Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1800611 du 25 juin 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 8 novembre 2018 et 7 janvier 2019, M. C...B..., représenté par MeF..., demande à la cour:
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 25 juin 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2017 du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de procéder au réexamen de sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens et une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il ressort de la motivation du jugement attaqué que les deux pièces qu'il a produites le 28 mai 2018 n'ont pas été prises en compte ;
En ce qui concerne la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :
- elle est entachée d'un défaut de motivation en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, ce qui révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- cette décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière, sans mise en oeuvre préalable de la procédure contradictoire, en méconnaissance des articles L. 121-1 et 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation et a été prise sans que le préfet sollicite les éléments pertinents et nécessaires à cet effet, alors que le droit d'être entendu est garanti par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne ;
- le préfet a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 4 § 42 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, dès lors qu'il justifie d'une promesse d'embauche et d'une expérience professionnelle lui permettant de bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié au sens de ces stipulations ;
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur les considérations humanitaires et les motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle entraîne sur sa situation personnelle eu égard à l'ancienneté de son séjour, aux attaches qui sont les siennes en France, à ses conditions de vie et à sa parfaite intégration ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cette décision est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
-elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard du pouvoir de régularisation du préfet ; il justifie d'éléments lui permettant d'être admis exceptionnellement au séjour tant au titre du travail que de sa vie privée ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :
- il se prévaut, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- il reprend, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, l'ensemble des moyens soulevés à l'encontre de la décision portant refus de séjour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est entachée d'un défaut de motivation en fait en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- le préfet ne l'a pas mis à même de présenter ses observations préalablement à l'édiction de cette décision, en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et en violation de son droit d'être entendu, principe général du droit de l'Union européenne ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences d'une exceptionnelle gravité qu'entraînerait sa décision sur sa situation ;
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :
- elle est entachée d'un défaut de motivation en fait et en droit, en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et cette motivation ne démontre pas que le préfet de la Haute-Garonne a effectivement procédé à un examen particulier ;
- le préfet ne l'a pas mis à même de présenter ses observations préalablement à l'édiction de cette décision, en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- le préfet n'a pas examiné sérieusement sa situation et s'est placé à tort en situation de compétence liée ;
- cette décision est dépourvue de base légale ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- cette décision est entachée d'un défaut de motivation en fait en raison de l'absence d'indication des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la seule circonstance qu'il ait été débouté de sa demande d'asile ne fait pas obstacle à ce que soient reconnus des risques en cas de retour dans son pays d'origine.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 décembre 2018, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 26 novembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 janvier 2019 à 12 heures.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la circulation et le séjour des personnes ;
- l'accord du 23 septembre 2006 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoires et l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018,le président de la cour a désigné Mme Béatrice Molina-Andréo pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D...a été entendu au cours de l'audience publique :
Considérant ce qui suit :
1. M. C...B..., ressortissant sénégalais, né le 10 mars 1980, déclare être entré en France le 7 novembre 2010. S'étant maintenu irrégulièrement sur le territoire français, M. B...a sollicité, le 28 juillet 2017, son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article 4 § 42 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006. Par un arrêté du 9 novembre 2017, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B...relève appel du jugement du 25 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2.. Par un mémoire en production de pièces enregistré le 28 mai 2018 au greffe du tribunal administratif de Toulouse, M. B...a transmis des pièces nouvelles à l'appui de son moyen tiré de ce que le préfet avait commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 4 § 42 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006. Toutefois, il ressort du jugement attaqué que le tribunal administratif n'a ni visé ni analysé ni communiqué ce mémoire, alors que par une ordonnance en date du 15 mai 2018, la clôture de l'instruction avait été fixée au 29 mai 2018 à 12 heures. Dès lors, M. B...est fondé à soutenir qu'en ne prenant pas en compte ce mémoire qui comportait des éléments nouveaux, le tribunal administratif de Toulouse a entaché d'irrégularité son jugement du 25 juin 2018. Ce jugement doit, par suite, être annulé.
3. Il y a lieu de statuer par la voie de l'évocation sur la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Toulouse.
