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01/10/2019 | FRANCE | N°19BX00787

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 01 octobre 2019, 19BX00787


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2017 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1801652 du 13 novembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 novembre 2017 en tant que le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 27 fév

rier 2019 et 15 juin 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2017 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1801652 du 13 novembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 novembre 2017 en tant que le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 27 février 2019 et 15 juin 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 13 novembre 2018 ;

2

°) d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2017 du préfet du Tarn en tant qu'il a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa demande, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du 2° de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif est insuffisamment motivé en réponse à ses moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision du 14 novembre 2017 est illégale car prise en méconnaissance des articles L.313-11, R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce que la collégialité de l'avis des médecins de l'OFII n'est pas démontrée et comporte une signature électronique qui n'a pas été déclarée conformément à l'article 9 de l'ordonnance n°2005-1516 du 8 décembre 2005 ;

- la décision attaquée a également méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnait l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car le phénobarbital n'est pas disponible au Maroc ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et de méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par ordonnance du 17 juin 2019, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au

10 juillet 2019.

M. A..., a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les observations de Me B..., représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. D... A..., né en 1952 à El Kbab au Maroc, de nationalité marocaine, est entré en France en janvier 2017 muni d'un visa court séjour à entrées multiples valable du 8 octobre 2015 au 7 octobre 2019, accompagné de son épouse, titulaire d'un visa visiteur. Par arrêté du 14 novembre 2017, le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par le même arrêté, il lui a fait obligation de quitter le territoire national dans un délai de trente jours et l'a assigné à résidence dans le département du Tarn. Par un jugement du 6 avril 2018, non frappé d'appel, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et l'assignant à résidence. Puis par un jugement du 13 novembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête dirigée contre la décision du préfet du Tarn lui refusant un titre de séjour. M. A... relève appel de ce dernier jugement par lequel le tribunal a rejeté sa requête en annulation de l'arrêté du 14 novembre 2017 en tant qu'il refuse de lui accorder un titre de séjour.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le requérant soutient que le tribunal a insuffisamment motivé sa réponse aux moyens selon lesquels la décision de refus de séjour serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaitrait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, il ressort des termes mêmes du jugement, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, ont suffisamment répondu à ces moyens, en estimant d'une part, que l'intéressé qui n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Maroc où demeurent quatre de ses enfants, ne justifie pas d'une insertion sociale d'une particulière intensité, et d'autre part, que le préfet a examiné la situation particulière du requérant en estimant qu'il ne pouvait être regardé comme justifiant de circonstances relevant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le tribunal administratif de Toulouse n'a pas entaché sa décision d'irrégularité.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Selon l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". L'article R. 313-23 de ce code dispose que : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase de l'alinéa (...) L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ". Enfin aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions : " (...) Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".

4. Il résulte de ces dispositions que lorsque l'avis porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant ", cette mention du caractère collégial de l'avis fait foi jusqu'à preuve du contraire. Cette preuve contraire n'est pas rapportée par la seule production de captures d'écrans tirées du logiciel de traitement informatique du dossier médical faisant état des date et heure auxquelles ces médecins ont renseigné et authentifié dans cette application le sens de leur avis.

5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'avis médical concernant M. A..., du 17 août 2017, porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant " et a été signé par les trois médecins composant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Pour contester la régularité de cet avis, M. A... a produit des captures d'écrans tirées du logiciel de traitement informatique d'un dossier médical faisant apparaître des dates et heures différentes auxquelles chacun des médecins du collège a entré dans cette application le sens de son avis. Ces documents et ces mentions qui, au demeurant sont relatifs aux dossiers médicaux d'autres ressortissants étrangers, ne sauraient constituer la preuve contraire mentionnée au point 4. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé de la garantie tirée du débat collégial du collège de médecins de l'OFII.

6. En outre, contrairement à ce que soutient M. A..., l'avis émis le 17 août 2017 par le collège de médecins de l'OFII, dont la copie est produite par le préfet en défense, est revêtu de la signature manuscrite de chacun des trois médecins ayant délibéré et ne comporte donc pas de signatures électroniques. Dès lors, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entaché cet avis du fait de la présence de signatures électroniques ne respectant pas les exigences relatives à la sécurité, à la confidentialité et à l'horodatage fixées par l'ordonnance du 8 décembre 2005 ne peut qu'être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

8. En l'espèce, eu égard notamment à la brève ancienneté de séjour de l'appelant en France, à la double circonstance qu'il n'y a séjourné que pour visiter l'un de ses fils et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Maroc où résident quatre de ses enfants, le préfet du Tarn n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions ce moyen doit être écarté.

9. En dernier lieu, M. A... reprend en appel les moyens, déjà soulevés en première instance, et tirés de ce que, d'une part, la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'intéressé ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

10. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de du Tarn du 14 novembre 2017 en tant qu'il refuse de lui accorder un titre de séjour. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Tarn.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme C... E..., présidente-assesseure,

Mme Déborah De Paz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.

La rapporteure,

Fabienne E... Le président,

Dominique Naves Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX00787


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00787
Date de la décision : 01/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : ATY AVOCATS ASSOCIES AMARI DE BEAUFORT-TERCERO-YEPONDE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-01;19bx00787 ?
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