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10/03/2020 | FRANCE | N°18BX04538

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 10 mars 2020, 18BX04538


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. M'C... F... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 5 avril 2018 par lequel le préfet du Gers a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi, ensemble la décision du 25 juin 2018 par laquelle la même autorité l'a assigné à résidence pour une période de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1801122,1801527 du 12 juillet 2018, le m

agistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. M'C... F... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 5 avril 2018 par lequel le préfet du Gers a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi, ensemble la décision du 25 juin 2018 par laquelle la même autorité l'a assigné à résidence pour une période de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1801122,1801527 du 12 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de jours, et fixation du pays de destination, contenues dans l'arrêté du préfet du Gers du 5 avril 2018, ainsi que l'annulation de la décision du 25 juin 2018 par laquelle cette même autorité l'a assigné à résidence, en renvoyant devant une formation collégiale les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, contenue dans l'arrêté du 5 avril 2018.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2018, M. F..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau du 12 juillet 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 avril 2018 du préfet du Gers en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, fixe le pays de destination et l'astreignant à se présenter une fois par semaine à la gendarmerie de Condom ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gers de procéder à un réexamen de sa situation tant au titre de son activité professionnelle que de sa vie privée et familiale et, dans l'attente, de lui délivrer dans les quarante-huit heures, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de renouvellement de son titre séjour, contenue dans l'arrêté contesté du 5 avril 2018 ; en effet, le refus de titre de séjour est entaché d'une motivation insuffisante en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre l'administration et le public ; le refus de titre de séjour a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors que les motifs retenus par les services de la Direccte pour émettre un avis défavorable à sa demande d'autorisation de travail auraient pu être régularisés si lui-même ou son employeur avaient été invités à régulariser la demande ou à fournir des pièces manquantes dont la production était indispensable à l'instruction de sa demande, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce, en méconnaissance des articles L. 114-5 et L. 114-6 du code des relations entre l'administration et le public ; en s'abstenant de procéder à un examen sérieux de sa situation, le préfet a commis une erreur de droit en lui refusant le titre de séjour sollicité en qualité de salarié ; la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, et des dispositions des articles R. 5221-17 et suivants du code du travail, dès lors que le fait que le contrat de travail ne mentionne pas le motif du recours au contrat de travail à durée indéterminée est un simple oubli ; il appartient au préfet d'établir en quoi les conditions de sa rémunération ne respecteraient pas la convention collective agricole du Gers alors que le salaire est équivalent au SMIC ; la circonstance que son employeur a été condamné au paiement d'une amende pour non-respect de la réglementation en matière d'hébergement des salariés n'établit pas à elle seule qu'il ne remplirait pas la condition du respect de la législation en matière de droit du travail ; la décision portant refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors la circonstance qu'il soit célibataire et sans enfant à charge ne l'exclut pas du bénéfice des stipulations précitées ; il justifie d'attaches stables et anciennes en France dès lors il est entré en France muni d'un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, il a appris la langue française, a été marié durant cinq ans, a séjourné régulièrement en France entre le 15 décembre 2013 et le 5 avril 2018 ; depuis son divorce, il réside au domicile de son frère, en situation régulière, et de l'épouse de celui-ci, de nationalité française reconnue travailleur handicapé, avec leurs deux enfants scolarisés, dont il s'occupe au quotidien ; sa présence en France est indispensable pour accompagner sa belle-soeur dans les actes de la vie quotidienne et dans la charge des enfants mineurs du couple ; le secteur de l'agriculture constitue un secteur en tension dans le bassin de Condom ; il justifie d'une insertion professionnelle dans ce secteur qui connait des difficultés de recrutement et son employeur a confirmé sa volonté de l'embaucher par une promesse d'embauche de 12 mois en juin puis décembre 2017 ; pour les mêmes motifs, cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français contestée a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu en violation de l'article 41§1 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, dès lors qu'il n'a pas été invité à se présenter en préfecture ou à présenter des observations écrites avant l'édiction de la mesure d'éloignement, alors que la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le précédent arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, par un arrêt du 30 novembre 2017 ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision d'astreinte, contenue dans l'arrêté contesté du 5 avril 2018, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors que cette mesure, qui l'oblige à se présenter une fois par semaine à la gendarmerie revêt un caractère excessif.

