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01/10/2019 | FRANCE | N°19BX00741

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 01 octobre 2019, 19BX00741


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2017 par lequel le préfet de la Guyane l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire pendant deux ans.

Par un jugement n° 1800237 du 22 novembre 2018, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregis

trée le 22 février 2019, M. F... C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2017 par lequel le préfet de la Guyane l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire pendant deux ans.

Par un jugement n° 1800237 du 22 novembre 2018, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 février 2019, M. F... C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Guyane du 22 novembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2017 du préfet de la Guyane ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions et de lui délivrer dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que sa requête est recevable contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

- cette décision est entachée d'un défaut de motivation ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a commis une erreur d'appréciation dès lors qu'il a tissé des liens en France ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de celle-ci sur sa situation personnelle ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 et de l'article L. 313-11 7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision de refus d'un délai de départ volontaire :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision s'avère entachée d'un défaut de motivation ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juillet 2019, le préfet de la Guyane conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 9 juillet 2019, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 9 août 2019 à 12 heures.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord du 23 septembre 2006 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoires et l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant sénégalais né en 1978, est, selon ses déclarations, entré en France en 2006. Il a fait l'objet en 2013 et 2017 de deux mesures d'éloignement auxquelles il n'a pas déféré. Le 23 juillet 2017 il a fait l'objet d'un contrôle d'identité au cours duquel il a été constaté l'irrégularité de son séjour. Le même jour, le préfet de la Guyane a pris à son encontre un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai, et a fixé son pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. C... relève appel du jugement du 22 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'article 38 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi susvisée du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique dispose que : "Lorsqu'une action en justice doit être intentée avant l'expiration d'un délai devant la juridiction du premier degré, [...] l'action est réputée avoir été intentée dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter : / a) De la notification de la décision d'admission provisoire ; / b) De la notification de la décision constatant la caducité de la demande ; / c) De la date à laquelle la décision d'admission ou de rejet de la demande est devenue définitive ; / d) Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné ".

3. Par un arrêté du 23 juillet 2017, le préfet de la Guyane a fait obligation à M. C... de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pendant deux ans. Il ressort des pièces du dossier de première instance que l'acte en litige a été notifié à l'intéressé le 23 juillet 2017 avec l'indication d'un délai de recours de deux mois et qu'il a déposé le 25 août 2017, soit dans le délai de recours contentieux qui lui avait été indiqué, une demande d'aide juridictionnelle. Le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Cayenne l'a admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 octobre 2017 et un conseil a été désigné pour l'assister le 20 décembre 2017. La décision du bureau d'aide juridictionnelle lui a été notifiée par un courrier simple daté du 2 janvier 2018. En l'absence dans le dossier d'élément permettant d'établir la date à laquelle M. C... a réceptionné cette décision, le nouveau point de départ du délai de recours ne peut être déterminé. Ainsi, et en tout état de cause, le délai dans lequel le requérant pouvait saisir le tribunal administratif en application des dispositions précitées de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 susvisé, n'était pas expiré le 3 mars 2018 lorsqu'il a présenté sa demande au tribunal administratif. Dès lors, la demande de M. C... n'était pas tardive et, par suite, le jugement attaqué du tribunal administratif de Guyane doit être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Guyane.

Sur la demande d'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2017 :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". En l'espèce, l'arrêté litigieux mentionne, d'une part, les textes sur lesquels se fonde l'obligation de quitter le territoire français, et notamment le 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et, d'autre part, les circonstances de fait qui en constituent le fondement en indiquant que le requérant indique être entré irrégulièrement sur le territoire français en 2006 et qu'il s'y est maintenu irrégulièrement et n'a présenté aucun document d'identité, qu'il ne démontre pas l'ancienneté de sa présence en France, ni l'existence d'attaches personnelles et familiales stables en France ni d'obstacle à ce qu'il quitte le territoire. Le préfet qui n'était pas tenu de relever de manière exhaustive l'ensemble des éléments de la situation personnelle et familiale de M. C... a suffisamment motivé sa décision. Par ailleurs, cette motivation révèle que, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet a procédé à un examen de sa situation individuelle.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

