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17/10/2019 | FRANCE | N°19BX00475,19BX01212

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 17 octobre 2019, 19BX00475,19BX01212


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

- M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Indre a prononcé son transfert aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile ainsi que l'arrêté du même jour par lequel il a été assigné à résidence dans le département de l'Indre pour une durée de quarante-cinq jours

Par un jugement n° 1900052 et 1900053 du 10 janvier 2019 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a

rejeté cette demande.

- M. E... C... a également demandé au tribunal administratif de L...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

- M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Indre a prononcé son transfert aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile ainsi que l'arrêté du même jour par lequel il a été assigné à résidence dans le département de l'Indre pour une durée de quarante-cinq jours

Par un jugement n° 1900052 et 1900053 du 10 janvier 2019 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté cette demande.

- M. E... C... a également demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 20 février 2019 par lequel le préfet de l'Indre a prolongé son assignation à résidence pour une nouvelle durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1900349 du 27 février 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 8 février 2019 sous le n° 19BX00475, M. C..., représenté par Me D... demande à la cour :

1°) de lui accorder l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges du 10 janvier 2019 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2019 par lequel le préfet de l'Indre a prononcé son transfert aux autorités italiennes ainsi que l'arrêté du même jour par lequel il a été assigné à résidence ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens " recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle ".

Il soutient que :

- les décisions attaquées sont insuffisamment motivées en méconnaissance des articles L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- il demeure un doute quant à l'identification de l'Etat membre responsable de la demande d'asile en application de l'article 19 du règlement " Dublin III ". En effet, il est douteux que l'Italie soit l'Etat membre responsable faute d'avoir démontré qu'il s'est maintenu sans discontinuité sur le territoire des Etats membres entre le 24 novembre 2016, date de son identification sur le territoire italien, et le 5 juin 2018, date de son entrée en France ;

- la décision de transfert a fait une mauvaise appréciation de sa situation personnelle et méconnait les dispositions des articles 3.2 et 17 du règlement " Dublin III ".

- la décision de transfert méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par mémoire en défense enregistré le 16 juillet 2019, le préfet de l'Indre conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 18 juillet 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 19 août 2019 à 12h00.

M. C... été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 mai 2019.

II- Par une requête enregistrée le 21 mars 2019 sous le n° 19BX01212, M. C..., représenté par Me D... demande à la cour :

1°) de lui accorder l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges du 27 février 2019 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 20 février 2019 par lequel le préfet de l'Indre a prolongé son assignation à résidence pour une nouvelle durée de quarante-cinq jours.

4°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens " recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle ".

Il soutient que :

- l'arrêté a été pris en méconnaissance des exigences de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne lui a pas été notifié dans une langue qu'il comprend ;

- l'arrêté ne répond pas aux exigences de motivation prévues par les dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté repose sur un arrêté précédant du 7 janvier 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile qui fait l'objet d'un recours contentieux pendant devant la cour.

Par mémoire en défense enregistré le 16 juillet 2019, le préfet de l'Indre conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 18 juillet 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 19 août 2019.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 juin 2019.

Vu :

- la Constitution ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention signée à New York le 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, modifié par le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... A..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant nigérian né le 12 février 1999, est, selon ses déclarations, entré en France avec sa conjointe irrégulièrement le 21 mai 2018 afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugiés. Au cours de l'examen de sa demande d'asile, il a été constaté, par comparaison du relevé décadactylaire des empreintes du requérant avec le fichier européen " Eurodac ", que M. C... avait été enregistré par les autorités italiennes le 1er septembre 2016. Le préfet de l'Indre a saisi les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge, qu'elles ont implicitement acceptée. Par deux arrêtés du 7 janvier 2019, le préfet de l'Indre a, d'une part, décidé le transfert de M. C... aux autorités italiennes et, d'autre part, assigné l'intéressé à résidence dans le département de l'Indre, pour une durée de quarante-cinq jours. Puis, par arrêté du 20 février 2019, le préfet de l'Indre a prolongé son assignation à résidence pour une nouvelle durée de quarante-cinq jours. M. C... relève appel des jugements du 10 janvier 2019 et du 27 février 2019 par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la jonction des requêtes :

