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19/05/2020 | FRANCE | N°18BX01317

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 19 mai 2020, 18BX01317


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Saba France, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er avril 2009 au 31 décembre 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1600424 du 31 janvier 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 avri

l 2018, et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 8 juillet et 6 septembre 2019, la sociét...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Saba France, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er avril 2009 au 31 décembre 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1600424 du 31 janvier 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 avril 2018, et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 8 juillet et 6 septembre 2019, la société Saba France, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 31 janvier 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er avril 2009 au 31 décembre 2012, ainsi que des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- au cours de la vérification de comptabilité, le vérificateur n'a pas mis en oeuvre un véritable débat oral et contradictoire ;

- en matière d'escompte d'effets de commerce, la taxe n'est exigible qu'au paiement par le client final, et non à la date à laquelle l'escompte a été porté sur le compte bancaire ; l'administration n'a pas tenu compte des effets non échus non encaissés au cours de l'année ;

- le service a retenu à tort des avances de trésorerie et des emprunts comme chiffre d'affaires imposable à la taxe sur la valeur ajoutée ;

- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas motivée ;

- l'administration n'établit pas l'existence d'un manquement délibéré ;

- la pénalité pour manquement délibéré est disproportionnée par rapport aux griefs retenus.

Par trois mémoires, enregistrés les 19 octobre 2018, 5 septembre 2019 et 24 septembre 2019, et des pièces complémentaires, enregistrées le 6 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 27 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 16 octobre 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Romain Roussel, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,

- et les observations de Me C... substituant Me B..., représentant la société Saba France.

Considérant ce qui suit :

1. La société Saba France, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, qui exerce une activité d'animation et de mise en place de produits de charcuterie dans les rayons de supermarchés, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a relevé des insuffisances de taxe sur la valeur ajoutée collectée et un excédent de taxe déduite sur la période du 1er avril 2009 au 31 décembre 2012. Il en a découlé, au titre de cette période, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes. La société Saba France relève appel du jugement du 31 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels et pénalités correspondantes.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Il est constant que la vérification de comptabilité de la société Saba France s'est déroulée du 19 avril au 17 octobre 2013 et a donné lieu à plusieurs interventions du vérificateur au siège de l'entreprise. La société requérante ne démontre pas que le vérificateur se serait refusé à tout échange de vue lors de ses opérations de contrôle sur place. Dans ces conditions, le moyen tiré par la société Saba France de ce qu'elle aurait été privée, lors de ce contrôle, de la possibilité d'un débat oral et contradictoire ne saurait être accueilli.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

3. Aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Aux termes du 1 de l'article 266 du même code : " La base d'imposition est constituée : / a. Pour (...) les prestations de services (...), par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers (...) ". Aux termes de l'article 269 du même code : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : a) Au moment où (...) la prestation de services est effectuée (...) / 2. La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de services autres que celles visées au b bis, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. / En cas d'escompte d'un effet de commerce, la taxe est exigible à la date du paiement de l'effet par le client (...) ". A compter du 1er janvier 2011, ce dernier alinéa dispose que, " En cas d'escompte d'effet de commerce ou de transmission de créance, l'exigibilité intervient respectivement à la date du paiement de l'effet par le client ou à celle du paiement de la dette transmise entre les mains du bénéficiaire de la transmission ". Enfin, aux termes du 1 de l'article 272 du même code : " La taxe sur la valeur ajoutée qui a été perçue à l'occasion de ventes ou de services est imputée ou remboursée dans les conditions prévues à l'article 271 lorsque ces ventes ou services sont par la suite résiliés ou annulés ou lorsque les créances correspondantes sont devenues définitivement irrecouvrables. (...) / L'imputation ou la restitution est subordonnée à la justification, auprès de l'administration, de la rectification préalable de la facture initiale ".

4. Pour reconstituer le chiffre d'affaires encaissé de la période en litige, l'administration fiscale a retenu les encaissements bancaires de chacune des périodes du 1er avril 2009 au 31 mars 2010, du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 et du 1er avril 2011 au 31 mars 2012, corrigé des effets non échus à l'ouverture et à la clôture de chaque période.

5. D'une part, il résulte de l'instruction, en particulier du tableau figurant en annexe 3 de la proposition de rectification, que, contrairement à ce que soutient la société requérante, le service a bien tenu compte de la circonstance que les escomptes des effets de commerce n° 860195 et 865026 d'un montant de 10 000 euros chacun étaient restés impayés au 31 décembre 2012. Il résulte encore de l'instruction que l'escompte de l'effet de commerce n° 861039 d'un montant de 10 000 euros a donné lieu à un versement du même montant le 28 septembre 2012. La taxe due à ce titre était donc exigible en septembre 2012, ainsi que l'a estimé l'administration.

6. D'autre part, il résulte des mêmes pièces figurant en annexe de la proposition de rectification que le service a tenu compte de l'existence de nombreux prêts et avances de trésorerie consenties à la société Saba France. En se bornant à produire des extraits de comptes bancaires sur lesquels figurent des numéros de chèques, ainsi que des copies de chèques et de remises de chèques, la société requérante n'apporte pas d'éléments permettant d'estimer que les sommes correspondantes seraient constitutives de prêts ou avances que le service aurait omis de prendre en compte, alors surtout que plusieurs de ces documents concernent des versements que l'administration a exclu des bases taxables comme ayant le caractère de prêts ou avances, ainsi que cela résulte notamment de l'annexe 2 à la proposition de rectification.

Sur les pénalités :

7. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public (...) ". Aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors applicable : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) - infligent une sanction (...) ". Aux termes de l'article 3 de la loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

9. La proposition de rectification cite l'article 1729 du code général des impôts et indique qu'il sera fait application d'une pénalité de 40 % pour manquement délibéré. Elle précise que, compte tenu du montant en litige, de l'activité de la requérante et d'un précédent contrôle fiscal en 2008, la société requérante ne pouvait ignorer que la taxe collectée devait être reversée. Par suite, le document adressé à la société Saba France comprend les considérations de droit et de fait ayant conduit à l'application de la pénalité en litige et répond ainsi à l'obligation de motivation prévue par les dispositions précitées de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales.

10. En second lieu, d'une part, il est constant que certaines périodes visées par la vérification de comptabilité ont donné lieu à des omissions déclaratives. D'autre part, il résulte de l'instruction que la société Saba France avait déjà fait l'objet en 2008 d'un contrôle fiscal qui avait révélé les mêmes manquements. L'administration a ainsi apporté la preuve lui incombant du caractère délibéré de la dissimulation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Saba France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme que demande la société Saba France au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Saba France est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Saba France et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2020 à laquelle siégeaient :

Mme D... A..., présidente,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

M. Romain Roussel, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 mai 2020.

La présidente,

Elisabeth A... La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX01317


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01317
Date de la décision : 19/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Romain ROUSSEL
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : CABINET SIRIEZ - ADVEO AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-05-19;18bx01317 ?
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