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08/06/2020 | FRANCE | N°19BX04343

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 08 juin 2020, 19BX04343


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler 1'arrêté du 21 février 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé et lui a interdit de revenir sur le territoire français durant deux ans.

Par un jugement n° 1902095 du 24 juin 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la de

mande de M. D....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 novem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler 1'arrêté du 21 février 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours, a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé et lui a interdit de revenir sur le territoire français durant deux ans.

Par un jugement n° 1902095 du 24 juin 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de M. D....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 24 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du préfet de la Gironde du 21 février 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, sous astreinte de 80 euros par jour de retard après le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros à verser à Me B....

Il soutient que :

En ce qui concerne le refus de séjour :

- son signataire était incompétent ;

- il est entaché d'un défaut de motivation ;

- il méconnaît l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît l'article L. 313-11-7° du même code et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation à cet égard ;

- il méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation à cet égard ;

- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la mesure d'éloignement :

- son signataire était incompétent :

- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;

- elle méconnaît l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article L. 511-1 du même code ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

- son signataire était incompétent ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 16 janvier 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 février 2020.

Par une décision en date du 24 octobre 2019, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. D....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de 1'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et 1'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... D..., ressortissant congolais (République démocratique du Congo), né en 1992, est entré irrégulièrement en France le 22 juillet 2012 selon ses dires. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 18 juin 2013 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 28 janvier 2014. Il a toutefois obtenu un titre de séjour pour raisons de santé valable du 3 juillet 2014 au 2 juillet 2015, dont le préfet de la Gironde a refusé le renouvellement, par un arrêté du 27 avril 2016. S'étant maintenu irrégulièrement sur le territoire français, M. D... a présenté une nouvelle demande de titre de séjour pour raisons de santé, le 11 août 2017. Par un arrêté du 21 février 2019, le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer le titre sollicité, l'a obligé à quitter le territoire dans le délai de 30 jours, a fixé le pays dont il a la nationalité comme pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé et lui a interdit le retour pendant deux ans. M. D... fait appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 20 novembre 2019, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la compétence du signataire des décisions contestées :

2. Comme l'ont déjà relevé les premiers juges, M. Thierry Suquet, secrétaire général de la préfecture de la Gironde, qui a signé l'arrêté attaqué, bénéficiait d'une délégation du préfet en date du 25 janvier 2019, qui n'est pas subordonnée à l'empêchement de celui-ci, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture et qui n'avait donc pas à être " notifiée par écrit ", à l'effet de signer tous arrêtés concernant les attributions de l'Etat dans le département à l'exception de trois catégories d'actes, dont ne font pas partie les décisions attaquées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté, comme de toutes les décisions qui y sont contenues, ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne le refus de séjour :

3. En premier lieu, ce refus vise les textes dont il fait application et rappelle, de manière détaillée, la situation médicale, administrative, familiale et professionnelle du requérant. Par suite, il est suffisamment motivé.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'annexe II de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " C. - Points particuliers concernant les pathologies les plus fréquemment concernées : a) Les troubles psychiques et les pathologies psychiatriques. Les informations suivantes doivent en principe être recueillies : description du tableau clinique, critères diagnostiques, en référence à des classifications reconnues (classification internationale des maladies : CIM10, ou manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux : DSM 5). Il est également important que soient précisés, lorsque ces éléments sont disponibles, la gravité des troubles, son suivi et les modalités de prise en charge mises en place. L'importance dans ce domaine de la continuité du lien thérapeutique (lien patient-médecin) et du besoin d'un environnement/entourage psycho social familial stable (eu égard notamment à la vulnérabilité particulière du patient) doit être soulignée. / Le problème des états de stress post-traumatique (ESPT) est fréquemment soulevé, notamment pour des personnes relatant des violences, tortures, persécutions, traitements inhumains ou dégradants subis dans le pays d'origine. La réactivation d'un ESPT, notamment par le retour dans le pays d'origine, doit être évaluée au cas par cas (...). ".

5. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif saisi de l'affaire, au vu des pièces du dossier et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi et de la possibilité d'y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi et la possibilité d'en bénéficier effectivement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

6. L'avis du collège des médecins de l'OFII rendu le 5 juillet 2018 indique que l'état de santé de M. D... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine.

