La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/04/2019 | FRANCE | N°17BX01006

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 12 avril 2019, 17BX01006


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Omicron Protection, venant aux droits de la SARL AS Sécurité, a notamment demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 19 septembre 2014 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS a prononcé à son encontre un avertissement et lui a infligé une pénalité financière de 13 000 euros.

Par un jugement n° 1404455-1405128 du 2 février 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cou

r :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement les 30 mars 2017 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Omicron Protection, venant aux droits de la SARL AS Sécurité, a notamment demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 19 septembre 2014 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS a prononcé à son encontre un avertissement et lui a infligé une pénalité financière de 13 000 euros.

Par un jugement n° 1404455-1405128 du 2 février 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement les 30 mars 2017 et 12 décembre 2018, la société Omicron Protection, représentée par Me D...puis par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 2 février 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 19 septembre 2014 par laquelle la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS a prononcé à son encontre un avertissement et lui a infligé une pénalité financière de 13 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision du 24 mars 2014 de la commission interrégionale d'agrément et de contrôle du Sud-Ouest a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

- la décision en litige a également été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

- cette dernière décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un vice de forme ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2018, le Conseil national des activités privées de sécurité, représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête ainsi qu'à la condamnation de la société Omicron Protection à lui verser la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient qu'aucun des moyens présentés par la requérante n'est fondé.

Par ordonnance du 16 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 17 décembre 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- le décret n° 2011-1919 du 22 décembre 2011 relatif au Conseil national des activités privées de sécurité et modifiant certains décrets portant application de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 ;

- le décret n° 2012-870 du 10 juillet 2012 relatif au code de déontologie des personnes physiques ou morales exerçant des activités privées de sécurité ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sylvie Cherrier,

- les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant le conseil national des activités privées de sécurité.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL AS Sécurité, aux droits de laquelle vient la société Omicron Protection et qui exerçait une activité de sécurité et de gardiennage, a fait l'objet, le 10 janvier 2013, d'un contrôle par les agents du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS). Plusieurs manquements ayant été constatés, le directeur de cet organisme a décidé d'engager une procédure disciplinaire à son encontre. Il a saisi la commission interrégionale d'agrément et de contrôle du Sud-Ouest du CNAPS aux fins qu'une sanction soit prononcée. Par une décision du 24 mars 2014, cette commission a infligé à la SARL AS Sécurité un avertissement ainsi qu'une pénalité financière de 13 000 euros. La SARL AS Sécurité a formé un recours à l'encontre de cette décision devant la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS. Par une décision du 19 septembre 2014, cette commission a rejeté le recours et confirmé la sanction prononcée par la commission interrégionale. Par la présente requête, la société Omicron Protection relève appel du jugement du 2 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision.

Sur la légalité de la décision du 19 septembre 2014 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 633-3 du code de la sécurité intérieure : " Tout recours contentieux formé par une personne physique ou morale à l'encontre d'actes pris par une commission régionale d'agrément et de contrôle est précédé d'un recours administratif préalable devant la Commission nationale d'agrément et de contrôle, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux " ; que l'article R. 632-11 du même code prévoit que : " La commission nationale d'agrément et de contrôle : (...) 2° statue sur les recours administratifs préalables formés à l'encontre des décisions des commissions régionales et interrégionales sur le fondement de l'article L 633-3 " et que l'article R 633-9 dudit code précise que : " Le recours administratif préalable obligatoire devant la commission nationale d'agrément et de contrôle prévu à l'article L 633-3 peut être exercé dans les deux mois de la notification par la commission régionale ou interrégionale d'agrément et de contrôle de la décision contestée. Cette notification précise les délais et les voies de ce recours. / Toute décision de la Commission nationale d'agrément et de contrôle se substitue à la décision initiale de la commission régionale ou interrégionale d'agrément et de contrôle ".

3. En premier lieu, dans le cadre du recours administratif préalable obligatoire devant l'organe disciplinaire d'appel prévu par les dispositions précitées, la procédure suivie devant cet organe et la décision prise par ce dernier se substituent entièrement à la procédure suivie devant l'organe disciplinaire de première instance et à la décision prise par ce dernier. Dès lors, les irrégularités dont la procédure de première instance aurait été atteinte ne peuvent être utilement invoquées à l'appui du présent recours, dirigé contre la décision du 19 septembre 2014.

