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18/03/2019 | FRANCE | N°17BX01520

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 18 mars 2019, 17BX01520


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...F...a demandé devant le tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de la décision du 4 juin 2015 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de Gironde a autorisé la société Technigaine à procéder à son licenciement pour inaptitude physique.

Par un jugement n° 1503365 du 23 mars 2017 le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de M. F...

Procédure devant la cour :

Par une requête du 15 mai 2017, M. E...F...représenté par Me C..., demand

e à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 mars 2017 du tribunal administratif de Bordeaux ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...F...a demandé devant le tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de la décision du 4 juin 2015 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de Gironde a autorisé la société Technigaine à procéder à son licenciement pour inaptitude physique.

Par un jugement n° 1503365 du 23 mars 2017 le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de M. F...

Procédure devant la cour :

Par une requête du 15 mai 2017, M. E...F...représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 mars 2017 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler la décision du 4 juin 2015 de l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de Gironde ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en ce qui concerne la légalité externe, l'inspecteur du travail doit prendre en compte, avant de prendre une décision, toutes les fonctions représentatives de salarié protégé, qu'il s'agisse de postes de suppléant ou de postes de titulaire, ce principe ayant été rappelé par le Conseil d'Etat, par un arrêt du 7 décembre 2009, M.A..., n° 315588 ; en l'espèce, l'inspectrice du travail ne fait pas mention de la qualité de délégué personnel titulaire ou suppléant de M. F..., ce qui entache d'illégalité la décision d'autorisation dès lors que l'inspectrice du travail n'a pas analysé de façon précise le mandat détenu par M. F..., sans que n'ait d'incidence à cet égard, la circonstance que la demande d'autorisation du 20 mai 2015, faisait bien état de la qualité de suppléant délégué du personnel de M. F...;

- la décision de l'inspectrice du travail, est insuffisamment motivée au regard des articles R. 2421-5 et R. 2421-12 du code du travail, dès lors que la décision n'est motivée que par des considérations d'ordre général sans aucune précision concernant la situation personnelle de M.F... ; par ailleurs, la motivation est erronée dès lors que l'inspectrice indique avoir tenu compte des indications fournies par le médecin du travail par mail du 2 mars 2015 à la suite d'une demande de précisions, alors que l'administration n'a pas tenu compte de ces préconisations du médecin du travail, qui indiquait que le salarié pouvait garder son poste à condition de travailler 2heures par jour ; la société n'a pas aménagé le poste malgré l'intervention de la CARSAT et du médecin du travail depuis l'étude de poste réalisée le 2 septembre 2014 ; l'administration n'a pas même envisagé la possibilité d'un aménagement de poste dans le cadre d'une baisse de la durée du travail sur la base de deux heures par jour, soit 10 heures par semaine ; par ailleurs, la décision de l'inspectrice du travail n'indique pas quels seraient les postes disponibles dans les entreprises du groupe, se bornant à mentionner les lettres adressées et reçues par l'employeur dans le cadre du reclassement, sans analyser sérieusement les potentialités de reclassement dans l'entreprise et dans les entreprises du groupe ;

- en ce qui concerne la consultation des délégués du personnel, elle doit s'effectuer avant le reclassement, comme l'a jugé la Cour de Cassation dans un arrêt du 25 mars 2015 ; or, en l'espèce, la société Technigaine a interrogé les deux sociétés du groupe le 10 avril 2015 alors que les délégués ont été consultés le 16 avril 2015, ce qui constitue une irrégularité ;

- une lettre circulaire adressée à des sociétés au titre de la recherche de reclassement, ne faisant pas état de la qualité de salarié protégé, ne permet pas d'estimer que le reclassement présente un caractère sérieux ;