2. Les requêtes ci-dessus visées, enregistrées sous les numéros 19BX00475 et 19BX1212 concernent la situation de M. C... au regard du droit d'asile et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire :

3. Il a été statué sur les demandes d'aide juridictionnelle présentées par M. C... par décisions du 2 mai 2019 et du 20 juin 2019. Par suite, les conclusions du requérant tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre la décision de transfert aux autorités italiennes :

4. En premier lieu, le requérant se borne à reprendre en appel, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif, les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait insuffisamment motivée, de ce que la détermination de l'Etat responsable de sa demande d'asile au regard de l'article 19 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ne serait pas établie et de ce que l'arrêté de transfert méconnaîtrait les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 et serait entaché d'une " mauvaise appréciation " de sa situation personnelle et méconnaitrait ainsi les dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013, compte tenu des défaillances existant en Italie en matière d'accès à la procédure d'asile et de traitement des demandes d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.

5. En second lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. En l'espèce, si M. C... fait valoir que sa compagne a donné naissance à leur enfant le 27 août 2018, l'exécution de l'arrêté attaqué, qui n'a pas notamment pour objet ou pour effet de séparer cet enfant de ses parents, ne méconnaît pas l'intérêt supérieur de cet enfant. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) / 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ; (...) ".

7. Il résulte de ce qui précède que l'arrêté portant transfert aux autorités italiennes n'est pas entaché d'illégalité. Dès lors, M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité dudit arrêté au soutien de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du même jour l'assignant à résidence dans le département de l'Indre pour une durée de quarante-cinq jours.

8. En second lieu, M. C... soutient que l'arrêté portant assignation à résidence est insuffisamment motivé. Toutefois, ledit arrêté, qui vise les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment l'article L. 561-2, ne se borne pas à mentionner qu'il a fait l'objet d'un arrêté de transfert aux autorités italiennes par un arrêté du même jour mais mentionne expressément, que l'exécution de l'arrêté de transfert aux autorités italiennes, responsables de la demande d'asile de M. C... demeure une perspective raisonnable, que l'intéressé dispose d'un hébergement à Chateauroux et, partant, de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à la mesure de transfert prise à son encontre. Dès lors, l'arrêté litigieux, qui comporte les considérations de droit et de fait qui le fondent, est suffisamment motivé.

En ce qui concerne l'arrêté portant prolongation de l'assignation à résidence :

9. M. C... reprend en appel, dans des termes identiques, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif, les moyens tirés de ce que la décision attaquée serait insuffisamment motivée et de ce que l'arrêté aurait été pris en méconnaissance des exigences de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne lui aurait pas été notifié dans une langue qu'il comprend. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.

10. Enfin, si M. C... soutient que la mesure de prolongation de son assignation à résidence repose sur un arrêté précédant du 7 janvier 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile qui fait l'objet d'un recours contentieux pendant devant la cour, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que cet arrêté n'est pas annulé et que, par conséquent, la mesure de prolongation d'assignation n'est pas dépourvue de base légale.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demande tendant à l'annulation, d'une part, des arrêtés du 7 janvier 2019 par lesquels le préfet de l'Indre a prononcé son transfert aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence dans ce département et, d'autre part, de l'arrêté du 20 février 2019 par lequel le préfet a prononcé la prolongation de cette assignation pour une nouvelle durée de quarante-cinq jours. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. C... tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent également qu'être rejetées.

DECIDE

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. C... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. C... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Indre.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. B... A..., président-assesseur,

M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 17 octobre 2019.

Le rapporteur,

Dominique A... Le président,

Philippe Pouzoulet Le greffier,

Sylvie Hayet La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°s 19BX00475, 19BX01212


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00475,19BX01212
Date de la décision : 17/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : GOMOT-PINARD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-17;19bx00475.19bx01212 ?
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