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01/10/2019 | FRANCE | N°19BX00746

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 01 octobre 2019, 19BX00746


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2017 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit.

Par un jugement n° 1701337 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 janvier 2017 en tant que le préfet du Tarn a refusé d

e lui délivrer un titre de séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregist...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2017 par lequel le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit.

Par un jugement n° 1701337 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 janvier 2017 en tant que le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 février 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 6 février 2018 ;

2

°) d'annuler l'arrêté du 13 janvier 2017 du préfet du Tarn en tant qu'il a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa demande, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du 2° de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Toulouse est irrégulier pour ne pas être suffisamment motivé en ce qui concerne le moyen relatif au défaut d'examen de sa situation personnelle et pour ne pas avoir statué sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision du 13 janvier 2017 n'est pas motivée notamment en droit et révèle un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- la décision méconnait les articles L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par ordonnance du 15 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au

17 juin 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., né le 24 septembre 1965, de nationalité albanaise, est entré irrégulièrement en France le 25 juillet 2015 selon ses déclarations. Il a sollicité le bénéfice de l'asile en France qui a été rejeté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 29 février 2016, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 5 octobre 2016. Par un arrêté du 13 janvier 2017, le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit. N'ayant pas exécuté cette décision, M. D... a été entendu par les services de police et le préfet du Tarn a pris à son encontre, le 23 mars 2017, un arrêté portant assignation à résidence pour une durée de 45 jours renouvelable. Par un jugement du 27 mars 2017, non frappé d'appel, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête dirigée contre les décisions l'obligeant à quitter le territoire français, fixant le pays de destination et l'assignant à résidence. Puis par un jugement du 6 février 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête dirigée contre la décision du préfet du Tarn lui refusant un titre de séjour. M. D... relève appel de ce dernier jugement par lequel le tribunal a rejeté sa requête en annulation de l'arrêté du 13 janvier 2017 en tant qu'il refuse de lui accorder un titre de séjour.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. D... reproche au tribunal administratif de ne pas avoir suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle par le préfet du Tarn et de ne pas avoir répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, il ressort des termes mêmes du jugement que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, ont suffisamment répondu à ces moyens, en estimant d'une part, qu'il ne ressortait ni de la motivation de la décision contestée du 13 janvier 2017 ni d'aucune pièce du dossier que le préfet du Tarn n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de la situation personnelle de M. D..., et en relevant d'autre part, que le requérant qui restait imprécis sur la réalité des risques qu'il prétendait encourir en Albanie, ne pouvait être regardé comme justifiant de circonstances relevant de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Enfin s'agissant d'une décision de refus de séjour qui ne fixe pas de pays de destination, le tribunal n'était pas dans l'obligation de répondre au moyen inopérant tiré de ce que M. D... encourait des risques en cas de retour en Albanie. Par suite, le tribunal administratif de Toulouse n'a pas entaché sa décision d'omissions à statuer.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, M. D... reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance, et alors qu'il a été dit au point 2 que la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif était suffisamment motivée, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de refus de titre de séjour. Il y a dès lors lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.

4. En deuxième lieu, et contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet du Tarn a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. D..., notamment en évoquant l'existence d'autres membres de la famille résidant sur le territoire français, en retraçant, de manière circonstanciée, le parcours du requérant depuis son entrée sur le territoire français au regard de sa demande d'asile et en détaillant la situation familiale de l'intéressé tant en France qu'en Albanie. Dans ces conditions ce moyen doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". En vertu de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Pour l'application des stipulations et dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

6. M. D..., qui est entré en France à l'âge de 50 ans, soutient qu'il entretient des liens étroits avec la France où réside l'essentiel de sa famille, en particulier sa grand-mère malade, bénéficiant du statut de réfugié, qui l'héberge et dont il s'occupe quotidiennement. Cependant, l'intéressé qui est célibataire et sans enfant à charge n'établit pas l'intensité des liens entretenus avec les membres de sa famille, alors que ses enfants majeurs ne résident pas sur le territoire français. En outre, il n'est pas établi qu'il serait seul à pouvoir s'occuper de sa grand-mère compte-tenu, notamment, du caractère récent de l'assistance qu'il lui porte et de, ce que plusieurs membres de sa famille vivent en France. Dans ces conditions, le refus de séjour contesté ne peut être regardé comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. En lui opposant cet arrêté, le préfet du Tarn n'a donc méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de l'intéressé.

7. En dernier lieu, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour qui a été opposée à M. D... n'implique pas par elle-même son renvoi en Albanie. Par suite, doit être écarté, comme inopérant, le moyen tiré de ce que cette décision méconnaîtrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de du Tarn du 13 janvier 2017 en tant qu'il refuse de lui accorder un titre de séjour. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Tarn.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Dominique Naves, président,

Mme C... E..., présidente-assesseure,

Mme Deborah De Paz, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.

La rapporteure,

Fabienne E... Le président,

Dominique Naves Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX00746


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00746
Date de la décision : 01/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : DUJARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-01;19bx00746 ?
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