7. M. D... fait valoir qu'il souffre de schizophrénie, de troubles bipolaires et de dépression, en raison des traumatismes qu'il aurait subi dans son pays d'origine alors qu'il était un militant d'opposition actif, que la continuité du lien thérapeutique au sens du C a) de l'annexe II de l'arrêté ministériel du 5 janvier 2017 susvisé est fondamentale pour lui dès lors qu'il est soigné depuis 6 ans en France, qu'un retour dans son pays d'origine ne pourrait qu'aggraver ses pathologies psychiques et qu'il ne pourra y avoir accès à un traitement approprié. Pour contredire l'avis du collège des médecins de l'OFII, il produit des ordonnances et deux certificats du Dr Mestre, psychiatre-psychothérapeute au CHU Pellegrin. Cependant, d'une part, M. D... n'établit pas, ni même n'allègue, que certaines des spécialités pharmaceutiques qui y figurent, ou les molécules équivalentes, ne seraient pas disponibles dans son pays d'origine. D'autre part, les certificats établis par le Dr Mestre, qui sont au demeurant postérieurs à l'arrêté contesté, se bornent à énoncer de façon générale, tout comme la fiche de " renseignement de l'analyse-pays " éditée par l'OSAR et datée de mai 2013, que " l'accès aux soins psychiatriques en RDC est très problématique voire nul pour les personnes pauvres ". Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel s'apprécie à la date de la décision attaquée, doit être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1.- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2.- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

9. M. D... fait valoir qu'il est en France depuis 2012 sans jamais être retourné dans son pays d'origine, a pour compagne Mme A... chez laquelle il vit, une compatriote résidant régulièrement en France et mère d'un enfant mineur dont il s'occupe, et qu'il justifie d'une bonne intégration sociale, ayant déjà occupé des emplois en intérim et suivi des cours de langue française. Cependant, il n'établit pas la réalité et la stabilité de sa relation avec Mme A..., ne fait état d'aucune ressource stable, ne démontre pas avoir des attaches familiales en France ni en être dépourvu en RDC où résident a minima son enfant mineur et sa mère et où il a vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, et alors en outre qu'il est entré irrégulièrement en France et n'a pas déféré à la mesure d'éloignement que lui a fait le préfet de la Gironde le 27 avril 2016, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, ledit préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et, par suite, n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) ".

11. Il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à la situation de M. D..., telle qu'elle a été décrite précédemment, que les éléments qu'il invoque constitueraient des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

12. En dernier lieu, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques encourus par M. D... en cas d'éloignement vers la RDC est inopérant à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour, qui n'a ni pour objet ni pour effet de renvoyer l'intéressé vers son pays d'origine.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

13. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance (...) d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) ".

14. La mesure d'éloignement n'étant pas privée de base légale en raison de l'illégalité du refus de séjour, le préfet de la Gironde pouvait légalement, sur le fondement de ces dispositions, assortir ce refus d'une mesure portant éloignement de l'intéressé.

15. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-4, 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) ". Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus aux points 7 et 9 que M. D... n'est pas fondé à invoquer le bénéfice de ces dispositions. Par suite, en ne les lui appliquant pas, le préfet de la Gironde n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de M. D....

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

16. M. D... ne peut utilement invoque l'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

17. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence des cas prévus au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

18. En premier lieu, M. D... ne peut utilement invoquer l'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement à l'encontre de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français.

19. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées qu'il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans sa durée, dans l'hypothèse du premier alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou dans son principe et dans sa durée, dans l'hypothèse du quatrième alinéa du III de cet article, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

20. En l'espèce, en visant explicitement le quatrième alinéa du III, puis en relevant que l'examen de l'ensemble de la situation de l'intéressé ne faisait apparaître aucune circonstance humanitaire particulière, qu'il ne justifiait pas de nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, sans faire état de la relation invoquée avec Mme A... laquelle, comme cela a été dit ci-dessus, n'est pas établie, et que, compte-tenu des circonstances propres au cas d'espèce, déjà exposées de façon circonstanciées par l'arrêté, la durée de cette interdiction ne portait pas une atteinte disproportionnée au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale, le préfet de la Gironde a suffisamment motivé la mesure en litige.

21. En dernier lieu, alors même que M. D... ne constitue pas une menace à l'ordre public, il a été destinataire d'une précédente mesure d'éloignement qu'il n'a pas exécutée. Il ne justifie pas de liens profonds et stables en France. Dans ces conditions, bien qu'il vive en France depuis plus de six ans, le préfet de la Gironde n'a pas commis d'erreur d'appréciation en prenant à son encontre une interdiction de retour pour la durée maximale de deux ans.

22. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

23. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. D.... Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. D... demande le versement à son conseil sur ces fondements.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

Mme Karine Butéri, président-assesseur,

Mme E..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 juin 2020.

Le président,

Pierre Larroumec

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX04343 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04343
Date de la décision : 08/06/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : MARAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-08;19bx04343 ?
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