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08/10/2019 | FRANCE | N°19BX00383

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 08 octobre 2019, 19BX00383


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 17 novembre 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé son admission au séjour en qualité d'étranger malade.

Par un jugement n° 1700206 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2019, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du

tribunal administratif de Toulouse du 30 octobre 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 17 novembre 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 17 novembre 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé son admission au séjour en qualité d'étranger malade.

Par un jugement n° 1700206 du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2019, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 30 octobre 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 17 novembre 2016 du préfet de la Haute-Garonne ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence du document prouvant que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé a été régulièrement émis ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il ne peut effectivement accéder aux soins que son état requiert dans son pays d'origine en raison, notamment, de son impécuniosité et de l'indisponibilité du médicament " zopiclone " en Algérie ; de plus, il est dans l'impossibilité de retourner en Algérie à raison même de l'origine et de la nature du traumatisme subi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2019/000977 du 14 mars 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux.

Par une ordonnance du 4 mars 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 6 mai 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien né le 4 juin 1988, est entré en France, selon ses déclarations, le 4 octobre 2013, de manière irrégulière. Après avoir sollicité son admission au séjour au titre de l'asile, sa demande a été définitivement rejetée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 15 décembre 2015. Le 12 avril 2016, M. C... a fait l'objet d'une décision du préfet de la Haute-Garonne portant refus de titre de séjour assortie de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixant le pays de renvoi. Le 2 mai 2016, le requérant a déposé une demande d'admission au séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Il relève appel du jugement du 30 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 novembre 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) / 7° Refusent une autorisation (...) ". L'article L. 211-5 du même code ajoute que : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. Il ressort des termes mêmes de la décision en litige qu'elle vise les textes dont elle fait application, notamment le 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle se fonde, en fait, sur ce que M. C... a fait l'objet d'un arrêté, notifié le 21 avril 2016, portant refus d'admission au séjour au titre de l'asile et obligation de quitter le territoire français, devenu définitif, sur ce qu'il résulte de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé d'Occitanie du 8 juillet 2016 que si des conséquences d'une exceptionnelle gravité pourraient résulter d'un défaut de prise en charge médicale, les soins imposés par l'état de santé de l'intéressé peuvent être dispensés en Algérie, sur ce qu'aucun élément du dossier ne permet de considérer que la situation de M. C... revêtirait un caractère humanitaire exceptionnel, sur ce qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa personnelle et familiale tel que prévu à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est entré récemment et illégalement en France à l'âge de 25 ans, qu'il est célibataire et sans enfant et qu'il a vécu la majeure partie de sa vie en Algérie et, enfin, sur ce qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, cette décision était suffisamment motivée au sens et pour l'application des dispositions visées au point 2.

4. En deuxième lieu, si M. C... semble soutenir que la décision du préfet de la Haute-Garonne du 17 novembre 2016 est irrégulière en l'absence de preuve d'un avis régulièrement émis par le médecin de l'agence régionale de santé sur sa demande de titre, il ressort des pièces du dossier de première instance que cet avis, en date du 8 juillet 2016, a été régulièrement émis et produit par le préfet à l'appui de son mémoire en défense dans cette instance. Par suite, ce moyen doit, en tout état de cause, être écarté comme manquant manifestement en fait.

5. En troisième et dernier lieu, l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié stipule que : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7. au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".

6. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, que cette décision ne peut pas avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans son pays d'origine. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié de l'affection en cause en Algérie. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut pas en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

7. Pour justifier la décision de refus de délivrance du titre de séjour prise à l'encontre de M. C..., le préfet de la Haute-Garonne se fonde notamment sur l'avis émis le 8 juillet 2016 par le médecin de l'agence régionale de santé d'Occitanie selon lequel l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais il existe un traitement approprié dans son pays d'origine. Le préfet ajoute que l'intéressé ne justifie pas être dans l'impossibilité d'accéder aux soins dans son pays d'origine, ce dont il ne se prévaut pas par ailleurs. Si, à l'appui de sa requête, M. C... soutient qu'il ne sera pas en mesure d'accéder aux soins, et notamment aux séances de psychothérapie que son état de santé nécessite, en raison de son impécuniosité, il n'en apporte toutefois aucun commencement de preuve, alors que ses parents résident en Algérie et seraient éventuellement susceptibles de l'aider. Par ailleurs, si M. C... se prévaut de certificats médicaux établis, en France, par un médecin légiste le 28 novembre 2014 puis par le médecin spécialiste qui le suit, en date des 4 juillet 2016, 14 septembre 2017, 20 février et 29 mai 2018, outre que la plupart de ces certificats sont postérieurs à la décision en litige, aucun d'entre eux ne conclut à ce que les troubles dont il souffre, qui nécessitent un traitement lourd et de longue durée, seraient directement liés au traumatisme que lui auraient causé des événements dramatiques survenus en Algérie avant son entrée sur le territoire français en 2013 et se bornent, sur ce point, à faire état de ses déclarations. A cet égard, aucune des pièces du dossier ne corrobore les affirmations de M. C..., et n'est, en outre, de nature à remettre en cause l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé le 8 juillet 2016 s'agissant de la disponibilité du traitement approprié et de la possibilité pour l'intéressé d'en bénéficier en Algérie. Il ressort, au contraire, du certificat médical du 4 juillet 2016 que le traitement dont il a besoin est disponible dans son pays d'origine.

8. De plus, si M. C... se prévaut pour la première fois en appel de ce que la molécule du zopiclone, qui constitue l'un des princeps qui lui a été prescrit par son médecin traitant en France pour traiter ses insomnies, ne serait pas disponible en Algérie, il ressort des pièces du dossier, notamment des éléments produits en défense par le préfet, que le zolpidem, qui appartient à la même classe thérapeutique des benzodiazépines hypnotiques, a des propriétés équivalentes. Il n'est pas établi ni même utilement soutenu qu'il ne pourrait remplacer le zopiclone, et il est disponible en Algérie. Dans ces conditions, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas fait une inexacte application des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien en refusant de délivrer au requérant un certificat de résidence sur le fondement de ces stipulations. Pour le même motif, il n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 novembre 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé l'admission au séjour en qualité d'étranger malade. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

Mme Anne Meyer, président-assesseur,

M. Thierry A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2019.

Le rapporteur,

Thierry A...Le président,

Catherine Girault

Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 19BX00383


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00383
Date de la décision : 08/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. thierry SORIN
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : MEAUDE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-08;19bx00383 ?
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