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29/07/2019 | FRANCE | N°18BX03801

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 29 juillet 2019, 18BX03801


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2017 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800500 du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 novemb

re 2018 et 15 juin 2019, M.D..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2017 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800500 du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 novembre 2018 et 15 juin 2019, M.D..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mai 2018 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Dordogne du 13 octobre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui délivrer un titre de séjour vie privée et familiale, ou à défaut, d'enjoindre au préfet de la Dordogne de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le signataire de l'arrêté est incompétent ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'avis médical du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration rendu le 16 septembre 2017 ne mentionne pas le nom du médecin rapporteur ; le préfet n'ayant pu s'assurer de la régularité de la composition de ce collège de médecins et vérifier que le médecin rapporteur n'y siégeait pas, il a de ce fait été privé d'une garantie ;

- l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne s'est pas prononcé sur l'absence ou non de prise en charge dans son pays d'origine ;

- le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; les soins nécessités par son état de santé ne sont pas disponibles dans son pays d'origine ; or, l'absence de soins aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- il a également méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ;

- cette décision méconnaît les dispositions du 5° de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2019, le préfet de la Dordogne conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens invoqués par M. D...ne sont pas fondés.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 octobre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Andréa Molina-Andréo pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme A...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E...D..., ressortissant congolais né le 1er janvier 1981, déclare être entré irrégulièrement en France le 18 juin 2010, afin d'y solliciter l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 25 mai 2011, et par la Cour nationale du droit d'asile le 24 février 2012. Le préfet de la Dordogne lui a délivré, le 15 janvier 2014, une carte de séjour d'un an " étranger malade ", régulièrement renouvelée jusqu'au 14 juillet 2017. Le 15 mai 2017, M. D...en a sollicité le renouvellement. Par un arrêté du 13 août 2017, le préfet de la Dordogne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. D...relève appel du jugement du 29 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :

2. En premier lieu, le préfet de la Dordogne a, par un arrêté du 23 janvier 2017, régulièrement publié le 24 janvier 2017 au recueil des actes administratifs n° 24-2017-003 de la préfecture, donné délégation à M. Laurent Simplicien, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer toutes décisions concernant les attributions de l'Etat dans le département, et notamment les décisions relevant de l'application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté doit être écarté.

3. En second lieu, l'arrêté en litige, qui vise les dispositions dont il fait application, notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 211-1, L. 313-11 11°, et L. 511-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rappelle les conditions de l'entrée en France de M.D.... Il précise que selon l'avis du 16 septembre 2017 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, son état de santé nécessite une prise en charge médicale mais que le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Il comporte également des considérations quant à sa situation personnelle et familiale et précise que M. D...ne démontre pas être personnellement exposé à des traitements inhumains ou dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou dans tout autre pays pour lequel il établit être légalement admissible. Dès lors, cet arrêté comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté serait insuffisamment motivé doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté litigieux : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...) ".

5. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ".

6. Aux termes de l'article R. 313-23 du même code, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté litigieux : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. A défaut de réponse dans le délai de quinze jours, ou si le demandeur ne se présente pas à la convocation qui lui a été fixée, ou s'il n'a pas présenté les documents justifiant de son identité le médecin de l'office établit son rapport au vu des éléments dont il dispose et y indique que le demandeur n'a pas répondu à sa convocation ou n'a pas justifié de son identité. Il transmet son rapport médical au collège de médecins./ Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. En cas de défaut de présentation de l'étranger lorsqu'il a été convoqué par le médecin de l'office ou de présentation des examens complémentaires demandés dans les conditions prévues au premier alinéa, il en informe également le préfet ; dans ce cas le récépissé prévu à l'article R. 311-4 n'est pas délivré./ Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) / Le collège peut demander au médecin qui suit habituellement le demandeur, au médecin praticien hospitalier ou au médecin qui a rédigé le rapport de lui communiquer, dans un délai de quinze jours, tout complément d'information. Le demandeur en est simultanément informé. Le collège de médecins peut entendre et, le cas échéant, examiner le demandeur et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. Il peut être assisté d'un interprète et d'un médecin. Lorsque l'étranger est mineur, il est accompagné de son représentant légal. / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate./ L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. ".

7. L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

8. Il ne résulte d'aucune de ces dispositions, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office. Si l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 indique que l'avis mentionne " les éléments de procédure ", cette mention renvoie, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité.

9. Il ressort des pièces versées au dossier par le préfet de la Dordogne, en particulier de l'indication du nom du médecin qui a établi le rapport médical donnée au préfet par une attestation des services de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en date du 11 mars 2019, que le rapport médical sur l'état de santé de M. D...prévu à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été établi par un premier médecin et a été transmis pour être soumis au collège de médecins. Il ressort également des pièces du dossier que ce collège, au sein duquel ont siégé trois autres médecins, qui avaient été désignés pour participer aux collèges de médecins de l'Office par décision du directeur général de l'Office en date du 17 janvier 2017 publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur, s'est réuni le 16 septembre 2017 pour émettre l'avis qui a été transmis au préfet de la Dordogne. Il s'ensuit que l'avis a été émis dans le respect des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment dans le respect de la règle selon laquelle le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. Par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse est entachée d'un vice de procédure.

10. En deuxième lieu, le collège de médecins n'était pas tenu de préciser, dans son avis du 16 septembre 2017, si l'intéressé pouvait effectivement accéder à un traitement approprié dans son pays d'origine dès lors qu'il a estimé que la condition tenant aux conséquences d'une exceptionnelle gravité du défaut d'une prise en charge médicale n'était pas, en l'espèce, remplie. Par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que cet avis a méconnu, pour ce motif, les dispositions de l'article 6 précité de l'arrêté du 27 décembre 2016.

