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04/11/2019 | FRANCE | N°19BX00247

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 04 novembre 2019, 19BX00247


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, d'annuler l'arrêté du 24 mai 2018 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer le titre de séjour sollicité à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1803080 du 20 décembre

2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de Mme A....

Procédure...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, d'annuler l'arrêté du 24 mai 2018 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer le titre de séjour sollicité à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1803080 du 20 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de Mme A....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 janvier 2019 et un mémoire en production de pièces, enregistré le 20 février 2019, Mme A..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 20 décembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Tarn-et-Garonne du 24 mai 2018 ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour, au besoin sous astreinte, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas motivé leur rejet de son moyen tenant à une insuffisante motivation de l'arrêté contesté ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'un défaut de motivation et d'examen de sa situation ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 311-13 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle vit seule au Maroc où elle n'a plus d'attaches, sa seule famille est constituée de sa fille, qui a la nationalité française ; elle-même n'a aucun revenu, mais sa fille a suffisamment de ressources pour la prendre en charge.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2019, le préfet de Tarn-et-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés ; il n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en lui refusant le séjour ; la requérante ne se prévaut d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à la première instance.

Par une ordonnance en date du 1er août 2019, la clôture de l'instruction a été reportée au 16 août 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme F... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., ressortissante marocaine née le 1er décembre 1953 à Fès (Maroc), est entrée en France le 20 mai 2017, munie d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour valable jusqu'au 31 octobre 2017. Le 2 janvier 2018, elle a sollicité un titre de séjour en qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français auprès de la préfecture de Tarn-et-Garonne. Par un arrêté en date du 24 mai 2018, le préfet de ce département a refusé de l'admettre au séjour, a adopté à son encontre une mesure d'éloignement et a fixé le pays de renvoi. Mme A... fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 20 décembre 2018, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. En relevant que " l'arrêté attaqué, portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré du défaut de motivation doit donc être écarté ", les premiers juges ont suffisamment motivé leur rejet du moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté contesté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, l'arrêté contesté vise les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde. Au titre des considérations de fait, il mentionne notamment les conditions d'entrée en France de Mme A..., indique qu'à supposer que sa fille disposerait de ressources suffisantes pour la prendre en charge, ce seul fait ne suffit pas à conférer à Mme A... un droit au séjour, qu'elle n'a d'ailleurs pas déclarée être à la charge de sa fille au consulat de rance à Fès, et relève que la mesure d'éloignement ne porterait pas une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale, dès lors que, même si elle a divorcé en 1986 de son époux marocain, elle a continué à vivre 20 ans au Maroc où elle n'établit pas être isolée et où elle dispose de ressources financières. Par suite, le préfet, qui n'était pas tenu à l'exhaustivité, a suffisamment motivé son arrêté, notamment en ce qui concerne les considérations de fait.

4. En deuxième lieu, cette motivation démontre que le préfet ne s'est pas abstenu de se livrer à un examen attentif de la situation particulière de Mme A....

5. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui.". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

6. Mme A... fait valoir qu'elle vit seule et n'a plus d'attaches au Maroc, qu'elle n'a plus comme famille que sa fille, de nationalité française, son gendre et leurs deux filles, qu'elle est cardiaque et diabétique, qu'elle n'a aucune ressource propre au Maroc alors que sa fille dispose de ressources suffisantes pour la prendre en charge. Cependant, il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée récemment en France à l'âge de 64 ans, munie d'un seul visa de court séjour, qu'elle a donc vécu toute sa vie au Maroc où elle est restée après son divorce en 1986, qu'elle a ainsi vécu éloignée pendant de nombreuses années de sa fille, qui, selon ses déclarations, est partie à l'âge de 16 ans, et de ses petites-filles, et qu'elle ne démontre pas avoir tissé des liens particuliers en France en dehors de ceux qu'elle a avec ces dernières, pas plus d'ailleurs qu'elle ne démontre être isolée dans son pays d'origine, compte tenu de ce que toute sa vie s'y est déroulée. Par ailleurs, si elle allègue souffrir de problèmes de santé, elle se borne à produire en appel un certificat d'un médecin généraliste affirmant qu'elle est actuellement traitée pour diabète et hypertension. Toutefois, alors au demeurant que ce certificat est postérieur à l'arrêté contesté, elle n'établit ainsi pas que son état de santé nécessiterait la présence de sa fille à ses côtés. Au surplus, il ressort également des pièces du dossier, d'une part, qu'elle n'est pas dépourvue de ressources financières au Maroc où elle dispose d'un compte bancaire approvisionné, quand bien même serait-ce exclusivement par sa fille comme elle le fait valoir sans d'ailleurs établir son absence de toute ressource, et, d'autre part, qu'elle a fourni, au consulat de France à Fès, pour obtenir un visa de court séjour, une attestation sur l'honneur indiquant qu'elle ne déposerait pas de demande de carte de séjour auprès des autorités françaises et qu'elle n'a alors pas déclaré être à la charge de sa fille. Enfin, la seule circonstance que sa fille et son gendre déclarent posséder les ressources nécessaires à sa prise en charge n'est pas de nature à lui conférer un droit au séjour sur le fondement des dispositions précitées, alors qu'elle ne réside en France que depuis un an à peine à la date de l'arrêté attaqué. Dans ces conditions, l'arrêté en litige ne peut être regardé comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. En lui opposant cet arrêté, le préfet de Tarn-et-Garonne n'a donc méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de l'intéressée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

8. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A... n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme A... sur ces fondements.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B... A.... Copie en sera adressée au préfet de Tarn-et-Garonne.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

Mme D... C..., présidente-assesseure,

Mme F..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 novembre 2019.

Le rapporteur,

F...Le président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 19BX00247


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00247
Date de la décision : 04/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : SCP LARROQUE - REY - ROSSI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-04;19bx00247 ?
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