Sur la légalité de l'arrêté du 9 novembre 2017 :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, la décision contestée vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention du 1er août 1995, l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, ainsi que les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle précise que l'intéressé est entré irrégulièrement en France le 7 novembre 2010, que ce n'est que le 28 juillet 2017 que M. B...s'est fait connaître de l'administration en sollicitant son admission exceptionnelle au séjour en France en qualité de salarié sur le fondement des articles 5 de la convention relative à la circulation et au séjour des personnes entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Sénégal du 1er août 1995, 3-32-321 et 4-42 de l'accord du 23 septembre 2006 modifié par avenant du 25 février 2008 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de la Haute-Garonne, qui n'était pas tenu de mentionner l'ensemble des circonstances constituant la situation de fait du requérant, indique également que si M. B...se prévaut de près de sept années de résidence habituelle en France, il ne fournit pas de preuve établissant la réalité et la continuité de sa résidence en France, que s'il fait état de la présence en France d'une cousine qui l'héberge, cela ne saurait lui conférer un quelconque droit au séjour et par ailleurs, qu'il ne démontre pas avoir créé sur le territoire national des liens personnels et familiaux d'une intensité et d'une stabilité telles qu'ils pourraient justifier sa régularisation et que, célibataire, il n'établit pas être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie ailleurs qu'en France et notamment au Sénégal, où il a vécu la majeure partie de sa vie et où il a conservé d'importantes attaches personnelles et familiales, à savoir, selon ses déclarations et a minima, son enfant mineur né le 10 décembre 2010, sa mère, sa soeur et ses deux frères. Il a ainsi procédé à une évaluation particulière de sa situation personnelle. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de refus de séjour au regard des exigences de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté.
5. En deuxième lieu, cette motivation ne révèle pas que le préfet se serait abstenu de se livrer à un examen attentif de la situation personnelle de M.B....
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ". Selon l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (...) ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas respecté la procédure contradictoire prévue par les articles précités du code des relations entre le public et l'administration avant de refuser à M. B...le renouvellement de son titre de séjour est inopérant.
7. En quatrième lieu, en vertu de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour en application de l'article L. 311-3, est tenu de se présenter, à Paris, à la préfecture de police et, dans les autres départements, à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient. (...) ". Aux termes des dispositions de l'article R. 311-13 du même code : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français ". D'une part, lorsqu'il sollicite son admission au séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français sur ce fondement, ne saurait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande, il pourra faire l'objet d'un refus de titre de séjour assorti, le cas échéant, d'une mesure d'éloignement du territoire français. Il lui appartient, lors du dépôt de sa demande de titre de séjour, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. D'autre part, selon la jurisprudence de la Cour de Justice de 1'Union européenne une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision.
8. M. B...soutient que la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour a été prise sans que le préfet sollicite spontanément auprès de lui les éléments pertinents et nécessaires à l'examen de sa situation, alors que le droit d'être entendu préalablement à toute mesure individuelle défavorable est garanti par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne. Il résulte toutefois de ce qui vient d'être dit au point 7 qu'il incombait au contraire à l'appelant, au cours de l'examen de sa demande de titre de séjour par les services préfectoraux, d'apporter tout élément nouveau susceptible d'influer sur le sens de la décision à rendre. Il est constant que tel n'a pas été le cas. Dès lors, les moyens tirés de ce que cette décision aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière et procéderait d'une erreur de droit ne peuvent qu'être écartés.
9. En cinquième lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants sénégalais, s'appliquent les stipulations de la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relative à la circulation et au séjour des personnes ainsi que celles de l'accord du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires, telles que modifiées par un avenant signé le 25 février 2008. Aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ".
10. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2.(...) ". Les stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code.
11. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant dans la liste annexée à l'arrêté interministériel du 18 janvier 2008, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et recensés comme tels dans l'arrêté du 18 janvier 2008, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
12. Pour demander son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié, laquelle n'est pas de droit selon les termes de l'accord précité, M. B...se prévaut d'une promesse d'embauche de la " SAO Peinture Nettoyage " en qualité de peintre en bâtiment, poste qui figure parmi les métiers du bâtiment et des travaux publics énumérés par l'annexe IV de ce même accord, ainsi que de son expérience dans ce métier, notamment dans son pays d'origine mais aussi en France. Toutefois, en se bornant à produire une attestation du 26 mai 2015 indiquant qu'il a travaillé dans l'entreprise de M. A...au Sénégal en qualité de peintre du 1er mars 1999 au 8 novembre 2006 et une attestation du 23 mai 2018 de M. E...exploitant de la "SAO Peinture Nettoyage", au demeurant postérieure à l'arrêté contesté, louant les qualités professionnelles de M. B...et indiquant, de manière peu circonstanciée, qu'il a eu l'occasion de superviser son travail au sein de son entreprise dans le cadre d'un contrat de mission de chantier, M. B...ne justifie ni d'une qualification et d'une expérience dans l'emploi de peintre en bâtiment ni d'une insertion professionnelle particulière et ancienne en France, où il réside, selon ses déclaration depuis 2010, constamment en situation irrégulière. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appelant présente des circonstances exceptionnelles ou des considérations humanitaires au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lui permettant de bénéficier d'un titre de séjour " salarié ". Par suite, le préfet de la Haute-Garonne a pu, sans commettre d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation au regard du paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rejeter la demande de titre de séjour de M.B....
13. En sixième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Il n'est ni allégué ni démontré que M. B...a déposé une demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne résulte pas non plus de l'arrêté contesté que le préfet aurait examiné de sa propre initiative la demande de M. B...sur ce fondement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant.
