Vu la procédure suivante :
Procédure antérieure :
M. H...et Mme K...B...G...ont demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, de constater que l'implantation d'une canalisation dans le sous-sol de leur propriété située sur la commune de Mauzé-sur-le-Mignon (Deux-Sèvres) assurant l'écoulement des eaux pluviales et usées de leur immeuble ainsi que de celles du lotissement voisin est irrégulière, à titre principal, d'annuler la décision du 25 février 2015 par laquelle la communauté d'agglomération du Niortais du 25 février 2015 a refusé de procéder à l'enlèvement de cette canalisation et de procéder au raccordement de leur immeuble au tout-à-l'égout et d'enjoindre à la collectivité précitée de procéder à ces travaux et à la remise en état de leur jardin, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de condamner la communauté d'agglomération à leur verser une somme de 20 000 euros en réparation des préjudices subis, à titre subsidiaire, d'annuler la même décision du 25 février 2015, en tant qu'elle refuse de procéder aux travaux de mise en conformité du réseau d'assainissement, d'enjoindre à la collectivité de procéder à la réalisation des travaux de mise en conformité suivant les préconisations de l'expert judiciaire et à la remise en état de leur jardin après ces travaux, dans le même délai et sous la même astreinte, et de condamner la communauté d'agglomération à leur verser une somme de 90 000 euros en réparation des préjudices subis, à titre infiniment subsidiaire de désigner un expert chargé de se prononcer sur les préjudices qu'ils ont subis du fait de cette emprise irrégulière et des inondations résultant de de la non-conformité du réseau d'assainissement et en tout état de cause de condamner la communauté d'agglomération du Niortais à leur verser la somme de 10 000 euros correspondant aux frais de l'expertise amiable et judiciaire qu'ils ont supportés.
Par un jugement no 1501059 en date du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Poitiers a déclaré l'emprise de la canalisation en litige irrégulière, et a rejeté le surplus de leurs conclusions.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 19 juillet 2016 et un mémoire enregistré le 31 janvier 2018, M. et Mme B...G..., représentés par MeI..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 19 mai 2016 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de la décision du 25 février 2015 par laquelle la communauté d'agglomération du Niortais a rejeté leur demande indemnitaire préalable ;
2°) d'enjoindre à la communauté d'agglomération de Niortais de réaliser les travaux préconisés par l'expert judiciaire, soit la suppression du regard n° 4 et la surélévation du regard n° 5 assorti d'un habillage, dans un délai maximum de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai ;
3°) à titre principal, de condamner cette collectivité, sur le fondement de la responsabilité sans faute à l'égard des tiers du fait d'un ouvrage public et pour dommages permanents de travaux publics, à leur verser la somme totale à parfaire de 82 350 euros en réparation de leurs entiers préjudices, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2011, date de la première réclamation, ou du 22 décembre 2014, date de la seconde réclamation, eux-mêmes capitalisés à la date du 25 mai 2012 ou à défaut à la date du 22 décembre 2015 ;
4°) à titre subsidiaire, de condamner la communauté d'agglomération, sur le fondement de la responsabilité pour faute en raison de l'établissement d'un ouvrage public sans droit ni titre sur une propriété privée, à leur verser la somme globale à parfaire de 58 450 euros en réparation de leurs préjudices, somme assortie des intérêts au taux légal, eux-mêmes capitalisés à la date du 25 mai 2012 ou à défaut à la date du 22 décembre 2015 ;
5°) à titre infiniment subsidiaire, de juger que l'enrichissement sans cause de la communauté d'agglomération est établi et de condamner la collectivité à réparer les préjudices subis à hauteur de la somme totale de 58 450 euros, somme à parfaire et assortie des intérêts au taux légal, eux-mêmes capitalisés à la date du 25 mai 2012 ou à défaut à la date du 22 décembre 2015 ;
6°) de condamner la communauté d'agglomération à leur verser une indemnité d'un montant de 200 euros par mois au titre de l'occupation sans droit ni titre de leur propriété privée, jusqu'à la disparition de l'emprise irrégulière ;
7°) en tout état de cause, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Niortais les sommes de 10 000 euros au titre notamment des frais d'expertise amiable et judiciaire et de 10 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, " outre les entiers dépens, comprenant notamment le droit de plaidoirie de 13 euros ".
