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25/06/2020 | FRANCE | N°18BX01698

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 25 juin 2020, 18BX01698


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... G..., Mme K... J... et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 25 mars 2016 par lequel le maire de la commune de Le Bugue a délivré un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'un magasin à l'enseigne Lidl d'une surface de vente de 997 mètres carrés.

Par un jugement n° 1602257 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette requête.

Procédure devant la cour :

Par une r

equête enregistrée le 27 avril 2018 et des mémoires et pièces complémentaires enregistrés le 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... G..., Mme K... J... et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 25 mars 2016 par lequel le maire de la commune de Le Bugue a délivré un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'un magasin à l'enseigne Lidl d'une surface de vente de 997 mètres carrés.

Par un jugement n° 1602257 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 avril 2018 et des mémoires et pièces complémentaires enregistrés le 16 mai 2018, le 11 octobre 2018, le 18 octobre 2018, le 9 novembre 2018, le 16 novembre 2018, le 20 novembre 2018, le 8 janvier 2019 et le 29 janvier 2019, Mme C... et Mme G..., représentées par le Cabinet Parme, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 février 2018 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler le permis de construire du 25 mars 2016 ;

3°) d'annuler le permis de construire modificatif du 24 septembre 2018 ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Le Bugue et de la société Lidl une somme de 3 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation, d'un défaut de réponse à conclusions et d'un défaut de réponse à un moyen ;

- le dossier de demande de permis de construire est lacunaire en ce que la notice contenue dans le projet architectural ne précise pas l'état initial du terrain et de ses abords en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme et ne comprend pas de document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-10 du même code, et comporte des informations contradictoires s'agissant de la surface de vente du magasin projeté ;

- le projet devait faire l'objet d'une autorisation d'exploitation commerciale en application des dispositions de l'article L. 752-1 du code de commerce ;

- le permis de construire attaqué a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal dès lors que la modification du plan local d'urbanisme approuvée par délibération du 23 octobre 2014 ne pouvait faire l'objet que d'une procédure de révision, que les dispositions des articles 6, 7 et 8 en zones UA et UB qui en sont issues méconnaissent les dispositions de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme alors applicables ; le permis de construire attaqué ne pouvait être délivré sur la base du règlement du plan local d'urbanisme en vigueur avant cette modification dès lors qu'il en méconnaît les articles UB 6, UB 11 ;

- le permis de construire attaqué méconnaît les dispositions de l'article 6 du règlement du plan de prévention des risques d'inondation et celles de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- le permis de construire modificatif délivré à la société Lidl le 24 septembre 2018 est signé par une autorité incompétente ;

- le dossier de demande du permis de construire modificatif comporte également des informations contradictoires s'agissant de la surface de vente du futur magasin ;

- le permis de construire modificatif est entaché d'un vice de procédure résultant de l'absence de consultation préalable de la direction départementale des territoires et de la mer ;

- le permis de construire modificatif est entaché d'un défaut de base légale en raison de l'illégalité du permis de construire initial.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 13 août 2018 et 5 décembre 2018, la commune de Le Bugue, représentée par Me H..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérantes une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions tendant à l'annulation du permis de construire modificatif délivré le 24 septembre 2018 sont irrecevables ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 septembre 2018, le 11 octobre 2018 et le 14 décembre 2018, la société Lidl, représentée par la SCP Courrech et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérantes une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les requérantes sont dépourvues d'intérêt pour agir ;

- le moyen tiré de ce que le permis de construire initial devait être soumis pour avis à la commission départementale d'aménagement commercial est irrecevable dès lors qu'il ne tient pas lieu d'autorisation commerciale ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 25 février 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 25 mars 2019 à 12h00.

Un mémoire présenté pour Mme C... et Mme G... a été enregistré le 6 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... B...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me I..., représentant la commune de Le Bugue.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 25 mars 2016, le maire de Le Bugue (Dordogne) a délivré à la société Lidl un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'un magasin à l'enseigne Lidl d'une surface de vente de 997 mètres carrés. Par un jugement du 27 février 2018 dont Mme C... et Mme G... relèvent appel, le tribunal administratif de Bordeaux, après avoir pris acte du désistement de Mme J..., a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par arrêté du 24 septembre 2018, le maire de Le Bugue a délivré à la société Lidl un permis de construire modificatif.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de leur moyen tiré de l'illégalité des dispositions du plan local d'urbanisme de la commune de Le Bugue résultant de ce qu'elles devaient faire l'objet d'une révision et non d'une modification, les requérantes ont fait valoir devant le tribunal que les modifications approuvées par délibération du conseil de la communauté de communes Terre de Cro-Magnon du 23 octobre 2014 avaient pour conséquence de changer les orientations définies par le projet d'aménagement et de développement durables et d'entraîner une réduction d'une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels. Le tribunal n'a pas répondu à ce dernier moyen, qui n'était pas inopérant. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens d'irrégularité du jugement, les requérantes sont fondées à soutenir que ce dernier est entaché d'irrégularité en tant qu'il statue sur la légalité du permis et doit être annulé dans cette mesure.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2016 présentée par Mme C... et Mme G... devant le tribunal administratif de Bordeaux.