14. En septième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
15. M. B...se prévaut de l'ancienneté de son séjour, de son insertion dans la société française, de ses attaches privées sur le territoire national et de son intégration professionnelle en qualité de peintre en bâtiment. Toutefois il ne ressort pas des pièces du dossier que M.B..., célibataire et sans charge de famille en France, qui s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire depuis la date d'entrée alléguée le 7 novembre 2010, soit particulièrement inséré dans la société française et y ait tissé des liens personnels et familiaux intenses. L'intéressé ne justifie pas davantage, ainsi qu'il a été dit au point 13, d'une insertion professionnelle particulière et ancienne en France. Enfin, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident son fils mineur né le 10 décembre 2010, ainsi que sa mère, sa soeur et ses deux frères. Dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et ainsi méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
16. En dernier lieu, et pour les mêmes motifs que ceux qui ont été développés aux points 14 et 16 ci-dessus, l'appelant n'établit pas que le préfet, en estimant qu'il ne justifiait pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en n'usant pas de son pouvoir de régularisation, aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, d'une part, de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B...et d'autre part, des considérations humanitaires et des motifs exceptionnels qui justifieraient son admission exceptionnelle au séjour.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
17. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance (...) d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; ( ...) L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l' objet d'une motivation (...) ".
18. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision lui refusant l'admission au séjour, pour demander l'annulation, par voie de conséquence, de la décision distincte lui faisant obligation de quitter le territoire français.
19. En deuxième lieu, M. B...déclare invoquer à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français les mêmes moyens que ceux exposés contre la décision portant refus de séjour. Pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment, ces moyens doivent être écartés.
20. En troisième lieu, en application du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour, dont elle découle nécessairement, quand elle a été prise sur le fondement du 3° du I, comme en l'espèce. Par suite, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation d'une telle obligation n'implique pas de mention spécifique pour respecter l'exigence de motivation des actes administratifs. Ainsi qu'il a été dit, la motivation du refus de séjour opposé à M. B...par le même arrêté est conforme aux prescriptions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Dans ces conditions, la décision attaquée est suffisamment motivée.
21. En quatrième lieu, il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment de son article L. 512-1, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Par suite, M. B...ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, désormais reprises à l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration, prévoyant une procédure contradictoire, qui ne sont pas applicables.
22. En cinquième lieu, le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, selon le droit de l'Union, dont l'un des objectifs est l'éloignement de tout ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier, lorsqu'une mesure d'éloignement a été décidée dans le cadre d'une procédure administrative en méconnaissance du droit d'être entendu, le juge chargé de l'appréciation de la légalité de cette décision ne saurait annuler cette mesure que s'il considère, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit de chaque espèce, que cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B...aurait été effectivement privé, en l'espèce, de la possibilité de faire connaître son point de vue sur la mesure d'éloignement envisagée. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait le principe général du droit d'être entendu, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, doit être écarté.
23. En dernier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 15, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ou serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale.
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :
24. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) ".
25. En premier lieu, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet de motiver spécifiquement l'octroi du délai de départ volontaire quand celui-ci correspond à la durée légale fixée à trente jours. En tout état de cause, le préfet a mentionné que la situation personnelle de M. B...et les circonstances déjà exposées ne justifiaient pas, compte tenu des éléments du dossier, qu'à titre exceptionnel, un délai supérieur lui soit accordé. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le délai de départ est insuffisamment motivée manque en droit comme en fait.
26. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen attentif de la situation particulière de l'intéressé, ni qu'il se serait senti en situation de compétence liée.
27. En troisième lieu, pour les raisons exposées au point 21, M. B...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, reprises à l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration.
28. En quatrième lieu, M. B...ne se prévaut d'aucune circonstance démontrant que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en assortissant l'obligation de quitter le territoire du délai de trente jours, qui est le délai normalement accordé pour quitter volontairement le territoire, sauf circonstances exceptionnelles.
29. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision contestée n'est pas privée de base légale.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
30. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y est menacée ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
31. En premier lieu, la décision contestée vise notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que M. B..." n'établit pas être exposé à des peines ou traitements personnels, réels et actuels, contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine vu, notamment l'absence de demande d'admission au bénéfice de l'asile ". M. B...n'établissant pas qu'il encourrait des risques en cas de retour au Sénégal, la motivation adoptée par le préfet, qui a ainsi énoncé les éléments de droit et de fait sur lesquels il a fondé sa décision, doit être regardée comme suffisante.
32. En deuxième lieu, comme cela vient d'être dit, M. B...n'établit pas encourir des risques particuliers en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues par la décision contestée.
33. En dernier lieu, pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit dès lors être écarté.
34. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 9 novembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1800611 du 25 juin 2018 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Toulouse et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier conseiller.
M. David Katz, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 juillet 2019.
Le premier-conseiller,
Paul-André BraudLe président - rapporteur,
Marianne D...
Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
18BX03864