4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la SARL AS Sécurité a été convoquée devant la formation disciplinaire de la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS du 4 septembre 2014 par un courrier du 7 août 2014, notifié le 11 août 2014. Le rapport d'instruction établi en vue de cette séance lui a été adressé par un courrier du 19 août 2014, reçu le 21 août, lequel lui indiquait par ailleurs qu'elle pouvait faire parvenir ses observations au secrétaire permanent de la commission nationale d'agrément et de contrôle jusqu'au 4 septembre 2014. Par suite, et à supposer même que la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS ne disposait pas, à la date de cette audience, du règlement intérieur prévu par les dispositions de l'article III.1.3.3 de la circulaire du 23 décembre 2011 relative à l'installation du CNAPS, le moyen tiré de ce que le principe du contradictoire aurait été méconnu dans le cadre de la procédure devant cette commission ne peut être accueilli.

5. En troisième lieu, la circonstance, à la supposer établie, que la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS n'aurait pas répondu au moyen tiré de ce que la décision de la commission interrégionale d'agrément et de contrôle du Sud-Ouest aurait été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière n'est pas de nature à révéler une insuffisance de motivation dès lors que, comme il a été dit, une telle irrégularité ne pouvait fonder sa décision laquelle est, comme l'a relevé le tribunal administratif, suffisamment motivée au regard des éléments de droit et de fait qui la fondent.

6. En quatrième lieu, la circonstance que la décision du 19 septembre 2014 n'indique pas le nom des personnes ayant siégé à la séance du 4 septembre 2014 ne suffit pas à établir, en l'absence de toute autre élément ou précision, que cette formation aurait siégé selon une composition irrégulière.

7. En cinquième lieu, aux termes de l'article de l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse: " Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu'elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent : 1° A fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles ; (...) 3° A protéger l'intégrité physique des personnes ; (...) ". Aux termes de l'article L. 612-2 du même code dans sa rédaction applicable : " L'exercice d'une activité mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 611-1 est exclusif de toute autre prestation de services non liée à la surveillance, au gardiennage ou au transport de fonds, de bijoux ou de métaux précieux. / L'exercice de l'activité mentionnée au 3° de l'article L. 611-1 est exclusif de toute autre activité. / (...) ", l'article L. 612-20 dudit code disposant que : "Nul ne peut être employé ou affecté pour participer à une activité mentionnée à l'article L. 611-1 : (...) 5° S'il ne justifie pas de son aptitude professionnelle selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat et, s'il utilise un chien dans le cadre de son emploi ou de son affectation, de l'obtention d'une qualification définie en application de l'article L. 613-7. / Le respect de ces conditions est attesté par la détention d'une carte professionnelle délivrée selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat. /(...) ".

8. Par ailleurs, il résulte de l'article 2 du décret susvisé du 10 juillet 2012 alors en vigueur que : " Tout manquement aux devoirs définis par le présent code de déontologie expose son auteur aux sanctions disciplinaires prévues à l'article L. 634-4 du code de la sécurité intérieure, sans préjudice des mesures administratives et des sanctions pénales prévues par les lois et règlements. ", l'article 15 de ce décret disposant que : " Les entreprises et leurs dirigeants s'interdisent d'employer ou de commander, même pour une courte durée, des personnels de sécurité et de recherches ne satisfaisant pas aux conditions de qualification professionnelle ou ne possédant pas les autorisations valides requises pour exercer leurs missions. ".