Sur la légalité de l'arrêté du 25 mars 2016 :

4. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial. Il en résulte, d'une part, que les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial et, d'autre part, que les moyens dirigés contre le permis de construire attaqué doivent être examinés en tenant compte de la régularisation des illégalités éventuellement intervenue par la délivrance en cours d'instance de ce permis de construire modificatif.

5. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

6. Aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (...) / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants (...) ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : (...) / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que la notice descriptive jointe au dossier de demande du permis de construire initial indique que le terrain d'assiette du projet abrite l'actuel magasin Lidl destiné à être démoli ainsi que son parking, accessible depuis la route départementale 31 au sud et par le chemin rural situé au nord, précise que le nouveau bâtiment sera implanté à l'ouest de la parcelle, perpendiculairement à ce chemin rural, et que le parking sera situé à l'est de la parcelle, devant le magasin. Le dossier de demande comprend également plusieurs documents photographiques permettant de visualiser l'insertion du projet au sein de l'îlot urbain et sur lesquels apparaissent les autres constructions qui s'y trouvent, ainsi qu'un plan de situation indiquant précisément l'implantation et l'organisation des différents éléments du projet. Par ailleurs, si la notice fournie à l'appui de la demande du permis de construire initial ne décrit pas les constructions et paysages avoisinants situés à l'extérieur de cet ilot, la société Lidl a produit, à l'appui de sa demande de permis de construire modificatif, des photographies cotées PCM 7/8 ainsi qu'un plan de situation coté PCM 2 qui permettent d'apprécier l'insertion du projet également par rapport à ceux-ci. Par suite, le moyen tiré de ce que le dossier de demande de permis de construire serait incomplet doit être écarté.

8. Le plan de situation joint au dossier de demande du permis de construire modificatif indique une " surface de vente réglementaire " de 991,5 mètres carrés. S'il indique également que le projet comporte une " surface de vente Lidl mur à mur " de 996,4 mètres carrés, et si la notice descriptive de sécurité indique pour sa part toujours une surface de vente de 997 mètres carrés, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces différences auraient été de nature à fausser l'appréciation des services instructeurs sur le projet, compte tenu de leurs écarts minimes et de la circonstance que les trois superficie indiquées sont inférieures au seuil de 1 000 mètres carrés, fixé par les dispositions de l'article L. 752-1 du code de commerce et au-delà duquel le projet devait faire l'objet d'un avis préalable de la commission départementale d'aménagement commercial compétente. Par ailleurs, les requérantes ne contestent pas utilement les explications fournies par la société Lidl sur ces écarts, aux termes desquelles la différence entre la " surface de vente réglementaire " et la " surface de vente Lidl mur à mur " correspond à la superficie du hall d'entrée et de l'arrière de la caisse centrale. Par suite, le moyen tiré de ce que le dossier de demande du permis de construire est entaché de contradictions doit être écarté.

9. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de commerce : " Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : / 1° La création d'un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 1 000 mètres carrés, résultant soit d'une construction nouvelle, soit de la transformation d'un immeuble existant (...) ". Aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés : " (...) La surface de vente des magasins de commerce de détail, prise en compte pour le calcul de la taxe, et celle visée à l'article L. 720-5 du code de commerce, s'entendent des espaces affectés à la circulation de la clientèle pour effectuer ses achats, de ceux affectés à l'exposition des marchandises proposées à la vente, à leur paiement, et de ceux affectés à la circulation du personnel pour présenter les marchandises à la vente (...) ".

10. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire modificatif, aux termes duquel la " zone non aménagée " a été transformée en " réserve 2 ", que les deux réserves prévues de 191,8 mètres carrés et 283,9 mètres carrés seront séparées de l'espace de vente par une paroi coupe-feu " deux heures " non amovible " montée jusque sous la couverture " et devant, s'agissant de la deuxième, supporter des étagères. Ces espaces ne sont ainsi ni accessibles au public, ce que ne peut suffire à établir la circonstance que la " réserve 2 " comporte une sortie de secours, ni directement liés à la vente. Par ailleurs, à supposer même que les cloisons qui séparent ces réserves de l'espace de vente puissent être démolies sans affecter la structure du bâtiment, cette circonstance ne permet pas de les regarder pour autant comme amovibles ou aisément démontables. Ces superficies n'avaient donc pas à être prises en compte dans le calcul de la surface de vente, et il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que cette superficie résulterait de manoeuvres frauduleuses, alors même que le projet aurait donné lieu à une précédente demande d'autorisation comportant une surface de vente supérieure à 1 000 mètres carrés. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir invoquée par la société Lidl, le moyen tiré de ce que le permis de construire litigieux devait être soumis à l'avis préalable de la commission départementale d'aménagement commercial en vertu des dispositions précitées de l'article L. 752-1 du code de commerce doit être écarté.

11. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Aux termes de l'article 6 du règlement du plan de prévention du risque d'inondation approuvé par arrêté préfectoral du 20 décembre 2000 et applicable en zone bleue, au sein de laquelle le projet se situe en partie : " Les bâtiments à usage d'habitation ou d'activité sont seulement admis à condition que le niveau du premier plancher aménagé soit situé au minimum à 20 cm au-dessus de la cote de référence ; au-dessous de cette cote, ne sont admis que les parkings ou garages pour le stationnement de véhicules (...) ".

12. Le plan de prévention des risques approuvé par arrêté préfectoral du 20 décembre 2000, en vigueur à la date de délivrance des permis litigieux, fixe la cote de référence applicable au terrain d'assiette du projet à 53,54 mètres NGF. En application des dispositions précitées de l'article 6 de son règlement, le niveau du premier plancher aménagé doit donc être situé au minimum à 53,74 mètres NGF. Le permis de construire modificatif prévoit que le premier plancher sera aménagé à une altitude de 54,7 mètres NGF, soit une hauteur satisfaisant à ces prescriptions. Par ailleurs, si les requérantes soutiennent que le maire devait, pour l'application des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme précité, prendre en compte les éléments d'information dont il disposait concernant la révision du plan de prévention des risques, laquelle avait été prescrite par arrêté du 23 mars 2016, soit deux jours avant la délivrance du permis de construire initial, l'altitude de 54,7 mètres NGF est également suffisante au regard de la nouvelle cote de référence projetée. Par suite les moyens tirés de ce que le permis de construire serait entaché d'illégalité au regard des dispositions précitées du règlement du plan de prévention des risques et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doivent être écartés.

13. Aux termes de l'article L. 123-13 du code de l'urbanisme applicable à la date d'approbation de la modification du plan local d'urbanisme de la commune de Le Bugue : " I. - Le plan local d'urbanisme fait l'objet d'une révision lorsque l'établissement public de coopération intercommunale ou, dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article L. 123-6, la commune envisage : / 1° Soit de changer les orientations définies par le projet d'aménagement et de développement durables ; / (...) 3° Soit de réduire une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels, ou d'une évolution de nature à induire de graves risques de nuisance (...) ".

14. Le plan local d'urbanisme de Le Bugue a été approuvé par délibération du 26 juin 2013 du conseil de la communauté de communes Terre de Cro-Magnon. Son projet d'aménagement et de développement durables fixe notamment comme orientations de soutenir l'activité économique, et prévoit à cet effet de maintenir le tissu commercial et les services dans le bourg en permettant l'accueil d'activités économiques, industrielles, commerciales, artisanales et touristiques dans quatre pôles économiques qu'il identifie, parmi lesquels figure le secteur où se situe le projet de construction en litige. Il prévoit également " d'assurer une insertion plus qualitative des constructions nouvelles ". La modification approuvée par délibération du 23 octobre 2014 a seulement eu pour objet, dans le secteur UB où se situe le projet, de permettre " l'évolution " des constructions à usage de commerce, et modifié en conséquence les articles 6 et 7, 8 et 11 du règlement applicables à cette zone afin de permettre pour ces constructions une dérogation aux règles qu'ils fixent en matière d'implantation par rapport à l'alignement, d'implantation par rapport aux limites séparatives, d'implantation des constructions sur une même propriété, et d'aspect extérieur, cette dernière étant subordonnée à la justification d'impératifs techniques ou architecturaux liés à l'activité. Eu égard à leur caractère limité, dans une zone où les constructions à usage de commerce étaient déjà autorisées, de telles modifications n'ont ni pour objet ni pour effet d'entraîner un changement des orientations définies par le projet d'aménagement et de développement durables, et ne procèdent pas à une réduction d'une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels, les dispositions auxquelles elles introduisent une possibilité de dérogation n'ayant au surplus pas cet objet. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis de construire aurait été délivré sous l'empire d'un plan local d'urbanisme illégal faute pour ces modifications d'avoir fait l'objet d'une procédure de révision doit être écarté.