7. M. C... fait valoir qu'il est entré en France en 2006, qu'il est bien intégré et n'a plus aucune attache dans son pays d'origine. Toutefois les pièces qu'il produit ne permettent pas d'établir la réalité de sa résidence habituelle en France notamment durant les années 2006, 2008 et 2010 au titre desquelles il se borne à produire des attestations, une ou deux factures d'achat et un avis d'imposition indiquant qu'il n'a déclaré aucun revenu. En outre, en se bornant à alléguer qu'il vend des fruits et légumes il ne produit aucun document relatif à son insertion professionnelle. Enfin, M. C... n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 28 ans et où réside sa mère et ses frères et soeurs. Dans ces circonstances, l'obligation de quitter le territoire français litigieuse n'a pas porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, ni, par suite, méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs elle n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ". M. C... ne peut utilement soutenir que la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle se borne à lui faire obligation de quitter le territoire français, et ne lui refuse pas un droit au séjour. Par suite, le moyen est inopérant et doit être écarté.

9. De même, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant au soutien des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire.

En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire :

10. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...)3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente (...) ".

11. En l'espèce, l'arrêté contesté vise les dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique que l'intéressé, entré régulièrement sur le territoire français, y séjourne irrégulièrement, n'a pas présenté de visa de long séjour et qu'il ne dispose pas de garanties de représentation suffisantes, n'ayant pas produit de document d'identité. Par suite, l'arrêté, qui énonce ainsi les considérations de droit et de fait fondant le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, motive suffisamment cette décision. Cette motivation révèle que le préfet a procédé à un examen particulier de sa situation.

12. En second lieu, si M. C... soutient que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne conteste pour autant pas se trouver dans la situation du b) et du f) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, laquelle permet de caractériser un risque de fuite. Dès lors, ce moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

13. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination, qui vise les dispositions de l'article L. 513-1 à L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, indique que M. C..., de nationalité sénégalaise, est obligé de quitter le territoire français pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays où il est légalement admissible. La même décision précise qu'elle ne contrevient pas à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, la décision contestée énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté comme manquant en fait.

14. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". En vertu de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

15. Les pièces versées au dossier qui n'ont trait qu'à l'état civil et la situation de l'intéressé en France, ne permettent pas d'établir que M. C... pourrait être personnellement et actuellement exposé en cas de retour au Sénégal à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors qu'il n'a au demeurant jamais sollicité l'asile. Par suite, la décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté contesté n'a pas méconnu les stipulations et dispositions précitées.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

16. En premier lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

17. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

18. En l'espèce, en visant le III de l'article L. 511-1 et en édictant dans ce même arrêté une obligation de quitter le territoire français sans délai, le préfet de Guyane a indiqué que l'intéressé se trouvait dans l'un des cas du premier alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, l'arrêté précise que sa présence ancienne sur le territoire n'est pas établie, qu'il ne justifie pas d'une cellule familiale ni de garanties de représentation suffisantes. La décision contestée d'interdiction de retour sur le territoire français est ainsi suffisamment motivée au regard des critères prévus aux dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette motivation révèle que le préfet a procédé à un examen particulier et attentif de sa situation.

19. En troisième lieu, comme indiqué précédemment, M. C... a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français non assortie d'un délai de départ volontaire. L'intéressé n'ayant justifié d'aucune circonstance humanitaire faisant obstacle au prononcé d'une décision d'interdiction de retour sur le territoire français, c'est à bon droit que le préfet de Guyane a décidé de prendre à son encontre une telle mesure. S'agissant de la durée de cette interdiction, eu égard à la durée de présence de M. C... sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens en France et à l'absence de garanties de représentation de l'intéressé, le moyen tiré du caractère disproportionné de l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans doit être écarté.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté en litige. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Guyane est annulé.

Article 2 : La requête de première instance de M. C... et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C..., au ministre de l'intérieur et à Me B.... Copie en sera transmise au préfet de Guyane.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. D... A..., présent-assesseur,

Mme Caroline E..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.

Le rapporteur,

Caroline E... Le président,

Elisabeth Jayat Le greffier,

Virginie Marty

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

19BX00741


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00741
Date de la décision : 01/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : CARDET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-01;19bx00741 ?
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