- pour ce qui est de la légalité interne, la Cour de Cassation et le Conseil d'Etat exigent une recherche sérieuse et individualisée de reclassement et sanctionne les lettres circulaires lorsqu'elles sont non personnalisées et qu'elles ne font pas état de la qualité de salarié protégé ; en l'espèce, la société Technigaine n'a pas respecté les préconisations faites par le médecin du travail dans son mail du 2 mars 2015, dès lors que ce dernier n'a jamais estimé que M. F...était incapable d'occuper un poste au sein de l'entreprise ; par ailleurs, le médecin du travail a estimé que le salarié pouvait continuer à occuper son poste manuel mais uniquement deux heures d'affilée par jour ; par ailleurs, dans sa première fiche médicale d'aptitude du 13 février 2015, le médecin du travail préconisait un reclassement professionnel à un poste sans contraintes physiques des membres supérieurs ; il appartenait dès lors à la société Technigaine de proposer à M. F...un poste à temps partiel au minimum sur la base de 2 heures par jour, soit 10 heures par semaine, soit 43 heures par mois, conformément aux préconisations du médecin du travail ; le tribunal administratif a reconnu cette préconisation médicale d'un temps partiel mais n'en a pas tiré les conséquences sur un reclassement dans le cadre d'un temps partiel ; lors de la consultation des délégués du personnel, il n'a pas été fait état du mail du 2 mars 2015 du médecin du travail ; M. F... pouvait effectuer un autre travail dans l'entreprise à condition de ne pas avoir de travail manuel l'obligeant à manipuler des pièces lourdes, et il ne pouvait plus souder ; tout autre poste pouvait lui être proposé au sein de la société Technigaine ; le contrôleur de sécurité et l'ingénieur conseil de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM), ont demandé le 16 juillet 2014 à l'employeur, d'aménager les postes de travail et de procéder à l'étude ergonomique en se faisant accompagner d'un ergonome ; le poste de M. F... n'a jamais été aménagé et l'ergonome n'a jamais établi de rapport ; lors d'un deuxième contrôle du 18 février 2015, le contrôleur du travail a constaté l'importance des troubles musculo-squelettiques dans l'entreprise et l'absence d'aménagement des postes de travail ; si un poste de travail avait été aménagé avec une étude sérieuse et rapide par un ergonome, M. F...aurait pu conserver son poste de travail ; la société n'a donc pas respecté son devoir d'adaptation et son obligation de sécurité de résultat et son obligation légale de prévention des risques ; c'est à tort que la décision de l'inspectrice du travail indique que le salarié serait dans l'impossibilité d'occuper " son poste ou un autre poste dans l'atelier " ; les fiches d'aptitude médicales des 13 et 27 février 2015 précisent que le salarié est inapte au poste à l'atelier, mais en aucun cas une inaptitude générale à tous les postes au sein de l'entreprise ; en tout état de cause, même si le médecin du travail déclare le salarié inapte à tout poste, l'employeur doit satisfaire à son obligation de reclassement ; en l'espèce, l'obligation de reclassement n'a pas été respectée, dès lors qu'en amont l'employeur n'a pas satisfait à son obligation d'adaptation au poste de travail ; par ailleurs, l'inspectrice du travail n'a pas analysé sérieusement la possibilité de reclasser le salarié à un autre poste aménagé et de le former à un autre poste, et le médecin du travail n'a jamais été consulté à cet égard ; M. F..., ainsi que deux autres salariés qui ont contracté la même maladie professionnelle que lui, a été exclu de la formation organisée le 27 mars 2015 par l'entreprise pour obtenir le CACES pour le chariot élévateur et le CACES pour le pont roulant ; M. F..., aurait pu occuper même à mi-temps un poste de cariste et de conducteur du pont roulant ; en ce qui concerne la question de l'existence d'une recherche loyale et sérieuse de reclassement, les deux lettres remises le 10 avril 2015 aux représentants de la société M2A et de la société GP Développement sont constituées par une lettre circulaire ; cette lettre ne mentionne à aucun moment la qualité de salarié protégé de M. F..., ni sa qualification, ni un curriculum vitae, ni ses diplômes, et les fiches médicales ne sont pas jointes ; par ailleurs, l'envoi des deux lettres le 10 avril 2015 est intervenu un vendredi et les réponses sont intervenues dès le lundi 13 avril 2015, ce qui démontre que les recherches de reclassement ne sont pas sérieuses ; il appartenait par ailleurs à l'inspectrice du travail d'appliquer les dispositions de l'article 31 de la convention collective qui prévoit des dispositions pour faciliter l'emploi et l'insertion des personnes handicapées ; par ailleurs, un accord du 12 décembre 2013 étendu la 6 octobre 2014 prévoit des dispositions relatives à l'emploi de personnes en situation de handicap ; en vertu de l'article L. 5213-3 du code du travail " tout travailleur handicapé peut bénéficier d'une réadaptation, d'une rééducation, ou d'une formation professionnelle " ; cet accord collectif indique dans son préambule qu'il est destiné à " accompagner les entreprises et les salariés de la métallurgie dans l'insertion professionnelle et le maintien dans l'emploi des personnes en situation de handicap " ; à aucun moment, la société Technigaine n'a fait appel à la commission paritaire et aux représentants de la branche de la métallurgie.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 août 2017, et un mémoire complémentaire du 7 décembre 2018, la société Technigaine et la SELARL Laurent Mayon, son mandataire liquidateur, représentées par Me D..., concluent au rejet de la requête de M. F...et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- la demande devant le tribunal administratif ne comportait aucun moyen de légalité externe ;