15. En vertu des dispositions de l'article L. 152-3 du code de l'urbanisme, applicables à la date de délivrance du permis de construire litigieux : " Les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme : / 1° Peuvent faire l'objet d'adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes (...) ". Aux termes de l'article R. 151-13 du même code : " Les règles générales peuvent être assorties de règles alternatives qui en permettent une application circonstanciée à des conditions locales particulières. / Ces règles alternatives ne peuvent avoir pour objet ou pour effet de se substituer aux possibilités reconnues à l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme de procéder à des adaptations mineures par l'article L. 152-3 et d'accorder des dérogations aux règles du plan local d'urbanisme par les articles L. 152-4 à L. 152-6 ".

16. Il ressort des pièces du dossier que les dérogations mentionnées au point 14 concernent spécifiquement les constructions et installations à usage de commerce, d'artisanat et d'industrie. Celles prévues aux articles UB 6, 7 et 8 sont en outre subordonnées à la production des " études nécessaires à l'évaluation des nuisances qui pourraient être entraînées par l'activité faisant l'objet du permis de construire ", et celle prévue à l'article UB 11, ainsi qu'il a été dit, à la justification d'impératifs techniques ou architecturaux liés à l'activité. Elles sont, par suite, suffisamment encadrées et ne constituent pas des dérogations illégales aux règles qu'elles affectent.

17. Il résulte de ce qui a été dit au points 13 à 16 que le moyen tiré de ce que le permis de construire litigieux aurait été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal doit être écarté. Les moyens tirés de ce que le projet méconnaîtrait les dispositions en vigueur antérieurement à la modification du plan local d'urbanisme approuvée par délibération du 23 octobre 2014 sont donc inopérants.

Sur la légalité de l'arrêté du 24 septembre 2018 :

18. Il ressort des pièces du dossier que M. F..., signataire du permis de construire modificatif attaqué, disposait d'une délégation de fonctions prise en vertu des dispositions de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales par arrêté du maire du 7 avril 2014 à l'effet notamment de signer les pièces et actes en matière d'urbanisme, ce qui inclut les permis de construire portant sur des établissements recevant du public. Il ressort des mentions non contestées de cet arrêté qu'il a été transmis en préfecture le 9 avril 2014 et publié le jour même. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis de construire modificatif serait entaché d'incompétence doit être écarté.

19. Aucune disposition n'imposait que le permis de construire fît l'objet d'un avis préalable de la direction départementale des territoires et de la mer, alors même que le projet se situe pour partie en zone bleue du plan de prévention du risque d'inondation approuvé par arrêté préfectoral du 20 décembre 2000. Par suite, la circonstance qu'un tel avis n'ait pas été recueilli préalablement à la délivrance du permis de construire modificatif est sans incidence sur sa légalité, alors même que la demande de permis de construire initiale avait fait l'objet d'un tel avis rendu le 18 janvier 2016. Au demeurant, cet avis était lui-même favorable, et le permis de construire modificatif n'a eu pour objet que de prévoir que le premier plancher serait aménagé à une hauteur compatible avec la cote de référence devant être définie à l'issue de la procédure de révision du plan de prévention, soit une altitude supérieure à celle exigée par les dispositions en vigueur de ce plan. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis de construire modificatif serait entaché d'un vice de procédure doit être écarté.

20. Il résulte de ce qui a été dit au point 8 que le moyen tiré de ce que le dossier de demande serait entaché de contradictions concernant la surface de vente du projet doit être écarté.

21. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 17 que le moyen tiré de ce que le permis de construire modificatif devrait être annulé par voie de conséquence de l'illégalité du permis de construire initial doit être écarté.

22. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir invoquées par la commune et la société Lidl, que les requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation des arrêtés du 25 mars 2016 et du 24 septembre 2018 portant respectivement permis de construire et permis de construire modificatif au bénéfice de la société Lidl.

Sur les frais liés au litige :

23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Le Bugue et de la société Lidl, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, les sommes que demandent les requérantes au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de ces dernières le paiement de la somme de 1 500 euros au bénéfice d'une part, de la commune de Le Bugue, d'autre part, de la société Lidl à ce titre.

DECIDE :

Article 1er : Les articles 2 à 4 du jugement n° 1602257 du 27 février 2018 du tribunal administratif de Bordeaux sont annulés.

Article 2 : La demande de Mme C... et de Mme G... présentée devant le tribunal administratif de Bordeaux et le surplus de leurs conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Mme C... et de Mme G... verseront à la commune de Le Bugue et à la société Lidl une somme de 1 500 euros à chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C..., à Mme D... G..., à la commune de Le Bugue et à la SNC Lidl.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Didier Salvi, président,

M. A... B..., premier conseiller,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juin 2020.

Le président,

Didier SalviLa République mande et ordonne au préfet de la Dordogne, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18BX01698


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. David TERME
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : DANGLADE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 25/06/2020
Date de l'import : 28/07/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18BX01698
Numéro NOR : CETATEXT000042043235 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-25;18bx01698 ?
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