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25/06/2020 | FRANCE | N°18BX00031

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 25 juin 2020, 18BX00031


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SNCF Réseau a déféré au tribunal administratif de Pau la société alternative foncière Camiéta comme prévenue d'une contravention de grande voirie et demandé que le tribunal constate que les faits établis par le procès-verbal dressé le 31 janvier 2017 constituent la contravention prévue et réprimée par l'article L. 2231-5 du code des transports, ordonne la remise en état des lieux sous astreinte de 50 euros par jour de retard et condamne cette société au paiement de la somme de 600,36

euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal de grande voirie.

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SNCF Réseau a déféré au tribunal administratif de Pau la société alternative foncière Camiéta comme prévenue d'une contravention de grande voirie et demandé que le tribunal constate que les faits établis par le procès-verbal dressé le 31 janvier 2017 constituent la contravention prévue et réprimée par l'article L. 2231-5 du code des transports, ordonne la remise en état des lieux sous astreinte de 50 euros par jour de retard et condamne cette société au paiement de la somme de 600,36 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal de grande voirie.

Par un jugement n° 1700851 du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Pau a condamné la société alternative foncière Camiéta au paiement d'une amende d'un montant de 1 500 euros, lui a ordonné de remettre sans délai les lieux en l'état sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la notification du jugement, et l'a condamnée au paiement à la société SNCF Réseau d'une somme de 600,36 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 janvier 2018 et 12 juin 2019, la société alternative foncière Camiéta, représentée par la Selarl Etche avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 9 novembre 2017 ;

2°) d'annuler le procès-verbal de contravention de grande voirie dressé à son encontre le 31 janvier 2017 ;

3°) de rejeter les conclusions de la société SNCF Réseau ;

4°) de mettre à la charge de la société SNCF Réseau une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- le procès-verbal dressé à son encontre le 31 janvier 2017 est entaché d'irrégularité dès lors que l'agent l'ayant dressé n'était pas habilité à constater les contraventions de grande voirie sur le domaine public ferroviaire à Urrugne et qu'à la date à laquelle il a été assermenté, la société SNCF Réseau n'existait pas ;

- le procès-verbal dressé le 31 janvier 2017 est entaché d'un défaut de motivation qui porte atteinte au respect des droits de la défense et au droit à un procès équitable garanti par les stipulations de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- à la date d'établissement du procès-verbal, les faits litigieux étaient prescrits, l'ouvrage en cause ayant été réceptionné plus d'un an auparavant le 9 novembre 2015 ;

- la société SNCF Réseau avait donné son accord à la réalisation de l'ouvrage litigieux et cette solution a été mise en oeuvre conformément aux autorisations d'urbanisme et à la loi sur l'eau ;

- elle est titulaire d'une servitude d'écoulement des eaux pluviales acquise par prescription ;

- l'ouvrage litigieux n'est pas situé sur le domaine public ferroviaire ;

- la société SCNF Réseau a négligé l'entretien de l'exécutoire existant ce qui l'a contrainte à adapter l'ouvrage existant afin que ce dernier puisse remplir son office ;

- les ouvrages constitutifs du réseau d'eaux pluviales ont été intégrés au domaine public de la commune d'Urrugne.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2019, la société SNCF Réseau représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société alternative foncière Camiéta une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de ce que le procès-verbal serait entaché d'un défaut de motivation et méconnaîtrait de ce fait le droit à un procès équitable garanti par l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ;

- le moyen tiré du défaut d'entretien de l'exutoire existant est inopérant ;

- le moyen tiré de ce que la propriété de l'ouvrage litigieux aurait été transféré à la commune d'Urrugne est inopérant ;

- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de procédure pénale ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code des transports ;

- la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer ;

- l'ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 relative à la partie législative du code des transports ;

- le décret n° 2019-726 du 9 juillet 2019 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... B...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me G..., représentant la société alternative foncière Camiéta et les observations de Me D..., représentant la société SNCF Réseau.