Les époux B...G...soutiennent que :
- l'emprise irrégulière de la canalisation d'assainissement en cause déclarée par le tribunal a été découverte il y a plus de six ans, sans pour autant qu'ils aient été indemnisés de leurs préjudices. Or, la Cour de Cassation a récemment jugé que dès lors que l'existence d'une emprise irrégulière aboutissant à une extinction de propriété est constatée, l'indemnisation de la victime est automatique, sans que celle-ci n'ait à démontrer un quelconque préjudice. Le tribunal n'a manifestement pas tiré toutes les conséquences de ses constatations en rejetant leurs conclusions indemnitaires ;
- s'ils n'entendent pas contester le jugement en tant qu'il a refusé d'enjoindre à la collectivité de déplacer la canalisation litigieuse et ses annexes dès lors que ces travaux, aux dires de l'expert judiciaire, auraient des conséquences trop lourdes pour l'intérêt général, ils souhaitent toutefois maintenir une demande de démolition partielle de l'ouvrage public, conformément aux constatations du même expert, ce qui permettrait selon lui d'éviter les inondations de leur jardin. A cet égard, les premiers juges n'ont pu sans erreur estimer que l'implantation de la canalisation litigieuse presque en limite de propriété leur causait des " inconvénients limités ", alors que la parcelle concernée est désormais en quasi-totalité inconstructible, ce qui induit notamment une diminution importante de la valeur vénale du bien. Dans ces conditions, ils sont parfaitement fondés à demander qu'il soit enjoint à la communauté d'agglomération de réaliser les travaux préconisés par l'expert, soit la suppression du regard n° 4 et la surélévation du regard n° 5 assorti d'un habillage ;
- la juridiction administrative, au regard de la décision du Tribunal des Conflits du 9 décembre 2013, est désormais compétente, contrairement à ce que soutient la communauté d'agglomération, à la fois pour faire cesser l'emprise irrégulière mais également pour connaître de conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de cette emprise irrégulière, hormis les cas où celle-ci emporte extinction du droit de propriété. Le caractère attractif de la notion d'ouvrage public induit que le régime de responsabilité applicable en l'espèce est celui de la responsabilité sans faute de l'administration à l'égard des tiers aux ouvrages publics. Une jurisprudence constante considère qu'un réseau d'écoulement des eaux pluviales ou usées, y compris les canalisations reliant des fonds privés au réseau communal est un ouvrage public et qualifie de tiers à l'ouvrage public le propriétaire voisin du réseau d'évacuation des eaux. Les atteintes à l'intégrité d'un bien sont en principe toujours réputées anormales et spéciales. Or, ils subissent une emprise irrégulière, constatée à juste titre par le tribunal, les dépossédant pour partie de leur propriété immobilière. Leurs préjudices présentent bien ces caractères et la responsabilité de la communauté d'agglomération en charge de l'assainissement est nécessairement engagée ;
- l'atteinte à leur droit de propriété n'est pas contestable. Selon l'expert, ils ont perdu le droit de construire sur une surface de 420 mètres carrés pour la parcelle n° 227 qui est d'une surface de 458 mètres carrés. Ils ne peuvent dès lors plus construire d'extension, de garage ou de piscine sur la surface dont ils ont été irrégulièrement dépossédés, alors qu'ils en ont la possibilité au regard du document d'urbanisme. En outre, la présence de la canalisation litigieuse aura pour conséquence certaine d'une part de retarder voire empêcher toute éventuelle vente, et d'autre part, de les contraindre à baisser le prix de leur bien alors qu'il existe un risque que cette parcelle soit à nouveau inondée par des eaux usées et nauséabondes provenant de ladite canalisation. Selon les indications de l'expert et les estimations d'une agence immobilière, la perte de valeur vénale moyenne de leur terrain s'élève à 34 650 euros. Par ailleurs, l'inconstructibilité de cette parcelle entraîne nécessairement une baisse d'attractivité de leur bien sur le marché de l'immobilier et une perte de chances de le vendre à bon prix, lesquelles peuvent être évaluées à la somme de 10 000 euros. Contrairement à ce qu'a considéré le tribunal, ces préjudices sont directement causés par l'emprise irrégulière sur leur propriété, et non par la dissimulation de l'existence de la canalisation en litige lors de la vente. Cette réticence dolosive du vendeur apparaît sans lien avec le caractère irrégulier de l'emprise et les préjudices qu'elle cause, et rien ne permet de savoir si les vendeurs avaient eux-mêmes connaissance de cette irrégularité. Au demeurant, la collectivité ne pouvait ignorer que les servitudes pour l'établissement des canalisations d'assainissement relèvent du code rural et qu'en l'absence d'un arrêté préfectoral établissant une servitude, le maître d'ouvrage devait obtenir l'accord du propriétaire et conclure une convention annexée aux documents d'urbanisme. En outre, en matière de responsabilité sans faute du fait des ouvrages publics, le fait du tiers ne peut utilement être invoqué pour exonérer l'administration de sa responsabilité. Les préjudices subis en raison de l'implantation sans droit ni titre d'une canalisation d'assainissement sur leur propriété immobilière doivent être indemnisés pour une période s'étalant d'octobre 2010, date de la découverte de la canalisation à juillet 2016, soit une somme de 13 800 euros, à laquelle doit s'ajouter une somme de 200 euros par mois jusqu'à la disparition de l'emprise ;
- ils sont fondés, à titre subsidiaire, à invoquer l'illégalité fautive commise par la collectivité, laquelle s'est abstenue d'établir par écrit une servitude comme l'exigent pourtant les dispositions de la loi n° 62-904 du 4 août 1962 et du décret d'application n° 64-153 du 15 février 1964, désormais codifiés aux articles L. 152-1 et suivants et R. 152-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, et a dès lors implanté la canalisation litigieuse sans titre ; le procès-verbal, annexé à l'acte de vente, effectué par le service d'assainissement de la communauté d'agglomération estimant parfaitement conforme le raccordement de leur maison ne fait mention ni de la présence de la canalisation dans le tréfonds du jardin ni d'une quelconque servitude, ce qui constitue également une faute. De même, le certificat d'urbanisme annexé à l'acte de vente ne mentionne aucune servitude d'utilité publique, en méconnaissance de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme. La servitude n'est pas davantage annexée au plan local d'urbanisme en méconnaissance de l'article L. 151-42 et de l'ancien article R. 126-1 du code de l'urbanisme. Contrairement à ce que soutient la collectivité, cette cause juridique n'est pas soulevée nouvellement en appel, dès lors que la notion même d'emprise irrégulière suppose nécessairement la caractérisation d'une illégalité constitutive d'une faute. Ces moyens apparaissent par suite parfaitement recevables ;
