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22/06/2020 | FRANCE | N°18BX02408

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 22 juin 2020, 18BX02408


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2015 par lequel le président du conseil régional Poitou-Charentes a refusé de la titulariser et, d'autre part, d'enjoindre à la région Nouvelle-Aquitaine de la réintégrer et de la titulariser.

Par un jugement n° 1600956 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de Mme C....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en répliqu

e, enregistrés les 20 juin 2018 et 14 mai 2019, Mme D... C..., représentée par Me E..., demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2015 par lequel le président du conseil régional Poitou-Charentes a refusé de la titulariser et, d'autre part, d'enjoindre à la région Nouvelle-Aquitaine de la réintégrer et de la titulariser.

Par un jugement n° 1600956 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de Mme C....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 juin 2018 et 14 mai 2019, Mme D... C..., représentée par Me E..., demande à la cour ;

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 2 mai 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2015 par lequel le président du conseil régional Poitou-Charentes a refusé de la titulariser ;

3°) d'enjoindre à la région Nouvelle-Aquitaine de la réintégrer et de la titulariser en qualité d'adjoint technique territorial de 2è classe des établissements d'enseignement ;

4°) de mettre à la charge de la région Nouvelle-Aquitaine la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale.

Elle soutient que :

- son refus de titularisation est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; pendant toutes les années où elle a exercé ses fonctions, elle n'a pas eu le moindre reproche et avait même des appréciations élogieuses ; de même, son entretien professionnel de 2015 montre qu'elle a toujours donné satisfaction dans l'accomplissement de ses fonctions et ce, depuis 2007, et malgré ses problèmes de dos et articulaires ; d'ailleurs, son poste n'a jamais été aménagé malgré ses demandes ; pourtant, son contrat a été constamment renouvelé ; la région a travesti la réalité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 septembre 2018, la région Nouvelle-Aquitaine, représentée par le Cabinet Claisse et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 4 juin 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 juillet 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique ;

- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 2007-913 du 15 mai 2007 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignements ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- et les conclusions de M. A... B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... C... a été embauchée, à compter de 2005, en tant qu'agent contractuel vacataire ou temporaire, par divers contrats à durée déterminée avec la région Poitou-Charentes, pour assurer des fonctions d'agent d'entretien dans différents établissements d'enseignement. A compter du 1er mai 2014, elle a été recrutée par la région Poitou-Charentes en qualité d'adjoint technique territorial des établissements d'enseignement (ATTEE) de 2è classe stagiaire, sur un poste d'agent d'entretien polyvalent au lycée de la mer et du littoral à Bourcefranc-le-Chapus (Charente-Maritime). Cependant, après une prolongation de stage de 6 mois, la région a pris la décision, par un arrêté du 23 novembre 2015, de ne pas la titulariser, sur un motif d'insuffisance professionnelle. Mme C... fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 2 mai 2018, qui a rejeté la demande de Mme C... tendant à l'annulation de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint à la région Nouvelle-Aquitaine, venant aux droits et obligations de la région Poitou-Charentes, de la réintégrer et de la titulariser.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. D'une part, aux termes de l'article 46 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté litigieux : " La nomination (...) à un grade de la fonction publique territoriale présente un caractère conditionnel. La titularisation peut être prononcée à l'issue d'un stage dont la durée est fixée par le statut particulier. (...) / L'agent peut être licencié au cours de la période de stage en cas d'insuffisance professionnelle ou de faute disciplinaire et après avis de la commission administrative paritaire compétente. ". Aux termes de l'article 4 du décret du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale : " La durée normale du stage et les conditions dans lesquelles elle peut éventuellement être prorogée sont fixées par les statuts particuliers des cadres d'emplois. / Sous réserve de dispositions contraires prévues par ces statuts et de celles résultant des articles 7 et 9 du présent décret, la durée normale du stage est fixée à un an. Elle peut être prorogée d'une période au maximum équivalente, après avis de la commission administrative paritaire compétente, si les aptitudes professionnelles du stagiaire ne sont pas jugées suffisantes pour permettre sa titularisation à l'expiration de la durée normale du stage. (...) ". L'article 5 de ce même décret dispose : " Le fonctionnaire territorial stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. / Le licenciement est prononcé après avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d'emplois dans lequel l'intéressé a vocation à être titularisé. (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 4 du décret du 15 mai 2007 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement : " Les agents classés au grade d'adjoint technique territorial des établissements d'enseignement sont notamment chargés de fonctions d'entretien courant des locaux et des surfaces non bâties des établissements d'enseignement, qui incluent le maintien en bon état de fonctionnement des installations et la participation aux services de magasinage et de restauration. (...) ". Aux termes de l'article 9 du même décret : " Les candidats recrutés en qualité d'adjoint technique territorial des établissements d'enseignement (...) sont nommés stagiaires par l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination pour une durée d'un an. (...) ". Aux termes de l'article 11 dudit décret : " A l'issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés par décision de l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination au vu notamment d'une attestation de suivi de la formation d'intégration établie par le Centre national de la fonction publique territoriale./ Les autres stagiaires peuvent, sur décision de l'autorité territoriale, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d'une durée maximale d'un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés. Les adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement stagiaires et les adjoints techniques territoriaux principaux de 2e classe des établissements d'enseignement stagiaires qui n'ont pas été autorisés à effectuer un stage complémentaire, ou dont le stage complémentaire n'a pas été jugé satisfaisant, sont soit licenciés s'ils n'avaient pas auparavant la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur grade d'origine. ".