Considérant ce qui suit :

1. Le 31 janvier 2017, un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé à l'encontre de la société alternative foncière Camiéta, constatant à proximité immédiate de la voie ferrée n° 1 de la ligne ferroviaire reliant Bordeaux à Hendaye, au kilomètre 222 sur le territoire de la commune d'Urrugne, la présence d'un bac d'évacuation d'eau sur un terrain appartenant à la société SNCF Réseau, avec évacuation des eaux sur les emprises ferroviaires. La société SNCF Réseau a transmis ce procès-verbal au tribunal administratif de Pau. La société alternative foncière Camiéta relève appel du jugement du 9 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau l'a condamnée au paiement d'une amende d'un montant de 1 500 euros ainsi que d'une somme de 600,36 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal, et lui a ordonné de remettre sans délai les lieux en l'état sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la notification du jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le mémoire en réplique produit par la société SNCF Réseau enregistré au greffe du tribunal le 19 octobre 2017 a été communiqué à la société alternative foncière Camiéta le 20 octobre 2017, soit deux jours avant la date de clôture de l'instruction intervenue, en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, trois jours francs avant l'audience du 26 octobre 2017, soit le 22 octobre 2017 à minuit. Ce mémoire était accompagné de pièces nouvelles relatives notamment à l'assermentation M. F... E..., auteur du procès-verbal dressé le 31 janvier 2017, ainsi qu'au refus de la société SNCF Réseau d'autoriser la construction des ouvrages litigieux sur l'emprise du domaine public ferroviaire. En statuant au vu de ces éléments sans que l'instruction n'ait été rouverte, le tribunal n'a pas laissé à la société alternative foncière Camiéta un délai suffisant pour y répondre et a, de ce fait, méconnu le caractère contradictoire de la procédure. Dès lors, le jugement doit être annulé pour ce motif.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les poursuites diligentées par la société SNCF Réseau devant le tribunal administratif de Pau tendant à la condamnation de la société alternative foncière Camiéta pour contravention de grande voirie.

Sur la régularité des poursuites :

4. Aux termes de l'article L. 2132-21 du code général de la propriété des personnes publiques alors applicable : " Sous réserve de dispositions législatives spécifiques, les agents de l'État assermentés à cet effet devant le tribunal de grande instance, les agents de police judiciaire et les officiers de police judiciaire sont compétents pour constater les contraventions de grande voirie ". Aux termes de l'article L. 2232-1 du code des transports dans sa rédaction applicable : " Les infractions aux dispositions du chapitre Ier sont constatées, poursuivies et réprimées comme en matière de grande voirie. / SNCF Réseau exerce concurremment avec l'État les pouvoirs dévolus à ce dernier pour la répression des atteintes à l'intégrité et à la conservation de son domaine public. / Les infractions aux dispositions du chapitre Ier peuvent en outre être constatées par les agents assermentés énumérés au I de l'article L. 2241-1 et par les agents assermentés des personnes ayant conclu une convention avec SNCF Réseau en application de l'article L. 2111-9 ". Enfin, en vertu des dispositions de l'article L. 2241-1 du même code : " I. - Sont chargés de constater par procès-verbaux les infractions aux dispositions du présent titre ainsi que les contraventions prévues par les règlements relatifs à la police ou à la sûreté du transport et à la sécurité de l'exploitation des systèmes de transport ferroviaire ou guidé, outre les officiers et les agents de police judiciaire : / (...) 3° Les agents assermentés missionnés du gestionnaire d'infrastructures de transport ferroviaire et guidé ; / 4° Les agents assermentés de l'exploitant du service de transport (...) ". Enfin, aux termes du troisième alinéa de l'article 23 de la loi du 15 juillet 1845 alors en vigueur : " Au moyen du serment prêté devant le tribunal de grande instance de leur domicile, les agents de surveillance de l'administration et des concessionnaires ou fermiers pourront verbaliser sur toute la ligne du chemin de fer auquel ils seront attachés ".

