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15/02/2019 | FRANCE | N°17BX03573

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre - formation à 3, 15 février 2019, 17BX03573


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) du circuit de Gasques a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, de condamner la commune de Gasques à lui verser la somme de 600 000 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice causé par l'illégalité de l'arrêté du 6 avril 2012 par lequel le maire de la commune de Gasques a refusé de lui délivrer un permis d'aménager pour la réalisation d'un circuit automobile et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 4 août 2015 pa

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) du circuit de Gasques a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, de condamner la commune de Gasques à lui verser la somme de 600 000 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice causé par l'illégalité de l'arrêté du 6 avril 2012 par lequel le maire de la commune de Gasques a refusé de lui délivrer un permis d'aménager pour la réalisation d'un circuit automobile et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 4 août 2015 par lequel le maire de la commune de Gasques a de nouveau refusé de lui délivrer un permis d'aménager pour la réalisation de ce projet.

Par un jugement n° 1403744, 1504320 du 19 septembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête des mémoires, enregistrés le 17 novembre 2017, le 28 septembre 2018 et le 22 octobre 2018, la société civile immobilière du circuit de Gasques, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 19 septembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 août 2015 par lequel le maire de la commune de Gasques a refusé de lui délivrer un permis d'aménager pour la réalisation d'un circuit automobile ;

3°) de condamner la commune de Gasques à lui verser la somme de 6 938 920, 80 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa demande préalable indemnitaire, ainsi que la capitalisation des intérêts, en réparation du préjudice causé par les fautes commises par la commune ;

4°) d'enjoindre au maire de la commune de Gasques, à titre principal, de lui délivrer un permis d'aménager ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Gasques la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure à l'issue de laquelle l'arrêté du 4 août 2015 a été pris est entachée d'irrégularité dès lors qu'en méconnaissance de l'article 24 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000, la société n'a pas été mise à même de présenter des observations ;

- le permis d'aménager doit lui être délivré de plein droit en raison du certificat d'urbanisme opérationnel qui lui avait été délivré le 21 juillet 2008 et qui a été prorogé le 18 décembre 2009 pour la réalisation d'un aménagement identique ;

- en outre, le projet de circuit automobile est compatible avec le règlement de la zone ZN de la carte communale de la commune de Gasques en vigueur à la date de la délivrance du certificat d'urbanisme : ces dispositions autorisent tant les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs que les annexes des constructions à usage d'habitation existantes, constructions auxquelles un circuit automobile peut être assimilé ;

- aucun des motifs de l'arrêté de 2015 n'est fondé : le projet n'est pas différent de celui déposé à l'origine ;

- par ailleurs, le refus opposé en 2015 est entaché d'un détournement de pouvoir : un certificat d'urbanisme positif lui avait été initialement délivré et le refus contesté ne s'explique que par l'influence exercée par une association hostile à la réalisation du projet de circuit automobile ;

- enfin, l'illégalité du refus de délivrance de permis d'aménager du 6 avril 2012 a provoqué un retard dans la réalisation de son projet, ce qui lui a causé un préjudice constitué par le manque à gagner résultant de l'impossibilité d'exploiter ledit circuit automobile.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 6 février 2018, le 17 octobre 2018 et le 7 novembre 2018, la commune de Gasques, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la SCI du circuit de Gasques sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Par ordonnance du 23 octobre 2018, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 12 novembre 2018 à 12h00.

Des pièces ont été produites pour la commune de Gasques les 3 et 5 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sylvande Perdu,

- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la SCI du Circuit de Gasques, et de Me B..., représentant la commune de Gasques.

Une note en délibéré présentée par la SCI du circuit de Gasques a été enregistrée le 28 janvier 2019.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI du circuit de Gasques a déposé le 16 décembre 2010 une demande de permis d'aménager en vue de la réalisation d'un anneau routier de loisir (circuit automobile) d'une longueur de 2 kilomètres sur des parcelles cadastrées C1, C2, C3, C4, C5, C6, C7 et C788, situées au lieu-dit le Carme, sur le territoire de la commune de Gasques. Par un arrêté du 6 avril 2012, le maire de Gasques a rejeté cette demande. Le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette décision par un jugement n° 1204198 du 11 juin 2015 et enjoint au maire de procéder à une nouvelle instruction de cette demande. Le maire de Gasques, par un arrêté du 4 août 2015, a opposé un nouveau refus à la demande de permis d'aménager. Par deux requêtes distinctes, la SCI du circuit du Gasques a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, de condamner la commune de Gasques à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'illégalité de l'arrêté du 6 avril 2012 et, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 4 août 2015. La SCI du circuit de Gasques fait appel du jugement du 19 septembre 2017 par lequel le tribunal a rejeté l'ensemble de ces demandes.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté du 4 août 2015 :

