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13/02/2019 | FRANCE | N°17BX02972

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 13 février 2019, 17BX02972


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...M...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2015 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion a fixé la liste d'aptitude pour l'accès au cadre d'emplois des attachés territoriaux au titre de la promotion interne de l'année 2015 et d'enjoindre au président du centre de gestion de réexaminer sa situation et de l'inscrire sur la liste d'aptitude.

Par un jugement n° 1500890 du 26 juin 2017 le tribunal

administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...M...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2015 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion a fixé la liste d'aptitude pour l'accès au cadre d'emplois des attachés territoriaux au titre de la promotion interne de l'année 2015 et d'enjoindre au président du centre de gestion de réexaminer sa situation et de l'inscrire sur la liste d'aptitude.

Par un jugement n° 1500890 du 26 juin 2017 le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête du 30 août 2017 M. B...M..., représenté par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 juin 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2015 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion a fixé la liste d'aptitude pour l'accès au cadre d'emplois des attachés territoriaux au titre de la promotion interne de l'année 2015 ;

3°) de mettre à la charge du centre de gestion de la fonction publique territoriale la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure devant la commission administrative paritaire (CAP) est entachée d'un manquement au principe d'impartialité dès lors que le président du centre de gestion a soumis à la CAP une liste d'aptitude préétablie, ce qui a été qualifié par le président du centre de gestion lui-même de " geste politique " ; ce fait est attesté par un courrier de M.F..., membre de la CAP ; il y a eu une absence réelle de consultation de la CAP caractérisant une irrégularité de procédure ; en effet, quand les collectivités locales sont affiliées au centre de gestion, elles peuvent seulement faire des propositions de promotion, qui sont ensuite examinées par la CAP laquelle doit être saisie des dossiers de tous les fonctionnaires susceptibles d'être promus ; le président du centre de gestion a indiqué que les propositions de promotion avaient déjà été négociées avant la consultation de la CAP ; dans ces conditions, la consultation de la CAP ne peut être regardée comme ayant été régulière ; la valeur professionnelle de l'ensemble des candidats n'a pas été examinée devant la CAP contrairement à ce qu'impose la jurisprudence du Conseil d'Etat (Conseil d'Etat, 27 avril 2011, n° 304987) ; par ailleurs, les dossiers des candidats n'ont pas été transmis aux membres de la CAP ; l'arrêté du 2 juillet 2015 est donc intervenu au terme d'une procédure irrégulière ; cet arrêté et le jugement du tribunal administratif sont par ailleurs entachés d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984 et de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983, dès lors que la circonstance que l'article 39 ne prévoit pas de dispositif de promotion interne pour les agents se trouvant en position, comme le requérant, de décharge totale d'activité, ne saurait pour autant lui interdire la possibilité d'une telle promotion ; il appartient au contraire, dans le silence de la loi, au juge administratif de préciser les critères qui doivent fonder l'avancement au titre de la promotion interne, d'agents se trouvant en décharge totale d'activité du fait de l'exercice d'une activité syndicale ; l'arrêté du 2 juillet 2015 est donc entaché d'illégalité faute pour sa situation d'avoir fait l'objet d'un examen particulier ; si les premiers juges ont estimé que l'article 39 ne prévoit pas de dispositif de promotion interne pour les agents se trouvant en position de décharge totale d'activité, ils auraient du s'inspirer des dispositions de l'article 77 de la loi du 26 janvier 1984, relatives à l'avancement de grade ; l'arrêté du 2 juillet 2015 est entaché d'une erreur de droit et d'appréciation au regard de l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984, faute d'appréciation des mérites et de l'ancienneté des agents proposés à la promotion ; par ailleurs, le président du centre de gestion, n'a pas examiné sa situation particulière dès lors que si tel avait été le cas, il aurait constaté que sa promotion ne pouvait être évaluée qu'au regard de son ancienneté en la comparant à l'ancienneté des autres candidats ; en omettant d'examiner en vue de la fixation de la liste d'aptitude établie dans le cadre de la promotion interne au grade d'attaché territorial, tant la situation de décharge totale de service que son ancienneté, le président du centre de gestion a commis une erreur de droit et d'appréciation au regard des dispositions de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2018, le centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion, représenté par MeH..., conclut au rejet de la requête de M. M...et à ce que soit mise à sa charge la somme de 3 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la requête d'appel de M. M...est irrecevable au regard de l'article R. 811-2 du code de justice administrative, dès lors que le jugement est du 26 juin 2017, alors que la requête d'appel est du 30 août 2017 ;

