rencontrer sur la chaussée ; la chute est survenue le 26 août 2012 vers 10 h 15, alors que la chaussée et ses éventuelles imperfections étaient parfaitement visibles ;
- ainsi que l'ont retenu les premiers juges, l'inattention et l'imprudence de la victime exonèrent Bordeaux Métropole de toute responsabilité ; Mme E... a changé de version en cause d'appel, et si elle contournait son véhicule, celui-ci devait être stationné illégalement ;
- ni les circonstances réelles de la chute, ni le lien de causalité entre le dommage et un défaut d'entretien normal de la chaussée ne sont établis ;
- le montant de l'indemnité demandée n'est pas justifié.
Par une ordonnance du 4 avril 2019, la clôture de l'instruction a été fixée
au 28 mai 2019 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme Chauvin, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant Bordeaux Métropole.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E... relève appel du jugement du 27 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande de condamnation de Bordeaux Métropole
à l'indemniser des préjudices en lien avec sa chute sur la chaussée, rue Emile Combes
à Bordeaux, le 26 août 2012.
2. Il appartient à l'usager d'un ouvrage public qui demande réparation d'un préjudice qu'il estime imputable à cet ouvrage de rapporter la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre le préjudice invoqué et l'ouvrage. Le maître de l'ouvrage ne peut être exonéré
de l'obligation d'indemniser la victime qu'en apportant la preuve, soit de l'absence de défaut d'entretien normal, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas
de force majeure.
3. Mme E..., usagère de la voie publique, apporte la preuve du lien de causalité entre l'accident et l'état de cette voie en produisant les attestations de trois témoins dont il résulte qu'elle a fait une chute, le dimanche 26 août 2012 vers 10 h 15, en raison d'un " trou " dans la chaussée, à l'intersection de la rue Emile Combes et de la rue Jenny Lepreux à Bordeaux.
Alors que Mme E... produit des photographies montrant une dépression de forme oblongue dans le revêtement de la chaussée, Bordeaux Métropole, qui se borne à faire valoir que les dimensions n'en sont pas précisées, n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'entretien normal de la voie publique. Toutefois, il résulte de l'instruction, d'une part, que Mme E... avait stationné son véhicule, qu'elle rejoignait au moment de l'accident en traversant de biais la chaussée après avoir quitté le passage pour piétons, hors des emplacements prévus à cet effet dans la rue Emile Combes, et d'autre part, que l'accident a eu lieu en plein jour, alors que la dépression était visible. Dans ces circonstances, les fautes de la victime sont de nature à exonérer totalement Bordeaux Métropole de sa responsabilité.
4. Il résulte de ce qui précède que sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par Bordeaux Métropole ni d'ordonner une expertise, Mme E... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par suite, la demande de la CPAM de la Gironde doit également être rejetée.
5. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. / (...). " Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge
de Bordeaux Métropole, qui n'est pas la partie perdante, au titre des frais exposés
par Mme E... et par la CPAM de la Gironde à l'occasion du présent litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de ces dernières au titre
des frais exposés par Bordeaux Métropole.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... E..., à Bordeaux Métropole
et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2020 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
Mme A... B..., présidente-assesseure,
M. Thierry Sorin, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 juin 2020.
Le président de la 2ème chambre,
Catherine Girault
La République mande et ordonne à la préfète de la Gironde en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX01714