La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2019 | FRANCE | N°17BX02732

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre - formation à 3, 28 juin 2019, 17BX02732


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...et l'association syndicale libre des riverains de la Sèvre Niortaise ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2014 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a mis en demeure Mme C...de régulariser la situation administrative des travaux de restauration de la chaussée du moulin de Piozay sur la commune de Saint-Martin-Saint-Maixent.

Par un jugement n° 1500507 du 7 juin 2017, le tribunal administratif de Poitiers a annulé cet arrêté du 22 décembre

2014 du préfet des Deux-Sèvres.

Procédure devant la cour :

Par un recours, enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...et l'association syndicale libre des riverains de la Sèvre Niortaise ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2014 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a mis en demeure Mme C...de régulariser la situation administrative des travaux de restauration de la chaussée du moulin de Piozay sur la commune de Saint-Martin-Saint-Maixent.

Par un jugement n° 1500507 du 7 juin 2017, le tribunal administratif de Poitiers a annulé cet arrêté du 22 décembre 2014 du préfet des Deux-Sèvres.

Procédure devant la cour :

Par un recours, enregistré le 9 août 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 7 juin 2017 et de rejeter la demande de Mme C... et de l'association syndicale libre des riverains de la Sèvre Niortaise.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ; le préfet indiquait que " l'arrêté préfectoral du 22 décembre 2014 mentionne que les travaux de réfection peuvent avoir des impacts de nature à détruire les frayères et que le dossier de déclaration se devait de démontrer que les travaux exécutés étaient compatibles avec la mesure 1B-2 du SDAGE Loire-Bretagne et proposer des mesures correctrices et compensatoires à l'impact des travaux sur la continuité écologique " ;

- les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation en considérant que " les travaux ne nécessitaient pas une déclaration " au titre de l'article R. 214-1 du code de l'environnement ;

- les travaux menés par Mme C...sont soumis à déclaration au titre de la rubrique 3.5.1.0. annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement au regard du risque de destruction des frayères ; le libellé de la rubrique 3.5.1.0. concerne tous les travaux de nature à détruire les frayères, sans préjudice de leurs effets réels sur ces dernières ;

- l'existence d'un risque de destruction des frayères ressort tant de l'annexe de l'arrêté préfectoral établissant l'inventaire des frayères des Deux-Sèvres qui comprend la zone où les travaux ont été réalisés que du rapport de l'ONEMA en date du 31 juillet 2013 ;

- Mme C...n'a apporté aucun élément justifiant la compatibilité des travaux envisagés avec les dispositions du 1B-2 du SDAGE-Loire-Bretagne.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2018, Mme C... et l'association syndicale libre des riverains de la Sèvre Niortaise, représentés par MeB..., concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le jugement est régulier ;

- les moyens soulevés par le ministre ne sont pas susceptibles de fonder l'annulation du jugement ;

- à titre subsidiaire, les travaux litigieux entrent dans le champ d'application de la dispense de déclaration prévue par les dispositions de l'article R. 214-44 du code de l'environnement ;

- à supposer que le dépôt d'une déclaration au titre de la législation sur l'eau fût nécessaire, elle a bien déposé une déclaration en préfecture préalablement à la réalisation de ses travaux ;

- l'arrêté litigieux lui enjoint illégalement de joindre au dossier de régularisation des travaux " un diagnostic ICE de l'ouvrage afin d'évaluer précisément l'impact des travaux de restauration de la brèche sur la continuité écologique ".

Par ordonnance du 12 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 22 janvier 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Madelaigue ;

- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., propriétaire de la partie haute de la chaussée du moulin de Piozay situé sur le territoire de la commune de Saint-Martin-Saint-Maixent (Deux-Sèvres), a décidé de procéder à des travaux de réfection de la chaussée endommagée et ébréchée sur près de 8 mètres et a déposé à cette fin une déclaration au titre de la législation sur l'eau en préfecture des Deux-Sèvres le 21 juillet 2014. Par un courrier du 29 juillet 2014, la direction départementale des territoires (DDT) a considéré que le dossier de déclaration déposé par Mme C...était incomplet en raison de l'absence de justification de la compatibilité des travaux projetés avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Loire-Bretagne et en a informé Mme C...le 8 août 2014. En réponse à ce courrier, Mme C...a présenté une note complémentaire le 19 août 2014. Les travaux de remise en état de la chaussée ont été achevés le 4 septembre 2014 et un rapport de manquement administratif a été établi à l'encontre de Mme C...le 22 septembre 2014. Par un arrêté du 22 décembre 2014, le préfet des Deux-Sèvres a mis en demeure Mme C...de régulariser la situation administrative des travaux de restauration de la chaussée. Le ministre de la transition écologique et solidaire relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Poitiers a, à la demande de Mme C... et de l'association syndicale libre des riverains de la Sèvre Niortaise, annulé l'arrêté du 22 décembre 2014 du préfet des Deux-Sèvres.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Pour répondre au moyen d'erreur de droit soulevé par Mme C...au motif que les travaux du moulin de Piozay n'entrent pas dans le champ d'application de l'article R. 214-1 du code de l'environnement, le préfet a indiqué que " le dossier démontre que les travaux de réfection du déversoir relèvent d'une procédure de déclaration au titre de l'article L. 214-3 du code pour la rubrique 3.1.5.0 de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1 du fait des impacts qu'ils peuvent avoir dans le lit mineur de la Sèvre Niortaise, étant de nature à détruire les frayères, les zones de croissance ou les zones d'alimentation de la faune piscicole, des crustacés ou des batraciens " et a ajouté que " contrairement aux arguments de la partie adverse, l'arrêté préfectoral du 22 décembre 2014 mentionne que les travaux de réfection peuvent avoir des impacts de nature à détruire les frayères ... et que le dossier de déclaration se devait de démontrer que les travaux exécutés étaient compatibles avec la mesure 1B-2 du SDAGE Loire-Bretagne et proposer des mesures correctrices et compensatoires à l'impact des travaux sur la continuité écologique ". Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments des parties, ont répondu au moyen en défense opposé par le préfet au point 3, qu'aucun élément n'était susceptible de montrer que les travaux de réfection à l'identique de la chaussée du moulin pouvaient avoir des impacts de nature à détruire les frayères, de sorte que Mme C...n'avait pas à déposer un dossier de déclaration au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement. Ils ont également relevé que le rapport établi par l'office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), le 31 juillet 2013, visé par la décision attaquée, n'a pas été produit à l'instance. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'une omission à statuer ou qu'il serait insuffisamment motivé ne peut qu'être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 214-6 du code de l'environnement : " (...) II.-Les installations, ouvrages et activités déclarés ou autorisés en application d'une législation ou réglementation relative à l'eau antérieure au 4 janvier 1992 sont réputés déclarés ou autorisés en application des dispositions de la présente section. Il en est de même des installations et ouvrages fondés en titre. (...) ". En vertu du VI du même article : " -Les installations, ouvrages et activités visés par les II, III et IV sont soumis aux dispositions de la présente section ".

4. Il résulte de l'instruction que les travaux de la chaussée du moulin de Piozay dont l'existence est antérieure à 1789 ainsi qu'il ressort du règlement d'eau du moulin en date du 26 mars 1864, ont consisté en la réparation de la brèche créée par l'alternance des périodes d'assèchement et des périodes de crues intervenues en décembre 2011, pendant l'hiver 2011-2012 et au printemps 2013. Il n'est pas contesté que le moulin de Piozay et la chaussée en litige bénéficient d'un droit fondé en titre. La chaussée de Mme C... est par conséquent réputée autorisée au titre de la loi sur l'eau en application du II de l'article L. 214-6 du code de l'environnement précité. Si cette autorisation ne fait pas obstacle à ce que cet ouvrage soit soumis aux dispositions des articles L. 214-1 à L. 214-11 du code de l'environnement, il résulte toutefois de l'instruction et il n'est pas contesté que ces travaux ne modifient pas l'ouvrage ni sa consistance légale. Le rapport de manquement administratif établi le 22 septembre 2014 par les agents du service de l'eau et de l'environnement de la direction départementale des territoires ne relève pas de modification par rapport à l'état antérieur de l'ouvrage. Par suite, les premiers juges ont estimé à bon droit que les travaux envisagés n'étant pas de nature à entraîner de modification substantielle ou notable des éléments de la chaussée, le préfet ne pouvait exiger qu'il soit procédé à une nouvelle déclaration au titre de ces travaux.

5. Toutefois, le rétablissement de la continuité écologique au sein des bassins hydrographiques est un des intérêts mentionnés au 7° du I de l'article L. 211-1 du code de l'environnement au titre de la gestion équilibrée et durable de l'eau. Dans ce cadre, des prescriptions dûment justifiées peuvent être imposées à tout moment aux ouvrages en lit mineur de cours d'eau non classés pour réduire leur impact sur cette continuité. Si la DDT et l'ONEMA relèvent que la réparation de la brèche a eu pour effet de rétablir un obstacle à la continuité écologique, il est loisible au préfet, s'il s'y croit fondé, d'édicter des prescriptions à l'intention de MmeC..., afin que l'ouvrage dont elle est propriétaire ne puisse constituer un obstacle à la continuité écologique.

6. Il résulte de ce qui précède que le ministre de la transition écologique et solidaire n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté du 22 décembre 2014 du préfet des Deux-Sèvres.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C...et l'association syndicale libre des riverains de la Sèvre Niortaise et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête du ministre de la transition écologique et solidaire est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Mme C...et à l'association syndicale libre des riverains de la Sèvre Niortaise la somme totale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et solidaire, à Mme A... C...et à l'association syndicale libre des riverains de la Sèvre Niortaise.

Copie en sera adressée au préfet des Deux-Sèvres.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Frédéric Faïck, premier conseiller,

Mme Florence Madelaigue, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 juin 2019.

Le rapporteur,

Florence MadelaigueLe président,

Elisabeth JayatLe greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX02732


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02732
Date de la décision : 28/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

27-02-02 Eaux. Ouvrages. Entretien des ouvrages.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Florence MADELAIGUE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SCP BOIVIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-06-28;17bx02732 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award