4. Pour prononcer le licenciement de Mme C..., à l'issue de la période de 6 mois de prorogation de stage qui lui a été accordée, le président du conseil régional de la région Poitou-Charentes a décidé, après avis de la commission paritaire du 17 novembre 2015, de mettre fin à son stage et de ne pas prononcer sa titularisation, " au vu des bilans négatifs de votre activité indiquant clairement des compétences professionnelles insuffisantes et un manque d'investissement dans vos missions ". Mme C... conteste le motif de ce licenciement, en faisant valoir que, depuis qu'elle exerce des fonctions d'agent d'entretien polyvalent dans des établissements d'enseignement, soit depuis 2005, elle a toujours donné satisfaction dans l'accomplissement de ses missions et que, d'ailleurs, ses différents contrats ont toujours été renouvelés. A l'appui de ses allégations, elle produit une attestation en date du 23 novembre 2015 du chef de cuisine au lycée de la mer et du littoral, affirmant qu'en raison tant de sa ponctualité que de son sens de l'organisation, il ne voyait pas " en quoi Mme C... aurait pu ne pas remplir les tâches qui sont les siennes ". Si elle produit également son entretien professionnel 2015, en date du 2 novembre 2015, l'évaluation qui en résulte est assez mitigée, faisant apparaître un certain nombre de points acquis, mais d'autres en cours d'acquisition, avec la nécessité de participer à des " formations qualifiantes et d'amélioration en tous points au niveau du travail en équipe ". Enfin, si elle produit également une fiche d'appréciation très favorable, celle-ci date de juin 2007. De son côté, la région produit trois bilans de stage de Mme C..., à 6 mois, à un an et à un an et 6 mois, le compte-rendu d'un entretien professionnel en date du 24 septembre 2015, ainsi qu'un rapport d'évaluation de fin de stage en date du 3 novembre 2015. Il en ressort de façon tout à fait constante, un manque de motivation, d'initiative et d'investissement de l'intéressée dans ses fonctions, un comportement qui n'est pas conforme aux attentes de l'établissement, en particulier en raison de relations distantes voire difficiles avec ses collègues et d'un manque d'esprit d'équipe et d'intérêt pour les missions de ceux-ci, un manque de respect des consignes voire même des obligations de sa fiche de poste, ainsi qu'une insuffisante maîtrise des protocoles de nettoyage et d'hygiène malgré une ancienneté de 11 ans dans l'établissement et une méconnaissance de la réglementation. Il ressort également de ces différents rapports ou bilans que toutes ces observations lui ont été faites à 6 mois de stage et ont été réitérées à maintes reprises, sans qu'elle change son comportement, son évaluation de stage au 2 avril 2015 relevant que : " Mme C... tient sa titularisation pour acquise, ce qui l'empêche probablement d'avoir du recul sur ses capacités et de chercher à s'améliorer ". Dans ces conditions, les éléments produits par la requérante ne suffisent pas à contredire l'ensemble des appréciations effectuées tout au long de son stage, qui a au demeurant été prolongé. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré qu'en ayant refusé de titulariser l'intéressée à l'issue de son stage complémentaire, le président du conseil régional de Poitou-Charentes n'avait pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

5. Par ailleurs, et en admettant que la requérante ait entendu se prévaloir d'un détournement de pouvoir, celui-ci n'est pas établi par les pièces du dossier.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation de Mme C.... Par suite, ses conclusions à fins de réintégration et de titularisation ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. A supposer que Mme C... ait entendu viser ce fondement, il n'y a pas lieu, en tout état de cause, de mettre à la charge de la région Nouvelle-Aquitaine, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la requérante. Il n'y a pas non plus lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... la somme que demande la région sur le fondement de l'article l. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la région Nouvelle-Aquitaine sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et à la région Nouvelle-Aquitaine.

Délibéré après l'audience du 25 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

Mme Karine Butéri, président-assesseur,

Mme F..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 juin 2020.

Le président,

Pierre Larroumec

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 18BX02408 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02408
Date de la décision : 22/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : CABINET CLAISSE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-22;18bx02408 ?
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