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03/12/2019 | FRANCE | N°17BX03870

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 03 décembre 2019, 17BX03870


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme H... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner solidairement la commune d'Arcachon, la société Auige venant aux droits de la société Aurige, et la société GCG devenue Erma Electronique, à leur verser une indemnité d'un montant total

de 31 664,97 euros en réparation des préjudices qu'ils attribuent aux travaux publics réalisés place de l'Aiguillon, de mettre à la charge solidaire de la commune et de ces sociétés les frais d'expertise, et d'enjoindre à la commun

e d'Arcachon de réaliser un entablement en zinc

et l'étanchéité de la jardinière si...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme H... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner solidairement la commune d'Arcachon, la société Auige venant aux droits de la société Aurige, et la société GCG devenue Erma Electronique, à leur verser une indemnité d'un montant total

de 31 664,97 euros en réparation des préjudices qu'ils attribuent aux travaux publics réalisés place de l'Aiguillon, de mettre à la charge solidaire de la commune et de ces sociétés les frais d'expertise, et d'enjoindre à la commune d'Arcachon de réaliser un entablement en zinc

et l'étanchéité de la jardinière située au pied de la fontaine jouxtant leur maison.

Par un jugement n° 1505308 du 10 octobre 2017, le tribunal administratif de Bordeaux

a condamné solidairement, d'une part, la commune d'Arcachon, la société Auige et la société Erma Electronique à verser à M. et Mme H... une somme de 4 622,50 euros au titre

des désordres affectant les murs de leur cave, d'autre part, la commune d'Arcachon et la société Auige à leur verser une somme de 18 568,26 euros au titre des fissures affectant le carrelage

du rez-de-chaussée de leur habitation, a condamné la commune d'Arcachon à garantir la société Auige et la société Erma Electronique de la totalité des condamnations prononcées

à leur encontre, a mis les frais d'expertise à la charge de la commune d'Arcachon, et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 décembre 2017 et deux mémoires enregistrés

le 4 octobre 2019, la commune d'Arcachon, représentée par la SELARL Boissy Avocats, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il fixe le préjudice de jouissance à 3 000 euros, qu'il rejette ses appels en garantie et qu'il met à sa charge la totalité des frais d'expertise ;

2°) de fixer le préjudice de jouissance à 1 350 euros ;

3°) de condamner solidairement les sociétés Erma Electronique et Auige à la garantir, sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs, des condamnations prononcées à son encontre au titre du défaut d'étanchéité en tête du mur construit en jonction avec le mur de la maison ;

4°) de condamner solidairement les sociétés Erma Electronique, Debout et Auige à la garantir, sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs, des condamnations prononcées à son encontre au titre du défaut d'étanchéité de la jardinière ;

5°) de condamner solidairement les sociétés Erma Electronique, Debout et Auige à la garantir des condamnations prononcées à son encontre au titre du préjudice de jouissance ;

6°) d'évaluer à 50 % la part des frais d'expertise afférents aux dommages survenus dans la cave et de condamner solidairement les sociétés Erma Electronique, Debout et Auige à la garantir de cette part des frais d'expertise mise à sa charge ;

7°) de mettre à la charge solidaire des sociétés Erma Electronique, Debout et Auige une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne l'humidité de la cave :

- l'indemnité de 3 000 euros allouée au titre du préjudice de jouissance, caractérisé par des odeurs d'humidité se manifestant en périodes de fortes chaleurs, est excessive et doit être ramenée à 1 350 euros ;

En ce qui concerne les appels en garantie :

- le tribunal a commis une erreur de droit en recherchant si les dommages subis par les tiers " affectent les ouvrages objet du marché ", et non s'ils trouvent leur origine dans des désordres affectant ces ouvrages ; en l'espèce, les défauts d'étanchéité du mur et de la jardinière, ouvrages publics objet du marché, qui sont à l'origine de l'humidité dans la cave des époux H..., les rendent impropres à leurs destinations dès lors que l'infiltration d'eau est de nature à compromettre la solidité du mur, et le défaut d'étanchéité de nature à empêcher la jardinière de recevoir des plantations ; ainsi, la responsabilité décennale des constructeurs est engagée ;

