Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011.
Par un jugement n° 1502789 du 24 janvier 2017 le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 mars 2017, M.D..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 24 janvier 2017 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités susmentionnées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure est irrégulière à défaut pour le service de lui avoir adressé un avis de vérification de comptabilité en vertu de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales ; la doctrine BOI-CF-IOR-60-10 n° 190 du 12 septembre 2012 confirme cette analyse ; les rectifications au titre des revenus d'origine indéterminée qui lui ont été notifiées sont en réalité des revenus distribués en provenance de la société Portes Fenêtres et Façades (PFF) dont il est le gérant ; ainsi le service disposait des éléments permettant d'établir l'activité occulte et fondant les rectifications bien avant l'engagement de l'ESFP ;
- le service persiste à ne pas prendre en compte les explications fournies pour certains crédits ; plusieurs sont en lien avec l'indemnisation, par la société Pacifica, d'un sinistre ayant frappé un appartement situé à Béziers ; le crédit de 467,18 euros enregistré le 23 juin 2011 sur le compte ouvert auprès de la même banque correspond à un virement de compte à compte ; ces sommes représentent un total de 1 794,94 euros de crédits figurant au crédit du compte ouvert dans les livres du Crédit Agricole au titre des années 2010 et 2011 ;
- le crédit de 22 227,44 euros, enregistré le 28 septembre 2011, sur son compte ouvert à la Banque Postale, correspond à l'annulation de l'opération enregistrée au débit d'un autre compte quelques jours auparavant ; disposant de l'ensemble des relevés bancaires, l'administration est en mesure de le vérifier ;
- la proposition de rectification après avoir repris en détail les crédits bancaires considérés comme des revenus d'origine indéterminée fait référence à la proposition de rectification de la société PFF à l'issue de laquelle le service a estimé que certaines sommes constituaient des revenus distribués ; la corrélation dont fait état l'administration conduit à analyser les revenus en litige comme émanant de la société PFF et donc comme des revenus distribués ;
- les sommes inscrites au crédit du compte ouvert à la Banque Postale et dont il est établi, par les débits enregistrés sur ce compte, qu'elles n'ont fait qu'y transiter, doivent être exclues des revenus d'origine indéterminée mis à sa charge ; en effet les sommes débitées ont été reversées à M. A..., cogérant de la SARL Portes Fenêtres et Façades, à concurrence de la somme de 189 912,43 euros, et n'ont dès lors pas été appréhendées par ses soins ; l'absence de prise en compte de ces débits reviendrait à imposer deux fois ces sommes en ce qu'elles ont été créditées sur le compte de M. A...et sur le sien, alors même qu'il n'en a pas eu la disposition effective, ainsi que le démontrent les crédits correspondants enregistrés sur les comptes de M. A... ; l'administration ne motive pas son refus de prendre en compte ses sommes ;
- le caractère prétendument indéterminé des crédits en litige ne peut servir de fondement à l'application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré ; l'importance des sommes éludées ne peut justifier l'application des pénalités de 40 %.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 août 2017 le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par une ordonnance du 20 juin 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 27 septembre 2018 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Caroline Gaillard,
- et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'une vérification de comptabilité de la SARL Portes Fenêtres et Façades (PFF) dont MM. D...et A...sont associés et cogérants, l'administration a diligenté une procédure d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle de chacun d'eux. Au cours de son contrôle, le service a constaté que le montant des sommes portées au crédit des comptes bancaires ouverts au nom de M. D...était supérieur au double des revenus qu'il avait déclarés au titre de chacune des années 2010 et 2011. Après avoir adressé à l'intéressé le 3 avril 2013, une demande de justifications en application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales dont la réponse a été considérée comme insuffisante, le service a procédé selon la procédure de taxation d'office, à des rehaussement en matière de cotisations à l'impôt sur le revenu à raison de ces sommes qu'elle a regardées comme des revenus d'origine indéterminée et en matière de contributions sociales, et a appliqué des pénalités pour manquement délibéré. M. D...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions et pénalités en litige.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) ".
3. Aux termes de l'article L. 47 du même livre : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. (...) ". Aux termes de l'article L. 47 B du même livre : " Au cours d'une procédure d'examen de situation fiscale personnelle, l'administration peut examiner les opérations figurant sur des comptes financiers utilisés à la fois à titre privé et professionnel et demander au contribuable tous éclaircissements ou justifications sur ces opérations sans que cet examen et ces demandes constituent le début d'une procédure de vérification de comptabilité. /(...). " Aux termes de l'article L. 47 C du même livre : " Lorsque, au cours d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, sont découvertes des activités occultes ou mises en évidence des conditions d'exercice non déclarées de l'activité d'un contribuable, l'administration n'est pas tenue d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser la situation fiscale du contribuable au regard de cette activité. ".