- en ce qui concerne la légalité interne, il appartenait à l'inspectrice du travail d'apprécier si les faits justifiaient l'octroi de l'autorisation de licenciement pour inaptitude physique ; l'inspectrice du travail s'est fondée sur les deux examens pratiqués par le médecin du travail, lors des deux visites médicales de reprise ; si le requérant soutient que dans un courriel du 2 mars 2015, le médecin du travail aurait indiqué que M. F...pouvait conserver son poste à condition de travailler 2 heures par jour, le requérant dénature le contenu de ce mail dès lors que le médecin du travail n'a jamais préconisé un reclassement de M. F...à raison de 2 heures par jour, les premiers juges ayant à juste titre écarté le moyen invoqué à cet égard par M.F... ; le médecin du travail n'a jamais préconisé une telle réduction du temps de travail, s'étant contenté d'indiquer que M. F...ne pourrait plus effectuer de travail manuel plus de 2 heures d'affilée ; en ce qui concerne la consultation des délégués du personnel, ce moyen doit être écarté dès lors que l'inspection du travail a bien vérifié que les délégués du personnel avaient été consultés ; en ce qui concerne la question du reclassement, dans sa décision du 4 juin 2015 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement pour inaptitude physique, elle a vérifié que l'employeur s'était attaché à rechercher des postes de reclassement dans l'entreprise et auprès des autres entreprises du groupe auquel appartient la société Technigaine ; l'inspectrice du travail sur la base des restrictions figurant dans la fiche médicale d'aptitude du médecin du travail et dans les indications complémentaires du 2 mars 2015, a vérifié l'existence de recherches de reclassement par la société Technigaine ; la société a de façon loyale et de bonne foi, adressé des courriers aux sociétés GP Développement et M2, ces courriers ayant été parfaitement complets, le fait que l'état de salarié protégé de M. F...n'ait pas été mentionné dans ces courriers, se trouve sans incidence compte tenu de la structure familiale du groupe auquel appartient la société Technigaine dont les dirigeants sont identiques et qui connaissent la situation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Bentolila,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant M.F..., et de Me D..., représentant la SAS Technigaine.

Considérant ce qui suit :

1 M. F...a été recruté le 12 novembre 2008 en qualité de tôlier-chaudronnier par la société Technigaine par contrat à durée indéterminée en tant que " Responsable qualité " et détenait un mandat de délégué du personnel. M. F...relève appel du jugement du 23 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en annulation de la décision de l'inspectrice du travail de la Gironde du 4 juin 2015 autorisant son licenciement pour inaptitude physique.