- à titre infiniment subsidiaire, dès lors qu'ils sont dépossédés partiellement de leur propriété par une canalisation constituant emprise irrégulière entraînant une perte de valeur vénale de leur terrain, d'attractivité de leur bien et de chance de vendre leur bien à bon prix en raison de cette emprise irrégulière, ils se trouvent donc appauvris. L'enrichissement sans cause de la communauté d'agglomération de Niort se trouve donc établi et ils sont donc fondés à demander à ce titre des indemnités pour les montants précédemment exposés ;
- par ailleurs, les dommages causés par un dysfonctionnement ou des déficiences du réseau communal d'évacuation des eaux pluviales ont les caractères d'anormalité et de spécialité requis pour engager sans faute la responsabilité de l'administration. Les inondations répétées du sous-sol de leur maison et du jardin causées par la canalisation litigieuse présentent ces caractéristiques. Alors qu'ils ont vu plusieurs de leurs effets personnels dégradés, parfois même détruits, et qu'ils vivent dans l'angoisse permanente de voir chaque jour le sous-sol de leur maison d'habitation être inondé, ou à défaut leur jardin, ils subissent incontestablement un préjudice moral, qui peut être estimé à 10 000 euros. Le tribunal ne pouvait sans erreur estimer qu'en l'absence de lien de causalité direct entre les désordres subis et l'implantation irrégulière de la canalisation, le préjudice de jouissance et le préjudice matériel invoqués, dont la nature et l'ampleur ne sont au demeurant pas établies, ne peuvent être indemnisés, alors que le caractère irrégulier de l'implantation de la canalisation est sans incidence sur la responsabilité sans faute pour dommages permanents de travaux publics qu'ils invoquent ;
- après avoir souligné que les inondations de leur terrain trouvent leur cause dans l'inadéquation entre la capacité de la canalisation implantée et les débits qui doivent transiter dans le réseau par temps de pluie, l'expert préconise dans son rapport, pour éviter de nouvelles inondations,, qu'ils fassent réaliser un nouveau raccordement au réseau d'assainissement en un point plus bas et d'autre part, que des travaux soient entrepris sur les regards n° 4 (suppression) et n° 5 (surélévation) du collecteur. Le tribunal a mal apprécié la situation en estimant que les inondations ne résultent pas de la défectuosité de la canalisation ou de son dimensionnement mais de leur raccordement à celle-ci, dont la collectivité n'est pas responsable et dont au demeurant elle a attesté de la conformité dans l'acte de vente. Or, les travaux préconisés par l'expert judiciaire ne sont pas que des travaux privés, puisque les regards constituent des ouvrages publics. Selon l'expert, seul le cumul de ces travaux est susceptible d'annihiler les risques d'inondation de leur propriété. En outre, la réalisation de ces travaux peut être assortie de l'indemnisation de l'embellissement qu'ils devront réaliser autour du regard n° 5 dans leur propriété afin de diminuer son impact inesthétique. Le coût des travaux qu'ils se sont trouvés obligés d'engager pour faire cesser les inondations en raison de l'inadéquation de l'ouvrage public s'élève à la somme de 8 500 euros. Ils sont donc fondés à demander la réparation de ce chef de préjudice, auquel s'ajoute une somme de 400 euros en réparation de la gêne occasionnée par les travaux de raccordement privatif pendant 4 jours et une somme de 5 000 euros au titre de la remise en état du jardin après travaux ;
- en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, il ne pourra en outre qu'être ordonné à la collectivité de réaliser les travaux sur les regards n° 4 et 5 pour faire cesser les inondations qu'ils subissent ;
- les frais d'une procédure qu'ils se sont trouvés contraints d'engager alors même qu'ils ont fait preuve de la plus grande patience et ont depuis l'origine privilégié la voie amiable ne peuvent leur être imputés. Ils sollicitent donc le paiement d'une indemnité complémentaire de 10 000 euros au titre des différents frais de procédure engagés comprenant les frais des expertises amiable et judiciaire ;
- l'appel incident de la commune tendant à la réformation du jugement en tant que le tribunal a déclaré irrégulière l'emprise de la canalisation en litige vise à faire reconnaître la légalité de l'implantation de celle-ci et présente dès lors un litige distinct de leur appel principal par lequel ils contestent le rejet par le tribunal de leurs conclusions indemnitaires et en injonction. Les conclusions de la commune en ce sens sont par suite irrecevables. La collectivité ne peut en tout état de cause se prévaloir ni des dispositions de l'article L. 152-1 du code rural en estimant que la situation peut être régularisée, dès lors qu'aucune servitude ne peut être instituée sur un terrain bâti et qu'une scierie existait lors de l'implantation de la canalisation, ni de l'accord donné en 1975 par le propriétaire du terrain alors qu'elle ne rapporte pas la preuve d'un accord écrit ;
- si la communauté d'agglomération du Niortais leur oppose la prescription de leur action en invoquant la déchéance quadriennale, cette exception, soulevée nouvellement en appel après que le tribunal s'est prononcé sur le fond, ne pourra qu'être rejetée.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 mars 2017, la communauté d'agglomération du Niortais, prise en la personne de son président en exercice et représentée par MeF..., conclut au rejet de la requête, à la réformation du jugement en tant que le tribunal a estimé que l'implantation de la canalisation est irrégulière et à ce que soit mise à la charge des époux B...G...la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, outre tous les dépens.