5. En premier lieu, le procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 31 janvier 2017 par M. F... E..., agissant en tant que dirigeant de l'unité UP voie Sud-Aquitaine, dépendant de la société SNCF Réseau. D'une part, il résulte des dispositions précitées que tant les agents assermentés missionnés par le gestionnaire d'infrastructures de transport ferroviaire que ceux du service de transport sont habilités à constater les infractions prévues par les dispositions des articles L. 2231-1 et suivants du code des transports. D'autre part, il résulte de l'instruction, et notamment des mentions de ce procès-verbal, qui font foi jusqu'à preuve contraire, ainsi que de la carte de commissionnement produite par la société SNCF Réseau, que M. E... a été régulièrement assermenté à cet effet devant le Tribunal de grande instance de Saintes en 2005 et habilité à constater ces infractions. Enfin, les dispositions du troisième alinéa de l'article 23 de la loi du 15 juillet 1845 n'ont ni pour objet ni pour effet de restreindre le champ géographique de la compétence de l'agent assermenté au regard de son lieu de prestation de serment. Par suite, le moyen tiré de ce que le procès-verbal du 31 janvier 2017 aurait été dressé par une autorité incompétente doit être écarté.

6. En deuxième lieu, un procès-verbal de contravention de grande voirie n'est pas au nombre des décisions devant être motivées en applications des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

7. En troisième lieu, il appartient au juge administratif saisi d'un procès-verbal de contravention de grande voirie de rechercher, même d'office, les dispositions législatives ou réglementaires auxquelles contreviennent les faits qui y sont rapportés. Dès lors, la société alternative foncière Camiéta ne peut utilement se prévaloir de ce que le procès-verbal dressé le 31 janvier 2017 ne fait pas mention des dispositions du code des transports fondant des poursuites pour prétendre qu'il serait irrégulier.

8. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que la mise en demeure adressée par la société SNCF Réseau à la société requérante le 20 juin 2016 indique que cette dernière a réalisé, sans autorisation, sur l'emprise ferroviaire contiguë à son programme immobilier Camiéta à Urrugne, des travaux consistant dans la réalisation d'un raccordement direct de ses bassins de rétention à l'exutoire de la voie ferrée, et cite intégralement les dispositions de l'article L. 2231-5 du code des transports. Le procès-verbal dressé le 31 janvier 2017 mentionne la " présence d'un bac d'évacuation d'eau sur terrain appartenant à la SNCF, avec évacuation des eaux sur les emprises ferroviaires sans autorisation préalable ". Dès lors, le moyen tiré de ce que les griefs figurant dans ce procès-verbal seraient différents de ceux mentionnés dans la mise en demeure du 20 juin 2016 doit, en tout état de cause, être écarté.

9. En cinquième et dernier lieu, si la société requérante soutient qu'elle n'a pas été rendue destinataire du constat d'huissier et des photographies mentionnés par le procès-verbal du 31 janvier 2017, celui-ci indique avec une précision suffisante l'auteur, la date, le lieu et les éléments constitutifs de l'infraction constatée. Au surplus, la société alternative foncière Camiéta ne soutient pas avoir effectué une quelconque diligence pour obtenir communication de ces éléments. Par ailleurs, ce procès-verbal indiquait, conformément aux prescriptions de l'article L. 774-2 du code de justice administrative, que la société alternative foncière était tenue, si elle voulait fournir des défenses écrites, de les déposer dans un délai de quinze jours, et lui a, ainsi, donné la possibilité de rassembler les éléments de preuve utiles à sa défense. Par suite, les moyens tirés de la violation des droits de la défense et des stipulations de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

Sur la prescription :

10. D'une part, aux termes de l'article L. 2132-2 du même code : " Les contraventions de grande voirie sont instituées par la loi ou par décret, selon le montant de l'amende encourue, en vue de la répression des manquements aux textes qui ont pour objet, pour les dépendances du domaine public n'appartenant pas à la voirie routière, la protection soit de l'intégrité ou de l'utilisation de ce domaine public, soit d'une servitude administrative mentionnée à l'article L. 2131-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 2132-27 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les contraventions définies par les textes mentionnés à l'article L. 2132-2, qui sanctionnent les occupants sans titre d'une dépendance du domaine public, se commettent chaque journée et peuvent donner lieu au prononcé d'une amende pour chaque jour où l'occupation est constatée, lorsque cette occupation sans titre compromet l'accès à cette dépendance, son exploitation ou sa sécurité ".

