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14/05/2020 | FRANCE | N°19BX02990

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 14 mai 2020, 19BX02990


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2018 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par une ordonnance n° 1901148 du 24 juillet 2019, le vice-président du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 août 2019

et un mémoire complémentaire enregistré le 19 décembre 2019, Mme A..., représentée par Me B..., dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2018 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par une ordonnance n° 1901148 du 24 juillet 2019, le vice-président du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 août 2019 et un mémoire complémentaire enregistré le 19 décembre 2019, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 24 juillet 2019 du vice-président du tribunal administratif de Mayotte ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du 17 décembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Mayotte de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée est insuffisamment motivée dès lors que le premier juge n'a pas pris en compte les éléments essentiels relatifs à sa situation familiale ;

- l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté attaqué méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut d'examen approfondi de sa situation personnelle.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 novembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale de New-York relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... A..., ressortissante comorienne, est entrée en France en 2007 selon ses déclarations, de manière irrégulière. Elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 17 décembre 2018, le préfet de Mayotte a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel Mme A... pourrait être reconduite. Mme A... relève appel de l'ordonnance du 24 juillet 2019 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Sur la régularité de l'ordonnance :

2. Il résulte des motifs mêmes de l'ordonnance attaquée que le vice-président du tribunal administratif de Mayotte a expressément répondu aux moyens contenus dans la requête de Mme A.... En particulier, le premier juge a répondu au moyen tiré de l'atteinte portée à sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'ordonnance contestée doit être écarté. Si Mme A... fait valoir que le premier juge n'a pas pris en compte certains des éléments relatifs à sa situation personnelle et familiale, un tel moyen se rapporte au bien-fondé de l'ordonnance et non à sa régularité.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance :

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Selon l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. A l'appui de ses conclusions à fin d'annulation Mme A... fait valoir qu'elle réside à Mayotte depuis plus de douze ans où elle élève ses quatre enfants qui y sont scolarisés. Toutefois, les documents qu'elle produit, à savoir les actes de naissance de ses enfants nés à Mayotte en 2007, 2008, 2013 et 2017 ainsi que des certificats de scolarité, dont le plus ancien date de l'année 2013, ne sont pas, à eux seuls, de nature à caractériser la continuité du séjour de Mme A... sur le territoire français depuis plus de douze ans, comme elle le prétend, ni l'existence, en France, de liens d'une nature ou d'une intensité particulière. Par ailleurs il ne ressort d'aucune pièce du dossier, compte tenu du jeune âge des enfants, que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer hors de France et notamment aux Comores, pays dans lequel Mme A... a vécu la plus grande partie de sa vie. Dans ces conditions, les décisions attaquées portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peuvent être regardées comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus de séjour et des buts poursuivis par la mesure d'éloignement. Par suite, le préfet de Mayotte n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. L'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 stipule : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

6. Les décisions contestées n'ont ni pour objet ni pour effet de séparer Mme A... de ses enfants. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que les enfants de Mme A... ne pourraient pas poursuivre leur scolarité hors de France, et notamment aux Comores, pays dont ils sont ressortissants. Dans ces conditions, les décisions contestées ne peuvent être regardées comme ayant été prises en méconnaissance de l'intérêt supérieur des enfants de Mme A.... Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 1 de l'article 3 de la convention sur les droits de l'enfant doit être écarté.

7. Il résulte de ce qui a été dit aux point 4 et 6 que le préfet n'a pas entaché sa décision d'un défaut d'examen de la situation de Mme A....

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande. Par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : La présent arrêt sera notifié à Mme E... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Mayotte.

Délibéré après l'audience du 13 février 2020 à laquelle siégeaient :

Mme D... C..., président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 mai 2020.

Le président-rapporteur,

Marianne C...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX02990 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02990
Date de la décision : 14/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Marianne HARDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : BABOU

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-05-14;19bx02990 ?
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