Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 12 décembre 2018 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de renouveler son autorisation provisoire de séjour et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois.
Par un jugement n° 1900726 du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 octobre 2019, Mme B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 29 mai 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde du 12 décembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou à défaut de procéder au réexamen de sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour :
- elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière en raison du fait qu'il n'est pas justifié par une simple mention manuscrite du nom du médecin rapporteur et qu'il n'a pas siégé au sein du collège des médecins de l'OFII ;
- elle est entachée d'une erreur de droit car le préfet s'est estimé en situation de compétence liée par rapport à l'avis rendu par le collège ;
- la décision attaquée méconnait le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision contestée est privée de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 janvier 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens de la requérante ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2019.
Par ordonnance du 17 janvier 2020, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 17 février 2020 à 12h00.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... E..., a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., de nationalité congolaise, née le 29 décembre 1978, est entrée en France en 2013. Après le rejet définitif de sa demande d'admission au bénéfice de l'asile par la Cour nationale du droit d'asile, le 5 février 2016, elle a fait l'objet le 29 février 2016 d'un arrêté, pris par le préfet de la Gironde, lui refusant le séjour et l'obligeant à quitter le territoire français. Mme B... n'a pas exécuté cet arrêté et a sollicité son admission au séjour en qualité d'étranger malade. Elle a bénéficié, à ce titre, à compter du 17 février 2017 d'autorisations provisoires de séjour pour raison de santé dont elle a sollicité le renouvellement le 13 novembre 2017. Par un arrêté du 12 décembre 2018, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme B... relève appel du jugement n° 1900726 du 29 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi du 7 mars 2016 relative aux droits des étrangers en France : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Selon l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...). " Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...). Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. (...) / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. ".
3. En premier lieu, il ressort des pièces versées au dossier par le préfet, en particulier de l'indication manuscrite du nom du médecin qui a établi le rapport médical, et sans que la requérante ne fasse valoir aucun élément de nature à établir que cette mention serait erronée, que le rapport sur l'état de santé de Mme B... prévu à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été établi par un premier médecin le 31 mai 2018 pour être soumis au collège de médecins. Ce collège au sein duquel ont siégé trois autres médecins dont les noms et signatures figurent sur l'avis, s'est réuni le 20 juin 2018 pour émettre l'avis qui a été transmis au préfet de la Gironde. Par suite, l'avis du collège de médecins a bien été émis au vu d'un rapport médical, dans une composition qui ne méconnaît pas la règle fixée à l'article R. 313-23 précité du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile selon laquelle le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. Dès lors le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.
4. En deuxième lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté attaqué ni des autres pièces du dossier que le préfet de la Gironde se serait cru en situation de compétence liée, compte tenu de l'avis rendu par le collègue de médecins de l'OFII, pour refuser à Mme B... la délivrance d'un titre de séjour et aurait omis de procéder à un examen complet de la situation personnelle de l'intéressée.
5. En troisième lieu, Mme B... reprend, dans des termes identiques et sans critiques utiles du jugement, son moyen de première instance tiré de ce que la décision de refus de séjour méconnaitrait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, il y a lieu, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Si Mme B..., entrée en France en 2013, fait valoir qu'elle est bien intégrée dans la société française et qu'elle a exercé une activité professionnelle régulière en tant qu'agent polyvalent au sein de l'association sociale pour l'emploi depuis juillet 2017, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'elle est entrée en France à l'âge de 35 ans et n'a été autorisée à y résider temporairement que durant le temps de l'examen de sa demande d'asile puis pour des motifs liés à son état de santé. Mme B... est célibataire et n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident notamment son mari et deux de ses enfants. En outre, les ressources mensuelles de Mme B... sont en moyenne inférieures au salaire minimum interprofessionnel de croissance. Elle est d'ailleurs logée par un centre d'hébergement et de réinsertion sociale. Dans ces conditions, et en dépit du fait que la fille aînée de la requérante soit titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle en qualité d'étudiante et poursuive une scolarité exemplaire, les décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français, qui ne remettent pas en cause le droit au séjour de sa fille majeure, ne portent pas au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision de refus de séjour sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
8. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale doit être écarté.
9. Le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde du 12 décembre 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2020 à laquelle siégeaient :
M. C... E..., président,
Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller,
M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 20 mai 2020.
Le président-rapporteur,
Philippe E...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX04048