11. Tant que se poursuit l'occupation sans titre de la dépendance du domaine public, ces dispositions font obstacle à la prescription de l'action publique et permettent de prononcer une peine d'amende pour chaque jour où l'infraction est constatée. La société alternative foncière Camiéta ne peut donc utilement faire valoir, pour soutenir que l'action publique était prescrite à la date à laquelle le tribunal administratif de Pau a été saisi, que les ouvrages litigieux auraient été achevés et réceptionnés le 9 novembre 2015, dès lors qu'il est constant qu'ils ont été maintenus depuis cette date. Au surplus, il résulte de l'instruction que le procès-verbal constatant l'infraction a été dressé ainsi qu'il a été dit le 31 janvier 2017 et que le tribunal administratif de Pau a statué sur les poursuites le 9 novembre 2017. Par suite, le moyen tiré de la prescription de l'action publique doit être écarté.

12. D'autre part, le principe de l'imprescriptibilité du domaine public rappelé par les dispositions de l'article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques fait obstacle à ce que la prescription de l'action publique en matière de contravention de grande voirie s'applique à la réparation des dommages causés au domaine.

Sur le bien-fondé des poursuites :

13. Aux termes de l'article L. 2132-12 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les atteintes à l'intégrité ou à l'utilisation du domaine public ferroviaire sont fixées par les articles 2 et 11 de la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer ". Aux termes de l'article L. 2132-18 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les atteintes aux servitudes établies au profit du domaine public ferroviaire définies aux articles 3 et 5 à 9 de la loi du 15 juillet 1845 sont réprimées conformément aux dispositions des articles 11 et 23 de cette loi ". Aux termes de l'article L. 2231-5 du code des transports : " Aucune construction autre qu'un mur de clôture ne peut être établie dans une distance de deux mètres d'un chemin de fer ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 5 de la loi du 15 juillet 1845, maintenu en vigueur par l'effet des articles 7 et 9 de l'ordonnance du 28 octobre 2010 relative à la partie législative du code des transports : " Cette distance sera mesurée soit de l'arête supérieure du déblai, soit de l'arête inférieure du talus du remblai, soit du bord extérieur des fossés du chemin, et, à défaut d'une ligne tracée, à un mètre cinquante centimètres à partir des rails extérieurs de la voie de fer. " Enfin aux termes de l'article L. 2231-7 du même code : " Dans une distance de moins de cinq mètres d'un chemin de fer, aucun dépôt de quelque matière que ce soit ne peut être établi sans autorisation préalable de l'autorité administrative (...) ".

14. En premier lieu, il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal de constat du 31 janvier 2017 et du constat d'huissier du 11 juin 2015 que les ouvrages litigieux, consistent dans un bassin de rétention d'eau raccordé à un avaloir propriété de la société SNCF Réseau et permettant d'y rejeter les eaux pluviales issues du terrain du projet immobilier riverain des voies, aménagé par la société alternative foncière Camiéta. D'une part, ces ouvrages sont implantés sur la parcelle d'assiette des voies ferrées, au-delà du mur d'enceinte du projet immobilier Camiéta et à quelques mètres de l'arête du talus de la voie ainsi que de l'avaloir qui en est l'accessoire et auquel ils sont raccordés, et se trouvent donc sur le domaine public ferroviaire. D'autre part, il résulte de l'instruction que le bassin de rétention créé par la société requérante et son raccordement sont situés pour partie à une distance inférieure à deux mètres et intégralement à moins de cinq mètres de l'arête inférieure du talus du remblai. Enfin, il résulte également de l'instruction, notamment des courriers du 24 juin 2015, du 9 septembre 2015 et du 28 octobre 2015 produits par la société SNCF Réseau, que ces ouvrages n'ont pas reçu l'aval de celle-ci.

15. En deuxième lieu, il résulte du principe de l'inaliénabilité des biens du domaine public qu'ils ne peuvent être grevés de servitudes légales de droit privé. Par suite, le moyen tiré de ce que la société requérante serait titulaire d'une servitude d'écoulement des eaux pluviales sur le domaine public ferroviaire doit être écarté.

