Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... F... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 9 décembre 2016 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier (CDAF) de la Charente-Maritime a rejeté sa réclamation tendant à la contestation du plan d'aménagement foncier et agricole arrêté par la commission communale d'aménagement foncier de Clerac.
Par un jugement n° 1701158 du 7 mars 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 avril 2018 et un mémoire complémentaire enregistré le 19 juin 2018 ainsi que des pièces déposées le 4 novembre 2019, M. F..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 7 mars 2018 ;
2°) d'annuler la décision du 9 décembre 2016 de la commission départementale d'aménagement foncier de la Charente-Maritime ;
3°) de mettre à la charge du département de la Charente-Maritime une somme de 1 600 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de la CDAF est insuffisamment motivée ;
- la valeur des apports est supérieure à celle des attributions ; les conditions et l'équilibre de l'exploitation des parcelles qui lui sont attribuées ne sont pas à son avantage. Il subit un déséquilibre de compte et une aggravation des conditions d'exploitation forestière et un déséquilibre de la structure d'exploitation ;
- il est lésé par le nouveau bornage des parcelles qui lui ont été attribuées et qui ne correspondent pas à la limite de propriété.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2018, le département de la Charente-Maritime, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. F... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 4 novembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 4 décembre 2019 à 12h00.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. G... E...,
- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant le département de la Charente-Maritime.
Considérant ce qui suit :
1. Dans le cadre des opérations relatives à réalisation de la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique, la commission communale d'aménagement foncier (CCAF) de Clérac en Charente-Maritime a adopté un plan d'aménagement foncier concernant notamment des terres situées sur la commune. M. C... F... a formulé une réclamation qui a été rejetée par la CCAF le 16 avril 2016 et son recours exercé auprès de la commission départementale d'aménagement foncier (CDAF) a ensuite été rejeté le 9 décembre 2016. M. F..., qui a demandé au tribunal administratif de Poitiers l'annulation de cette dernière décision, relève appel du jugement du 7 mars 2018 par lequel le tribunal a rejeté sa requête.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, M. F... soutient en appel, comme il le faisait en première instance, sans faire valoir aucun élément nouveau, que la décision en litige est insuffisamment motivée et qu'il serait lésé par le nouveau bornage des parcelles qui lui ont été attribuées qui ne correspondrait pas à la limite de propriété. Il y a lieu, cependant d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 123-1 du code rural et de la pêche maritime : " L'aménagement foncier agricole, applicable aux propriétés rurales non bâties, se fait au moyen d'une nouvelle distribution des parcelles morcelées et dispersées. / Il a principalement pour but, par la constitution d'exploitations rurales d'un seul tenant ou à grandes parcelles bien groupées, d'améliorer l'exploitation agricole des biens qui y sont soumis. Il doit également avoir pour objet l'aménagement rural du périmètre dans lequel il est mis en oeuvre. / (...)". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 123-4 du même code : " Chaque propriétaire doit recevoir, par la nouvelle distribution, une superficie globale équivalente, en valeur de productivité réelle, à celle des terrains qu'il a apportés, déduction faite de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs mentionnés à l'article L. 123-8 et compte tenu des servitudes maintenues ou créées. " Ces dispositions ne garantissent pas aux propriétaires ni une égalité absolue entre la surface qui leur est attribuée et celle de leurs apports, ni une équivalence parcelle par parcelle ou classe par classe entre ces terres. Les commissions d'aménagement foncier sont seulement tenues d'attribuer des lots équivalents en valeur de productivité réelle aux apports de chaque propriétaire après déduction de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs. Enfin, l'aggravation éventuelle des conditions d'exploitation doit être appréciée, non parcelle par parcelle mais pour l'ensemble d'un compte de propriété.
4. M. F... soutient que la valeur des apports est supérieure à celle des attributions et que les conditions et l'équilibre de l'exploitation des parcelles qui lui sont attribuées ne sont pas à son avantage.
5. Cependant, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que M. F..., qui dispose de deux comptes de propriété, a reçu pour le compte de propriété n° 345 (ancien compte n° 17200), 2 ha 11 ares 70 ca de terres en échange d'apports de 2 ha 9 ares et 85 ca, et pour le compte 346 (ancien compte 19840), la surface des parcelles apportées est de 62 ares 52 centiares alors que la surface des parcelles attribuées ressort à 63 ares et 79 centiares.
6. D'autre part, la fiche de valorisation des boisements établie dans le cadre de l'opération en cause indique que concernant le compte 345, la valorisation des boisements ressort à 558,58 points pour les parcelles d'apport et 560,46 pour les parcelles d'attribution, soit une différence de 1,87 points en faveur de M. F...,, et concernant le compte 346 la valorisation ressort à 0 pour les parcelles d'apport et à 7 pour les parcelles d'attribution, soit une différence à son avantage de 7. A cet égard, si M. F... soutient qu'il subirait un déficit de valorisation de 70 % en s'appuyant sur une note de deux pages réalisées en mai 2018 par un géomètre expert, cette affirmation n'est cependant pas justifiée ni démontrée par les seules affirmations de l'expert qui se contente de critiquer la méthodologie suivie par le cabinet d'experts ayant réalisé l'expertise forestière de juin 2017 qui a servi de base au projet d'aménagement.
7. Ainsi, pour chacun de ses comptes, et alors notamment que M. F... s'est vu attribuer des parcelles ayant une valeur de boisement supérieure à ses apports, la règle d'équivalence ne peut être regardée comme ayant été méconnue.
8. Enfin, concernant les conditions d'exploitation, il ressort des pièces du dossier que les parcelles d'attribution qui ont été choisies jouxtent celles appartenant déjà au requérant ce qui ne peut que les améliorer.
9. Dans ces conditions, M. F..., qui ne subit aucun déséquilibre de compte ni aggravation des conditions d'exploitation de ses parcelles n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de la décision en litige.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département de la Charente-Maritime, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. F... de la somme qu'il sollicite au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. F... la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le département de la Charente-Maritime.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : M. F... versera une somme de 1 500 euros au département de la Charente-Maritime au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... F... et au département de la Charente-Maritime.
Copie en sera adressée au préfet de la Charente-Maritime.
Délibéré après l'audience du 20 février 2020 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Pouzoulet, président,
M. G... E..., président-assesseur,
M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 20 mai 2020.
Le président,
Philippe Pouzoulet
La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX01715