- les moyens de légalité externe présentés en appel sont irrecevables dès lors que la demande de première instance ne comportait que des moyens de légalité interne ;

- l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984 relatif à la promotion interne constitue un dispositif distinct de celui de l'avancement de grade, la promotion interne reposant sur l'appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle de l'agent ; les agents bénéficiant d'une décharge syndicale peuvent être évalués de la même façon que les autres agents, l'autorité territoriale pouvant notamment apprécier l'activité exercée par l'agent dans le cadre de ses activités syndicales ; toutefois aucune disposition n'attribue au fonctionnaire territorial se trouvant en décharge d'activité, de droit à bénéficier d'un avancement automatique au titre de la promotion interne ; aucune disposition ne permet comme le soutient le requérant d'opérer une analogie entre l'avancement au titre de la promotion interne et l'avancement de grade ; le centre de gestion n'est pas tenu de faire figurer l'ensemble des candidats susceptibles d'être promus, sur le projet de liste soumis à la CAP ; pour l'année 2015, seulement cinq recrutements dans le cadre d'emplois des attachés territoriaux étaient ouverts par la voie de la promotion interne, et il convenait de sélectionner cinq candidats ; 452 agents étaient promouvables, et 135 agents ont fait l'objet d'une proposition de promotion interne ; le centre de gestion a préétabli une liste de cinq noms ; les membres de la CAP ont privilégié les compétences et les valeurs des agents indépendamment de toute appartenance politique ou syndicale.

Par un mémoire distinct enregistré le 9 novembre 2017, M. B...M..., demande au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la constitutionnalité de l'article 77 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

Par un mémoire enregistré le 16 novembre 2017, le centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion demande le rejet de la demande de M. M....

Par ordonnance du 29 janvier 2018, le président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux a jugé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question ainsi soulevée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Bentolila,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de MeH..., représentant le centre de gestion de la fonction publique territoriale de la Réunion.

Considérant ce qui suit :

1. M. M...est fonctionnaire territorial, appartenant au cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux, et titulaire du grade de rédacteur principal depuis 1er août 2012. Il bénéficie d'une décharge totale d'activité à titre syndical. M. M...a présenté une demande tendant à être placé sur la liste d'aptitude en vue d'accéder par la voie de la promotion interne au cadre d'emplois des attachés territoriaux et a fait l'objet d'une proposition d'avancement par la commune de Saint-Leu qui l'emploie. Par arrêté du 2 juillet 2015, le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion a fixé la liste d'aptitude pour l'accès au cadre d'emplois des attachés territoriaux au titre de la promotion interne de l'année 2015, cette liste comprenant les noms de cinq fonctionnaires au nombre desquels ne se trouve pas M.M.... M. M...a formé un recours gracieux contre l'arrêté du 2 juillet 2015 devant le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale, qui a été rejeté par un courrier du 28 juillet 2015. M. M...relève appel du jugement du 26 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2015

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :

Sur le bien-fondé du jugement et de l'arrêté du 2 juillet 2015 :

S'agissant de la recevabilité des moyens invoqués en appel au titre de la légalité externe :

2. Il ressort des pièces du dossier que la demande de M. M...devant le tribunal administratif ne comportait que des moyens de légalité interne. Dès lors les moyens de légalité externe invoqués par M. M...dans sa requête d'appel reposent sur une cause juridique distincte de celle invoquée en première instance, et sont donc irrecevables.