9. Enfin, aux termes de l'article L. 634-4 du code de la sécurité intérieure dans sa rédaction alors applicable : " Tout manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles et déontologiques applicables aux activités privées de sécurité peut donner lieu à sanction disciplinaire. Le Conseil national des activités privées de sécurité ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction. / Les sanctions disciplinaires applicables aux personnes physiques et morales exerçant les activités définies aux titres Ier et II sont, compte tenu de la gravité des faits reprochés : l'avertissement, le blâme et l'interdiction d'exercice de l'activité privée de sécurité à titre temporaire pour une durée qui ne peut excéder cinq ans. En outre, les personnes morales et les personnes physiques non salariées peuvent se voir infliger des pénalités financières. Le montant des pénalités financières doit être fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages tirés du manquement, sans pouvoir excéder 3 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos calculé sur une période de douze mois. Ce maximum est porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation. ".

10. Il ressort des pièces du dossier que, le 10 janvier 2013, un contrôle a été réalisé au siège de la SARL AS Sécurité par les agents de la délégation territoriale Sud-Ouest du CNAPS. Ce contrôle a permis d'établir, ce que la société Omicron Protection ne conteste d'ailleurs pas, qu'au cours de l'année 2012, la SARL AS Sécurité a employé à la fois des agents d'accueil et des agents de surveillance, en méconnaissance du principe d'exclusivité posé par l'article L. 612-2 du code de la sécurité intérieure, et que 13 des 69 agents de sécurité qu'elle a employés au cours de cette année ne possédaient pas de carte professionnelle, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 612-20 du même code, ainsi que de l'article 15 du décret susvisé du 10 juillet 2012.

11. La société Omicron Protection fait valoir, sur le premier chef d'infraction, que la SARL AS Sécurité n'employait plus d'agents d'accueil à la date du contrôle, les agents concernés ayant été transférés à une société spécialement dédiée à cette activité, créée le 29 novembre 2012, et que ce contrôle a très vraisemblablement fait suite à une démarche de la SARL AS Sécurité auprès du CNAPS, au mois de novembre 2012, dans le cadre de laquelle cette société avait évoqué les difficultés soulevées par sa double activité. De telles circonstances ne sont toutefois pas de nature à remettre en cause la matérialité des faits retenus à l'encontre de cette société, consistant en une méconnaissance de l'obligation de respecter le principe d'exclusivité posé par l'article L. 612-2 du code de la sécurité intérieure au cours de l'année 2012.

12. Quant au deuxième chef d'infraction, la société Omicron Protection soutient que l'absence de détention d'une carte professionnelle par treize salariés était due à la longueur des délais d'instruction, par le CNAPS, des demandes de délivrance de cartes professionnelles, que la plupart d'entre eux détenaient alors une autorisation provisoire et que l'emploi d'agents non encore titulaires d'une carte professionnelle est la conséquence des difficultés de recrutement qu'elle rencontre, qui la conduisent à embaucher des salariés dont elle doit elle-même assurer la formation. De telles circonstances, à les supposer même établies, ne sont pas davantage de nature à justifier la méconnaissance, par la SARL AS Sécurité, des dispositions précitées du code de la sécurité intérieure et du décret du 10 juillet 2012 qui lui imposent de n'employer, pour la réalisation de missions de sécurité, que des personnes titulaires de cartes professionnelles délivrées à cette fin.

13. Eu égard aux faits reprochés à la SARL AS sécurité, la commission nationale d'agrément et de contrôle du CNAPS, en infligeant un avertissement, sanction la moins sévère, ainsi qu'une pénalité financière de 13 000 euros équivalant à 1,25 % du chiffre d'affaires de a société pour l'année 2012, n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

14. Il résulte de ce qui précède que la société Omicron Protection n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

15. Pour l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il convient de mettre à la charge de la société Omicron Protection la somme de 500 euros, demandée par le Conseil national des activités privées de sécurité au titre des frais engagés et non compris dans les dépens. En revanche, cet organisme n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions présentées au même titre par la société Omicron Protection ne peuvent être accueillies.

DECIDE

Article 1er : La requête de la société Omicron Protection est rejetée.

Article 2 : La société Omicron Protection versera au Conseil national des activités privées de sécurité la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Omicron Protection et au Conseil national des activités privées de sécurité.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2019 à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Sylvie Cherrier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 avril 2019.

Le rapporteur,

Sylvie CHERRIERLe président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 17BX01006


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01006
Date de la décision : 12/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05 Police. Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : CABINET CLAISSE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-04-12;17bx01006 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award