4. Il résulte de l'instruction qu'au cours de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M.D..., portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, qui a débuté par l'envoi d'un avis de vérification du 21 décembre 2012, M. D... a remis au vérificateur la copie d'une partie des relevés de ses comptes bancaires ouverts auprès du Crédit Agricole et de la Banque Postale. Conformément aux dispositions des articles L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales, l'administration a également exercé son droit de communication auprès des banques concernées afin d'obtenir les relevés manquants sur la période vérifiée. La consultation des documents bancaires a permis de constater une discordance entre les crédits mentionnés sur ces comptes et les revenus déclarés. En l'absence de justifications apportées par le contribuable, le service a imposé ces sommes en tant que revenus d'origine indéterminée. Si le requérant fait valoir que les revenus d'origine indéterminée auxquels il a été assujetti résulteraient de la procédure de vérification de comptabilité de la société PFF dont il est le gérant, la seule circonstance que le service a fait mention dans la proposition de rectification du 2 août 2013 de cette vérification de comptabilité et des sommes présumées distribuées par la société PFF ne traduit pas le lien invoqué entre les sommes taxées comme revenus d'origine indéterminée et la vérification de comptabilité de la société PFF. Il ne ressort pas davantage de cette proposition de rectification que le service disposait d'informations permettant d'établir que les crédits taxés en tant que revenus d'origine indéterminée proviendraient de la société PFF et devraient être qualifiés de revenus distribués. Par suite, les dispositions précitées de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales font obstacle à ce que M. D...fasse utilement valoir que la procédure aurait dû comporter l'engagement régulier d'une vérification de comptabilité en vue de l'imposition des revenus des années 2010 et 2011 tirés de son activité occulte, mise en évidence au cours de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle.
5. Par ailleurs, M. D...ne peut utilement invoquer la doctrine référencée BOI-CF-IOR-60-10 n° 190 du 12 septembre 2012, qui concerne la procédure d'imposition.
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
6. Aux termes de l'article 69 du livre des procédures fiscales : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ". Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". Aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ".
7. M. D...n'ayant pas répondu à la demande d'éclaircissements adressée par l'administration sur l'origine de certains de ses crédits bancaires des années 2010 et 2011, l'administration a taxé d'office les crédits demeurés inexpliqués sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée. Par suite, il appartient à l'intéressé, en application de l'article L. 193 du même livre, de démontrer le caractère exagéré des impositions supplémentaires résultant de ce rehaussement.
8. M D...soutient que les crédits de 400 euros, 477,76 euros et 450 euros enregistrés respectivement le 6 janvier, le 20 janvier et le 25 juin 2010 sur le compte ouvert auprès de la banque Crédit Agricole, correspondent à une indemnisation perçue de l'assurance Pacifica pour un sinistre survenu dans le logement dont il est propriétaire. Toutefois, en se bornant à faire état des revenus fonciers qu'il retire de ce bien, il n'établit nullement la réalité de l'origine de ces sommes à savoir une indemnisation d'assurance consécutive à un sinistre. En outre, l'administration indique sans être contredite qu'elle a extourné des revenus d'origine indéterminée le crédit de 467,18 euros enregistré le 23 juin 2011 sur le compte ouvert auprès de la banque Crédit Agricole et en a informé le contribuable dans sa réponse aux observations du contribuable du 21 octobre 2013. Par suite, le requérant n'est pas fondé à demandé la décharge de l'imposition correspondant à ce crédit.
9. Par ailleurs, si le requérant allègue que le crédit d'un montant de 22 227,44 euros, enregistré le 28 septembre 2011, sur son compte ouvert à la Banque Postale, correspondrait à l'annulation de l'opération enregistrée au débit d'un autre compte quelques jours auparavant, il indique lui-même ne pas disposer du double des relevés permettant de l'établir.
10. En outre, M. D...soutient qu'il n'a pas disposé des crédits portés sur son compte à la Banque Postale correspondant à la somme de 189 912,43 euros, dès lors qu'il aurait reversé cette somme à son associé, M. A.... Toutefois, à supposer même que les sommes en litige, de 175 593,43 euros au titre de l'année 2010 et de 14 319 euros au titre de 2011, ont donné lieu à des débits au profit du compte ouvert à la Caisse d'Epargne au nom de son associé, cette circonstance ne permet pas d'établir l'origine de ces sommes mais seulement leur destination et cette circonstance ne remet ainsi pas en cause le fait que ces sommes ont été créditées sur le compte de M. D...et qu'il a ainsi pu en disposer quand bien même pour une durée limitée. Au surplus, la circonstance que M. A...aurait été imposé à raison du versement de ces sommes ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que les sommes perçues par M. D...soient imposées entre ses mains. Par suite, ce dernier ne peut utilement se prévaloir d'une quelconque double imposition.
11. Enfin si M. D...soutient que les impositions mises à sa charge constituent des revenus distribués par la société FFP, il ne résulte pas des mentions de la proposition de rectification du 2 août 2013, laquelle se borne à rappeler la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la société FFP sans en tirer de conséquence sur les impositions en litige, qu'existe un quelconque lien entre les revenus présumés distribués par la société PFF et les crédits apparaissant sur les comptes bancaires de M.D....
Sur les pénalités pour manquement délibéré :
12. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
13. Pour justifier de la pénalité en litige l'administration rappelle que M. D...a déclaré un revenu brut de 36 070 euros au titre de l'année 2010 et de 48 243 euros au titre de l'année 2011 alors que les crédits d'origine indéterminée, à l'issue de la procédure d'imposition, s'élevaient respectivement à 404 744 euros et 264 124 euros et qu'ainsi, eu égard aux montants déclarés, l'intéressé ne pouvait ignorer l'existence de ces revenus sur l'origine desquels il n'a apporté aucune explication. Ainsi, en constatant l'importance des sommes en litige qui constituaient l'essentiel de son train de vie, le caractère répété des manquements et l'absence d'explication sur l'origine des sommes imposées, l'administration fiscale doit être regardée comme démontrant l'intention délibérée de M. D...d'éluder l'impôt et partant, son absence de bonne foi.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme dont le requérant demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 5 février 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Mme Caroline Gaillard, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 5 mars 2019.
Le rapporteur,
Caroline Gaillard
Le président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Florence Deligey
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 17BX00952