La collectivité fait valoir que :
- le tribunal a qualifié les faits de façon erronée en décidant que la canalisation constitue une emprise irrégulière dans la propriété des requérants, au motif que la communauté d'agglomération du Niortais ne justifie d'aucun accord pour l'installation de la canalisation. La jurisprudence reconnaît pourtant la possibilité à l'administration de pouvoir implanter une canalisation dans les propriétés privées avec l'accord amiable des propriétaires, sans préciser la forme que doit revêtir cet accord. Or, le rapport d'expertise indique précisément que le propriétaire de l'époque avait bien donné son accord verbal préalable à cette implantation, ainsi que l'a attesté la fille de celui-ci lors d'une réunion d'expertise contradictoire. Ainsi, l'ouvrage a été régulièrement implanté et il ne saurait constituer une emprise irrégulière ;
- les créances indemnitaires des époux B...G...sont prescrites aux termes de la loi du 31 décembre 1968, alors au demeurant que plus de trente ans se sont écoulés depuis la prise de possession de la parcelle en 1975 ;
- contrairement à ce que soutiennent les requérants, le tribunal ne s'est pas fondé sur le régime des travaux publics pour refuser l'indemnisation. Les premiers juges ont constaté que la diminution de la valeur des parcelles, à condition que celle-ci soit établie, remonte au jour où l'ouvrage a été implanté sur la parcelle n° 227. Ainsi, si M. et Mme B...G...avaient eu connaissance de l'existence de la canalisation lorsqu'ils ont acquis leur bien immobilier en 2007, ils l'auraient acquis à un prix moindre ou n'auraient pas conclu la vente. C'est donc la réticence dolosive des vendeurs, qui avaient de surcroît connaissance de la présence de la canalisation, qui est la principale cause de leur préjudice. Ainsi, leur demande à fin d'indemnisation de la perte de la valeur vénale de leur bien immobilier ne pourra qu'être rejetée ;
- l'éventualité d'une vente étant purement hypothétique, le chef de préjudice tiré d'un défaut d'attractivité du bien ne peut faire l'objet d'une indemnisation ;
- les sommes réclamées au titre du préjudice lié à l'occupation illégale de leur parcelle ont été calculées à compter du jour où les requérants ont eu connaissance de la présence de la canalisation. Il n'est pas contesté que les vendeurs connaissaient l'existence de la canalisation litigieuse, Mme E...ayant déclaré que son père avait donné son accord pour son implantation. Si les requérants avaient été informés au moment de l'acquisition de leur bien immobilier de l'existence du collecteur litigieux, ils auraient acquis ces parcelles à un prix moindre ou n'auraient pas conclu la vente. Là encore, c'est la réticence dolosive de leur vendeur qui est à l'origine de leur préjudice. Dès lors, il n'appartient pas à la CAN d'indemniser les requérants pour un préjudice qui découle d'un rapport de droit privé entre un vendeur et son acquéreur ;
- les demandes de réparation à titre subsidiaire et à titre infiniment subsidiaire fondées d'une part sur la responsabilité pour faute et d'autre part sur l'enrichissement sans cause sont présentées pour la première fois en appel et présentent le caractère de moyens nouveaux dès lors que seule la cause juridique de responsabilité sans faute était invoquée en première instance. Dans l'hypothèse où la cour les estimerait recevables, la collectivité n'a pas commis d'illégalité fautive dès lors qu'elle disposait d'un accord amiable du propriétaire des parcelles pour l'implantation de la canalisation en litige. Au demeurant, à supposer qu'elle était tenue de respecter la procédure d'institution des servitudes prévue au code rural, l'implantation de la canalisation aurait pu être régularisée car elle n'était pas attenante à une maison d'habitation. C'est lors de la construction de la maison d'habitation que toute régularisation de l'emprise est devenue impossible. Il n'existe donc aucun lien de causalité entre l'illégalité invoquée du fait de la décision et l'implantation de la canalisation. Si les appelants prétendent que la communauté d'agglomération du Niortais a commis une illégalité fautive en ne mentionnant pas la servitude résultant de la présence de la canalisation dans le plan local d'urbanisme, l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme fait obstacle à ce qu'ils puissent utilement se prévaloir d'un vice de forme ou de fond plus de six mois après l'entrée en vigueur de ce plan. Le vice allégué n'est ainsi pas de nature à ouvrir droit à indemnité. Il ne peut enfin utilement lui être reproché d'avoir commis une faute en délivrant le certificat d'urbanisme sans faire mention de la servitude de passage dès lors que les époux B...G...ne démontrent pas un lien de causalité entre les préjudices allégués et l'absence de mention de la canalisation dans le certificat d'urbanisme ;
- la collectivité, propriétaire d'un réseau d'assainissement, ne s'enrichit pas en implantant une canalisation dans des propriétés privées. Au contraire elle s'appauvrit en supportant sa construction et ses frais de fonctionnement. Les appelants ne démontrent pas davantage leur appauvrissement. Dans ces conditions, leur demande à fin d'indemnisation sur le fondement de l'enrichissement sans cause ne saurait prospérer ;
- la demande d'injonction portant sur la suppression du regard n° 4 et la surélévation du regard n° 5 n'a pour seul but que de limiter les préjudices dont M. et Mme B...G...se prétendent victimes au titre du refoulement des eaux dans leur sous-sol. Or, le tribunal a justement mis en oeuvre la théorie du bilan afin de déterminer, d'une part, si une régularisation est possible et, d'autre part, si en l'absence de régularisation, la démolition de l'ouvrage peut être ordonnée si elle n'emporte pas de conséquences excessives au regard de l'intérêt général. Les travaux réclamés par les requérants ne faisant pas cesser l'emprise de la canalisation, leur demande d'injonction ne pourra qu'être rejetée ;