Sur le bien-fondé du jugement et de la décision de l'inspectrice du travail de la Gironde du 4 juin 2015 autorisant le licenciement pour inaptitude physique de M. F... :

S'agissant de la légalité externe :

2. En premier lieu, pour opérer les contrôles auxquels elle est tenue de procéder lorsqu'elle statue sur une demande d'autorisation de licenciement, l'autorité administrative doit prendre en compte chacune des fonctions représentatives du salarié et par suite, il appartient à l'employeur de porter à sa connaissance l'ensemble des mandats détenus par l'intéressé. Toutefois, lorsque l'administration a eu connaissance de chacun des mandats détenus par l'intéressé, la circonstance que la décision autorisant le licenciement ne fasse pas mention avec exactitude du ou des mandats détenus ne suffit pas, à elle seule, à établir que l'administration n'a pas, comme elle le doit, exercé son contrôle en tenant compte des mandats détenus par le salarié protégé.

3. Il est en l'espèce constant que la demande d'autorisation de licenciement, adressée à l'inspectrice du travail le 20 mai 2015 indiquait la qualité de délégué du personnel suppléant de M.F.... La circonstance que la décision du 4 juin 2015 de l'inspectrice du travail de la Gironde autorisant le licenciement pour inaptitude physique de M. F...relève qu'il dispose " du mandat de délégué du personnel ", sans précision quant au fait que le mandat était détenu en qualité de suppléant ne permet pas d'établir que l'administration n'a pas exercé son contrôle en tenant compte des mandats détenus par le salarié protégé.

4. En second lieu, en vertu des articles R. 2421-5 et R. 2421-12 du code du travail, les décisions prises par l'inspecteur du travail relatives aux autorisations de licenciement des salariés protégés doivent être motivées.

5. En l'espèce, la décision d'autorisation de licenciement du 4 juin 2015, vise les textes applicables, et cite notamment les conclusions du médecin du travail lors des deux visites médicales de reprises des 13 et 27 février 2015, selon lesquelles M. F...était médicalement inapte, que " l'avis d'inaptitude vise tous les postes de l'atelier de l'entreprise ", que les " mouvements répétitifs des membres supérieurs (sont) interdits et (les) manutention lourdes et répétées interdites ", et que " l'employeur avait recherché des postes de reclassement au sein de la société Technigaine en tenant compte des capacités restrictives formulées par le médecin du travail dans la fiche médicale d'aptitude et dans les indications complémentaires fournies le 2 mars 2015 suite à une demande de précisions ".

6. Dans ces conditions, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, la décision d'autorisation de licenciement du 4 juin 2015 est suffisamment motivée sans que n'ait d'incidence à cet égard le fait que cette décision ne fasse pas référence au mail adressé le 2 mars 2015 par le médecin du travail à la société Technigaine, indiquant que M. F... ne pourra plus faire de travail " manuel " plus de 2 heures d'affilée dès lors que comme il est indiqué au point 5, une telle observation du médecin du travail ne peut valoir préconisation d'aménagement du poste.

7. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de l'inspecteur du travail, doit être écarté.

S'agissant de la légalité interne :

8. En premier lieu, en vertu de l'article L. 1226-10 du code du travail : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. (...) ".

9. L'avis des délégués du personnel doit, en application des dispositions précitées de l'article L. 1226-10 du code du travail, être expressément recueilli après les deux examens médicaux du médecin du travail et avant la proposition de reclassement ou l'information donnée par l'employeur quant à l'impossibilité de bénéficier d'un tel reclassement.

10. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, que par courriers du 10 avril 2015, la société Technigaine a consulté les différentes sociétés du groupe auquel appartient la société Technigaine en vue de rechercher un éventuel reclassement de M.F.... M. F... a été informé de l'impossibilité de bénéficier d'un reclassement par une lettre du 17 avril 2015, soit postérieurement à la réunion des délégués du personnel du 16 avril 2015. Il n'est donc pas fondé à soutenir que la réunion des délégués du personnel le 16 avril 2015 serait intervenue après que l'employeur lui ait indiqué s'il pouvait bénéficier d'un reclassement, la circonstance par ailleurs que les recherches de reclassement aient été entreprises avant la réunion des délégués du personnel du 16 avril 2015 se trouvant sans incidence sur la régularité de cette procédure de consultation.

11. En deuxième lieu, si le requérant fait valoir que les courriers adressés le 10 avril 2015 par la société Technigaine à différentes sociétés en vue de la recherche de reclassement, n'ont pas fait état de sa qualité de salarié protégé, il n'invoque à cet égard la méconnaissance d'aucun texte législatif ou réglementaire.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. ".

13. En vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'employeur a cherché à reclasser le salarié sur d'autres postes appropriés à ses capacités, le cas échéant par la mise en oeuvre, dans l'entreprise, de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. Le licenciement ne peut être autorisé que dans le cas où l'employeur n'a pu reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, menée tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.

14. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, que par courriers du 10 avril 2015, la société Technigaine a consulté les différentes sociétés du groupe auquel appartient la société Technigaine en vue de rechercher un éventuel reclassement de M.F..., ces recherches se sont révélées infructueuses, dès lors que ces sociétés ne disposaient, ce qui n'est pas contesté par M.F..., que des postes d'ouvrier.

15. Si le requérant fait valoir qu'un reclassement à temps partiel était possible, et aurait été préconisé par le médecin du travail dès lors qu'il a dans un mail du 2 mars 2015 adressé à l'employeur indiqué que M. F...pouvait travailler sur un poste manuel pendant une durée de deux heures, il ne ressort pas de ce mail par lequel le médecin du travail confirmait l'inaptitude physique de l'intéressé aux poste de l'atelier, ni des autres pièces du dossier, que le médecin du travail aurait préconisé un reclassement dans l'atelier sur un poste de deux heures par jour. En tout état de cause, même s'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 1226-10 du code du travail, que l'employeur doit avoir étudié la mise en oeuvre de mesures tendant à proposer au salarié un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à son emploi précédent, au besoin par la mise en oeuvre de mesures de mutation, de transformation de postes ou d'aménagement du temps de travail, cette obligation ne saurait aller jusqu'à obliger l'employeur à recourir à un temps partiel à raison de deux heures par jour.

16. En quatrième et dernier lieu, si le requérant invoque la méconnaissance de l'article 31 de la convention collective nationale de la métallurgie de la Gironde qui prévoit des dispositions pour faciliter l'emploi et l'insertion de personnes handicapées, et de l'accord du 12 décembre 2013 étendu le 6 octobre 2014 qui prévoit des dispositions sur l'emploi des personnes en situation de handicap, ce moyen ne pourra qu'être écarté dès lors, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, ces dispositions ne confèrent pas plus de droits au salarié que les dispositions du code du travail dont il est fait application dans le présent arrêt.

17. Il résulte de ce qui précède que M. F...n' est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 23 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande en annulation de la décision du 4 juin 2015 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de Gironde a autorisé la société Technigaine à procéder à son licenciement pour inaptitude physique et à demander l'annulation de cette décision du 4 juin 2015.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. L'Etat n'étant pas dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions présentées par M. F...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M.F..., au profit de la société Technigaine, une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Technigaine sur le fondement de l'article L761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...F..., à la société Technigaine, à la SELARL Mayon, mandataire judiciaire de la société Technigaine, et à la ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 13 février 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, président-assesseur,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 mars 2019.

Le rapporteur,

Pierre BentolilaLe président,

Pierre Larroumec

Le greffier,

Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre du travail, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

8

N° 17BX01520


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01520
Date de la décision : 18/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP GUEDON et MEYER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-03-18;17bx01520 ?
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