Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C..., épouse D..., a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2018 par lequel le préfet de la Corrèze lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1801637 du 5 décembre 2018, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 avril 2019, Mme D..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 5 décembre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2018 du préfet de la Corrèze ;
3°) d'enjoindre, à titre principal au préfet de lui délivrer le titre de séjour sollicité, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, en tout état de cause, de régulariser sa situation dans un délai de sept jours à compter de la notification de cet arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- en ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour, elle est insuffisamment motivée s'agissant de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ;elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se fondant uniquement sur la durée de sa présence en France dès lors, en particulier, qu'elle n'était pas tenue de recourir à la procédure de regroupement familial prévue à l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que le critère de ressources ne semble pas rempli ;
- la décision est également entachée d'une erreur d'appréciation de sa situation au regard de l'ancienneté de son mariage, de sa maîtrise de la langue française, de ses projets personnels et professionnels et de ses liens familiaux comparés en France et dans son pays d'origine ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle vit en France depuis 2016 avec son mari et ses deux enfants et n'a pas de famille au Maroc ;
- en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français, elle est illégale à raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et dépourvue de base légale au regard du 2° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle n'était pas en situation irrégulière dès lors qu'un récépissé de demande de titre avait nécessairement été délivré ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990, dès lors que les jeunes enfants ne peuvent être séparés ni de leur père, qui travaille régulièrement en France en contrat à durée indéterminée, ni de leur mère ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation ;
- en ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi, elle est illégale à raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2019, le préfet de la Corrèze conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées le 4 septembre 2019 de ce qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la cour était susceptible de procéder d'office à une substitution de base légale tirée de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté contesté du 2 octobre 2018 trouve son fondement légal dans les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par ordonnance du 20 juin 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 septembre 2016.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2019/000660 du 14 mars 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code des relations entre le public et l'administration,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., épouse D..., ressortissante marocaine, née le 14 octobre 1991, est entrée en France le 1er octobre 2016 munie d'une carte de séjour espagnole à caractère temporaire, afin de rejoindre son époux, M. F... D..., avec qui elle a deux enfants nés le 26 mai 2012 et le 27 septembre 2017. Mme D... a sollicité, le 6 novembre 2017, la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle relève appel du jugement du 5 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 octobre 2018 par lequel le préfet de la Corrèze a refusé de lui délivrer le titre demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la décision contestée, qui vise les dispositions sur lesquelles elle se fonde, notamment l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise, en fait, que Mme D... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 de ce code, qu'elle est entrée en France munie d'une carte de séjour espagnole " non résident de longue durée " équivalente à un visa de court séjour, qu'elle s'est maintenue en France à l'issue du délai de trois mois de validité de son autorisation de séjour, qu'elle relève du dispositif de regroupement familial et ne peut prétendre à un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11, qu'elle réside sur le territoire national depuis moins de deux ans et ne peut se prévaloir d'une vie privée et familiale suffisamment stable, qu'au regard de sa date d'entrée sur le territoire notamment, elle ne remplit pas les conditions d'une régularisation de sa situation au titre d'une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'enfin, la décision ne méconnaît pas les stipulations des articles 2 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans ces conditions, la décision en litige est suffisamment motivée en fait au sens et pour l'application des dispositions des articles L. 211-2 et L 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
3. En deuxième lieu, selon l'article L. 411-1 du même code : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. ". Enfin, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) ". Ces dernières dispositions laissent à l'administration un large pouvoir pour apprécier si l'admission au séjour d'un étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels que celui-ci fait valoir.
4. Il n'est pas contesté, en appel, que Mme D... ne pouvait pas bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle entre dans l'une des catégories de personnes susceptibles de bénéficier du regroupement familial. Mme D... fait valoir qu'elle est entrée en France le 1er octobre 2016 pour rejoindre son mari, qui travaille en contrat à durée indéterminée, et qu'elle a deux enfants mineurs, dont un est né sur le territoire français et l'autre scolarisé. Toutefois, ces éléments ne sauraient démontrer, en eux-mêmes, l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels qui lui permettraient de se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressée a vécu séparée de son conjoint au moins jusqu'à son entrée récente sur le territoire national, où elle s'est maintenue de manière irrégulière à l'expiration du délai de validité de son autorisation provisoire de séjour, et qu'elle a vécu au Maroc jusqu'à l'âge de 26 ans. Par ailleurs, elle n'établit pas ne pouvoir bénéficier du regroupement familial, dont son époux n'a pas sollicité le bénéfice alors que cette procédure constitue la voie de droit commun pour l'obtention du titre de séjour sollicité au titre de la vie privée et familiale. Enfin, l'intéressée n'établit pas ne plus avoir de liens familiaux au Maroc où elle a vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant son admission exceptionnelle au séjour sur ce fondement. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et familiale de l'intéressée.
5. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
6. Mme D... soutient qu'elle n'a plus de famille au Maroc et que ses liens personnels et familiaux en France sont anciens et stables. Si elle se prévaut également de l'insertion professionnelle de son époux, qui bénéficie d'un contrat à durée indéterminée, elle n'établit pas, toutefois, ne plus avoir de liens familiaux au Maroc où elle a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans. Si elle est en France depuis deux ans à la date de la décision litigieuse, elle s'y est maintenue en situation irrégulière au-delà du délai de trois mois suivant son entrée sur le territoire national avant de demander, en novembre 2017 seulement, un titre de séjour. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que ses enfants, encore en bas âge, ne pourraient pas poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine, ni que la cellule familiale ne pourrait se reconstruire hors de France, et notamment au Maroc. La circonstance que l'intéressée disposerait en France d'attaches familiales constituées, pour l'essentiel, de ses cousins et cousines, n'est pas, en tout état de cause, de nature à démontrer qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine. Dès lors et compte tenu du caractère récent de la communauté de vie des époux en France et de la possibilité de solliciter le bénéfice de la procédure de droit commun du regroupement familial, le préfet de la Corrèze n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été prise la décision contestée. Le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de cette décision, invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français, doit être écartée.
8. En deuxième lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). ".
9. Lorsque, saisi d'une requête dirigée contre une décision portant obligation de quitter le territoire français, il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre alinéa du même article que celui sur lequel s'est fondée l'autorité administrative compétente, le juge administratif peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder soit à la demande des parties soit de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce dernier cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point.
10. Il ressort des pièces du dossier que si Mme D... s'est maintenue sur le territoire français après l'expiration de sa carte de séjour espagnole " non résident longue durée " l'autorisant à séjourner sur le territoire français pendant une période de trois mois, valable jusqu'au 1er janvier 2017, elle a, ensuite, bénéficié de la délivrance d'un récépissé valant autorisation provisoire de séjour le temps de l'examen de sa demande de titre de séjour. Il s'ensuit que le préfet ne pouvait fonder sa décision sur le 2° du I de l'article L. 511-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cependant, et ainsi qu'il vient d'être dit aux points 2 à 6, la délivrance du titre de séjour sollicité a été refusée par le préfet de la Corrèze. Ainsi, la décision portant obligation pour Mme D... de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté contesté trouve son fondement légal dans les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui peuvent être substituées à celles du 2° du I du même article du même code dès lors que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et que le préfet disposait du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions. Mme D..., qui n'a produit aucune observation sur la substitution ainsi relevée d'office par la cour, n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la décision attaquée était dépourvue de base légale ou entachée d'une erreur de droit.
11. En troisième lieu, en application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise. La circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé. Cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure.
12. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... entre dans les catégories ouvrant droit au regroupement familial, alors qu'il est constant que son époux, titulaire d'une carte de séjour salarié valable de 2017 à 2021, n'a formé aucune demande au titre de cette procédure de droit commun, qui lui était applicable. De plus, si l'intéressée prétend que son époux n'a pas les ressources financières correspondant aux critères légaux du regroupement familial, alors même qu'il est en contrat à durée indéterminée et perçoit une rémunération d'environ 1 300 euros net par mois, elle n'établit pas qu'une demande de regroupement familial ne pourrait aboutir et ne fait, par ailleurs, valoir aucun obstacle sérieux à ce qu'elle retourne dans son pays d'origine, où elle conserve des attaches familiales, dans l'attente de l'issue d'une telle demande. En outre, elle ne justifie pas d'une intégration sociale et professionnelle depuis son entrée sur le territoire. Dans ces conditions et compte tenu de la brève durée de son séjour en France, la décision du préfet de la Corrèze ne porte pas au droit de Mme D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée eu égard aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
13. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
14. Compte tenu, d'une part, du jeune âge des enfants de la requérante, d'autre part, de l'existence d'une procédure de regroupement familial constituant la voie de droit commun applicable au cas d'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date à laquelle elle a été prise, la décision attaquée portait atteinte à l'intérêt supérieur des enfants de Mme D... et de son époux, la séparation susceptible d'intervenir entre la mère ou le père et les deux enfants n'ayant d'autre objet que de permettre l'instruction de sa demande dans les formes prévues pour le regroupement familial. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée aurait méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.
15. En dernier lieu, et pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être exposés aux points 11 à 14, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation de Mme D....
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
16. L'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de cette décision, invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, doit être écartée.
17. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 octobre 2018 du préfet de la Corrèze. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C..., épouse D..., est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., épouse D..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Corrèze.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
Mme Anne Meyer, président-assesseur,
M. Thierry B..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 8 octobre 2019.
Le rapporteur,
Thierry B...Le président,
Catherine Girault
Le greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
No 19BX01570