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08/10/2019 | FRANCE | N°18BX04195

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 08 octobre 2019, 18BX04195


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler les décisions du 7 décembre 2017 par lesquelles le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour et une autorisation provisoire de séjour en qualité d'accompagnant d'enfant malade, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1800623 du 14 mai

2018, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision d'interdiction de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler les décisions du 7 décembre 2017 par lesquelles le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour et une autorisation provisoire de séjour en qualité d'accompagnant d'enfant malade, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1800623 du 14 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 décembre 2018, Mme G..., représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 14 mai 2018 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de la Gironde du 7 décembre 2017 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 80 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans le même délai avec délivrance d'un récépissé autorisant le séjour et le travail, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

En ce qui concerne les décisions de refus de titre et d'autorisation provisoire de séjour :

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée en tant qu'elle ne mentionne pas la naissance d'un deuxième enfant en France ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'absence d'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) sur les possibilités d'accès aux soins en Géorgie a exercé une influence sur le sens de la décision de refus d'autorisation provisoire de séjour ;

- la décision de refus d'autorisation provisoire de séjour est entachée d'erreur de droit en ce que le préfet s'est estimé lié par l'avis du collège des médecins de l'OFII ;

En ce qui concerne les moyens communs au refus de séjour et à l'obligation de quitter le territoire français :

- les décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation au regard de son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le tribunal ayant annulé l'obligation de quitter le territoire français de son époux, il ne pouvait en faire état pour apprécier sa situation ;

- les décisions méconnaissent l'intérêt supérieur de ses enfants, protégé par

l'article 3-1 et l'article 16 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 avril 2019, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés et s'en rapporte au mémoire produit devant le tribunal.

Mme G... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision

du 4 octobre 2018.

Par ordonnance du 20 juin 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 22 juillet 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme G..., ressortissante géorgienne née en 1981, est entrée en France en 2012 avec son époux et leur fils mineur. Après le rejet définitif de sa demande d'asile par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 13 juin 2014, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant de sa vie privée et familiale et de l'état de santé de son fils. L'arrêté du préfet de la Gironde du 16 juin 2015 rejetant cette demande et lui faisant obligation de quitter le territoire français a été annulé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux n° 16BX03763 du 20 avril 2017 pour irrégularité de la procédure d'instruction de la demande présentée en qualité d'accompagnant d'étranger malade. Le préfet de la Gironde a réexaminé la situation de Mme G..., et, par arrêté du 7 décembre 2017, a refusé de lui délivrer un titre de séjour et une autorisation provisoire de séjour en qualité d'accompagnant d'enfant malade, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit de revenir sur le territoire français durant deux ans. Mme G... relève appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 14 mai 2018 en tant que, après avoir annulé l'interdiction de retour, il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation des décisions de refus de titre de séjour et d'autorisation provisoire de séjour, et d'obligation de quitter le territoire français.

Sur les moyens dirigés contre les décisions de refus de titre de séjour et d'autorisation provisoire de séjour :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. En indiquant que l'époux de Mme G... fait également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, que la scolarisation de son fils ne fait pas obstacle à la poursuite de sa vie familiale hors de France, qu'elle n'a pas d'autre attache familiale proche en France, et que ses parents et ses frères et soeurs résident dans son pays d'origine, la décision attaquée comporte des considérations de fait suffisantes pour motiver le refus de délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". La circonstance qu'elle ne fait pas état de la naissance récente d'un deuxième enfant, dont il n'est au demeurant pas démontré que Mme G... en aurait informé le préfet, est sans incidence sur la régularité de cette motivation.

En ce qui concerne le refus d'autorisation provisoire de séjour :

3. Il résulte des dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour d'une durée maximale de six mois aux parents étrangers en raison de l'état de santé de leur enfant est subordonnée à la condition que ce dernier remplisse les conditions cumulatives prévues

au 11° de l'article L. 313-11 de ce code, à savoir que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Dès lors que le collège de médecins de l'OFII a estimé, dans son avis du 10 novembre 2017, qu'en l'espèce, l'état de santé du fils de Mme G... nécessite une prise en charge dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'absence de mention relative à l'accès effectif au traitement approprié dans le pays d'origine, qui n'a pu exercer une influence sur le sens de la décision et n'a pas privé les intéressés d'une garantie, est sans incidence sur la régularité de la procédure.

4. Malgré la formulation maladroite de la décision attaquée, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Gironde se serait cru à tort en situation de compétence liée par l'avis du collège de médecins de l'OFII concernant l'état de santé du jeune D.... Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

Sur les moyens communs aux décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français :

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Si Mme G... se prévaut de la durée de son séjour en France et de sa qualité de mère de deux enfants, dont l'un est scolarisé, il ressort des pièces du dossier qu'elle réside en France depuis cinq ans à la date des décisions attaquées, que son époux, défavorablement connu des services de police, a également fait l'objet d'une décision de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, et que ses parents et ses frères et soeurs résident en Géorgie. Par suite, les décisions attaquées ne portent pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte contraire aux stipulations précitées.

6. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Ni la circonstance que le fils de Mme G..., né en 2007, a toujours été scolarisé en France, ni le fait, attesté par un certificat médical

du 8 novembre 2017, qu'il présente des manifestations d'anxiété et des difficultés attentionnelles et de concentration avec des répercussions sur ses apprentissages et sa scolarisation, ne sont de nature à faire regarder les décisions attaquées comme prises en méconnaissance de son intérêt supérieur dès lors qu'elles n'ont ni pour objet, ni pour effet de le séparer d'un de ses parents.

Sur le délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de renvoi :

7. Les conclusions à fin d'annulation de ces décisions ne sont assorties d'aucun moyen distinct.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme G... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contestées. Par suite les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... épouse G... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E... épouse G... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

Mme A... C..., présidente-assesseure,

M. Thierry Sorin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2019.

La rapporteure,

Anne C...

Le président,

Catherine GiraultLa greffière,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 180BX04195


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX04195
Date de la décision : 08/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : TREBESSES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-08;18bx04195 ?
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