- les appelants ne démontrent pas plus en appel qu'en première instance qu'ils ont subi des dommages ouvrant droit à indemnisation. Ils ne produisent au débat aucun procès-verbal d'huissier ni aucun élément tangible permettant d'établir qu'ils ont été inondés dans leur sous-sol et l'expert relève que si l'apparition de débordement est physiquement possible d'après les relevés altimétriques, les demandeurs n'ont pu produire des photographies des dégâts provoqués. Ils ne démontrent pas qu'ils ont subi un préjudice moral du fait d'inondations qui seraient survenues dans leur sous-sol. En outre, ce chef de préjudice ne présente pas la caractéristique d'anormalité requise par la jurisprudence pour ouvrir droit à indemnité. L'expert indique que les débordements sont " de faible ampleur ". Les dommages prétendument subis ne sont pas établis, ce qui tend à démontrer qu'ils sont sans gravité. En tout état de cause, les appelants ont concouru à leur propre dommage en n'actionnant pas le clapet anti-retour, dispositif empêchant tout refoulement des eaux, dont ils connaissaient l'existence. Ils ont ainsi commis une faute de nature à exonérer la collectivité de sa responsabilité ;
- l'article L. 1331-4 du code de la santé publique prévoit que les travaux de raccordement à la partie publique du réseau d'assainissement sont à la charge exclusive des propriétaires. On ne peut lui demander de prendre à sa charge le coût des travaux de raccordement et leurs conséquences. Il s'agit d'un litige de droit privé entre les acquéreurs et leur vendeur sur le fondement d'une action en vices cachés. Dans ces conditions, leur demande à fin d'indemnisation de ce chef de préjudice ne peut être que rejetée ;
- dès lors qu'ils ne démontrent pas avoir subi de préjudice anormal et spécial, il ne saurait lui être enjoint de procéder aux travaux demandés par M. et Mme B...G.... Par ailleurs, les travaux de raccordement de leur canalisation au réseau d'assainissement auxquels ils procèdent actuellement annihileront totalement le risque de refoulement des eaux dès lors que leur maison ne sera plus reliée à la canalisation litigieuse. Dans ces conditions, leurs conclusions en injonction ne pourront qu'être rejetées.
Par une ordonnance du 1er février 2018, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 3 avril 2018 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 29 novembre 2018 :
- le rapport de Mme Nathalie Gay-Sabourdy,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public ;
- et les observations de MeD..., représentant M. et Mme B...G...et les observations de MeJ..., représentant la communauté d'agglomération du Niortais.
Considérant ce qui suit :
1. Après avoir acquis, selon un acte authentique en date du 18 juillet 2007, les parcelles cadastrées section AH n° 212, 213 et 227 situées sur la commune de Mauzé-sur-le-Mignon (Deux-Sèvres) au niveau du 16, rue Claude Durand, les époux B...G...ont découvert, à la suite d'inondations survenues au sous-sol de leur habitation lors d'épisodes pluvieux importants, que leur propriété était traversée par une canalisation publique d'assainissement mise en place en 1975 par la commune dans le cadre de travaux de raccordement au réseau local du lotissement voisin de Vigneault. Les époux B...G...ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Niort, lequel a désigné par une ordonnance du 10 juillet 2012 un expert aux fins notamment de décrire les désordres sur l'immeuble en cause, de préciser leur importance, de rechercher leur cause, de déterminer la part imputable aux différents intervenants par référence aux causes décelées, de proposer les travaux nécessaires pour remédier aux désordres et en chiffrer le coût et la durée, d'évaluer les troubles de jouissance et préjudices annexes qui ont pu résulter des désordres et qui sont susceptibles de résulter des travaux éventuellement nécessaires. L'expert a rendu son rapport au mois de septembre 2013. Les époux B...G...ont sollicité, par un courrier du 22 décembre 2014, de la communauté d'agglomération du Niortais (CAN), compétente en matière d'assainissement depuis l'année 2000, de procéder à l'enlèvement de cet ouvrage, ou à défaut de faire procéder aux travaux de mise en conformité du réseau afin de faire cesser les désordres causés à leur bien, et de les indemniser des préjudices subis. La collectivité ayant rejeté leur demande préalable par une décision du 25 février 2015, ils ont demandé au tribunal administratif de Poitiers notamment d'annuler cette décision, de constater l'irrégularité de l'implantation de la canalisation, d'enjoindre à la collectivité de procéder à l'enlèvement de l'ouvrage ou à défaut aux travaux de remise en état de cette canalisation et de leur jardin, et de condamner la communauté d'agglomération du Niortais à les indemniser de leurs entiers préjudices. Par un jugement du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Poitiers a déclaré que l'implantation de la canalisation en cause constitue une emprise irrégulière, et a rejeté le surplus de leurs conclusions. M. et Mme B...G...relèvent appel de ce jugement dans cette mesure, reprennent leurs conclusions en injonction et demandent à la cour de condamner la collectivité à leur verser la somme de 82 350 euros sur les fondements de la responsabilité sans faute à l'égard des tiers du fait d'un ouvrage public, ou un montant de 58 450 euros sur les fondements de la responsabilité pour faute en raison de l'établissement d'un ouvrage public sans droit ni titre sur une propriété privée ou de l'enrichissement sans cause. Ils demandent en outre le versement d'une somme de 200 euros par mois jusqu'à la disparition de l'emprise irrégulière. Par la voie de l'appel incident, la communauté d'agglomération du Niortais demande la réformation du jugement en tant que le tribunal a déclaré cette emprise irrégulière.