- la société Auige a manqué à son devoir de conseil en lui proposant une réception sans réserve des travaux alors que des problèmes d'étanchéité avaient été signalés lors des opérations préalables à la réception le 13 juin 2008, ce qui engage sa responsabilité contractuelle ;

- dès lors qu'elle n'est pas responsable des dommages affectant la cave, les frais d'expertise, qui concernent à parts égales la cave et le carrelage, ne peuvent être mis à sa charge qu'à hauteur de 50 %, le surplus devant incomber solidairement aux sociétés Auige,

Erma Electronique et Debout.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 mai 2018, la société Erma Electronique, représentée par Me B..., conclut à titre principal à la confirmation du jugement, à titre subsidiaire à ce que sa responsabilité soit limitée aux postes 1.1 et 2 du rapport d'expertise, dont la société Auige devra la relever et garantir à hauteur de 50 %, et à ce que les frais d'expertise mis à sa charge soient limités à 10 %, et dans tous les cas, à ce qu'une somme de 1 500 euros chacune soit mise à la charge de la société Auige et de la commune d'Arcachon au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa responsabilité ne peut être recherchée en ce qui concerne l'étanchéité de la jardinière, qui n'était pas prévue au marché et a ultérieurement été confiée à la société Debout ;

- elle s'en remet à la sagesse de la cour en ce qui concerne la bavette en zinc réalisée à la tête du mur ; toutefois, l'expert n'a pas retenu l'hypothèse d'une porosité du mur, qui a été construit en blocs à bancher remplis de béton et recouvert d'un enduit ;

- les travaux de remise en état doivent être évalués respectivement à 2 508 euros et 445,20 euros, conformément aux chiffrages retenus par l'expert ;

- la maîtrise d'oeuvre, qui a été défaillante sur la dimension de la bavette et l'absence de caniveaux, doit être condamnée à la garantir de 50 % des condamnations prononcées à son encontre.

Par des mémoires enregistrés les 3 mai et 4 juin 2019, la société Auige, représentée par la SELARL Etche avocats, conclut à titre principal à la réformation du jugement en tant qu'il a retenu une part de responsabilité à son encontre, à titre subsidiaire à ce que " l'ensemble des intervenants " soit condamné à la relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre et au rejet des appels en garantie de la commune d'Arcachon, et dans tous les cas à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune d'Arcachon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'est pas responsable du défaut d'étanchéité du mur construit par la société

Erma Electronique, qui a commis une faute dans l'exécution des travaux et manqué à son obligation de résultat ; le dimensionnement de la bavette en zinc ne relevait pas de sa mission de maîtrise d'oeuvre ; à titre subsidiaire, elle doit être relevée et garantie de toute condamnation par la société Erma Electronique ;

- le cabinet d'architecte Champagnat a réalisé la maîtrise d'oeuvre de la jardinière et reconnu avoir omis l'étanchéité, de sorte que ce défaut de conception ne lui est pas imputable ; en outre, la société Erma Electronique a manqué à son obligation de conseil en s'abstenant d'alerter les différents intervenants des risques encourus en l'absence d'étanchéité ; la réalisation non conforme aux règles de l'art des travaux d'étanchéité engage la responsabilité de la société Debout ; à titre subsidiaire, elle doit être relevée et garantie de toute condamnation par la commune d'Arcachon, dont les services techniques ont été défaillants ;

- dès lors que les non-conformités affectant les ouvrages publics n'ont aucune incidence sur leur fonctionnement normal et que le léger défaut d'étanchéité n'affecte pas la solidité du mur, les dommages causés à M. et Mme H... ne sont pas susceptibles d'engager sa responsabilité décennale ; ainsi, les appels en garantie de la commune à son encontre ne peuvent qu'être rejetés ;

- l'indemnisation du préjudice de jouissance, surévaluée par le tribunal, doit être ramenée à 800 euros.