S'agissant de la légalité interne :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984 : " En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration (...) non seulement par voie de concours (...) mais aussi par la nomination de fonctionnaires (...) suivant l'une des modalités ci-après : / 1° Inscription sur une liste d'aptitude après examen professionnel ; / 2° Inscription sur une liste d'aptitude établie après avis de la commission administrative paritaire compétente, par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des agents. / (...) les listes d'aptitude sont établies par l'autorité territoriale pour les collectivités non affiliées à un centre de gestion et par le président du centre de gestion pour les fonctionnaires des cadres d'emplois, emplois ou corps relevant de sa compétence, sur proposition de l'autorité territoriale. (...). ". Aux termes de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Le grade est distinct de l'emploi. Le grade est le titre qui confère à son titulaire vocation à occuper l'un des emplois qui lui correspondent. Toute nomination ou toute promotion dans un grade qui n'intervient pas exclusivement en vue de pourvoir à un emploi vacant et de permettre à son bénéficiaire d'exercer les fonctions correspondantes est nulle. Toutefois, le présent alinéa ne fait pas obstacle à la promotion interne d'agents qui, placés dans la position statutaire prévue à cette fin, consacrent la totalité de leur service à l'exercice d'un mandat syndical. En cas de suppression d'emploi, le fonctionnaire est affecté dans un nouvel emploi dans les conditions prévues par les dispositions statutaires régissant la fonction publique à laquelle il appartient ".

4. Il résulte de ces dispositions combinées que la promotion interne organisée par les dispositions précitées de l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984 ne saurait être fermée aux fonctionnaires se trouvant comme M.M..., en position de décharge totale d'activité pour l'exercice d'un mandat syndical.

5. En deuxième lieu, ainsi que l'ont considéré à bon droit les premiers juges, M. M... ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 77 de la loi du 26 janvier 1984 instituant un droit, pour les fonctionnaires en position de décharge totale d'activité, à un avancement " sur la base de l'avancement moyen des fonctionnaires du cadre d'emplois, emploi ou corps auquel (ils) appartiennent " dès lors que ces dispositions se rapportent uniquement à l'avancement de grade et non à la promotion interne par changement de cadres d'emplois.

6. En troisième lieu, l'autorité administrative compétente n'est pas tenue, en vertu des dispositions précitées de l'article 39 de la loi du 26 janvier 1984, de faire figurer l'ensemble des agents remplissant les conditions pour être promus sur le projet de tableau d'avancement. Toutefois, elle doit procéder à un examen de la valeur professionnelle de chacun des agents remplissant les conditions pour être promus et comparer les mérites respectifs des agents.

7. En l'espèce, comme l'ont considéré à bon droit les premiers juges et contrairement à ce que le requérant soutient, il ne ressort des pièces du dossier, ni que la liste d'aptitude pour l'accès au cadre d'emplois des attachés territoriaux au titre de la promotion interne de l'année 2015, aurait été fixée sur la base de critères étrangers à la valeur professionnelle des agents, ni que la situation de l'ensemble des candidats proposés et notamment celle de M.M..., dont la situation a notamment été évoquée lors de la commission administrative paritaire du 29 juin 2015 n'aurait pas été examinée. L'arrêté du 2 juillet 2015 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion a fixé la liste d'aptitude pour l'accès au cadre d'emplois des attachés territoriaux au titre de la promotion interne de l'année 2015 n'est donc entaché ni d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de ce qui précède que M. M...n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 26 juin 2017 du tribunal administratif de La Réunion et de l'arrêté du 2 juillet 2015 par lequel le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion a fixé la liste d'aptitude pour l'accès au cadre d'emplois des attachés territoriaux au titre de la promotion interne de l'année 2015.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Le centre de gestion de la fonction publique territoriale n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'une somme soit mise à sa charge à ce titre. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu, de faire droit aux conclusions présentées par le centre de gestion de la fonction publique territoriale sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. M...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...M..., au centre de gestion de la fonction publique territoriale de La Réunion, à Mme K...C..., à M. E...D..., à Mme J...A..., à M. N...et à Mme L...I....

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, président-assesseur

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 février 2019.

Le rapporteur,

Pierre BentolilaLe président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

6

N° 17BX02972


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX02972
Date de la décision : 13/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-02-01 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement. Avancement. Avancement de grade.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CABINETS PLACIDI - DREVET-WOLFF

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-02-13;17bx02972 ?
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