Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 25 novembre 2013 du directeur du centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne et d'enjoindre à ladite autorité de le reclasser sur un poste adapté à son état de santé.
Par un jugement n° 1400242 du 7 décembre 2016, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 février 2017 et 23 février 2017, M. C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 décembre 2016 du tribunal administratif de Poitiers ;
2°) d'annuler la décision contestée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que l'administration doit établir l'impossibilité de le reclasser sur un poste adapté à son état de santé, preuve qui n'est pas rapportée en l'espèce.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 décembre 2017, la garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que l'administration a établi qu'aucune possibilité de reclassement n'avait été trouvée au bénéfice de M.C....
Par ordonnance du 19 décembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 5 février 2018 à 12 heures.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er février 2018.
Les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de soulever d'office un moyen d'ordre public.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code de procédure pénale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy,
- et les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., alors incarcéré au centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne, a fait l'objet le 25 février 2013 d'une décision de classement sur un emploi de buandier. Par un certificat médical établi le 9 novembre 2013, un médecin de l'unité de soins dudit établissement pénitentiaire a indiqué que l'intéressé présentait une affection rhumatismale occasionnant des douleurs lors de l'accomplissement de tâches sollicitant beaucoup les membres supérieurs et préconisé que lui soit proposé un emploi adapté à son état de santé. Par un acte du 25 novembre 2013, le directeur du centre pénitentiaire a estimé que l'emploi de buandier était incompatible avec l'état de santé de M.C..., relevé qu'il n'existait pas de possibilité de le reclasser sur un autre emploi et prononcé son déclassement de l'emploi de buandier qu'il occupait alors. M. C... fait appel du jugement du 7 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de cet acte du 25 novembre 2013.
2. Aux termes de l'article 717-3 du code de procédure pénale : " Les activités de travail et de formation professionnelle ou générale sont prises en compte pour l'appréciation des gages de réinsertion et de bonne conduite des condamnés. Au sein des établissements pénitentiaires, toutes dispositions sont prises pour assurer une activité professionnelle, une formation professionnelle ou générale aux personnes incarcérées qui en font la demande. Les relations de travail des personnes incarcérées ne font pas l'objet d'un contrat de travail. Il peut être dérogé à cette règle pour les activités exercées à l'extérieur des établissements pénitentiaires. (...) ". Aux termes de l'article D. 432-2 du même code : " Les dispositions nécessaires doivent être prises pour qu'un travail productif et suffisant pour occuper la durée normale d'une journée de travail soit fourni aux détenus. ". L'article D. 432-3 de ce code dispose : " Le travail est procuré aux détenus compte tenu du régime pénitentiaire auquel ceux-ci sont soumis, des nécessités de bon fonctionnement des établissements ainsi que des possibilités locales d'emploi. Dans la mesure du possible, le travail de chaque détenu est choisi en fonction non seulement de ses capacités physiques et intellectuelles, mais encore de l'influence que ce travail peut exercer sur les perspectives de sa réinsertion. Il est aussi tenu compte de sa situation familiale et de l'existence de parties civiles à indemniser (...) ". Aux termes de l'article D. 432-4 : " Lorsque la personne détenue s'avère incompétente pour l'exécution d'une tâche, cette défaillance peut entraîner le déclassement de cet emploi. Lorsque la personne détenue ne s'adapte pas à un emploi, elle peut faire l'objet d'une suspension, dont la durée ne peut excéder cinq jours, afin qu'il soit procédé à une évaluation de sa situation. A l'issue de cette évaluation, elle fait l'objet soit d'une réintégration dans cet emploi, soit d'un déclassement de cet emploi en vertu de l'alinéa précédent. ". Il résulte de ces dispositions que le travail auquel les détenus peuvent prétendre constitue pour eux non seulement une source de revenus mais encore un mode de meilleure insertion dans la vie collective de l'établissement, tout en leur permettant de faire valoir des capacités de réinsertion.
3. L'acte du 25 novembre 2013 en litige doit être regardé comme comportant deux décisions, l'une procédant au déclassement de M. C...de l'emploi de buandier au motif tenant à son inaptitude physique à accomplir les tâches afférentes à ce poste, l'autre refusant de le classer sur un autre emploi. En appel, le requérant, qui fait uniquement valoir que les premiers juges ont écarté à tort le moyen tiré de la méconnaissance, par l'administration, de son obligation de le reclasser sur un autre emploi, ne fait appel du jugement qu'en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre le refus de classement sur un emploi compatible avec son état de santé. Toutefois, une décision de refus de classement sur un emploi constitue une mesure d'ordre intérieur insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, sous réserve que ne soient pas en cause des libertés et des droits fondamentaux des détenus ; doivent être regardées comme mettant en cause des libertés et des droits fondamentaux des détenus les décisions qui portent à ces droits et libertés une atteinte qui excède les contraintes inhérentes à leur détention. Or, M. C...n'établit pas, ni même n'allègue que la décision de refus de classement querellée porterait atteinte à ses droits et libertés fondamentaux. Il s'ensuit que sa demande de première instance, en tant qu'elle était dirigée contre ladite décision de refus de classement, était irrecevable.
4. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, être accueillies.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et à la garde des sceaux, ministre de la justice. Copie en sera adressée à MeB....
Délibéré après l'audience du 9 mai 2019 à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
M. Laurent Pouget, président-assesseur,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 6 juin 2019.
Le rapporteur,
Marie-Pierre BEUVE DUPUYLe président,
Aymard de MALAFOSSE
Le greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne à la garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX00459