Sur la recevabilité de certaines conclusions et moyens des parties :
2. En premier lieu, contrairement à ce que soutiennent les époux B...G..., la contestation de la communauté d'agglomération du Niortais, par la voie de l'appel incident, sur le caractère irrégulier de l'emprise de la canalisation en cause retenu par le tribunal ne soulève pas un litige distinct de leur appel principal dirigé contre le rejet de leurs conclusions en injonction de réaliser les travaux propres à circonscrire les inconvénients de cette emprise irrégulière et en réparation de leurs préjudices. Par suite, les conclusions de la collectivité tendant à la réformation du jugement sur ce point sont recevables.
3. En deuxième lieu, les époux B...G...ont demandé en première instance l'engagement de la responsabilité de la communauté d'agglomération du Niortais au titre des préjudices résultant de l'emprise irrégulière. Il est constant que toute illégalité est fautive et que, par suite, contrairement à ce que soutient la défenderesse, les conclusions tendant à l'engagement de sa responsabilité pour faute ne sont pas nouvelles en appel.
4. En troisième lieu, les appelants invoquent pour la première fois en appel l'enrichissement sans cause. Toutefois, cette demande tendant à l'engagement de la responsabilité de la communauté d'agglomération du Niortais sur un fondement juridique distinct de ceux invoqués en première instance, se rattache à une cause juridique nouvelle et est, par suite, irrecevable.
5. En quatrième lieu, la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur.
6. Si les requérants se prévalent d'illégalités fautives résultant du certificat d'urbanisme annexé à l'acte de vente, de la carence du service d'assainissement de la communauté dans le contrôle du raccordement de leur maison d'habitation, et de la méconnaissance de l'article L. 151-43 du code de l'urbanisme, il s'agit de faits générateurs nouveaux, différents de ceux invoqués dans la demande préalable et la demande de première instance. La communauté d'agglomération du Niortais est, dans ces conditions, fondée à soutenir que ces moyens sont irrecevables en cause d'appel.
Sur la régularité de l'emprise :
7. L'implantation d'une canalisation publique dans le sous-sol d'une parcelle appartenant à une personne privée, opération dépossédant les propriétaires de cette parcelle d'un élément de leur droit de propriété, ne peut être régulièrement mise à exécution qu'après soit l'accomplissement d'une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, soit l'institution de servitudes dans les conditions prévues par les dispositions des articles L. 152-1 et R. 152-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, soit, enfin, l'intervention d'un accord amiable conclu avec les propriétaires intéressés.
8. La communauté d'agglomération soutient que la commune de Mauzé-sur-Mignon, alors maître d'ouvrage, a obtenu en 1975 l'accord verbal de l'ancien propriétaire des parcelles pour les travaux concernant la canalisation en litige. Si elle se prévaut des déclarations en ce sens de la fille de l'ancien propriétaire consignées dans le procès-verbal d'une réunion menée dans le cadre de l'expertise judiciaire, cet élément ne suffit pas à lui seul à établir l'existence d'un accord amiable entre le maître d'ouvrage et le propriétaire de la parcelle 227 pour l'autoriser à implanter sur son terrain la canalisation litigieuse. Par ailleurs, la communauté d'agglomération ne se prévaut d'aucun document matérialisant l'accord amiable. Il est constant qu'aucune servitude n'est mentionnée dans l'acte de vente des parcelles du 10 juillet 2007. Dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas même allégué qu'une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique aurait été engagée, les premiers juges ont pu estimer à juste titre que la dépossession partielle des propriétaires du terrain devait être regardée comme ayant été exécutée sans titre, et présente ainsi le caractère d'une emprise irrégulière sur une propriété privée immobilière.