16. En troisième lieu, la personne qui peut être poursuivie pour contravention de grande voirie est soit celle qui a commis ou pour le compte de laquelle a été commise l'action qui est à l'origine de l'infraction, soit celle sous la garde de laquelle se trouvait l'objet qui a été la cause de la contravention. Par ailleurs, si la société requérante relève que le procès-verbal de constat indique seulement la " présence " d'un bac d'évacuation d'eau, elle ne conteste pas sérieusement avoir réalisé celui-ci. Dès lors, la société alternative foncière Camiéta ne peut utilement soutenir qu'elle a cédé la propriété des ouvrages litigieux à la commune d'Urrugne, alors qu'il est constant qu'elle les a réalisés.

17. En quatrième et dernier lieu, si la société alternative foncière Camiéta fait valoir que son intervention aurait été rendue nécessaire par le défaut d'entretien de l'ouvrage existant par la société SNCF Réseau, cette circonstance, à la supposer établie, ne constitue pas un fait de l'administration assimilable à un cas de force majeure de nature à l'exonérer de sa responsabilité.

18. Il résulte de ce qui précède que les infractions prévues par les articles L. 2231-5 et L. 2231-7 précités du code des transports sont constituées.

19. Aux termes de l'article L. 2132-26 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sous réserve des textes spéciaux édictant des amendes d'un montant plus élevé, l'amende prononcée pour les contraventions de grande voirie ne peut excéder le montant prévu par le 5° de l'article 131-13 du code pénal. Dans tous les textes qui prévoient des peines d'amendes d'un montant inférieur ou ne fixent pas le montant de ces peines, le montant maximum des amendes encourues est celui prévu par le 5° de l'article 131-13. Dans tous les textes qui ne prévoient pas d'amende, il est institué une peine d'amende dont le montant maximum est celui prévu par le 5° de l'article 131-13 ". Aux termes de l'article 131-13 du code pénal : " (...) Le montant de l'amende est le suivant : (...) 5° 1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5ème classe, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit, hors les cas où la loi prévoit que la récidive de la contravention est un délit ".

20. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société alternative foncière Camiéta au paiement d'une amende d'un montant de 1 500 euros.

21. Il y a également lieu de condamner la société alternative foncière Camiéta à remettre sans délai les lieux en état, si ce n'est déjà fait, et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de six mois suivant la notification du présent arrêt.

22. Enfin, il y a lieu de condamner la société alternative foncière Camiéta à verser à la société SNCF Réseau la somme de 600,36 euros au titre des frais d'établissement du procès-verbal de contravention de grande voirie, dont la société SNCF Réseau justifie.

Sur les frais liés au litige :

23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société SNCF Réseau, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, la somme que demande la société requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu de mettre à la charge de cette dernière une somme de 1 500 euros au bénéfice de la société SNCF Réseau à ce titre.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1700851 du tribunal administratif de Pau du 9 novembre 2017 est annulé.

Article 2 : La société alternative foncière Camiéta est condamnée au paiement d'une amende de 1 500 euros ainsi qu'aux frais d'établissement du procèsverbal du 31 janvier 2017 dressé à son encontre pour un montant de 600,36 euros.

Article 3 : La société alternative foncière Camiéta devra, sous le contrôle de l'administration, remettre sans délai, si elle ne l'a déjà fait, les lieux en l'état, sous peine d'une astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de six mois suivant la notification du présent arrêt. En cas d'inexécution par l'intéressée, passé ce délai, l'administration est autorisée à procéder d'office, aux frais de la société alternative foncière Camiéta, à la remise en état des lieux.

Article 4 : La société alternative foncière Camiéta versera à la société SNCF Réseau une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société SCCV alternative foncière Camiéta et à la société SNCF Réseau.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Didier Salvi, président,

M. A... B..., premier conseiller,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juin 2020.

Le président,

Didier Salvi

La République mande et ordonne à la ministre de la transition énergétique et solidaire, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18BX00031


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX00031
Date de la décision : 25/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

24-01-03-01 Domaine. Domaine public. Protection du domaine. Contraventions de grande voirie.


Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. David TERME
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CHAPENOIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-25;18bx00031 ?
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