Par un mémoire en appel incident enregistré le 3 mai 2019, M. et Mme H..., représentés par Me F..., demandent à la cour :

1°) de porter l'indemnité qui leur est due à une somme totale de 31 674,97 euros

et de confirmer le surplus du jugement ;

2°) d'enjoindre à la commune d'Arcachon de réaliser les travaux préconisés

par l'expert, de nature à faire cesser les désordres ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Arcachon une somme de 4 000 euros

au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- il y a lieu de confirmer le jugement en ce qui concerne le nettoyage et la remise en peinture des murs de la cave pour un coût de 1 622,50 euros TTC ;

- dès lors que les odeurs d'humidité dans la cave ne se limitent pas aux périodes de forte chaleur, l'indemnisation de leur préjudice de jouissance doit être portée à 7 350 euros ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté les frais de garde-meubles car le déplacement du mobilier est indispensable à la réalisation des travaux de réfection du carrelage ; le préjudice de jouissance durant les travaux de réfection du carrelage doit être porté à 1 800 euros eu égard au handicap de Mme H... ;

- les travaux de menuiserie doivent être admis à hauteur de 440 euros retenus par l'expert en raison de la surépaisseur du nouveau carrelage qui impose de raboter huit portes ;

- les frais de nettoyage et de rangement après le chantier doivent être évalués

à 556 euros.

Par lettre du 24 octobre 2019, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que la commune d'Arcachon, qui avait fondé ses appels

en garantie exclusivement sur la responsabilité décennale devant le tribunal, n'est pas recevable

à invoquer pour la première fois en appel la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre au regard de son obligation de conseil lors des opérations de réception.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Chauvin, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant la commune d'Arcachon, et de Me G... représentant M. et Mme H.....

Considérant ce qui suit :

1. En 2008, la commune d'Arcachon a fait réaliser, dans le cadre d'un marché public de travaux, des aménagements de la place de l'Aiguillon consistant à démolir deux

maisons anciennes et à créer, sur l'espace ainsi libéré, une fontaine dite " sèche " avec une animation de jets d'eau, devant une jardinière adossée à un mur construit contre l'embase et une partie de la façade Ouest de la maison de M. et Mme H.... Des moisissures et des odeurs d'humidité persistantes sont apparues dans la cave de cette maison à partir de l'année 2009. Par ailleurs, lors des travaux de réalignement de la voirie réalisés dans le cadre du même marché, des fissures sont apparues sur le carrelage du rez-de-chaussée de cette maison. La réception des travaux a été prononcée sans réserves le 4 avril 2009. A la demande de M. et Mme H..., le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a ordonné une expertise dont le rapport, rendu le 11 août 2015, conclut, d'une part, que l'humidité des murs de la cave est due aux défauts d'étanchéité de la tête du mur et de la jardinière cumulés à un dysfonctionnement du regard destiné à la collecte des eaux pluviales, et d'autre part, que les fissures du carrelage ont pour origine l'utilisation d'engins lourds et vibrants lors de la réalisation des travaux de voirie. La commune d'Arcachon relève appel du jugement du 10 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée, solidairement avec la société Auige venant aux droits de la société Aurige, maître d'oeuvre des travaux, et la société GCG devenue Erma Electronique, à laquelle le gros oeuvre avait été confié, à indemniser M. et Mme H..., ainsi qu'à relever et garantir ces sociétés des condamnations prononcées à leur encontre, et a mis à sa charge la totalité des frais d'expertise. Par leur appel incident, M. et Mme H... contestent le montant de l'indemnité qui leur a été allouée. La société Auige conteste sa responsabilité dans le défaut d'étanchéité de la jardinière.

Sur l'humidité des murs de la cave :

En ce qui concerne la responsabilité :

2. Pour caractériser les trois causes de l'humidité dans la cave, le tribunal a relevé, en premier lieu, que le défaut d'étanchéité de la tête du mur construit contre la façade de la maison avait pour origine la pose, par la société GCG, d'une bavette en zinc d'une largeur insuffisante et d'un joint défectueux, en deuxième lieu, que l'étanchéité de la jardinière n'avait pas été prévue au cahier des charges du marché, ce qui caractérise un défaut de conception imputable au maître d'oeuvre chargé de la conception du projet, un manquement de la société GCG à son devoir de conseil lors de la réalisation des travaux, et un manque de vigilance des services techniques de la commune lors de la définition et de la conception du projet, et en troisième lieu, que le dysfonctionnement du regard, qui refoulait l'eau contre le mur de la cave par temps de pluie, est imputable à la commune. Si la société Auige persiste à contester en appel sa responsabilité dans le défaut d'étanchéité de la jardinière, par le moyen déjà invoqué en première instance, tiré de ce que cette partie de la maîtrise d'oeuvre a été réalisée par le cabinet d'architecte Champagnat, le tribunal a relevé à juste titre qu'elle avait contribué au dommage en sa qualité de mandataire d'un groupement solidaire. Si elle fait également valoir que le comportement de la commune, dont les services techniques n'ont pas détecté les risques de défaut d'étanchéité, devrait l'exonérer totalement, cette question relève des appels en garantie et ne saurait faire obstacle à ce que sa responsabilité soit retenue. Par suite, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, de retenir la responsabilité solidaire de la commune d'Arcachon, de la société Auige et de la société Erma Electronique.