Sur l'injonction :
9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Il appartient au juge administratif de statuer par voie d'injonction sur les mesures propres à mettre fin à une emprise irrégulière, et notamment de déterminer, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, si, eu égard notamment aux motifs de la décision, une régularisation appropriée de l'ouvrage est possible avant, dans la négative, de prendre en considération, d'une part les inconvénients que la présence de l'ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'ouvrage, d'autre part les conséquences de la démolition pour l'intérêt général, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si la démolition n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général.
10. Les époux B...G...ne sollicitent plus devant la cour la suppression de la canalisation irrégulièrement implantée ou son déplacement. Ils contestent en revanche le rejet de leurs conclusions en injonction tendant à ce que la collectivité fasse réaliser les travaux de mise en conformité du réseau d'assainissement préconisés par l'expert judiciaire, la défectuosité de l'ouvrage étant selon eux à l'origine des inondations dont ils se disent victimes. Toutefois, la commune soutient en défense sans être contredite que les requérants ont mis en oeuvre les travaux préconisés par l'expert, ce qui rend en tout état de cause les conclusions en injonction sans objet.
Sur les conclusions indemnitaires :
En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale :
11. Selon les dispositions du premier alinéa de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée, la prescription quadriennale, qui n'a pas été opposée par la communauté d'agglomération du Niortais en première instance, ne peut être invoquée pour la première fois en appel. Dès lors, l'exception tirée de la prescription quadriennale, invoquée nouvellement devant la cour par la collectivité, ne peut qu'être écartée.
En ce qui concerne les préjudices résultant des conséquences dommageables de l'emprise irrégulière :
12. Dans le cas d'une décision administrative portant atteinte à la propriété privée, le juge administratif, compétent pour statuer sur le recours en annulation d'une telle décision et, le cas échéant, pour adresser des injonctions à l'administration, l'est également pour connaître de conclusions tendant à la réparation des conséquences dommageables de cette décision administrative, hormis le cas où elle aurait pour effet l'extinction du droit de propriété. Si la décision d'édifier un ouvrage public sur une parcelle appartenant à une personne privée porte atteinte au libre exercice de son droit de propriété par celle-ci, elle n'a, toutefois, pas pour effet l'extinction du droit de propriété sur cette parcelle. Par suite, la réparation des conséquences dommageables résultant de la décision d'édifier un ouvrage public sur une parcelle appartenant à une personne privée ne saurait donner lieu à une indemnité correspondant à la valeur vénale de la parcelle, mais uniquement à une indemnité réparant intégralement le préjudice résultant de l'occupation irrégulière de cette parcelle et tenant compte de l'intérêt général qui justifie le maintien de cet ouvrage.
13. M. et Mme B...G...soutiennent que la présence de cette canalisation irrégulièrement implantée entraîne une perte de valeur vénale de la parcelle 227 devenue de fait inconstructible dans sa quasi-totalité. Toutefois, comme l'a indiqué à juste titre le tribunal, leurs préjudices liés à la limitation de leur droit à construire ou la diminution de la valeur de leur bien, à les supposer établis, ne résultent pas de la présence de la canalisation dans le sous-sol de leur propriété mais bien de ce que son existence leur aurait été cachée lors de la vente, ce qui a seulement pu avoir une incidence sur le prix d'achat du bien.
14. M. et Mme B...G...demandent la réparation de leur préjudice résultant de l'occupation sans titre de leur terrain par la canalisation et de condamner la communauté d'agglomération à leur verser une somme de 13 800 euros correspondant à l'occupation passée du bien immobilier et une indemnité de 200 euros par mois jusqu'à la disparition de l'emprise irrégulière. Alors qu'il peut être mis un terme au caractère irrégulier de l'emprise par une convention de servitude qu'il appartient aux parties d'établir après la renonciation des requérants à solliciter le retrait de la canalisation, il sera fait une juste appréciation du préjudice global subi par M. et Mme B...G...à ce titre en leur allouant une somme de 5 000 euros.
En ce qui concerne les préjudices résultant du fonctionnement défectueux de l'ouvrage public :
15. Il résulte de l'instruction que les inondations d'eaux usées qui ont causé des dégâts dans la propriété de M. et Mme B...G...ont été provoquées par l'inadéquation entre la capacité de la canalisation du réseau communal d'évacuation des eaux usées implantée sur la parcelle 227 et les débits qui doivent transiter dans le réseau par temps de pluie. Ainsi et alors même que leur immeuble est raccordé à ce réseau, les appelants ont la qualité de tiers par rapport à l'ouvrage public qui est à l'origine du dommage. Par suite, la responsabilité de la communauté d'agglomération du Niortais est engagée à leur égard dès lors qu'un lien de cause à effet est établi entre cet ouvrage public et le dommage subi.
16. Il résulte du rapport d'expertise que le réseau collectif réalisé par la commune dans les années 70 était prévu pour fonctionner de façon unitaire, collectant les eaux usées et les eaux pluviales. Si, désormais, le réseau est réputé être de type séparatif, de nombreux branchements, notamment dans le lotissement du Vigneault, rejettent encore des eaux pluviales. Or, si la capacité de la canalisation concernée serait suffisante pour les seules eaux usées, l'évacuation des eaux pluviales rejetées par les habitants du lotissement du Vigneault provoquent une mise en charge voire des débordements dans le sous-sol de l'habitation de M. et Mme B...G..., ou si le clapet situé dans le sous-sol est fermé et si son étanchéité est parfaite, au niveau des regards n° 4 et 5 situés sur la propriété des appelants. Par suite, le lien de causalité entre le fonctionnement défectueux de la canalisation et les inondations subies par les appelants est établi. En outre, le déversement d'eaux usées dans la seule propriété des époux B...G...doit être regardé comme constituant un dommage anormal et spécial de nature à engager la responsabilité sans faute de la communauté d'agglomération du Niortais.