11. En troisième lieu, M. D...n'établit ni même n'allègue avoir adressé au préfet de la Dordogne, préalablement à l'arrêté litigieux, des documents lui permettant d'apprécier son état de santé. Dans ces conditions, le préfet de la Dordogne ne pouvait que se fonder sur l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dès lors, la reprise des termes de l'avis dans l'arrêté en litige ne permet pas, à elle seule, d'établir que le préfet se serait estimé lié par celui-ci et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa compétence.

12. En quatrième lieu, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

13. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de renouveler le titre de séjour de l'intéressé en raison de son état de santé, le préfet de la Dordogne s'est notamment fondé sur l'avis du 16 septembre 2017 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui indique que si l'état de santé de M. D...nécessite une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, l'état de santé de l'intéressé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour contredire l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, M. D...produit, d'une part, des certificats médicaux datés des 5 février 2011 et 29 février 2012 lesquels, eu égard à leur ancienneté et aux termes dans lesquels ils sont rédigés, ne sont pas de nature à infirmer l'appréciation portée par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, et un troisième certificat du 20 mai 2016 affirmant qu'il doit être régulièrement suivi sur le plan psychologique et organique, sans préciser cependant que de tels soins devraient nécessairement être effectués en France et qu'un défaut de prise en charge pourrait avoir des conséquences " d'une extrême gravité ". S'il produit, d'autre part, un rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés sur les soins psychiatriques au Congo du 16 mai 2013, et l'extrait d'un entretien du 4 juillet 2016 du président de l'Union nationale des psychologues cliniciens, issu d'un site internet, qui font état de difficultés générales dans la prise en charge des patients atteints de troubles psychiques au Congo, ces documents ne permettent pas d'établir que l'intéressé ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Enfin, si M. D...produit un rapport d'expertise médicale du 21 juin 2018, un bulletin d'hospitalisation de septembre 2018 ainsi qu'un extrait d'expertise du docteur C...du 27 septembre 2018, ces éléments médicaux, peu circonstanciés, ne permettent pas de remettre en cause la pertinence de l'appréciation portée par le collège de médecins sur la gravité de sa pathologie et ne détaillent pas davantage les conséquences d'un éventuel défaut de prise en charge médicale. De plus, si l'intéressé indique également qu'il a déjà bénéficié de titres de séjour régulièrement renouvelés de 2014 à 2017 sur le fondement d'avis du médecin de l'agence régionale de santé estimant que l'absence de soins aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que le traitement alors requis n'était pas disponible dans son pays d'origine, cette circonstance n'est pas, par elle-même, de nature à révéler que le nouvel avis du collège de médecins du 16 septembre 2017 serait erroné. Au surplus, l'intéressé n'établit pas qu'il ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Dans ces conditions, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Dordogne aurait méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni qu'il a entaché son refus de séjour d'une erreur d'appréciation de son état de santé.

14. En cinquième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Lorsque le préfet recherche d'office si l'étranger peut bénéficier d'un titre de séjour sur un ou plusieurs autres fondements possibles, l'intéressé peut alors se prévaloir à l'encontre de la décision de rejet de sa demande de titre de séjour de la méconnaissance des dispositions au regard desquelles le préfet a également fait porter son examen.

15. Si l'appelant soutient que la décision en litige méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article L. 313-14 du même code, il ressort toutefois de la demande de titre de séjour de l'intéressé qu'elle ne se fondait que sur le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, le préfet n'était pas tenu de statuer sur la possibilité d'une admission au titre de la vie privée et familiale sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni sur son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du même code. Dans ces conditions, l'appelant ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 313-14 du même code à l'encontre d'un refus opposé à sa demande de renouvellement de titre de séjour qui n'a pas été présentée sur le fondement de ces articles.

16. En sixième et dernier lieu, si M. D...se prévaut de son intégration en France, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il ne justifie d'aucune formation professionnelle et ne présente, contrairement à ce qu'il allègue, aucune garantie d'insertion professionnelle ayant seulement, depuis son entrée en France il y a huit ans, effectué un stage ponctuel dans les métiers du bâtiment en octobre 2012, bénéficié d'un contrat à durée déterminée à temps partiel dans une association d'insertion sociale du 1er septembre 2015 au 28 février 2016 puis du 29 février au 28 août 2016, et compter du 1er septembre 2017, d'un contrat d'engagement au titre du plan local d'insertion et emploi. Il est célibataire et sans enfant. Il n'établit pas qu'il serait dépourvu de toute attache personnelle et familiale dans son pays d'origine où résident ses trois soeurs et où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation sur la situation de l'intéressé.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

17. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédant.

En ce qui concerne l'arrêté fixant le pays de renvoi :

18. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Ces stipulations font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de renvoi d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de renvoi ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée.

19. M. D...soutient qu'il encourt des risques de traitements inhumains et dégradants de la part d'un groupe de militaires en cas de retour dans son pays d'origine. Toutefois, alors que sa demande d'asile fondée sur les mêmes allégations a été rejetée, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de tels risques. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

20. En second lieu, aux termes de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion qu'en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes : (...) 5° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ".

21. M. D...ne saurait utilement soutenir que l'arrêté litigieux méconnaît les dispositions du 5° de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que ces dispositions ne concernent que les étrangers visés par une mesure d'expulsion. Dans ces conditions, le moyen doit être écarté comme inopérant.

22. Il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 octobre 2017. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. David Katz, premier-conseiller.

M. Paul-André Braud, premier-conseiller,

Lu en audience publique, le 29 juillet 2019.

Le premier conseiller,

Paul-André BraudLe président-rapporteur,

Marianne A...

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'Intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX03801


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03801
Date de la décision : 29/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: Mme Marianne POUGET M.
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : GENEVAY

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-07-29;18bx03801 ?
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