En ce qui concerne les préjudices :

3. Il résulte de l'instruction que les défauts d'étanchéité et le dysfonctionnement

du regard décrits au point précédent ont eu pour effet, à partir de l'année 2009, de saturer en eau les murs extérieurs de la cave de M. et Mme H..., provoquant à l'intérieur

un développement de moisissures brunes et noirâtres, et que le 11 juin 2018, un huissier a encore constaté dans cette cave une forte odeur d'humidité et de moisi, ainsi que la persistance d'humidité et de moisissures sur l'ensemble des murs de la descente d'escalier et des murs extérieurs. Eu égard, d'une part, à l'importance de ces désordres et au fait qu'ils ont perduré au-delà de la date du jugement, et d'autre part, au fait qu'ils n'affectent pas une pièce à usage d'habitation, la commune d'Arcachon et la société Auige ne sont pas fondées à soutenir que les premiers juges auraient fait une appréciation excessive du préjudice de jouissance en le fixant à la somme de 3 000 euros. M. et Mme H... ne sont pas davantage fondés à demander le relèvement de cette indemnité.

En ce qui concerne les appels en garantie de la commune d'Arcachon :

4. La fin des rapports contractuels entre le maître d'ouvrage et l'entrepreneur, consécutive à la réception sans réserve d'un marché de travaux publics, fait obstacle à ce que, sauf clause contractuelle contraire, l'entrepreneur soit ultérieurement appelé en garantie par le maître d'ouvrage pour des dommages dont un tiers demande réparation à ce dernier, alors même que ces dommages n'étaient ni apparents, ni connus à la date de la réception. Il n'en irait autrement que dans le cas où la réception n'aurait été acquise à l'entrepreneur qu'à la suite de manoeuvres frauduleuses ou dolosives de sa part. Toutefois, si le dommage subi par le tiers trouve directement son origine dans des désordres affectant l'ouvrage objet du marché, la responsabilité de l'entrepreneur envers le maître d'ouvrage peut être recherchée sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit

au point 1, la réception des travaux a été prononcée sans réserve le 4 avril 2009.

5. En relevant que " les dommages précités n'affectent en rien les ouvrages qui ont été l'objet des marchés ", le jugement attaqué ne recherche pas si les dommages subis par les tiers " affectent les ouvrages objet du marché ", mais se borne à constater que le mur et la jardinière, à l'origine d'infiltrations d'eau dans la cave de M. et Mme H..., ne sont eux-mêmes affectés d'aucun désordre. Tel est le cas dès lors qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que le mur, constitué de blocs à bancher remplis de béton, enduit et recouvert d'un parement de briques, n'est pas poreux, son défaut d'étanchéité étant limité à la jonction, à sa tête, avec la façade de la maison, et d'autre part, que la jardinière est utilisée conformément à sa destination. Par suite, la commune d'Arcachon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses appels en garantie, au titre de la responsabilité décennale, des sociétés Auige,

Erma Electronique et Debout, cette dernière ayant réalisé des travaux d'étanchéité défectueux après la réception du marché. Si la commune invoque, dans ses mémoires enregistrés

le 4 octobre 2019, la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre au regard de son obligation de conseil lors des opérations de réception, elle n'est pas recevable à le faire pour la première fois en appel, alors qu'elle avait fondé exclusivement sur la responsabilité décennale ses demandes en garantie devant le tribunal.