17. Il résulte également du rapport d'expertise que depuis l'acquisition de la maison le 18 juillet 2007, M. et Mme B...G...ont subi plusieurs inondations dont une plus importante le 6 août 2010, recouvrant l'intégralité de leur sous-sol à la suite de précipitations orageuses. Il sera fait une exacte appréciation du préjudice moral subi par les époux B...G...en leur accordant une indemnité de 2 000 euros.
18. Par ailleurs, M. et Mme B...G...demandent une somme de 8 500 euros HT en réparation des travaux qu'ils ont dû réaliser en raison de l'inadéquation de la canalisation. Ils ont procédé aux travaux préconisés par l'expert consistant, d'une part, à la suppression du regard n° 4 et à la surélévation du regard n° 5. L'expert a évalué ces travaux à la somme de 8000 euros hors taxes. Les appelants produisent un devis en date du 23 février 2011 non contesté par la communauté d'agglomération, d'un montant de 8 028,83 euros TTC. Par suite, il y a lieu de condamner la communauté d'agglomération du Niortais à verser la somme de 8 028,83 euros au titre des travaux réalisés par M. et Mme B...G....
19. En revanche, ni les gênes occasionnées par les travaux de raccordement, ni la remise en état du jardin par apport de terre végétale et remplacement des arbres et arbustes après la réalisation desdits travaux, ne sont établis.
En ce qui concerne les préjudices résultant des différents frais de procédure engagés comprenant les frais des expertises amiable et judiciaire :
20. M. et Mme B...G...demandent la condamnation de la communauté de communes du Niortais à leur verser la somme de 10 000 euros correspondant notamment aux frais des expertises amiable et judiciaire qu'ils ont sollicitées. Il résulte de l'ordonnance de taxation du tribunal de grande instance de Niort du 25 novembre 2013, que l'expertise confiée à M. C...A..., ordonnée par le 5 mars 2013, a été taxée à la somme de 2 228,70 euros et mise à la charge de M. et Mme B...G.... Dès lors que le rapport de M. A...a été utile à la résolution du présent litige, il y a lieu de condamner la communauté d'agglomération du Niortais à verser à M. et Mme B...G...la somme de 2 228,70 euros au titre de ce préjudice. En ce qui concerne les autres frais d'expertise qui auraient été exposés par les appelants, ils n'apportent pas plus en appel qu'en première instance, la justification des montants réclamés. Par suite, le surplus de leurs conclusions sur ce point ne peut qu'être rejeté.
21. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté d'agglomération du Niortais doit être condamnée à verser à M. et Mme B...G...la somme totale de 17 257,53 euros résultant des conséquences dommageables de l'emprise irrégulière et du fonctionnement défectueux de l'ouvrage.
En ce qui concerne les intérêts et leur capitalisation :
22. Aux termes de l'article 1231-6 du code civil : " Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure (...) ". L'article 1231-7 du même code dispose : " En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement (...) ". M. et Mme B...G...ont droit au paiement des intérêts au taux légal correspondant aux indemnités citées au point précédent à compter du 24 décembre 2014, date de réception de leur demande préalable par la communauté d'agglomération du Niortais.
23. Aux termes de l'article 1343-2 du code civil : " Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise ". La capitalisation des intérêts a été demandée par M. et Mme B...G...le 18 avril 2016. A cette date, il était dû plus d'une année d'intérêts. Par suite, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 18 avril 2016, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des appelants la somme que la communauté d'agglomération du Niortais demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Niortais une somme de 1 500 euros à ce titre au bénéfice de M. et Mme B...G.... La communauté d'agglomération du Niortais versera également aux appelants la somme de 13 euros prévue par l'article R. 723-26-3 du code de la sécurité sociale au titre du droit de plaidoirie.
DECIDE :
Article 1er : La communauté d'agglomération du Niortais est condamnée à verser à M. et Mme B... G...la somme de 17 257,53 euros, majorée des intérêts à compter du 24 décembre 2014.
Article 2 : Les intérêts dus sur la somme de 17 257,53 euros seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter du 18 avril 2016, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 mai 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : La communauté d'agglomération du Niortais versera à M. et Mme B...G...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La communauté d'agglomération du Niortais versera à M. et Mme B...G...une somme de 13 euros au titre du droit de plaidoirie.
Article 6 : Les conclusions de la communauté d'agglomération du Niortais sont rejetées.
Article 7 : Le surplus des conclusions de M. et Mme B...G...est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. H...et Mme K...B...G...et à la communauté d'agglomération du Niortais. Copie en sera adressée pour information au préfet des Deux-Sèvres.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.
Le rapporteur,
Nathalie GAY-SABOURDY Le président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au préfet des Deux-Sèvres, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 16BX02400 11