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12/03/2020 | FRANCE | N°18BX01432

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 12 mars 2020, 18BX01432


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par requête enregistrée le 20 octobre 2017, M. C... F... a contesté devant le tribunal administratif de Toulouse la servitude de passage imposée par le certificat d'urbanisme opérationnel que lui a délivré le maire de Taïx, le 22 août 2017, pour le détachement de deux lots en vue de la construction d'une maison sur chaque lot composant un terrain, situé chemin de la Source, sur le territoire de la commune.

Par ordonnance n° 1704862 du 6 février 2018, le président du tribunal administratif de To

ulouse a rejeté cette requête en application du dernier alinéa de l'article R. 222...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par requête enregistrée le 20 octobre 2017, M. C... F... a contesté devant le tribunal administratif de Toulouse la servitude de passage imposée par le certificat d'urbanisme opérationnel que lui a délivré le maire de Taïx, le 22 août 2017, pour le détachement de deux lots en vue de la construction d'une maison sur chaque lot composant un terrain, situé chemin de la Source, sur le territoire de la commune.

Par ordonnance n° 1704862 du 6 février 2018, le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette requête en application du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 avril 2018 et le 7 février 2019, M. C... F..., M. B... F... et M. H... F..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1704862, prise par le président du tribunal administratif de Toulouse le 6 février 2018 ;

2°) d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel du 22 août 2017 en ce qu'il prescrit la création d'une servitude de passage de 6 mètres de large le long du lot A pour assurer la desserte du terrain situé à l'arrière des lots ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Taïx une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête, présentée sans ministère d'avocat, comportait un moyen opérant contestant le bien-fondé de la servitude de passage au profit d'un terrain qui n'est pas enclavé, alors au surplus que le maire ne peut pas imposer la création de servitudes privées entre ses administrés ;

- le certificat en litige n'est pas suffisamment motivé au regard des dispositions de l'article R. 410-14 du code de l'urbanisme ;

- le certificat est entaché d'une illégalité interne : il n'appartient pas au maire de vérifier la validité des titres des tiers par rapport aux autorisations d'urbanisme ; le certificat d'urbanisme ne sanctionne pas les servitudes de droit privé ou les règles de droit civil ; ainsi, le certificat est illégal en ce qu'il prescrit la création d'une servitude de passage de 6 m de large au profit du terrain voisin du projet, cadastré ZD n° 153, qui au demeurant n'est pas enclavé.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 25 juillet 2018 et le 7 mars 2019, la commune de Taïx représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- l'ordonnance n'est entachée d'aucune erreur ;

- le certificat d'urbanisme est motivé et n'est entaché d'aucune illégalité.

Par ordonnance du 7 octobre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 13 novembre 2019 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... D...,

- et les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... F..., M. B... F... et M. H... F... sont propriétaires indivis d'une parcelle sise chemin de la Source, cadastrée section ZD n°154 sur le territoire de la commune de Taïx (81130) qui est dotée d'une carte communale. M. C... F... a déposé le 29 juin 2017 une demande de certificat d'urbanisme opérationnel pour le détachement de deux lots en vue de la construction d'une habitation sur chaque lot. Les consorts F... relèvent appel de l'ordonnance du 6 février 2018 par laquelle le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté, comme étant irrecevable, leur recours pour excès de pouvoir contre la servitude de passage nouvelle imposée par l'article 3 du certificat d'urbanisme opérationnel délivré par le maire de Taïx, le 22 août 2017.

2. Il ressort des pièces du dossier que dans sa requête de première instance, M. F... a clairement entendu contester la légalité du certificat d'urbanisme opérationnel délivré par le maire de la commune de Taïx le 22 août 2017 en ce qu'il avait prescrit la création d'une servitude de passage de 6 mètres de large le long du lot A pour assurer la desserte du terrain situé à l'arrière des lots. A l'appui de cette contestation, présentée sans ministère d'avocat, M. F... a indiqué qu'il s'étonnait et ne comprenait pas la nécessité de la création d'une servitude de passage sur le terrain lui appartenant en indivision puisque la parcelle desservie par la servitude n'est pas enclavée et que le maire lui-même avait admis que l'édiction d'une " servitude " était inappropriée. De plus, la contestation de la compétence du maire, mise en cause par M. F... qui faisait état des propres doutes du maire sur ce point, ressortait suffisamment des écritures du requérant pour amener le juge de l'urbanisme, sans qu'aucune mesure d'instruction ne soit nécessaire, à soulever d'office ce moyen d'ordre public et en informer les parties. Dès lors, les consorts F... sont fondés à soutenir que l'ordonnance attaquée, par laquelle le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande comme étant irrecevable, est entachée d'irrégularité et doit être annulée.

3. Il y a lieu pour la Cour, de se prononcer par la voie de l'évocation sur les conclusions à fin d'annulation partielle présentées par M. F... à l'encontre du certificat d'urbanisme opérationnel délivré par le maire de la commune Taïx le 22 août 2017 en ce qu'il prescrit la création d'une servitude de passage de 6 mètres de large le long du lot A pour assurer la desserte du terrain situé à l'arrière des lots.

4. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. (...) ". Aux termes de l'article 682 du code civil : " Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner ".

5. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme que le certificat d'urbanisme n'a pas pour objet d'indiquer les limitations imposées par le droit privé au droit de propriété applicables à un terrain.

A fortiori, l'administration, dans l'exercice de la police de l'urbanisme, et alors que les autorisations d'urbanisme sont délivrées sous réserve du droit des tiers, ne saurait instituer elle-même de telles limitations. Il en résulte que le maire de Taïx n'était pas compétent pour imposer à M. F..., dans le certificat d'urbanisme en litige, une servitude de passage au bénéfice du propriétaire de la parcelle voisine. Par suite, les consorts F... sont fondés à demander l'annulation du certificat en litige en tant qu'il prescrit cette servitude de passage.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Taïx la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par les consorts F....

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1704862, prise par le président du tribunal administratif de Toulouse le 6 février 2018 est annulée.

Article 2 : L'article 3 du certificat d'urbanisme opérationnel délivré par le maire de la commune de Taïx le 22 août 2017, en ce qu'il prescrit la création d'une servitude de passage de 6 mètres de large le long du lot A pour assurer la desserte du terrain situé à l'arrière des lots, est annulé.

Article 3 : La commune de Taïx versera aux consorts F... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... F..., à M. B... F..., à M. H... F... et à la commune de Taïx.

Délibéré après l'audience du 6 février 2020 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. E... D..., président-assesseur,

M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 mars 2020.

Le rapporteur,

Dominique D...Le président,

Philippe PouzouletLe greffier,

Sylvie HayetLa République mande et ordonne au préfet du Tarn en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 18BX01432 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01432
Date de la décision : 12/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : ARSAC

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-03-12;18bx01432 ?
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