La requête a été communiquée au préfet du Gers, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par ordonnance du 31 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 1er avril 2019 à 12h00.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. F..., ressortissant marocain, né le 12 juillet 1981, a épousé au Maroc en 2011 Mme G..., de nationalité française. Il est entré en France le 4 mars 2013 muni d'un visa long séjour en qualité de conjoint de Français, et a bénéficié à ce titre d'un titre de séjour régulièrement renouvelé jusqu'au 14 décembre 2015. Ayant divorcé le 7 avril 2016, M. F... a sollicité le 18 octobre suivant le renouvellement de son titre de séjour en demandant un changement de statut au regard de son insertion professionnelle et de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 17 février 2017, le préfet du Gers a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a astreint à se présenter une fois par semaine aux services de la gendarmerie de Condom. Cet arrêté a été annulé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 30 novembre 2017. Par un arrêté en date du 5 avril 2018, le préfet du Gers a de nouveau opposé un refus à la demande de titre de séjour présentée par M. F... et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et l'a astreint à se présenter une fois par semaine aux services de la gendarmerie de Condom. Par un arrêté en date du 25 juin 2018, cette même autorité l'a assigné à résidence. Par un jugement du 12 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de jours et fixation du pays de destination, contenues dans l'arrêté du préfet du Gers du 5 avril 2018, ainsi que sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 juin 2018 par laquelle cette même autorité l'a assigné à résidence, en renvoyant devant une formation collégiale les conclusions de la requête tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, contenue dans l'arrêté du 5 avril 2018. M. F... relève appel du jugement du 12 juillet 2018, en tant que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et de la décision fixant le pays de destination, contenues dans l'arrêté du 5 avril 2018 contesté du préfet du Gers.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

2. M. F... soulève l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour en date du 5 avril 2018 sur laquelle se fonde l'obligation de quitter le territoire français du même jour.

3. En premier lieu, le refus de titre de séjour vise les dispositions de droit dont il fait application et mentionne les circonstances de fait propres à la situation de l'intéressé. Il est, par suite, suffisamment motivé au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Cette motivation ne révèle pas davantage que le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de la situation de l'intéressé.

4. En deuxième lieu, le refus de titre de séjour du 5 avril 2018 est intervenu à la suite de la demande de changement de statut présentée par M. F... le 18 octobre 2016 en vue de la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en se prévalant d'un contrat de travail à durée déterminée de six mois, signé le 3 octobre 2016 en qualité de tailleur de vigne et de ses liens personnels et privés. Aux termes des stipulations de l'article 9 de l'accord franco-marocain susvisé : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ". L'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...) ". Pour l'application de ces stipulations, un ressortissant marocain souhaitant exercer une activité salariée en France doit présenter un contrat de travail visé conformément au 2° de l'article L. 5221-2 du code du travail.

5. Il est constant que, lors de sa demande de changement de statut, M. F... s'est prévalu d'une promesse d'embauche qui ne peut être regardée comme un contrat de travail visé par les autorités en charge de l'emploi au sens des dispositions précitées. Au regard de l'avis défavorable des services de la main d'oeuvre étrangère de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, en date du 14 février 2018, les deux autres contrats de travail qu'il produit, signés les 14 juin 2017 et 26 décembre 2017 ne respectent pas les conditions de rémunération prévues par la convention collective agricole départementale du Gers et ne mentionnent pas le motif du recours au contrat à durée indéterminée. Dès lors, le préfet du Gers n'était pas tenu de regarder la demande de M. F... comme étant incomplète et il ne lui appartenait pas de l'inviter à régulariser la demande ou à fournir des pièces manquantes dont la production était indispensable à l'instruction de celle-ci suivant les dispositions des articles L. 114-5 et L. 114-6 du code des relations entre le public et l'administration en vigueur. Alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'employeur de M. F... se soit rapproché des services en charge de l'emploi pour solliciter une autorisation de travail, le préfet du Gers était en droit, à la date du 5 avril 2018, de refuser de délivrer le titre de séjour sollicité sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain à M. F... qui n'en remplissait pas les conditions. Par suite, les moyens tirés du vice de procédure et de l'erreur de droit ne peuvent qu'être écartés.