En ce qui concerne les appels en garantie de la société Auige et de la société Erma Electronique :

6. Dès lors que la réception définitive des travaux a été prononcée sans réserve, la commune d'Arcachon, maître de l'ouvrage, doit supporter l'intégralité des condamnations. Par voie de conséquence, les conclusions d'appel en garantie de la société Erma Electronique à l'encontre de la société Auige, et de la société Auige à l'encontre de " l'ensemble des intervenants ", sont dépourvues d'objet et ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les fissures du carrelage :

En ce qui concerne la responsabilité :

7. La commune d'Arcachon et la société Auige ne contestent pas le principe de leur responsabilité solidaire dans l'apparition, sur le carrelage des pièces du rez-de-chaussée de la maison de M. et Mme H..., de fissures imputables à l'utilisation d'un cylindre lourd à billes en acier vibrantes lors du compactage du revêtement bitumineux de la chaussée.

En ce qui concerne les préjudices :

8. Il résulte de l'instruction que la technique retenue pour la pose d'un nouveau carrelage est un collage sur l'existant qui a pour effet de surélever le sol du rez-de-chaussée, nécessitant le rabotage des portes. Par suite, M. et Mme H... sont fondés à demander la prise en charge des travaux de menuiserie correspondants pour un montant de 440 euros.

9. M. et Mme H... n'apportent aucun élément nouveau à l'appui de leurs demandes relatives au placement de leur mobilier en garde-meubles pour la durée des travaux et aux frais de ménage et de rangement à l'issue du chantier, qu'il y a lieu de rejeter par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

10. Les premiers juges n'ont pas fait une appréciation insuffisante des troubles dans les conditions d'existence de M. et Mme H..., à raison des contraintes particulières d'organisation de la vie quotidienne imposées par les travaux, d'une durée de deux semaines, du fait du handicap de Mme H..., en fixant leur indemnisation à la somme de 1 500 euros.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la somme que la commune d'Arcachon et la société Auige ont été condamnées, conjointement et solidairement, à verser à M. et Mme H... au titre des fissures du carrelage doit être portée à 19 008,26 euros.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Lorsque le juge administratif met à la charge d'une personne publique la réparation d'un préjudice grave et spécial imputable à des travaux publics, il ne peut user du pouvoir de lui enjoindre d'exécuter les travaux nécessaires pour mettre un terme au dommage que si le requérant fait également état, à l'appui de ses conclusions à fin d'injonction, de ce que la poursuite de ce préjudice, ainsi réparé sur le terrain de la responsabilité sans faute du maître de l'ouvrage, trouve sa cause au moins pour partie dans une faute du propriétaire de l'ouvrage. Il peut alors enjoindre à la personne publique, dans cette seule mesure, de mettre fin à ce comportement fautif ou d'en pallier les effets.

13. Si la condamnation indemnitaire prononcée à l'encontre de la commune d'Arcachon et les motifs qui en sont le support inséparable impliquent que cette commune est tenue de prendre toute mesure de nature à faire cesser les désordres constatés, les époux H... n'ont pas allégué une faute de la commune. Dans ces conditions, ils ne sont pas fondés à se plaindre de ce que le tribunal a rejeté leurs conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais d'expertise :

14. La commune sollicite un partage des frais d'expertise que le tribunal a entièrement mis à sa charge. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre 50 % de ces frais à la charge des sociétés Erma Electronique, Debout et Auige. Par suite, les conclusions présentées à cette fin par la commune d'Arcachon doivent être rejetées.

Sur les frais exposés à l'occasion du litige :

15. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Arcachon n'est pas fondée à demander la réformation du jugement attaqué. Par suite, ses conclusions présentées au titre des frais exposés à l'occasion de l'instance d'appel ne peuvent qu'être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y pas lieu de faire droit aux demandes présentées

par M. et Mme H..., la société Auige et la société Erma Electronique au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que la commune d'Arcachon et la société Auige ont été condamnées conjointement et solidairement à verser à M. et Mme H... au titre des fissures du carrelage du rez-de-chaussée de leur maison est portée à 19 008,26 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 10 octobre 2017 est réformé

en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Arcachon, à M. et Mme E... H..., à la société Auige, à la société Erma Electronique, à la société Debout, et à la société Eiffage Route Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

Mme A... C..., présidente-assesseure,

M. Thierry Sorin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 décembre 2019.

La rapporteure,

Anne C...

Le président,

Catherine GiraultLa greffière,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX03870


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX03870
Date de la décision : 03/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Régime de la responsabilité - Qualité de tiers.

Travaux publics - Différentes catégories de dommages - Dommages créés par l'exécution des travaux publics.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : BOISSY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-12-03;17bx03870 ?
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