2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, désormais codifié à l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté portant refus de permis d'aménager du 4 août 2015, pris en exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse annulant le précédent arrêté du maire du 6 avril 2012, statue de nouveau sur la demande déposée par la SCI du circuit de Gasques le 16 décembre 2010. Par suite, la société requérante ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : (...) b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. (...) ". Si la règle fixée par cet article confère au titulaire d'un certificat d'urbanisme positif un droit à voir sa demande de permis de construire, déposée dans le délai mentionné qui suit, examinée au regard des dispositions d'urbanisme mentionnées dans ledit certificat, elle ne saurait avoir pour effet de justifier la délivrance d'un permis de construire fondée sur une appréciation erronée de l'application de ces dispositions.

5. Aux termes, par ailleurs, des dispositions du règlement de la carte communale de la commune de Gasques, en vigueur à la date de la délivrance du certificat d'urbanisme, le 21 juillet 2008, applicable à la zone ZN dans laquelle était situé le terrain d'assiette du projet : " Dans cette zone, sous réserve des articles R. 111-2, R. 111-3-1, R. 111-3-2, R. 111-13, R. 111-14-1, R. 111-21 du code de l'urbanisme, ne sont admises que : - l'adaptation, la réfection ou l'extension des constructions existantes - les constructions nécessaires à l'extension des activités existantes - le changement de destination pour la réhabilitation des constructions existantes (...) - les annexes des constructions à usage d'habitation - les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs - les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou forestière et notamment : les gîtes ruraux, les campings à la ferme, les habitations constituant des sièges d'exploitation agricole, les serres - les constructions et installations nécessaires à la mise en valeur des ressources naturelles - les constructions à usage d'habitation principale, pour l'exploitant (...) ".

6. Le projet d'aménagement d'un anneau routier porté par la SCI du circuit de Gasques ne constitue ni la réalisation d'une annexe à des constructions à usage d'habitation, ni une construction ou installation nécessaire à des équipements collectifs au sens des dispositions précitées du règlement de la zone ZN. Cet aménagement ne fait donc pas partie des réalisations limitativement autorisées par les dispositions applicables à cette zone. Ainsi, pour ce seul motif, le projet de la SCI du circuit de Gasques ne pouvait pas être réalisé sur les parcelles classées en zone ZN dans la carte communale alors en vigueur et, par suite, la société appelante ne peut utilement se prévaloir du certificat d'urbanisme positif délivré le 21 juillet 2008 et prorogé le 18 décembre 2009.

7. En outre, la société ne conteste pas que ce projet ne peut davantage être autorisé en application des dispositions du plan local d'urbanisme de la commune de Gasques, approuvé le 8 décembre 2009, désormais en vigueur, qui classent régulièrement les parcelles terrain d'assiette de ce projet en zone A ainsi que la cour le juge dans un arrêt 17BX03604 du même jour.

8. En troisième et dernier lieu, la seule circonstance qu'une association a manifesté son hostilité au projet d'anneau routier ne permet pas d'établir l'existence d'un détournement de pouvoir.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI du circuit de Gasques n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions à fin d'annulation. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires fondées sur l'illégalité de l'arrêté du 6 avril 2012 :

10. Il résulte de ce qui a été exposé au point 6 du présent arrêt qu'un permis autorisant le projet de circuit automobile porté par la SCI du circuit de Gasques ne pouvait lui être accordé. Dans ces conditions, le préjudice allégué par la société requérante ne peut être regardé comme découlant de l'illégalité de l'arrêté du 6 avril 2012 portant refus de permis d'aménager. Par suite, la SCI du circuit du Gasques n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Gasques, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la SCI du circuit de Gasques et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la SCI du circuit de Gasques une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Gasques et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société civile immobilière du circuit de Gasques est rejetée.

Article 2 : La société civile immobilière du circuit de Gasques versera à la commune de Gasques une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière du circuit de Gasques et à la commune de Gasques.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2009 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

Mme Sylvande Perdu, premier conseiller ;

M. Romain Roussel, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 15 février 2019.

Le rapporteur,

Sylvande Perdu

Le président,

Philippe Pouzoulet

Le greffier,

Florence Deligey

La République mande et ordonne au préfet du Tarn-et-Garonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX03573


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX03573
Date de la décision : 15/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Contentieux de la responsabilité (voir : Responsabilité de la puissance publique).

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: Mme Sylvande PERDU
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : CABINET FERRANT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-02-15;17bx03573 ?
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