6. En troisième lieu, M. F... se prévaut de son entrée régulière en France le 4 mars 2013, sous couvert d'un visa de long séjour, de ce qu'il a toujours travaillé et a vécu avec une ressortissante française durant deux années. Toutefois, il n'a été autorisé à résider en France qu'en tant que conjoint d'une ressortissante française dont il a divorcé le 19 juillet 2016. Il ne produit aucun élément probant de nature à justifier ni de l'ancienneté et la stabilité des relations qu'il entretiendrait avec son frère résidant régulièrement en France, ni que sa présence auprès de l'épouse, compte tenu de l'état de santé de cette dernière, et des enfants mineurs de ce dernier, serait indispensable, alors que la circonstance que les obligations professionnelles de son frère ne lui permettraient pas d'apporter à cette dernière l'aide requise par son état de santé ne démontre pas que le requérant serait le seul en mesure de lui apporter le soutien nécessaire. Par suite, la décision de refus de titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. F..., qui est célibataire et sans enfant à charge, au respect de la vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet du Gers aurait omis d'examiner la situation particulière du requérant.

7. Il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Dès lors, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de séjour invoqué à l'encontre de la mesure d'éloignement contestée doit être écarté.

8. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". En vertu du paragraphe 1 de l'article 51 de la même charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) ".

9. Le principe général du droit d'être entendu énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où l'obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour.

10. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour.

11. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. F... ait sollicité, sans obtenir de réponse, un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il ait été empêché de présenter des observations avant que ne soit prise la décision rejetant sa demande de titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré de ce qu'il aurait été privé de son droit à être entendu doit être écarté.

12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, en prenant à l'encontre du requérant la décision l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché celle-ci d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

13. M. F... soutient qu'en cas de retour dans son pays d'origine, il se trouverait isolé alors que ses attaches familiales et privées les plus intenses se trouvent en France, en la présence de son frère et de la famille de ce dernier. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 6, M. F..., célibataire et sans enfant, n'établit ni même n'allègue qu'il se serait dépourvu de toute attaches au Maroc où il a résidé la majeure partie de sa vie. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision fixant le pays de renvoi soit entachée d'erreur manifeste d'appréciation dans les conséquences de la décision sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision d'astreinte :

14. Lorsque l'étranger dispose d'un délai de départ volontaire, il peut, en application de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, être soumis à une obligation de présentation. Aux termes de ces dispositions : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 peut, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ. / Un décret en Conseil d'Etat prévoit les modalités d'application du présent article ".

15. La décision astreignant M. F... à se présenter une fois par semaine à la gendarmerie de Condom pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ constitue une mesure de police visant à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. Cette mesure, qui est appliquée dès sa notification et pendant le délai accordé au requérant pour organiser son départ volontaire, ne revêt pas un caractère excessif. Dès lors, en édictant une telle mesure, le préfet du Gers n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et astreinte aux fins de mesures de surveillance, et fixation du pays de renvoi, contenues dans l'arrêté du 5 avril 2018.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

17. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. F..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.

Sur les frais d'instance :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. F... demande le versement à son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. M'C... F... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet du Gers.

Délibéré après l'audience du 4 février 2020, à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme E... H..., présidente-assesseure,

Mme A... D..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 10 mars 2020.

Le rapporteur,

Agnès D...Le président,

Dominique NAVESLe greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX04538


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04538
Date de la décision : 10/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Restrictions apportées au séjour - Assignation à résidence.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Agnès BOURJOL
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : BOUIX

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-03-10;18bx04538 ?
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